Actusf : Quelle est votre dernière illustration pour un roman ?
Aurélien Police : Ma dernière illustration en date concerne un titre hors-série de la collection Une Heure-Lumière des éditions du Bélial’. Il s’inscrit dans le cadre d’une opération un peu particulière qui aura lieu courant septembre puisqu’il sera offert pour l’achat de deux titres de la collection. On y retrouvera une nouvelle inédite de Ken Liu et une présentation de l’ensemble du catalogue de la collection. Il ne s’agit donc pas d’illustrer le texte de l’auteur, mais de proposer une image qui se veut représentative de la collection, une sorte de résumé visuel de ce qu’elle souhaite offrir : du « sense of wonder », une science-fiction – ou plus simplement une littérature – qui sort du « cadre ». Littéralement, c’est cela que j’ai cherché à retraduire avec ces vaisseaux qui quittent l’espace connu pour s’aventurer au-delà, dans l’ailleurs, le blanc de la page.
Actusf : Est-ce difficile de saisir l’essence d’un récit pour la sublimer en une seule image ?
Aurélien Police : Je ne sais pas si je sublime quoi que ce soit, mais généralement l’idée s’impose d’elle-même dans les cent premières pages du texte. C’est une lecture active durant laquelle je souligne des passages, prends quelques notes. Si ce n’est pas le cas, s’ensuit une discussion avec l’éditeur. Je fais rarement plusieurs propositions (à vrai dire, jamais), mais si ma première idée ne convient pas, je repars sur tout autre chose. Je cherche toutefois à privilégier au maximum la première impulsion. C’est, selon mon expérience personnelle, souvent la meilleure.
Actusf : Quelle est la couverture préférée que vous avez réalisée ?
Aurélien Police : J’hésite entre trois couvertures. Les deux premières - parce qu’il s’agit de classiques chers à mon cœur que je n’aurais jamais imaginé pouvoir illustrer un jour – sont le Frankenstein de Mary Shelley et Fahrenheit 451 de Ray Bradbury (l’un de mes auteurs fétiches), tous deux parus en Folio SF. La troisième : le grand format de 7 secondes pour devenir un aigle de Thomas Day paru au Bélial’. C’est une couverture qui a marqué un tournant dans ma façon d’imaginer et de concevoir des couvertures. Une sorte de mix entre graphisme et illustration, une recherche de l’épure et de l’impact. J’ai beaucoup appris grâce à elle. On peut d’ailleurs dire que les couvertures de la collection Une Heure-Lumière sont les petites sœurs de 7 Secondes…
Actusf : Celle d’une de vos consœurs ou confrères ?
Aurélien Police : J’aime beaucoup ce que fait Stéphane Perger pour les éditions Scylla, toujours ce mélange de graphisme et d’illustration. Autrement, j’ai été marqué par les couvertures des Philip K. Dick parus chez 10-18 il y a un moment déjà… Ces photographies abstraites, ces néons, ces rémanences lumineuses. Certaines peuvent paraître terriblement datées, mais dans mon esprit, cela fait écho. Lorsque je pense à Philip K. Dick, je pense directement à ces couvertures, celle d’Ubik en tête, une photographie de ballons verts/jaunes de Guillaume de Rémusat. Finalement, j’aime les couvertures sobres, celles qui n’imposent pas une vision trop explicite du roman, qui ne nous disent pas : « tenez, c’est à ça que ressemble le personnage ». Il faut que cela soit intrigant, non démonstratif et surtout au service du roman… Donc oui, dans les publications actuelles, je retiendrai en premier Stéphane Perger et notamment les illustrations de couverture de Point du Jour, Tadjélé – Récits d’Exil ou encore Les Chambres Inquiètes…
Actusf : Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Aurélien Police : J’essaie de terminer toutes mes commandes en cours (beaucoup de couvertures de romans et de disques) afin de pouvoir me consacrer quasi exclusivement à ma prochaine bande dessinée. Après le comics Juste un peu de Cendres paru chez Glénat en octobre, Thomas Day et moi-même remettons le couvert – toujours chez Glénat - avec cette fois une réécriture très libre d’un classique de la littérature fantastique de la fin du XIXème. N’en étant qu’aux prémices (recherches sur les personnages, les ambiances, de nouvelles techniques à employer), je suis impatient d’y consacrer davantage de temps. Tant mieux me direz-vous, car je pense en avoir pour… allez… quelque chose comme trois ou quatre ans...
Cette semaine, retrouvez :
- Diego Tripodi
- Gilles Francescano
- Melchior Ascaride
- Zariel
- Jean-Emmanuel Aubert
- Cindy Canévet
- Pascal Casolari