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L'Enchâssement

Manchu (Illustrateur de couverture), Ian Watson ( Auteur), Frédéric Landragin (Postface)
Langue d'origine : Anglais UK
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 11/06/2015  -  livre
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L'Enchâssement

New wave, seventies et nostalgie
 
On l’a oublié aujourd’hui mais pas mal d’auteurs ont profité dans les années soixante de l’appel d’air provoqué par l’irruption de la new wave britannique et anglaise pour émerger dans le milieu de la science-fiction, sans pour autant se revendiquer de ce mouvement. Christopher Priest (dont le génial Adjacent vient de sortir) en a profité mais aussi Ian Watson.
 
Ce dernier bénéficia en plus de l’accueil enthousiaste du fandom français (même s’il raconte dans sa préface avoir parlé devant un auditoire qui se vidait lentement tandis qu’il lisait son article traduit en français « vers une linguistique autre ») puisqu’il obtint en 1975 le défunt prix Apollo pour L’Enchâssement. À la suite de ce coup d’éclat, Watson publia plusieurs ouvrages ambitieux, tels Le Modèle Jonas ou Les Visiteurs du miracle d’abord publiés dans la collection Dimensions SF de Calmann Levy, puis chez Presses Pocket. D’ambition et d’idées, Ian Watson débordait, au prix parfois d’un manque d’intelligibilité de ses intrigues. On regrette cependant qu’il ait commis des « romans » dans l’univers de Warhammer 40 000 mais il faut bien vivre…
 
Le Belial, éditeur courageux qui mérite amplement le soutien de tous les amateurs francophones de science-fiction, a entrepris de rééditer L’Enchâssement et ils ont raison : à coup sûr, ce roman fait partie du patrimoine de la science-fiction, genre très souple qui attira nombre de talents issus d’univers parfois opposés au genre. Reste cependant à savoir si ce roman saura trouver son public en 2015.
 
Premier contact, quelles langues ?
 
Tandis qu’un linguiste et ethnologue français, Pierre Darriand effectue des recherches en Amazonie auprès des Indiens Xemahoa au Brésil, son ancien ami Chris Sole participe à des expériences linguistiques assez extrêmes sur des orphelins pakistanais coupés du monde : il leur enseigne un langage entièrement dérivé de l’anglais par le procédé de l’enchâssement.
 
Par ailleurs, Chris Sole reçoit des lettres de Pierre qui lui décrivent les détails de ses explorations, et qui lui rappellent sans cesse qu’il a été l’amant de sa femme… Surgissent des extraterrestres, les Sp’thra, qui arrivent sur terre dans le Nevada en ayant appris l’anglais grâce aux émissions radios et télés. Les Sp’thra, en quête de langages, proposent un marchandage précis : technologies contre cerveaux humains capables de s’exprimer dans des langues différentes. Sole, embarqué dans la négociation, pense aussitôt aux Indiens décrits par Darriand dans ses lettres. Leur langage pourrait-il intéresser les extraterrestres ? Ceux-ci se retrouvent bientôt l’enjeu d’un conflit international…
 
Des limites de la démarche
 
On peut tout reprocher à Ian Watson sauf son manque d’ambition ! Il avoue dans sa préface avoir beaucoup emprunté à la théorie de Noam Chomsky relative à la grammaire universelle (devant laquelle les spécialistes sont divisés). Au-delà de ces controverses théoriques très bien restituées par la postface, L’Enchâssement pâtit de certains travers : beaucoup de passages décisifs sont dialogués, ce qui ralentit l’action à la différence des séquences incluant Pierre Darriand et les Indiens Xemahoa, bien écrites. Du coup, le roman pâtit d’un décalage entre ses ambitions, son propos (extrêmement intelligent) et le côté abscons de la démonstration de l’auteur, sans compter un contexte 70’s assez revendicatif… À lire cependant car une linguistique-fiction mérite le détour !

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