Du sense of wonder à la SF métaphysique

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MF
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Message par MF » lun. nov. 30, 2009 12:31 pm

@Lem
Je voudrais revenir là dessus
Lem a écrit :Chez Rinaldi, on voit presque la pensée disjoncter à chaque terme scientifique : le jeu de mot minable sur les radicaux libres, le coup du bac à légume pour conserver l'adn, etc. Pour lui, c'est juste du jargon. Il ne se pose pas la question de ce que ça veut dire, de la valeur que ça peut avoir, de l'intérêt que ça présente dans le roman : il dit non, non, non, pas de la littérature, à chaque occurrence. (Il a d'ailleurs la même attitude-réflexe devant les développements philosophiques, pour lesquels Houellebecq a mis au point sa "plate forme", sa forme dénuée de tout embellissement, de toute métaphore ; il écrit là comme dans un rapport du cnrs parce que tout son projet littéraire implique ce dénuement.
Le problème ne serait donc pas celui de la non acceptation de la science, mais uniquement celui du "jargon, qu'il soit scientifique ou autre.

Reprenons Rinaldi.
Rinaldi a écrit :.. Il n'y a rien qui soit plus aride, plus pauvret et plus obscur en même temps... L'ensemble où se mêlent en apparence pour nous bluffer informatique, génétique, clonage, collagène, ADN... La sexualité, assez souvent réduite aux services de bouche qui semblent obséder l'auteur, est décrite dans un argot de potache, donnant l'occasion de vérifier à nouveau, que l'on n'est pas cru en raison du vocabulaire que l'on utilise...
Est-ce si différent de
Raphaëlle Rérolle, dans le Monde a écrit :... Le narrateur des Fleurs de Troie, prospecteur minier dans les ceintures d'astéroïdes, s'est fait implanter un "entrelacs de cellules neurales indifférenciées, organisées en réseau de reconnaissance de forme". Pas de panique : ce magma de notions alambiquées n'a d'autre vocation que de créer un climat de mystère...
... Le charabia pseudo-scientifique est généralement distillé avec mesure, de manière à envelopper les protagonistes d'un simple voile d'étrangeté,...
ou même, intra-muros, de
Patrice a écrit :Certes, certains auteurs emploient du vocabulaire technologique, mais toujours à bon escient, et toujours de façon mesurée. Seule exception de ce point de vue (et encore!), le texte de Jean-Claude qui me semble le plus "anglo-saxon" dans le ton.
Bref, pas de NSO, par exemple (ni se SO tout court). Pas de "La Physique quantique pour les nuls". Pas de "je te balance mes cours de chimie à la figure".
ou de
Patrice a écrit :Ca ne me dérange pas qu'on parle de science, mais...
les cellules injectées se plaquent sur la couche externe du cortex virtuel primaire et stimulent la croissance d'axones à partir de motoneurones endogènes. le réseau se duplique au niveau des neurones et renforce les fonctions cérébrales locales.
C'est une phrase de Jean-Claude, dans ladite anthologie.
Sur le coup ça m'a rappelé Vision Aveugle de Peter Watts, qui justement accumule se genre de charabia.
Je rajouterais, pour le fun,
Nathrakh a écrit :S’y accumulent des détails technologiques sans intérêt narratif ou, plus grave, poétique, ce qui caractérise ce qu’on peut appeler la « science-fiction d’ingénieur »
.

Alors, problème de vocabulaire ? Pas seulement, bien sûr, mais sans doute un peu. Voire beaucoup. Un manque cruel du minimum de culture scientifique qui permet de faire la différence entre une langage structuré et un charabia. Qui permet de comprendre que des "détails technologiques" puissent avoir un intérêt narratif parce que, justement, ce ne sont pas des détails.

J'en profite pour rappeler une des définition de charabia : "Langage parlé ou écrit qui est ou qui semble incompréhensible parce qu'il est inconnu, incorrect ou hétéroclite". Pour Rinaldi, c'est inconnu et hétéroclite, donc incorrect.

