- le  
Les coups de coeur de Jean-Luc Rivera - Décembre 2013
Commenter

Les coups de coeur de Jean-Luc Rivera - Décembre 2013

Jean-Marc Lofficier & Jean-Marc Lainé : Le dico des super héros
 
Que se passe-t-il lorsqu'un éditeur intrépide comme celui des Moutons électriques associe Jean-Marc Lofficier, bien connu pour son amour et sa connaissance de la BD populaire principalement de petit format (cf son travail inlassable de réédition chez Hexagon Comics), et Jean-Marc Lainé, analyste du personnage du super héros et fin connaisseur de la BD américaine (en particulier l'univers Marvel) ? Cela nous donne "Le dico des super héros" (Les Moutons électriques) un monument d'érudition où tout ce que nous voulions savoir sur les super héros et même plus se trouve ! De "ABC Warriors" à "Zuma" - comment, vous ne connaissez pas  ces robots de guerre anglais envoyés sur Mars ni le méchant fils de Kukulkan qui veut régner sur le monde... - en passant par le "Chevalier arabe", "Tiramolla" (en français "Elastoc"), "Captain Carrot" ou  les "Powerpuff Girls", nous y découvrons une galerie très complète des super héros - gentils ou méchants car on y trouve aussi le "Joker" et autres "Doctor Doom", humains, surhumains ou assimilés et animaux à la "Speedy Gonzales" -, car nos deux auteurs ont passé en revue non seulement les BD mais aussi les serials et le cinéma, les dessins animés et la littérature des grands pays (France, Grande-Bretagne, USA, Espagne, Italie, Japon) pour nous offrir plusieurs centaines d'entrées fort complètes. En près de 400 pages nous voyons s'étaler sous nos yeux tout le panorama de l'imaginaire du super héros depuis ses origines, nous donnant envie de lire ou voir en action un grand nombre de ces personnages. L'Introduction est fort informative et nous explique  la manière dont les auteurs ont procédé pour opérer la détermination de ce qui fait un super héros et donc expliquer leurs choix (je me dois cependant de signaler la dyslexie sélective qui a fait taper à l'un d'entre eux systématiquement "Endiku" au lieu de "Enkidu" pour désigner le compagnon de Gilgamesh p. 6). Le livre est, comme il se doit, illustré, mon seul regret étant qu'il aurait sans doute pu - et dû - l'être encore plus afin que l'on voit à quoi ressemblent tous ces super héros et super "villains", un cahier couleurs étant même le bienvenu. Mais peu importe, voilà un ouvrage de référence à acheter immédiatement pour ensuite faire sa liste de "comics" et DVD au Père Noël !
 
George Mann Les Revenants de Whitechapel
Depuis quelques années, nous sommes souvent gâtés quant à la qualité en matière de "steampunk" et certains romans du genre sont excellents car ne se contentant pas d'un moteur à vapeur et de quelques boulons et tuyaux de cuivre rutilants. Le livre de George Mann, "Les Revenants de Whitechapel" (Panini, collection Eclipse) appartient à cette catégorie : dans un Londres comme on l'aime - brouillards inquiétants, ruelles sordides de Whitechapel et maisons georgiennes somptueuses -, survolé par des dirigeables transportant passagers et marchandises aux quatre coins de l'Empire, sillonné par des trains terrestres fonçant à toute vitesse et à toute vapeur et par des cabs à moteur, Sir Maurice Newbury, enquêteur accrédité par la Couronne et archéologue aussi chevronné qu'il est occultiste, mène l'enquête sur la demande spéciale de la reine, Victoria, qui dirige les affaires impériales d'une main de fer depuis son fauteuil roulant avec respirateur intégré ! Assisté de miss Hobbes, ravissante et intrépide, dotée d'un esprit déductif acéré, il va découvrir, et nous avec lui, pourquoi le dirigeable qui s'est écrasé en plein Londres n'avait pas de pilote ? A quoi la fièvre effroyable qui transforme les gens en zombies sert-elle de paravent ? Quel est le mystère de la fabrication de ces automates qui commencent à se répandre et à remplacer domestiques et ouvriers ? Outre son intrigue bien menée au rythme des innombrables tasses d'Earl Grey absorbées au cours de ces 380 pages, son ambiance très "british" et très holmésienne - Mann est un Anglais pur jus, grand connaisseur de Holmes et de Sexton Blake -, l'auteur a su intégrer aux éléments purement SF une composante occultiste qui rend bien compte de cette atmosphère particulière de la fin du siècle victorien : une science triomphante et rationaliste coexistant avec un occultisme respectable fonctionnant au sein de cercles de la haute société éduquée.Cela nous donne un roman tout à fait intéressant, où l'on trouve savant fou et génial - Français bien entendu ! - et médium charlatan, mystères de l'Inde profonde et avancées scientifiques révolutionnaires, la tension d'une période de changement social et technologique entraînant des modifications de fonds de la société et générant tout autant les peurs de l'avenir que les espoirs d'un futur meilleur (symbolisé par le "conservatisme" de miss Hobbes face à la fascination de Sir Newbury pour le "progrès").
Voilà un roman fort sympathique, qui nous plonge dans une atmosphère totalement dépaysante, avec des personnages qui m'ont autant conquis lors de cette relecture qu'il y a deux ans à leur première parution française. Un auteur à découvrir donc, d'autant plus que deux autres enquêtes de Newbury et Hobbes existent déjà en anglais et seront bientôt, je l'espère, traduites. Un dernier mot pour ajouter que, justement, la traduction de Pierre-Paul Durastanti rend avec bonheur l'atmosphère très particulière du livre. Un grand bonheur de lecture !
 
Jean-Luc Rivera

à lire aussi

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?