Pour certains auteurs, il existe des rencontres avec un personnage, qui façonnent toute leur œuvre et guident leur vie entière. Michel Weyland en a fait la découverte voici plus de trente ans. Son héroïne n'était que de passage dans les pages de l'auteur – même son nom n'était qu'un jeu de mots pour le titre : La Fugue d'Aria... Pourtant, la guerrière au cœur tendre a occupé tout le temps de son créateur au fil des trente-trois albums que compte aujourd'hui la série.

Retour en enfance

Aria est désormais une femme posée. Mère, propriétaire, aimée par ses amis et ses voisins, elle a tout pour être heureuse. Pourtant, elle est toujours cette fugitive en quête d'une impossible paix, cherchant dans l'étourdissement du combat et du voyage l'oubli et l'effacement. Incapable de simplement exister pour le moment présent. Au point d'être malade à l'idée de la fête préparée à son intention.

La magie n'est jamais loin, dans l'univers d'Aria, même si elle s'en méfie. Projetée loin dans le temps, témoin impuissante du pire drame que puisse subir une fillette, elle va revivre un épisode atroce de sa vie, un moment qu'elle a enfoui tellement profond dans sa mémoire qu'elle ne s'en souvenait plus.

Peut-elle agir, changer le passé ? Sauver sa famille, se sauver elle-même de l'enchaînement qui, à partir de l'innocence brisée, a fait d'elle ce qu'elle est devenue... En tout cas, elle se sent forcée d'essayer malgré ses peurs les plus profondes.

Retour aux sources de la série

Depuis quelques albums, il semblait que l'auteur tournait en rond, cherchant un nouveau souffle. Après une brillante étude de la pré-adolescence défigurée par le viol, Weyland était retourné vers une bande dessinée d'aventure un peu plus pâle et décorative. Avec ce nouveau volume, il repart dans l'étude du passé de son héroïne, de ce qui a constitué sa personnalité. Et, au travers de cette étude de cas, il nous offre la possibilité de chercher, dans nos vies, ce qui a fait de nous ce que nous sommes.

L'histoire est simple, belle, à la fois candide et forte. Une femme et une fillette, un drame inévitable puisque déjà vécu et l'ombre d'une possibilité de rédemption à défaut de changement de ce qui a été. Aria est peut-être ici encore plus fragile que dans les tomes sur son adolescence, mais en même temps elle en devient plus humaine, loin de l'archétype de guerrière infaillible des premiers volets.

Les amateurs de la série apprécieront de retrouver leur héroïne et certains de ses amis, mais ce tome peut être lu indépendamment des précédents, pour ceux qui veulent découvrir une aventure d'héroic fantasy atypique.