Maintenant, il est certain que, si au moment ou le héros s'attaque à la base secrète des végans à l'aide de son mégapulsatron, il faut commencer par expliquer ce qu'est un mégapulsatron, on va perdre pas mal de sense of wonder...

Je ne crois donc pas à un refus de la science, et, partant, de la science-fiction, mais simplement à une incompréhension de son langage.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » lun. nov. 30, 2009 12:39 pm

Tiens !
Coïncidence, en ce moment même (lundi, 10 h 30), Michel Butor est invité sur France-Culture ; on parle du Nouveau Roman et de sa façon d'aborder les descriptions (pas de métaphores, pas d'adjectifs autant que possible pour éviter l'anthropomorphisation de ce qui est décrit), on parle de Robbe-Grillet aussi, de sa formation scientifique, de sa façon de théoriser dans ses textes, de l'étrangeté des Gommes
Comme le flirt NR/SF semble naturel avec un demi-siècle de recul.

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Lensman
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Message par Lensman » lun. nov. 30, 2009 12:49 pm

Lem a écrit :Tiens !
Coïncidence, en ce moment même (lundi, 10 h 30), Michel Butor est invité sur France-Culture ; on parle du Nouveau Roman et de sa façon d'aborder les descriptions (pas de métaphores, pas d'adjectifs autant que possible pour éviter l'anthropomorphisation de ce qui est décrit), on parle de Robbe-Grillet aussi, de sa formation scientifique, de sa façon de théoriser dans ses textes, de l'étrangeté des Gommes
Comme le flirt NR/SF semble naturel avec un demi-siècle de recul.
... et hier soir, chez le très bon bouquiniste tout près de chez moi, j'ai acheté 3 euros le "Cahier du Sud" n°317 (1953), "nouveaux aspects d'une mythologie moderne" (avec Spriel, Butor, Carrouges...). En double ou en triple, chez moi? Il faut que je vérifie..
C'était il y a plus d'un demi-siècle...
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Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » lun. nov. 30, 2009 12:52 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Shalmaneser a écrit :Pourquoi tient-on tellement à ce que la SF soit considérée comme une culture "underground" ?
Donc, selon toi, tout ce qui ne rentre pas dans la culture officielle est "underground" ?

Genre les mangas ou les films d'horreur ?
Justement, non. Je pense que l'idée même d'"underground" est illusoire, la plupart du temps.

En revanche, je pense que je vois maintenant ce que veut dire Oncle : il n'y aurait aucun rapport entre ces "camps", et pour ce qui nous concerne, entre les tenants de la SF et ceux de la littérature générale... ou uniquement des rapports marginaux.
Les contre-exemples déjà énumérés sont si nombreux qu'on peut tout de même s'interroger sur le caractère exceptionnel de ces liens, non ? D'autant qu'à mon sens, ces liens sont moins évidents du point de vue du lectorat (notamment dans le milieu enseignant, où les lecteurs de SF sont rares) que du point de vue des oeuvres elles-mêmes : allons, Delany, Brunner, Simmons, Gibson, Colin, Calvo, tous ces auteurs qui usent sciemment des ressorts de la littérature, peut-on vraiment les considérer comme marginaux ?

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Message par Lensman » lun. nov. 30, 2009 1:00 pm

