- le  

L'Arpenteur

Moebius ( Auteur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/08/2010  -  bd
voir l'oeuvre
Commenter

L'Arpenteur

Arzak l'arpenteur apparaît pour la première fois dans la revue Métal Hurlant, dans les années soixante-dix et en 1976, un album regroupant cinq histoires muettes, mystérieuses, le met à l'honneur. Le personnage y parcourt une planète désertique, chevauchant un grand oiseau blanc, à la rencontre de ses habitants étonnants. Trente-quatre ans plus tard, Arzak réapparaît dans un album (Destination Tassili) destiné à engager le personnage dans une aventure en trois tomes. Aujourd'hui, l'éditeur original, Moebius Productions, s'associe à Glénat pour rééditer la bande dessinée – en couleurs puisque la première version était en noir et blanc, ainsi que le texte intégré dans des bulles – et faire paraître les deux autres albums de la série. La sortie du tome 2 est d'ailleurs prévue pour décembre.

Avec L'Arpenteur, Moebius refait donc vivre ce personnage étonnant qui avait tant marqué les lecteurs de la mythique revue créée avec Druillet et Dionnet. L'auteur de bande dessinée – de son vrai nom Jean Giraud – le fait évoluer, lui donnant la parole, une fonction, une mission. Il le confronte à des personnages qui eux aussi ont des buts, sont bienveillants ou malveillants.
Avec L'Arpenteur, Moebius refait surtout apparition, car depuis 2007 et son Histoire d'une idée ou sa participation au projet Halo graphic novel, il s'était fait plutôt discret. De quoi frustrer les fans du Neuvième Art auquel Jean Giraud a tant apporté en créant des séries comme Blueberry (avec Jijé dès 1963), Le Garage hermétique ou L'Incal (avec Alexandro Jodorowsky, à partir de 1981). La déjà longue carrière de Jean Giraud, né en 1938, qui a également œuvré pour le cinéma (Alien, Tron, Les Maîtres du temps...) n'est donc pas terminée, et on ne s'en plaindra pas.

Un univers de SF traditionnel mais rafraîchissant

Arzak est, on l'aura compris, l'Arpenteur, celui qui parcourt Tassili, à la recherche de l'Anomalie qui menace l'équilibre et la paix entre les habitants de la planète. Ce guerrier farouche, solitaire, charismatique, emblème de l'autorité galactique sur cette planète sauvage, est le héros des enfants, l'ennemi de ceux qui veulent faire régner leur loi plutôt que de se soumettre à celle de Desmezz. Il est également celui qui respecte tout et tous – les Humains comme les natifs de Tassili, les Wergs, méprisés par les premiers. Autant de caractéristiques qui lui seront d'un grand secours et lui feront jouer un rôle majeur au cours des événements dont la planète sera le centre.
Car le Tronic Rapidoo, qui fait route vers Desmezz, et a pour passager Dame Charmaine et le petit Domyo – respectivement la compagne et le fils du Prince Atkinaton – est menacé par les pirates du terrible Kimorg Barbax. Ce n'est pas une coïncidence si le vaisseau est attaqué par ces criminels Wergs déterminés à se venger de la « vermine humaine », car Barbax a un plan pour faire flancher Desmezz, et ce plan se déroule en partie sur Tassili...

Pas de doute, L'Arpenteur est un space opera de forme classique. Les noms des personnages, leurs costumes, les designs des vaisseaux spatiaux, l'architecture des maisons de Redmond, et cætera, fleurent bon les années soixante-dix. Moebius a donc su conserver l'esprit d'Arzach – comme le nom du personnage était orthographié à l'origine – et flatte les nostalgies d'une science-fiction qui recherche moins la sophistication technologique que la fascination par le sense of wonder. Pourtant, si les dessins de Moebius, immédiatement reconnaissables, et une colorisation par aplats de couleurs parfois chatoyantes, participent à une impression de « vieille SF », L'Arpenteur se lit comme ce qu'elle est : une œuvre qui se place dès à présent dans la liste des intemporelles, qu'on se plaira à lire et à relire dans les dizaines d'années à venir.
Pourtant, ce premier tome dévoile peu de choses d'un univers qu'on devine foisonnant ; il met en scène des personnages charismatiques : Arzak bien sûr, la centralisatrice et son caractère jaloux, Barbax qui apparaît comme un digne méchant de space opera... Il entame une aventure spatiale et planétaire qui semble destinée à s'enrichir en rebondissements, en suspense et en actes héroïques. L'Arpenteur est un album qui ne laisse que peu de répit au lecteur car l'action ne s'y ralentit que dans des passages permettant la contemplation de l'étrangeté des paysages d'une planète aux grands espaces désertiques hérissés de plateaux et d'éperons rocheux, peuplée d'une faune dangereusement exotique. Moebius revient à ses fondamentaux.

D'une lecture aisée et plaisante – et même bien au-delà –, la dernière bande dessinée de Moebius est un petit bijou science-fictionnesque, qui rappelle les heures glorieuses du genre dans les années soixante-dix tout en restant d'une actualité palpitante. Un incontournable de la rentrée littéraire 2010.

Genres / Mots-clés

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?