Silvana de Mari avait déjà raflé avec Le Dernier Elfe le prix Andersen en Italie, le prix Imaginales en France et suscité un très grand enthousiasme qu’on partageait sans réserve aucune.
Et cette psychologue italienne récidive avec Le Dernier Orc et le charme opère à nouveau . D’autant plus fort que l’on n’abordait pas le livre sans peur de le trouver un cran au dessous du premier…
Pendant que Rankstrail essaie vaillamment de changer cet ordre des choses, Yorsh (le héros du Dernier Elfe), sa compagne Robi et tous ceux qui les ont suivis tentent de vivre harmonieusement sur le rivage où ils ont trouvé refuge. Mais l’harmonie est un état fragile sans cesse menacé, il reste bien des combats à mener et une partie de la prophétie doit encore se réaliser...
Un souffle épique assorti d’un sens aiguisé de la rhétorique
Dans le domaine linguistique, Silvana de Marie joue aussi sur différents registres, opposant et contrastant les styles, du plus frustre au plus ampoulé.
Ceux qui s’étaient délectés du langage suranné du dragon apprécieront le langage du Phenix, cette verve dont il s’enivre.
Et l’adage qui veut que la vérité sorte de la bouche des enfants s'applique encore plus à une jeune demi-elfe d’autant plus capable de percevoir la vérité au-delà des faux-semblants. En découlent quelques passages délicieux où il faut décrypter ses balbutiements.
Des personnages charismatiques, complexes et jamais caricaturaux
Combattre le chaos… jusqu’en soi-même
Un des points communs des protagonistes en plus de la capacité à se battre sur plusieurs terrains est l’héritage douloureux dû à leur ascendance (des parents monstrueux) ou au rôle qu’ils ont à jouer et qui souvent les dépasse.
Mais pour pouvoir tirer parti de la richesse de leur identité ils doivent l’assumer complètement y compris dans ses aspects les moins glorieux. Et pour atteindre cette acceptation et leur accomplissement, ils seront tous en proie à des doutes à des tourments intérieurs. L’auteur ne leur épargne aucun dilemme, leur ménage pas d’issue. Ils doivent lutter contre la jalousie, la peur, la tentation de la facilité, la honte et la culpabilité. Et pour pouvoir assurer l’avenir de ceux dont ils ont la charge (par filiation ou par adoption), ils doivent reconnaître leurs failles et leurs erreurs.
Avec autant de combats à mener, l’épaisseur du volume ne surprend plus mais peut-être quelques passages auraient gagnés à être plus concis dussent-ils être moins fouillés psychologiquement ou moins ornés narrativement.
A cette petite réserve près, Le Dernier Orc avec ses farouches combattants pour l’harmonie universelle reste une flamboyante épopée où action et réflexion s’enchevêtrent délicatement. Une fresque inspirée, intelligente et finement menée.
Silvana de Marini accepterait-elle le titre de Reine-sorcière de la fantasy ? On le lui décerne sans hésiter.