Shalmaneser a écrit :
Roland C. Wagner a écrit :
En revanche, je pense que je vois maintenant ce que veut dire Oncle : il n'y aurait aucun rapport entre ces "camps", et pour ce qui nous concerne, entre les tenants de la SF et ceux de la littérature générale... ou uniquement des rapports marginaux.
Les contre-exemples déjà énumérés sont si nombreux qu'on peut tout de même s'interroger sur le caractère exceptionnel de ces liens, non ? D'autant qu'à mon sens, ces liens sont moins évidents du point de vue du lectorat (notamment dans le milieu enseignant, où les lecteurs de SF sont rares) que du point de vue des oeuvres elles-mêmes : allons, Delany, Brunner, Simmons, Gibson, Colin, Calvo, tous ces auteurs qui usent sciemment des ressorts de la littérature, peut-on vraiment les considérer comme marginaux ?
Je n'emploierais pas le terme "marginal" pour qualifier ces liens, mais je dirais qu'il y a des "champs" qui sont différents; Les ressorts de la littérature sont évidemment utilisés, parfois avec un grand raffinement, en SF (il n'y a pas à s'en plaindre, et c'est à encourager, si tant est que l'entreprise d'"encouragement" ait grand sens, et c'est là que je diffèrerais sans doute avec toi et quelques autres amis), mais ça ne me semble pas un des intérêts fondamentaux de la SF (là aussi, les appréciations vont diverger en degré, mais je suis persuadé de ça...)
Bon, je vous abandonne un bon moment!
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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » lun. nov. 30, 2009 1:17 pm

Shalmaneser a écrit :Delany, Brunner, Simmons, Gibson, Colin, Calvo, tous ces auteurs qui usent sciemment des ressorts de la littérature, peut-on vraiment les considérer comme marginaux ?
Tu aurais pu aussi citer Heinlein, Spinrad, Silverberg, Disch, Jouanne, Banks, Leiber, Lovecraft, Sturgeon, Dunyach, Sterling, Shepard, etc. Tu aurais même pu me citer, c'est dire.
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Message par Roland C. Wagner » lun. nov. 30, 2009 1:19 pm

Lensman a écrit :ça ne me semble pas un des intérêts fondamentaux de la SF
Toutafé d'accord.

La bonne science-fiction peut être aussi de la "bonne" littérature, mais le second point est en option.
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Message par Shalmaneser » lun. nov. 30, 2009 1:27 pm

Lensman a écrit : Je n'emploierais pas le terme "marginal" pour qualifier ces liens, mais je dirais qu'il y a des "champs" qui sont différents; Les ressorts de la littérature sont évidemment utilisés, parfois avec un grand raffinement, en SF (il n'y a pas à s'en plaindre, et c'est à encourager, si tant est que l'entreprise d'"encouragement" ait grand sens, et c'est là que je diffèrerais sans doute avec toi et quelques autres amis), mais ça ne me semble pas un des intérêts fondamentaux de la SF (là aussi, les appréciations vont diverger en degré, mais je suis persuadé de ça...)
Bon, je vous abandonne un bon moment!
Oncle Joe
Ah, mais il ne s'agit pas vraiment d'"encourager" cette pratique d'écriture, simplement d'en faire le constat, de l'explorer, au sein même de la littérature SF. Pour citer un autre exemple, que je commence à connaître un peu : Iain M. Banks (tiens, encore un auteur de SF qui écrit par ailleurs des textes de "littérature générale") place justement la langue au coeur d'un dispositif narratif à grande échelle. Le "marain", la langue officielle de la Culture, est abordé sous un angle largement théorique, mais à travers elle, c'est peut-être la langue dans son acception littéraire qu'explore Banks : le marain a pour principale caractéristique de parvenir, par sa complexité lexicale et syntaxique, à réduire au minimum la part d'indicible dans les affects humains. Et curieusement, cette langue, la plus perfectionnée que l'on puisse imaginer, est présentée comme une langue poétique, une langue du jeu. Dès Consider Phlebas (Une forme de guerre) et The Player of games (L'Homme des jeux), cet aspect de la Culture fait l'objet de développements assez importants. La démarche de Banks est ici tout à fait spécifique à la SF, mais elle n'en demeure pas moins en lien avec certaines problématiques littéraires.
Mais tout dépend si l'on considère la SF comme un branche de la littérature, ou comme une branche de la science, effectivement...
Modifié en dernier par Shalmaneser le lun. nov. 30, 2009 3:36 pm, modifié 3 fois.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » lun. nov. 30, 2009 1:43 pm

