Je me souviens d'un déjeuner il y a quatre ans maintenant. Nous sommes réunis dans un restaurant de Chambéry et j'annonce à Jean-Laurent que je suis très intéressé par son livre, Royaume de vent et de colères. Je viens de le finir au milieu de la nuit quelques jours plus tôt (c'est un plaisir rare d'éditeur, que de ne plus compter les heures quand on lit un manuscrit) et je veux absolument pouvoir le publier. J'avais adoré le contexte historique, le déroulé de l'intrigue et les personnages. Derrière un stand, vous m'entendrez souvent dire pour convaincre de futurs lecteurs et lectrices que ses héros m'ont poursuivi quelque temps une fois le dernier chapitre terminé. C'est la stricte vérité.
Ce que je ne sais pas encore à ce moment là, c'est qu'après Royaume, le bonheur va se reproduire. J'ai dévoré depuis tous les manuscrits de Jean-Laurent, Boudicca et Je suis fille de rage, mais aussi ses nouvelles et la novella graphique, La Guerre des trois rois, à venir avec Marc Simonetti. J'aime son économie de moyens (il n'y a jamais de longueur) et la manière qu'il a d'installer ses personnages, de leur donner en quelques mots une véritable profondeur. Il y a une vraie proximité avec eux. Ils se battent, ils s'aiment, ils souffrent, ils sont très proches de nous et on vit avec intensité leurs drames et leurs joies. Aucun n'est "plat".
Le bonheur est donc de nouveau arrivé avec Je suis fille de rage. Je l'ai vu pendant des mois batailler avec la documentation. Diantre, s'attaquer à la guerre de Sécession, ce n'est pas une mince affaire ! C'est la première à avoir été autant documentée, c'est la première à avoir été photographiée. La tâche semblait une montagne. Et elle a accouché d'un récit formidable, avec une nouvelle fois des personnages entiers, engagés, passionnants. Leurs destins font l'ossature de ce roman qui parcourt les quatre ans de guerre avec brio. J'avoue que je connaissais mal la période, et je me m'y suis plongé avec envie et gourmandise. Sur les médias sociaux (on fait un clin d’œil à la Volte), une blogueuse que l'on connaît bien ici, a posté un message disant qu'elle avait pleuré deux fois, preuve que l'histoire fonctionne à plein et que les personnages l'ont totalement emportée. Si le pari de raconter ce conflit semblait ambitieux, il est pour moi, qui ait eu la chance de l'éditer, totalement réussi. J'espère que comme moi, vous vous laisserez entraîner, que vous aurez même envie d'en savoir un peu plus sur cette époque. Et peut être écraserez-vous une petite larme au détour d'un chapitre. Ce serait une bonne nouvelle.
C'est un roman monde, vivant, formidable. Et je suis très fier que les éditions ActuSF le publient.
Jérôme Vincent
