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Interview d'Hervé Jubert
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Interview d'Hervé Jubert

ActuSF : Comment est née l'idée de la trilogie Morgenstern ?
Hervé Jubert : Pour être honnête, au départ, il n’y avait que le quadrille des assassins. Le tango et la samba m’ont été demandés par l’éditeur lorsque les américains ont été intéressés par Roberta. De toutes façons, j’avais laissé des portes ouvertes à la fin du quadrille. Et je n’étais pas prêt à laisser tomber cet univers aussi rapidement.

ActuSF : Parlez-nous un peu de Roberta, comment la voyez vous ?
Hervé Jubert : Petite. Boulotte. La cinquantaine. Rouquine. Avec une pêche d’enfer. Aimant Percy Faith, les fauteuils tendus de peaux de zèbre et le daïkiri coco punch. Ses parents idéaux : Mary Poppins et Iggy Pop.

ActuSF : Le premier tome se situe notamment dans un Londres reconstitué comme au XIXème siècle et dans d'autres villes. J'imagine que c'était un plaisir de se balader dans la capitale anglaise au XIXème en tant qu'auteur ?
Hervé Jubert : Je ne m’en lasse pas. Et puis, c’était amusant de décrire un Londres sauce XIXème assez fantasque, flottant sur une lagune, avec un Crystal palace dans lequel des vaisseaux aériens peuvent évoluer en toute quiétude. Les décors du quadrille doivent beaucoup à Schuiten et Peeters pour les murailles de Samaris et à Tim Powers pour les voies d’Anubis.

ActuSF : Qu'est-ce qui vous plait dans le XIXème siècle et plus particulièrement sa deuxième moitié ?
Hervé Jubert : Dans notre passé proche, j’ai l’impression que c’est la dernière période où le fantastique dans ce qu’il a de poétique (je ne vous parle pas des conspirations à la Rozewell dont on nous bassine depuis les années 50) faisait partie du quotidien. Quand on consulte les revues de l’époque, on a des articles très sérieux sur les aurores boréales visibles à Paris, les hommes-chiens, les puces savantes, les mystères du magnétisme et de l’électricité… Des zones des Alpes n’étaient toujours pas cartographiées dans les années 1880. De là à y installer un yéti français, il n’y a qu’un pas. En même temps, avec le chemin de fer, les transatlantiques, le monde rapetissait. Et puis, au quotidien, c’était autre chose. Certes, on n’avait pas la Wee ou les séries de HBO. Mais on chantait dans la rue et on allait voir Robert Houdin dans son théâtre. C’était classe.

ActuSF : Vous mettez en scène plusieurs personnages historiques. Est-ce facile de se glisser dans la peau de ces personnages ? Est-ce que cela vous a demandé beaucoup de documentations ? N'y a-t-il pas non plus une peur de "trahir" le personnage réel ?
Hervé Jubert : Je me documente pour les personnages réels, sans chercher le vérisme absolu. Particulièrement pour Roberta. Si j’utilise des personnages ayant existé, c’est pour les contraindre à servir l’intrigue, et pour divertir. Donc, mes excuses aux spécialistes de La Voisin et de Montezuma. Ces portraits sont sûrement très infidèles. Quant à celui qui connaîtrait l’identité de Jack l’éventreur, il peut m’écrire via mon site (www.blanche-paichain.net) Confidentialité assurée.

ActuSF : Vous avez également repris des assassins célèbres. Ce sont des personnages fascinants pour un écrivain ?
Hervé Jubert : Oups. J’ai répondu avant. Mais, euh, dans Roberta, les seuls personnages historiques que j’utilise sont les assassins ? Non ?

ActuSF : En avril 2005, vous nous aviez répondu dans une première interview. "Après, j'espère reprendre Roberta. Le scénario du numéro IV est bouclé. Mais bon, c'est une autre histoire." Qu'en est-il aujourd'hui ?
Hervé Jubert : J’avais proposé le scénario à Albin Michel… qui m’a demandé autre chose. Je suis donc parti sur Blanche, un vieux projet qui me tenait aussi très à cœur. Je ne désespère pas d’écrire un Roberta IV et V et VI. Les danses retenues sont le Sirtaki, le Fandango et… je sèche pour la dernière.

ActuSF : Vous avez créé un très beau site sur Blanche. Est-il prévu d'en créer un sur Roberta ?
Hervé Jubert : Le site qui accompagne la trilogie de Blanche a vraiment été conçu comme un jeu de bonus, tels ceux qui accompagnent les DVD. Si je devais faire un site sur Roberta, ce serait une réalisation à part. Quelque chose de pas évident, quoi. J’ai démarré un Cabinet de curiosités dans le site de Blanche et je le nourris ponctuellement. Cette encyclopédie inutile pourrait, à terme, constituer une bonne extension à l’univers de Roberta.

ActuSF : Le cycle de Roberta et celui de Blanche mêlent tous deux littérature de l'imaginaire et enquêtes policières. L'élément policier vous tient-il tant à coeur ?
Hervé Jubert : Mes six derniers livres (trois Roberta, trois Blanche) et quelques poches précédents mêlent polar et fantastique dans des mondes plus ou moins réels. C’est vrai. J’avoue. J’aime ça. Je dois aussi préciser que mes histoires dépendent beaucoup de mes découvertes et des bibliothèques que je fréquente. Quand je vais à Paris, je passe toujours aux archives de la police. Une mine d’or pour des pillards dans mon genre. Si je traînais un peu plus dans une Société de géographie, il y aurait moins de polar et plus d’exploration dans mes bouquins, j’imagine.

ActuSF : Même si votre trilogie n'a pas été spécialement écrite pour des ados, elle s'est retrouvée dans la collection wiz chez Albin Michel. Espérez-vous toucher un autre public ?
Hervé Jubert : J’espère toucher le public pour lequel la trilogie a été écrite, tout simplement. Wiz m’a permis de l’élargir au lectorat ados/jeunes adultes, (franchement, je me range facilement dans cette catégorie). N’empêche, Roberta est passée à côté du milieu Adultes dévoreurs d’imaginaires (à part les furieux qui s’alimentent aux rayons jeunesse et je leur tire mon chapeau.) Donc, je suis très content de voir Roberta sortir chez Points.

ActuSF : Quels sont vos projets ?
Hervé Jubert : Ecrire une biographie courte et destinée à la jeunesse de R.L.Stevenson. Accompagner les finitions de mon prochain Wiz, un roman de féerie qui a l’expo universelle de 1900 pour cadre. Le texte est fini. Mais tout un volet icono devrait l’accompagner, pour en faire un livre-objet. Je caresse aussi l’envie de faire un gros roman d’aventures avec, comme personnage principal, un des zeppelins qui faisaient le tour du monde au début des années 30. ça doit être la sortie d’Indiana Jones IV qui m’inspire.

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