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Le Dernier Orc

Jacques Barbéri (Traducteur), Gianni De Conno (Illustrateur de couverture), Silvana de Mari ( Auteur)
Langue d'origine : Italien
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 01/03/2008  -  jeunesse
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Le Dernier Orc

Silvana de Mari avait déjà raflé avec Le Dernier Elfe le prix Andersen en Italie, le prix Imaginales en France et suscité un très grand enthousiasme qu’on partageait sans réserve aucune.

Et cette psychologue italienne récidive avec Le Dernier Orc et le charme opère à nouveau . D’autant plus fort que l’on n’abordait pas le livre sans peur de le trouver un cran au dessous du premier…

« Je combats avec ce que j’ai, je combats pour vaincre »

Peu après avoir découvert le pouvoir des mots, leur capacité à faire plaisir ou à blesser, Rankstrail jeune habitant de la muraille externe de Varil manifeste une grande habileté à la chasse et permet d’améliorer l’ordinaire des menus de sa famille. Mais quand la maladie frappe, le braconnage ne suffit plus et Rankstrail s’enrôle comme mercenaire. Dans un monde où les Orcs menacent les frontières et prennent plaisir à détruire et où les grandes cités sont aux mains de tyrans, le rôle des mercenaires est aussi crucial pour la survie des plus faibles que méprisé par les aristocrates.

Pendant que Rankstrail essaie vaillamment de changer cet ordre des choses, Yorsh (le héros du Dernier Elfe), sa compagne Robi et tous ceux qui les ont suivis tentent de vivre harmonieusement sur le rivage où ils ont trouvé refuge. Mais l’harmonie est un état fragile sans cesse menacé, il reste bien des combats à mener et une partie de la prophétie doit encore se réaliser...

Un souffle épique assorti d’un sens aiguisé de la rhétorique

Ce roman comblera à la fois les assoiffés de grandes batailles et les adeptes des dialogues à rallonge. L’auteur a peaufiné la mise en scène de confrontations guerrières de grande envergure. Les affrontements, armées contre armées (certaines très organisées et d’autres plus composites), les sièges des villes et les assauts pour y mettre fin sont légion au cours de l’intrigue. Mais des escarmouches, des duels et parfois même des altercations verbales (mais tout aussi violentes) ponctuent aussi l’histoire. Silvana de Mari explore l’ « art de la guerre » dans toutes ses nuances et selon des codes très différents. Bien sûr il s’agit de vaincre avec ce que l’on a donc les armes qui assurent la victoire ne sont pas toujours celles qui semblent les plus taillées pour à première vue…

Le langage est un des héros de l’aventure. Il permet de métamorphoser une meute de mercenaires en un bataillon déterminé, serré et fidèle. Employé à bon escient, il galvanise les cœurs presque aussi sûrement que la magie elfique. De nombreux personnages réalisent le pouvoir que confèrent le langage et l’écriture.

Dans le domaine linguistique, Silvana de Marie joue aussi sur différents registres, opposant et contrastant les styles, du plus frustre au plus ampoulé.

Ceux qui s’étaient délectés du langage suranné du dragon apprécieront le langage du Phenix, cette verve dont il s’enivre.

Et l’adage qui veut que la vérité sorte de la bouche des enfants s'applique encore plus à une jeune demi-elfe d’autant plus capable de percevoir la vérité au-delà des faux-semblants. En découlent quelques passages délicieux où il faut décrypter ses balbutiements.

Des personnages charismatiques, complexes et jamais caricaturaux

A part Yorsch dont avait suivi la progression dans le premier volume, les autres héros de ce second tome se révèlent au lecteur et à eux-mêmes au fur et à mesure. Le braconnier peaufine sa capacité à entraîner à sa suite d’autres combattants plus durs que la troupe de gamins qui le suivaient dans ses chasses. Robi doit accepter d’endosser son identité véritable et apprend à se passer du soutien de son époux…

Combattre le chaos… jusqu’en soi-même

Un des points communs des protagonistes en plus de la capacité à se battre sur plusieurs terrains est l’héritage douloureux dû à leur ascendance (des parents monstrueux) ou au rôle qu’ils ont à jouer et qui souvent les dépasse.

Mais pour pouvoir tirer parti de la richesse de leur identité ils doivent l’assumer complètement y compris dans ses aspects les moins glorieux. Et pour atteindre cette acceptation et leur accomplissement, ils seront tous en proie à des doutes à des tourments intérieurs. L’auteur ne leur épargne aucun dilemme, leur ménage pas d’issue. Ils doivent lutter contre la jalousie, la peur, la tentation de la facilité, la honte et la culpabilité. Et pour pouvoir assurer l’avenir de ceux dont ils ont la charge (par filiation ou par adoption), ils doivent reconnaître leurs failles et leurs erreurs.

Avec autant de combats à mener, l’épaisseur du volume ne surprend plus mais peut-être quelques passages auraient gagnés à être plus concis dussent-ils être moins fouillés psychologiquement ou moins ornés narrativement.

A cette petite réserve près, Le Dernier Orc avec ses farouches combattants pour l’harmonie universelle reste une flamboyante épopée où action et réflexion s’enchevêtrent délicatement. Une fresque inspirée, intelligente et finement menée.

Silvana de Marini accepterait-elle le titre de Reine-sorcière de la fantasy ? On le lui décerne sans hésiter.

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