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L'instant Critic - Juin 2015
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L'instant Critic - Juin 2015

Comme qui dirait, cette rubrique, par la force des choses, est devenue a-mensuelle, voire bi-annuelle au train où vont les choses…, nous essaierons cependant de rectifier le tir pour vous présenter nos sélections un peu plus rapidement. Mais trêve de promesses, passons à ce qui nous amène ici : les livres, les livres, encore les livres, ivres d’imaginaire que vous êtes, ivres d’imaginaire que nous sommes.
 
Mais avant l’ivresse, encore faudrait-il avoir soif, n’est-ce pas ?
 
Avant de brosser un petit portrait de nos coups de cœur de juin, revenons sur quelques titres que nous avons loupés dans cette rubrique et dont nous aurions bien aimé vous parler. Tout d’abord, la suite du Bâtard de Kosigan (Le fou prend le roi) de Fabien Cerutti (ed. Mnemos) est parue en avril. Cette fantasy historique qui nous avait largement conquis (une de nos meilleures ventes à la librairie) est revenue avec autant d’énergie et d’inventivité. On s’amuse, et on admire Cerutti pour sa façon d’imbriquer imaginaire et Histoire. Chapeau. L’auteur vient de recevoir plusieurs prix, et c’est archi mérité.
 
Comment passer sous silence notre coup de cœur de l’année à Critic, La ménagerie de papier de Ken Liu (traduction Pierre-Paul Durastanti). L’auteur, découvert en France en premier lieu dans la revue Fiction, est, tout simplement, la plus belle voix anglo-saxonne émergente de ces vingt dernières années et une nouvelle comme celle qui donne son titre au recueil – qui a obtenu tous les grands prix anglo-saxons – devrait achever de convaincre à peu près tous les lecteurs. Il y a du Sturgeon, du Leiber (le nouvelliste) chez Ken Liu, capable de tout écrire avec la même virtuosité, qu’il touche à la SF, la fantasy ou au fantastique. Il vient de publier un roman de fantasy aux Etats-Unis… autant dire que nous attendons une traduction avec impatience, d’autant qu’il est déjà acclamé un peu partout ! Nous n’avons qu’une seule recommandation avant cela : achetez et lisez La ménagerie de papier, puis offrez-le. A tout le monde. C’est qu’on en deviendrait limite totalitaires pour vous imposer une plume humaniste…
 
En mai – attention, je préviens, je ne suis pas totalement objectif, étant l’éditeur de l’ouvrage – a paru chez Ad Astra le quatrième volume de l’intégrale du cycle de Lanmeur de Christian Léourier (Aux origines du Rassemblement). Il ne s’agit pas d’une réédition, comme pour les trois précédents tomes, mais bien d’un inédit, ou plutôt deux puisque deux romans (et une nouvelle) composent cette préquelle, qui revient notamment sur la genèse des Thoreïdes et du Rassemblement. Léourier avait carte blanche… il l’a remplie avec son talent de conteur, donnant aux lecteurs les clefs de sa fresque galactique. Ce même mois de mai est sorti chez Folio SF en poche le troisième volume ! Vous n’avez plus d’excuse pour ne pas découvrir ce cycle !
 
Toujours chez Folio en mai, il ne fallait pas louper pas le deuxième tome de Frontière Barbare de Serge Brussolo, Anges de Fer, Paradis d’Acier. D’abord parce que le roman, comme son prédécesseur, est inédit, et ensuite parce que nous retrouvons un Brussolo inventif qui, même si parfois (euphémisme) il ne s’embarrasse pas de cohérence, nous laisse en tête des images d’une force époustouflante. Brussolo est un Maître français du genre. Aucune raison de bouder son plaisir.
 
