Anthony Combrexelle, connu dans le petit monde du jeu de rôle sous le pseudonyme de "Yno", est un graphiste et illustrateur né en 1980. Artiste aux multiples facettes, il est l'auteur de jeux (Patient 13, Notre Tombeau, Americana), de nouvelles chez Malpertuis et Rivière Blanche, d'un court roman horrifique (Pleine Lune aux défuntes éditions Trash).
Presque Minuit est son premier roman, écrit à l'âge de 30 ans.
Une sorcière et ses acolytes veulent détruire les hommes
Paris, 1889. La capitale accueille l’Exposition universelle et se glorifie de sa toute nouvelle tour Eiffel, mais Moignon, Boiteux, Morve, Allumette, Pleurs et Bègue, six enfants échappés d’un orphelinat, ne se préoccupent que de leur survie.
Au cours d’une de leurs arnaques, poursuivis par un inspecteur de police particulièrement coriace, ils volent un étrange objet à un inconnu tout aussi étrange. Et les véritables problèmes arrivent.
Des personnages bizarres et anormaux font leur apparition, ainsi que des créatures faites de métal et de chair. Et quand les orphelins découvrent la tour de la sorcière Sibylline, leurs aventures les emmènent encore plus loin, dans la magie, les voyages dans le temps et les mécaniques mortifères.
Des personnages attachants
Le prologue et les premières scènes de ce roman adolescent/young adult sont difficiles à suivre, mais une fois qu’on commence à s’attacher aux six enfants, âgés de 8 à 15 ans, et à comprendre leur passé, l’histoire se lit vite : on se prend au jeu et on veut savoir s’ils arriveront à s’en sortir, puis s’ils arriveront à sauver le monde.
Un univers à la fois magique et steampunk
L’histoire hésite longtemps entre magie et steampunk, sans parvenir totalement à choisir entre les deux ni à faire la jonction entre deux types d’univers finalement assez différents : les rouages mécaniques d’une part, et la magie de l’autre. On sent que l’auteur aime les deux (on le comprend !) et n’a pas voulu choisir, mais cela se fait au détriment de la cohérence de l’histoire racontée, ce qui est un peu dommage. On se demande par exemple si les voyages dans le temps appartiennent au steampunk ou à la magie.
Les créatures hybrides
Hormis les personnages attachants (les orphelins, l’inventeur, Alice et son mari), le point fort du roman, ce sont les créatures hybrides, faites de métal et de chair, de rouages et de mauvaises intentions. Elles font penser aux autres créatures de la SF, comme le "mécanhumanimal" d’Enki Bilal ou les vaisseaux organiques de Battlestar Galactica : l’humain augmenté, voire transformé en machine pour augmenter ses performances, c’est du transhumanisme, voire du posthumanisme. Anthony Combrexelle en livre ici une vision très pessimiste : la machine, l’être créé qui échappe à son créateur et se retourne contre lui, c’est un des thèmes majeurs de la SF de l’époque moderne, avec notamment Frankenstein, Terminator et Matrix. Ce thème aurait pu être encore plus développé dans Presque minuit, si ce roman s’adressait davantage à des adultes.
Le rythme du récit
Les voyages dans le temps sont bien traités aussi, avec des effets de répétition dans l’écriture qui montrent la perception des événements par les personnages. Par contre les passages sur le passé des différents personnages sont plus maladroits car ils ne sont pas signalés : le temps de comprendre, il y a un flottement dans la lecture. Enfin, la fin du roman n'est pas très claire sur le devenir de certains personnages : qu'arrive-t-il à Alice et son mari, par exemple ? C'est dommage car on se prend vite de sympathie pour les personnages.
Un agréable moment de lecture
On a donc une histoire sympathique, avec de nombreuses péripéties qui s’enchaînent vite et des personnages qu’on a plaisir à suivre. L’univers à la fois magique et steampunk plaira aux jeunes lecteurs et aux amateurs d’urban fantasy.