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Nature humaine

Philippe Buchet (Dessinateur, Coloriste), Jean-David Morvan (Scénariste)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/08/2005  -  bd
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Nature humaine

On ne présente plus le duo Morvan-Buchet ni leur héroïne Nävis qui ont conquis depuis 1998 le cœur de centaines de milliers de personnes. Le lecteur suit pas à pas l’apprentissage et l’évolution de la mignonne petite fille devenue au fil des albums une ravissante jeune femme, sa quête de ses origines, sa découverte de la vie et la perte progressive de sa naïveté au profit d’une maturité qu’elle acquiert le plus souvent dans la souffrance et les larmes. Le lecteur voyeur a donc assisté à ses premiers émois amoureux suivis de près par ses premières peines de cœur, à ses premiers chocs psychologiques avec la découverte de la trahison ou de l’inégalité mais aussi à ses instants de bonheur grâce à ses solides amitiés et à sa famille recréée. C’est une nouvelle fois avec un œil tendre et compatissant qu’il assiste impuissant à la perte de ses illusions et à sa tristesse.

« Allez ! Accroche-toi, Nävis ! Parce qu’une fois ce téléportail franchi, on n’aura jamais été aussi proche… des êtres humains ! »

Nävis assiste à l’enterrement de Mackel-Loos, son mentor, tuteur et ami, qui repose désormais sur sa planète-gîte, auprès d’elle. Elle est en proie à la plus profonde des mélancolies, enfermée dans un mutisme qui inquiète ses deux compagnons Snivel et Bobo. Ce dernier le sait une seule chose lui fera retrouver sa joie de vivre, avoir un contact enfin avec les siens. Après les révélations du médecin de la Prisonef dans le tome précédent sur la possibilité d’une colonie humaine, ils sont enfin être parvenus à localiser la dite planète et se décident à partir en expédition. Notre trio se rend dans ce secteur prohibé par les autorités de Sillage malgré les mises en garde du Magister et de celles d’Atsukau et malgré les dangers de ce cette zone classée comme dangereuse.

A la vue de la communauté humaine, Nävis sort de son apathie et après bien des hésitations, elle entre en contact avec ceux de son espèce, pour le meilleur et pour le pire…

Paradoxes de la Nature humaine

Les fans l’attendaient depuis longtemps et c’est peut-être pour les contenter que Morvan organise cette rencontre avec d’autres êtres humains dans ce huitième tome qui s’annonce de fait comme un tournant. Jamais le lecteur n’aura connu Nävis aussi dépressive, son mutisme qui court sur près de vingt pages est impressionnant. Sa rencontre avec ses congénères va être sa bouffée d’oxygène, mais à quel prix. Sur cette planète non exempte de dangers, une communauté d’humains vit en harmonie avec son environnement, façon hippie. Semblant ne se contenter que d’amour et d’eau fraîche, de musique et de cueillette, leurs journées sont rythmées par l’absorption de différentes décoctions qui semblent peu à peu engourdir leur esprit. Nävis va bientôt les rejoindre et se laisser prendre dans ce tourbillon d’émotions et de nouveautés jusqu’à rejeter ses amis les plus fidèles.

Sans déflorer le suc de l’intrigue, disons que Nävis va connaître une forte déconvenue face à ses congénères. Si pendant un temps elle s’émerveille de cette vie sans contrainte, elle s’étonne du manque de solidarité et du détachement dont font preuves ses semblables. Un premier pas vers le désenchantement de ce qui ressemblait à un Paradis. D’ailleurs, l’ouverture de l’album sur l’enterrement de Mackel-Loos est à l’image de l’album qui se révèle plus triste et moins optimiste que les précédents. En substituant aux mots des bulles dessinées qui évoquent les souvenirs de chacun des participants, les auteurs allient sobriété et retenue, qui trouveront leur écho dans la lente décision de Nävis d’enfin se joindre à la communauté.
 
Si les émotions et la psychologie des personnages ont été traitées avec un souci de véracité, la pirouette scénaristique finale semble bien facile et caricaturale elle projette enfin l’héroïne dans l’action (jusque là Nävis était restée en retrait, passive). Si l’on comprend l’enjeu de cette scène dans la démonstration de Morvan sur les ambivalences de la nature humaine, la page ultime est bien plus éloquente tout en étant moins pompeuse.   

Pour finir sur le scénario, si les révélations du médecin de la prisonef sur la communauté humaine se sont révélées exactes, le lecteur n’oubliera pas pour autant celles d’Atsukau qui parlait d’un autre être humain présent sur Sillage. Morvan lâche finalement une demi bombe afin de mieux préserver le secret et de relancer son intrigue principale, qui est la quête de ses origines par Nävis.

Du côté des dessins, c’est à un vrai défilé de mode que nous convie une nouvelle fois Buchet avec une préférence pour les coiffures, en une planche, Nävis en change au bas mot une demi-douzaine de fois. Elle a encore grandi physiquement, ses traits sont moins ronds, ses mimiques sont moins accentuées, son corps est plus élancé. Elle paraît plus raisonnable et cet épisode va lui donner une maturité nouvelle. Sillage est avant tout le récit d’apprentissage de Nävis. Un apprentissage de la vie qui se fait dans la souffrance et la douleur. Ce huitième tome  est le plus dur de tous, il s’ouvre sur la mort de son père de substitution, Mackel-Loos, et se ferme sur la désillusion après son rendez-vous manqué avec ceux de son espèce. Un épisode clef de cette saga de Space Opera incontournable.

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