Quant au mois de juin, la liste des incontournables augmente en flèche. Pour nous, le point d’orgue de ce mois est la réédition augmentée de Kirinyaga (Mike Resnick) chez Denoël dans une traduction de Pierre-Paul Durastanti (dans tous les bons coups) et Olivier Deparis. Comparé aux chroniques martiennes de Ray Bradbury (sans doute pour son propos humaniste/philosophique et sa structure en nouvelles), ce fix-up n’en reste pas moins, et avant tout, un essai d’utopie (ce que ne sont pas les chroniques martiennes) qui reprend les cultures kenyanes (Masaïs, Kikuyus…). Le roman se situe sur un planétoïde terraformé, où Koriba, qui se pose en Sorcier de la tribu, reproduit les traditions du peuple Kikuyu. Le recueil culmine avec des textes d’une beauté saisissante tels que Toucher le ciel (l’histoire d’une petite fille qui recueille un oiseau blessé et va comprendre par l’accès à l’ordinateur du Sorcier que le monde n’est pas tel qu’elle le pense) ou encore Bwana (l’histoire d’un guerrier Masaï qui fait trembler les fondations du projet de Koriba). Pas de déchet et un ensemble cohérent, beau. Tout simplement un chef-d’œuvre de SF, qui plus est accessible aux plus réfractaires au genre, peut-être même idéal pour faire découvrir le genre. Jambo, Koriba !
 
En bref, et à retenir :
 
Chez l’éditeur Mirobole est sortie ce mois-ci la suite des aventures à Istanbul d’Alper Kamu, enquêteur de… 5 ans ! Bien-sûr, l’ambiance est ici plus proche du polar que de la SF mais, pourtant, ces deux enquête baignent dans l’imaginaire et devraient pouvoir plaire aux habitués de lectures SF ou fantastique ! Toujours est-il que L’assassinat d’Hicabi Bey et sa suite Une fleur en enfer nous font découvrir une Istanbul différente, exotique, souvent aussi sombre que lumineuse, peut-être parce que de la découvrir par les yeux pétillants d’un gamin de cinq ans, intelligent, aventureux et drôle, ça n’a pas d’équivalent ! Hop, dans le panier !
 
Dans la collection Hélios des Indés de l’Imaginaire, en poche donc, deux titres devraient obligatoirement finir dans votre panier, chez votre libraire : Il s’agit de La voix du Feu d’Alan Moore, œuvre cynique et intelligente s’il en est, ainsi que L’homme aux semelles de foudre de Yal Ayerdhal. Ici aussi, on est plus dans le thriller, mais on sait que chez l’auteur, l’imaginaire n’est jamais très loin et peut faire dérailler la réalité à notre vue au détour d’une scène ou d’une phrase. Miam.
 
 
Aux éditions Critic, le deuxième volume de la saga Retis Galactica de Bertrand Passegué pointe le bout du museau. Suite et fin des aventures de Ross Fergusson et ses compagnons d’infortune, autour d’une lutte de pouvoir qui mène (peut-être) au trône de mystérieux aliens, les Consctructeurs. Idéal pour vote été !
 
Présenté par Bragelonne comme la révélation fantasy de 2015, Les Manteaux de Gloire n’a pas les épaules assez solides pour prétendre à un tel statut, la faute à des ficelles parfois un peu grosses. Néanmoins, la première traduction en France de l’auteur canadien Sebastien de Castell ne démérite pas pour autant et se révèle être un chouette divertissement – une fantasy mâtinée de capes et d’épées, avec des personnages hauts en couleur, comme l’éditeur en propose régulièrement (Pierre Pevel, Dave Duncan, etc.), un roman fun qui vous volera quelques heures de sommeil et mieux, quelques sourires ; ce qui n’est déjà pas si mal.
 
On reviendra, le mois prochain si tout va bien, sur Kafka à Paris de Xavier Mauméjean (Alma ed.).
 
Allez, c’est tout pour cette fois-ci. Vous avez de grands crus à déguster cet été, allez donc dévaliser votre libraire sur le champ !
 
 
Xavier Dollo & Simon Pinel 

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