Bob Shaw, Irlandais du Nord, était un authentique fan de science-fiction qui participa à la création de plusieurs fanzines. Il obtint par la suite deux fois le prix Hugo dans la catégorie Best fan writer, réservé aux auteurs ayant publié dans des magazines amateurs et n'ayant pas été (ou très peu) rémunérés pour leur travail... Ce prix récompense d'authentiques esclaves passionnés du genre, à des millions d'années-lumière de la moindre préoccupation commerciale. Dans la lignée du Jour où la guerre s'arrêta, mais avec une approche résolument humoristique, Bob Shaw est également l'auteur du roman antimilitariste Qui va là ? C'est cependant une nouvelle, "Lumière des jours enfuis", plus tard étendue aux dimensions d'un roman sous le titre Les yeux du temps, qui commencera à faire apprécier au lectorat francophone cet auteur aux idées toujours intéressantes.

 

 

Lucas Hutchman est mathématicien. Il gagne sa vie en concevant des armes de mort pour une société spécialisée dans les missiles et autres engins explosifs... Pendant ses moments de liberté, ce pacifiste convaincu fait une découverte sensationnelle qui pourrait changer la face du monde : le principe d'un dispositif capable de détruire à distance la totalité des armes nucléaires de la planète. L'explosion d'une bombe atomique le décide à passer à l'action et à construire, chez lui et à ses propres frais, la machine dont il espère qu'elle mettra fin à toutes les guerres. Il deviendra cependant l'homme le plus recherché de la Terre car, en ces temps de guerre froide, son invention menace l'équilibre instable qu'ont instauré les grandes puissances dans la course aux armements. Il devra alors tout quitter et se cacher afin de mener son projet à terme. Les gouvernements sont prévenus, le compte à rebours a commencé et la paix est sur le point d'être déclarée !

 

 

À travers Lucas Hutchman, qui lutte seul contre le monde entier, Bob Shaw pose à ses lecteurs la question de notre responsabilité individuelle dans la naissance des conflits, eussent-ils lieu à des milliers de kilomètres de nous, dans d'autres pays. Sommes-nous vraiment impuissants devant les innombrables atteintes aux droits de l'homme, la rapacité au nom de laquelle les écosystèmes sont bouleversés, les guerres et les massacres qui entachent notre statut de primates prétendument supérieurs ? Ou alors, comme le personnage central du roman, ne pouvons-nous lutter aussi, chacun à notre façon, en faveur de la paix ? Cette question devient encore plus évidente lorsqu'on établit un parallèle entre la guerre froide du siècle dernier et les relations difficiles que connaissent Lucas Hutchman et sa femme Vicky. Ce microcosme conjugal reproduit l'équilibre fragile de la paix entre les nations, parfois rompu et qui fait s'envenimer les relations, l'harmonie entre les peuples faisant alors place à un divorce sanglant dont personne ne peut prétendre sortir indemne. La jalousie maladive de Vicky fait écho à la défiance que les gouvernements entretiennent les uns envers les autres et donne en même temps une dimension humaine à cette histoire de mésententes à l'échelle mondiale. La suppression des armes suffira-t-elle à désamorcer les conflits ? Le jour où la guerre s'arrêta pose donc des questions importantes et ne peut qu'inciter à montrer de plus de tolérance et de patience.  Pour cela, rien de plus simple : il suffit de faire volontairement preuve d'un peu de naïveté !