Il n’est pas un pan d’imaginaire qui résiste à Fabrice Colin. Cet auteur est sans nul doute le plus prolifique et le plus reconnu de la jeune génération qui a fait ses premières armes dans le jeu de rôles. C’est un habitué de la collection Autres Mondes puisqu’il y a déjà publié Les Enfants de la Lune, Projet oXatan et Cyberpan.

« Les amis, on a quand même sacrément du bol d’être en vie. »

Jason Palomino et ses parents ont gagné le gros lot du jeu Télé plus: un an de vie dorée à New-York. Pas question de congé sabbatique pour Jason, il se retrouve inscrit dans le collège le plus huppé de la Big Apple. Le fils du président des Etats-Unis se prend d’amitié pour lui et avec Cool, le seul noir de la classe, ils forment bientôt un joyeux trio. Jusqu’au jour où ils assistent presque par hasard à une réunion présidentielle ultra-confidentielle et découvrent que l’équipe du président veut simuler une invasion extra-terrestre pour regagner la confiance de l’opinion américaine. Jason propose à ses camarades de filmer l’opération pour dénoncer la supercherie. Mais, ils ne sont pas les seuls à s’être invités et les autres ont des intentions plus hostiles, du style détruire l’humanité…

Une grande force de frappe parodique

L’histoire est rapportée dans un style très enlevé par Jason, ses raccourcis et ses commentaires donnent un ton très humoristique. Surdoué, il a un don pour tourner les choses en dérision, mais ne s’en tire pas forcément mieux que la moyenne avec les filles…
Comme dans Atomic Bomb, Fabrice Colin ne se refrène pas dans le délire. Le président américain est encore plus bête que son modèle, son équipe encore moins scrupuleuse. Il mélange tous les clichés des films américains et les réutilise avec la même distance ironique que Tim Burton dans son Mars Attack.

Tentative de destruction massive ?

Sous ses dehors burlesques, ce roman pose le problème de l’usage que l’homme fait de son cerveau. Jason aperçoit un groupe d’hommes en costume-cravate qui font sonner leur portable pour comparer leur sonnerie et se demande si c’est là le signe qu’ils ont été transformés en zombies. Or, cette course au dernier gadget technologique est une tendance de notre société qui détourne nos attentions de problèmes plus essentiels.
Prônant la nécessité d’être critique, de décrypter les mensonges, Fabrice Colin est sans pitié. Qu’il utilise les formules de Paulo Coelho pour neutraliser les extra-terrestres que la stupidité paralyse, cela prête à sourire, voire à rire. Mais qu’il taxe, dans une note de niaiserie, Prévert et Saint-Exupéry, cela me paraît exagéré. Certes ces deux derniers ont, dans leurs textes, fait montre d’une naïveté, mélange de simplicité et de bons sentiments, mais ils véhiculent une poésie plus profonde… Les dénigrer de façon aussi expéditive relève plus de l’excès de cynisme que du trait de lucidité.
Malgré cette fausse note, ce roman ne dément pas le talent de Fabrice Colin et son aptitude à varier les styles… Il incombe maintenant aux jeunes lecteurs de vérifier un adage pas encore passé dans la sagesse populaire: mensonge anticipé, mensonge à moitié évité…