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VLB éditeur donne rendez-vous à l'imaginaire - Découvrez la nouvelle collection avec Geneviève Blouin et Mathieu Lauzon-Dicso
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VLB éditeur donne rendez-vous à l'imaginaire - Découvrez la nouvelle collection avec Geneviève Blouin et Mathieu Lauzon-Dicso

L'éditeur québécois VLB a annoncé dernièrement la création d'une nouvelle collection dédiée à la littérature de l'imaginaire avec l'aide de Geneviève Blouin (romancière et nouvelliste) et Mathieu Lauzon-Dicső (libraire à la Saga Bookstore à Montréal).

Découvrons en leur compagnie cette nouvelle collection.

Actusf : Qu'est-ce qui vous a donné envie de monter cette collection ?

Mathieu : Depuis 2016, je coordonne le Prix des Horizons imaginaires, qui est devenu un équivalent québécois du Prix Imaginales des Lycéens. En préparation de chaque nouvelle édition, je recense toutes les publications canadiennes en imaginaire francophone pour les lecteurs adultes, et un constat s’est imposé : pour une production annuelle d’environ 40 titres, on compte ceux de science-fiction et de fantasy sur les doigts d’une main, parfois de deux… Les éditeurs francophones du Canada publient essentiellement du fantastique, de l’horreur, et si on entre dans la SF, on est surtout du côté du post-apo, de la dystopie. Ou encore du réalisme magique, de l’imaginaire « liminal »; à la limite, des textes surréalistes, oniriques, etc. Et dans l’ensemble, le niveau littéraire est très bon! Mais, fervent lecteur de fantasy depuis mon tout jeune âge, puis de science-fiction ambitieuse, il me semble qu’on en voit peu au Québec depuis une décennie.

En même temps, je préparais l’ouverture d’une nouvelle librairie montréalaise spécialisée en genre - la librairie Saga, qui devrait rouvrir ses portes post-pandémie à la rentrée d’automne ! -, et au fil de rencontres, de discussions avec des comparses du milieu littéraire, il s’est avéré que lancer cette nouvelle collection chez VLB éditeur était une bonne idée, réalisable de surcroît ! C’est une maison d’édition extrêmement bien établie au Québec, qui publie de la littérature depuis 1976. VLB fait aussi partie d’un groupe éditorial, le Groupe Ville-Marie Littérature, et bénéficie d’une structure forte, qui lui permet de traverser la crise actuelle et de démarrer un projet comme celui de notre nouvelle collection, VLB imaginaire.

Par contre, si j’ai de l’expérience comme lecteur, comme conseiller littéraire, comme gestionnaire, etc., elle est plutôt limitée en direction littéraire. Mais heureusement, Geneviève Blouin avait envie de se lancer dans cette folle aventure !

Geneviève : Mathieu était déjà un ami, un complice de plusieurs projets. Lorsqu’il m’a approchée au sujet d’une éventuelle nouvelle collection en imaginaire, je me cherchais justement des contrats de direction littéraire. Je publie professionnellement depuis 2008, j’ai remporté plusieurs prix littéraires, donné des ateliers de création et effectué du travail bénévole comme directrice littéraire pour la revue Brins d’éternité, spécialisée en imaginaire. J’étais rendue là dans ma carrière de créatrice : prête à aider d’autres auteurs à se développer. L’offre de Mathieu est donc arrivée juste au bon moment, et je l’ai saisie sans hésiter.

Il faut dire en plus que j’ai toujours été une avide lectrice de science-fiction et de fantasy. Ce sont d’ailleurs des genres que j’ai souvent visités sous forme de nouvelle. De plus, depuis que j’ai entendu les termes « hopepunk » et « solarpunk », je suis fascinée par cette manière de repenser la fantasy et la science-fiction. Cependant, cette mouvance n’existe pratiquement que dans le monde anglo-saxon, il n’y a pas d’équivalent au Québec. Avec la nouvelle collection, Mathieu nous donnait la possibilité de la créer ensemble, d’être, peut-être, à l’origine d’un mouvement littéraire, de nouvelles idées. Je ne pouvais pas refuser!

Actusf : Quel type d'ouvrages avez-vous envie de publier ?

Geneviève : Un livre accessible, pensé pour les adultes, avec un bon rythme, pendant lequel on ne s’ennuie pas, où les thèmes sont abordés subtilement. Mais également un livre qui reste avec nous une fois refermé, qui nous pousse à nous poser des questions, à repenser notre rapport au monde. J’aimerais des histoires inclusives, féministes au sens où on ne reproduit pas le patriarcat actuel par réflexe, pas de dystopies hyper-capitalistes qui nous montrent vers quel enfer notre monde se dirige (on le sait!), mais plutôt des histoires où on rebâti une société, où on repense les structures. Bref, je veux qu’on me raconte ce qui se passe une fois le dragon vaincu, le tyran détrôné, l’intelligence artificielle domptée.

