Je voudrais revenir là dessus
Le problème ne serait donc pas celui de la non acceptation de la science, mais uniquement celui du "jargon, qu'il soit scientifique ou autre.Lem a écrit :Chez Rinaldi, on voit presque la pensée disjoncter à chaque terme scientifique : le jeu de mot minable sur les radicaux libres, le coup du bac à légume pour conserver l'adn, etc. Pour lui, c'est juste du jargon. Il ne se pose pas la question de ce que ça veut dire, de la valeur que ça peut avoir, de l'intérêt que ça présente dans le roman : il dit non, non, non, pas de la littérature, à chaque occurrence. (Il a d'ailleurs la même attitude-réflexe devant les développements philosophiques, pour lesquels Houellebecq a mis au point sa "plate forme", sa forme dénuée de tout embellissement, de toute métaphore ; il écrit là comme dans un rapport du cnrs parce que tout son projet littéraire implique ce dénuement.
Reprenons Rinaldi.
Est-ce si différent deRinaldi a écrit :.. Il n'y a rien qui soit plus aride, plus pauvret et plus obscur en même temps... L'ensemble où se mêlent en apparence pour nous bluffer informatique, génétique, clonage, collagène, ADN... La sexualité, assez souvent réduite aux services de bouche qui semblent obséder l'auteur, est décrite dans un argot de potache, donnant l'occasion de vérifier à nouveau, que l'on n'est pas cru en raison du vocabulaire que l'on utilise...
ou même, intra-muros, deRaphaëlle Rérolle, dans le Monde a écrit :... Le narrateur des Fleurs de Troie, prospecteur minier dans les ceintures d'astéroïdes, s'est fait implanter un "entrelacs de cellules neurales indifférenciées, organisées en réseau de reconnaissance de forme". Pas de panique : ce magma de notions alambiquées n'a d'autre vocation que de créer un climat de mystère...
... Le charabia pseudo-scientifique est généralement distillé avec mesure, de manière à envelopper les protagonistes d'un simple voile d'étrangeté,...
ou dePatrice a écrit :Certes, certains auteurs emploient du vocabulaire technologique, mais toujours à bon escient, et toujours de façon mesurée. Seule exception de ce point de vue (et encore!), le texte de Jean-Claude qui me semble le plus "anglo-saxon" dans le ton.
Bref, pas de NSO, par exemple (ni se SO tout court). Pas de "La Physique quantique pour les nuls". Pas de "je te balance mes cours de chimie à la figure".
Je rajouterais, pour le fun,Patrice a écrit :Ca ne me dérange pas qu'on parle de science, mais...C'est une phrase de Jean-Claude, dans ladite anthologie.les cellules injectées se plaquent sur la couche externe du cortex virtuel primaire et stimulent la croissance d'axones à partir de motoneurones endogènes. le réseau se duplique au niveau des neurones et renforce les fonctions cérébrales locales.
Sur le coup ça m'a rappelé Vision Aveugle de Peter Watts, qui justement accumule se genre de charabia.
.Nathrakh a écrit :S’y accumulent des détails technologiques sans intérêt narratif ou, plus grave, poétique, ce qui caractérise ce qu’on peut appeler la « science-fiction d’ingénieur »
Alors, problème de vocabulaire ? Pas seulement, bien sûr, mais sans doute un peu. Voire beaucoup. Un manque cruel du minimum de culture scientifique qui permet de faire la différence entre une langage structuré et un charabia. Qui permet de comprendre que des "détails technologiques" puissent avoir un intérêt narratif parce que, justement, ce ne sont pas des détails.
J'en profite pour rappeler une des définition de charabia : "Langage parlé ou écrit qui est ou qui semble incompréhensible parce qu'il est inconnu, incorrect ou hétéroclite". Pour Rinaldi, c'est inconnu et hétéroclite, donc incorrect.
Maintenant, il est certain que, si au moment ou le héros s'attaque à la base secrète des végans à l'aide de son mégapulsatron, il faut commencer par expliquer ce qu'est un mégapulsatron, on va perdre pas mal de sense of wonder...
Je ne crois donc pas à un refus de la science, et, partant, de la science-fiction, mais simplement à une incompréhension de son langage.