Brian Evenson est un auteur américain qui se faisait rare en France. Il revient sur le devant de la scène en ce début d’année avec la publication de 2 livres : L’Antre, une novella de 110 pages, publiée chez Quidam et Immobilité, un roman de 272 pages publié dans la nouvelle collection Rivages/Imaginaire chez Rivages. Ces deux livres se déroulent dans un monde post-apocalyptique semblable.
Noir c’est noir
Immobilité est un road trip très sombre. Il se déroule dans un futur indéterminé, dans lequel la terre a été transformée en champ de ruines stérile. Le monde a été ravagé par une catastrophe provoquée par l’humanité, le Kollaps, dont on ne sait pas grand-chose. Tout a été détruit, le taux de radiation a rendu l’air néfaste pour les rares survivants. Ceux-ci doivent porter des combinaisons pour sortir à l’extérieur. Les survivants vivent retranchés en communauté dans des ruines enterrées. Le personnage principal, Josef Horkaï, s’éveille après un stockage cryogénique qui aura duré 30 ans, et découvre ce monde en même temps que le lecteur. Il n’a aucun souvenir de sa vie passée ni du monde dans lequel il reprend conscience. C’est sombre, le monde est cruel, le personnage principal ignore tout, ce qui contribue à laisser le lecteur dans le flou. Brian Evenson dissémine les informations peu à peu, entretenant le doute et incitant le lecteur à se mettre à la place de Josef Horkaï.
Une quête d’identité
Si Josef Horkaï ignore tout du monde qui l’entoure, c’est parce qu’il a perdu la mémoire. Il est entouré de trois hommes qui ne lui expliquent pas grand-chose. Il se découvre paraplégique, dans un monde ravagé, et réveillé pour accomplir une mission que lui seul peut faire. Il doit aller dans un bâtiment à plusieurs kilomètres de là pour voler un cylindre d'une importance capitale et le ramener. Cela va entrainer beaucoup de choix pour Horkaï, qui ne sait pas s’il doit faire confiance à ceux qui l’ont réveillé, s’il a la possibilité de ne pas accepter, ni ce qu’est ce cylindre. Il se pose des questions sur son identité, sur son passé, sur la particularité qui le caractérise. Ce questionnement continu va être le centre du récit et constituer le sel du roman. Ces interrogations stimulent l’imagination du lecteur d’autant plus que l’auteur limite les descriptions, et se concentre sur les différents protagonistes, tous plus étranges les uns que les autres.
Brian Evenson utilise dans son roman deux thèmes principaux : un monde post-apocalyptique, et le personnage principal amnésique. Ils lui servent à produire un effet de dépouillement, autant dans le peu de choses que l’on sait du monde, que pour la définition de son personnage. L’histoire est brève, nerveuse, l’écriture est resserrée, à l’image du récit. Tout est fait pour aller vers les questionnements d’Horkaï et à travers lui de l’humain.
Immobilité est un roman à l’ambiance sombre qui présente un monde désolé. Il est brillamment écrit et pose des interrogations sur la nature de l’humanité. Il présente un récit sans espoir, à la fois déroutant et fascinant.