Mathieu : Des romans lumineux, des utopies lucides, de la science-fiction et de la fantasy dépaysantes, qui nous amènent à voir au-delà de la fin du monde. Si on ciblait quelques noms bien connus des littératures anglo-saxonne ou étrangère, qui nous inspirent, on irait vers Nalo Hopkinson, Guy Gavriel Kay, Ann Leckie, Nnedi Okorafor… D’ailleurs, nous envisageons publier des traductions d’œuvres étrangères en français un peu plus tard, et de miser sur la traduction de nos publications en anglais : après tout, établis à Montréal, nous avons la chance de nous retrouver dans un milieu professionnel bilingue très dynamique, à proximité des marchés du Canada anglais et des États-Unis.

Actusf : Vous parlez de nouvelles voix de l'imaginaire. Est-ce que ça veut dire que les soumissions de manuscrits sont possibles pour les jeunes auteurs et autrices ?

Geneviève : Oui, tout à fait! Nous avons envie de lire des idées nouvelles, des plumes originales, des gens qui proviennent de tous les horizons. Mon rêve est de découvrir de nouvelles voix qui deviendront importantes pour le milieu de l’imaginaire.

Actusf : Combien souhaitez publier de livres par an ?

Mathieu : Nous allons commencer par un premier livre à paraître au printemps 2021, dont on ne peut actuellement pas vous parler, malheureusement ! La parution se fera dans le cadre des nouveaux « Rendez-vous avec l’imaginaire! », prévus en mai. Ce serait un équivalent canadien du Mois de l’imaginaire, qui a fait ses preuves chez vous. Le Congrès Boréal de science-fiction et de fantastique, qui en sera à sa 42e édition du 30 avril au 2 mai 2021, marquera le début des activités.

Geneviève : Par la suite, si tout va bien et que les manuscrits intéressants sont au rendez-vous, nous visons 2 à 4 publications par année, incluant, dans un monde idéal, une traduction.

Actusf : Est-ce qu'on pourra trouver vos romans en France ?

Mathieu : Oui ! En fait, VLB éditeur est déjà distribué en France par Interforum, donc il est possible de commander tous les titres déjà parus dans les librairies françaises. D’ailleurs, même si VLB est une maison généraliste depuis ses débuts, son catalogue contient quelques titres d’imaginaire - pas nécessairement de la science-fiction ou de la fantasy comme on souhaite en faire avec VLB imaginaire, mais des lectures qui pourraient intéresser les lecteurs français. Je pense notamment au roman Zora, un conte cruel, de Philippe Arseneault, un récit rocambolesque et cru, imprégné d’humour noir et de mythologie finnoise, qui avait remporté le Prix Jacques-Brossard (meilleure production SFF de l’année au Québec) en 2014. Ou encore, paru en plein confinement, Le Prince, de Lili Boisvert, le premier tome de la trilogie fantasy Anan : de l’aventure, des complots politiques, dans l’État matriarcal d’Anan, en compagnie de Chaolih, une héroïne frondeuse qui a pour mission d’escorter un prince chez sa future épouse… Il y en aurait bien d’autres à recommander, mais je vais sortir de la SFF et mentionner aussi Le Livre de Judith, un roman purement historique de la talentueuse Mylène Gilbert-Dumas, qui nous ramène dans le Paris de 1939, sur les traces de Cécile Maltais, une jeune femme canadienne française, recrutée par les services secrets britanniques, au cœur d’une vaste intrigue qui rappelle le rôle que plusieurs femmes ont joué dans le combat contre les Nazis.

Sinon, nous souhaitons aussi être présents en France, en Belgique, en Suisse, etc. lors des événements, pour venir à la rencontre des lecteurs avec nos auteurs, que ce soit aux Utopiales, aux Imaginales et d’autres festivals. Par ailleurs, il n’est surtout pas exclu de collaborer avec des éditeurs européens pour réfléchir à des activités de promotion, pour discuter de vente et d’achat de droits, etc. Et ça tombe bien : le Canada sera l’invité d’honneur à Francfort, en 2021 - autant en profiter !

Actusf : Quelle place aimeriez-vous que cette collection ait dans l'imaginaire ?

Geneviève : J’espère que nous arriverons à publier des titres intemporels, dont on parlera et se souviendra, des romans qui feront du bien à leurs lecteurs, qui deviendront des classiques et rayonneront hors du Québec. Handmaid’s Tale a été écrit par une Canadienne et semble désormais presque prophétique… Peut-être que la prochaine Pythie sera Québécoise et publiée chez VLB imaginaire! Excusez mon ambition, c’est ce que ça fait de travailler avec Mathieu : sa propension à rêver est d’autant plus contagieuse qu’il finit toujours par réaliser ses visions! Hihihihi!

Mathieu : D’abord, on aimerait que VLB imaginaire brasse un peu le milieu éditorial local et montre qu’il est possible de développer une ligne éditoriale ambitieuse en imaginaire au Québec. Ensuite, on aimerait que la collection serve à développer un pôle montréalais pour le travail éditorial des genres de l’imaginaire francophones : créer des ponts avec les milieux francophones étrangers, avec les milieux anglophones nord-américains, etc. Si on comparait avec une autre industrie qui s’est très bien développée ici, ce serait le milieu du jeu vidéo : Montréal en est devenu un hub international, avec la présence de plus de 140 studios, dont ceux d’Ubisoft, de Stadia, d’Eidos, de WB Games, etc. Il y aurait sûrement quelque chose à développer ici en science-fiction et en fantasy, vous ne croyez pas ? (rires)

Propos recueillis par Jérôme Vincent.

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