C’est avec une réelle curiosité que l’on attendait ce numéro 72 de Lunatique. La petite revue des éditions Eons peut en effet se targuer d’avoir des fictions de Jean-Marc Ligny, Jeanne Faivre d’Arcier, Jean-Pierre Andrevon et Daniel Walther à son sommaire. Une distribution plus qu’alléchante pour une revue qui vient tout juste de renaître de ses cendres !

Dossier Daniel Walther

Le premier à ouvrir le feu n’est autre que Jean-Marc Ligny, avec une nouvelle parue en 1991 dans une anthologie du Fleuve Noir et qu’il a pour l’occasion modifiée et augmentée. Un texte qui s’inscrit dans son univers des Chroniques des nouveaux Mondes (dont le principal élément reste le roman Les Oiseaux de Lumière paru chez J’ai lu) et qui raconte la première apparition de ces oiseaux de lumière dans le système solaire. Une apparition détectée par un androïde en poste sur Mercure. Un texte à la fois émouvant et bien mené, et qui fait regretter que Jean-Marc Ligny n’ait pas l’occasion d’y revenir plus souvent dans des nouvelles ou des romans (il y a déjà une bonne demi-douzaine de livres affiliés à ce cycle).

La deuxième nouvelle de ce numéro 72 de Lunatique est sans doute la plus délectable. Avec un humour féroce et une poésie évidente, Jeanne Faivre d’Arcier raconte la résurrection d’un homme en... lémurien. De quoi perturber le quotidien de sa femme mais également le monde entier.

Une nouvelle en concurrence pour le titre de « meilleure histoire du sommaire » avec L’écroulement de la maison d’enfance de Jean-Pierre Andrevon dans laquelle son héros revient sur les lieux de sa maison effondrée avec la danse des souvenirs et la folie qui l’accompagnent.

Véronique Cabon est un peu plus morbide avec les yeux verts, et l’histoire d’un homme un peu fou et de sa curieuse manie... Même chose avec La fille aux Yeux de Ténèbres de Guy Scovel avec un traitement particulier de la pédophilie, entre noirceur et malaise. Et on recommandera également pour sa noirceur et sa surprise finale le texte de Lucas Moréno qui pour une fois à laisser son habit de traducteur pour enfiler celui d’écrivain.

Quant au dossier de Daniel Walther, il est incontournable pour se remémorer d’abord le talent de l’auteur à travers ses deux nouvelles (la première sur la rencontre de spationautes avec un vaisseau extra-terrestre abandonné, la seconde sur un voyage dans le temps), et ensuite le rôle qu’il a joué dans la construction de la SF en France.

Un numéro incontournable.

On est tout simplement bluffé par ce 72ème numéro de Lunatique. Il y a de la qualité dans les nouvelles et les dossiers, des auteurs importants au sommaire mais aussi de nouvelles plumes à découvrir, le tout avec une mise en page correcte même si elle reste à améliorer. Ne nous y trompons pas, Lunatique vient là de se hisser presque au niveau de Bifrost et de Galaxies (tout du moins en ce qui concerne les auteurs français) . En tout cas, ce numéro 72 fera date. Si elle continue sur ce modèle, elle va vite s’imposer comme une revue incontournable et qui compte. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.