Seiter et Mercier, deux scénaristes pour une série dont le premier tome avait été plus que prometteur. Le premier, Roger Seiter, est conseiller principal dans un lycée et historien de formation. Il scénarise sa première bande dessinée, Après un si long hiver, en 1989 pour les confidentielles éditions La Nuée Bleue. Cœur de Sang(Delcourt) dont les dessins sont de Vincent Bailly, et Fog (Casterman) avec Cyril Bonin, lui permettent de toucher le grand public. C’est avec son épouse, Isabelle Mercier-Seiter, déjà la co-auteur de Cœur de Sang, qu’il choisit de travailler sur Dies Irae. Tous deux ont contacté Max, de son vrai nom Maxime Thierry, après avoir vu ses illustrations sur Internet. Ce tout jeune auteur, il est né en 1977, diplômé des Beaux-Arts, a exercé plusieurs jobs avant d’arriver enfin à publier son premier album.
Bien mal acquis ne profite jamais
Dans le premier tome, Théo avait utilisé la magie pour attirer la chance. Il a maintenant une petite vie tranquille, il a mis sa famille définitivement à l’abri du besoin et passe son temps à chiner des meubles chez les antiquaires pour combler le vide de son nouveau manoir. Une vie trop simple où l’argent coule à flot. Il a également invoqué un succube pour son plaisir personnel, il ne se doutait pas alors qu’il libérait des forces qui le dépasseraient et qu’il ne peut maîtriser. Un à un, les gens qui lui sont proches disparaissent tragiquement, son seul salut pourrait venir de l’organisation occulte Les Fils d’Enoch.
« Je veux expier mes fautes. Une idée aussi pitoyable que vaine… Comment cette ridicule souffrance pourrait-elle racheter mes errances ?…
On avait été enthousiaste pour le premier tome, voici donc l’heure de la confirmation avec ce second volet qui clôt tragiquement l’histoire de Théo, celui qui a voulu défier la chance. Le flash-back se poursuit et Seiter et Mercier développent de nouveaux thèmes en se centrant non plus sur la chance insolente de Théo, depuis qu’il a créé son charme, mais sur le succube qu’il a inconsciemment invoqué. Toujours narré à la première personne et dans un style très contemporain, le récit du jeune homme est plus mature depuis les récents événements qui ont vu la mort des personnes de son entourage. On suit l’évolution du personnage qui soudain semble se rendre compte de la gravité de la situation et prend conscience des conséquences de ses actes. La manipulation de la magie noire a des répercussions qu’a magnifiquement ignorées Théo, un personnage auquel peut aisément s’identifier le lecteur. En effet, ni bon, ni mauvais, il est le symbole d’une envie présente en chacun de nous, la tenation du bonheur par l’argent, du bien rapidement acquis sans effort.
Les dessins réalistes se font l’écho de ce thriller tendu. Le trait de Max est plus affirmé, à n’en pas douter il a pris de l’assurance, et son dessin n’en est que meilleur. D’ailleurs, le visage de Théo a changé, il semble avoir pris dix ans en quelques semaines. Une réserve cependant, ce changement est un peu déconcertant au début puisque l’on ne reconnaît que vaguement les personnages. Juste un exemple, Théo change carrément de nez d’un album à l’autre. Enfin, les couleurs sans joie et ternes reflètent l’ambiance glauque de la série. L’histoire, une fois n’est pas coutume se finit dramatiquement, ce qui d’emblée classe Dies Irae dans le haut du panier.
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