Shalmaneser a écrit :Mais tout dépend si l'on considère la SF comme un branche de la littérature, ou comme une branche de la science, effectivement...[/i]
Les deux, mon général.
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Message par Lem » lun. nov. 30, 2009 1:49 pm

MF a écrit :Je ne crois donc pas à un refus de la science, et, partant, de la science-fiction, mais simplement à une incompréhension de son langage.
Je ne suis pas sûr que la distinction doive passer là mais tu as, de toute façon, raison d'y revenir car c'est un point important.
Il faut s'entendre sur ce qu'on appelle "refus" de la science.
En tant que société, la France n'a pas refusé la science, ni même la technoscience. Au contraire : c'est une de ses sources de puissance. Dans la préface d'Escale, j'avais souligné à quel point le déni de la sf était paradoxal pour un pays qui
possède de nombreux domaines d'excellence : espace (Ariane, Spot, mission Cassini), transports (TGV, Airbus), médecine et génétique (découverte du virus du sida, projet Génôme humain), physique fondamentale (les Nobel de Charpak et Cohen-Tannoudji), mathématiques (médaille Fields de Yoccoz), télécoms, énergie, agroalimentaire, etc. Qui plus est, l'intérêt du public est fort et constant. Il se lit, notamment, dans le nombre, la qualité et l'audience des revues de vulgarisation ou des collections spécialisées et la popularité de figures comme Hubert Reeves, Michel Serres ou Pierre-Gilles de Gennes. Au fond, quoi de plus normal ? La France de 1998 est massivement productrice de science et de technologie. Cela signifie qu'une partie importante de la population bénéficie des retombées concrètes du domaine, ne serait-ce que parce que celui-ci crée, directement ou indirectement, de l'activité professionnelle.
S'il y eut rejet après la première guerre mondiale, ce ne fut pas celui de la science et de la technologie comme pratiques mais comme faits de culture. Toujours dans la préface d'Escales, j'avais cité comme exemple un extrait de Civilisation de George Duhamel, livre écrit en 1919 après que son auteur ait servi comme infirmier dans les tranchées :
Avant la guerre, j'étais préparateur dans un laboratoire industriel. C'était une bonne petite place ; mais je vous assure que si j'ai le triste privilège de sortir vivant de cette catastrophe, je ne retournerai pas là-dedans. La campagne ! La pure cambrousse ! Quelque part bien loin de toutes les sales usines, un endroit où je n'entende plus jamais grogner vos aéroplanes et toutes vos sales machines qui m'amusaient naguère, quand je ne comprenais rien à rien, mais qui me font horreur maintenant parce qu'elles sont l'esprit même de cette guerre, le principe et la raison de cette guerre.
Le phénomène n'est d'ailleurs pas spécifiquement français mais plus largement européen. Le futurisme, par exemple, dont on parle rarement quand on étudie la sf ce qui est bizarre, produit l'essentiel de ses œuvres et de ses théories de 1900 à 1915 ; après la guerre, il ne disparaît pas mais végète, retombe lentement, éclipsé par Dada et le Surréalisme. Et ça me semble tout à fait normal ; comment la littérature, l'art en général, pourraient-ils ne pas enregistrer que quelque chose a changé. La technoscience existe évidemment après 1918. Elle poursuit son travail. Mais l'ouverture intellectuelle autour de son incription dans la culture, le fait qu'elle fasse ou puisse faire partie du bagage de l'honnête homme, qu'elle puisse informer les formes esthétiques, qu'on puisse importer d'elle des éléments de langage, de logique, voire des sujets d'œuvre – ceci n'est plus possible. La seule occurrence observable, c'est désormais celle de la catastrophe – c'est aussi l'une des raisons pour lesquelles les seules œuvres de sf qui ont été légitimées au XXème siècle ont été des horreurs scientifiques : Le meilleur des mondes, Ravage, La planète des singes, Malevil. C'est devenu un tropisme de la réception et il a duré longtemps… longtemps… Considère par exemple la façon dont a été lue Les particules élémentaires. Quand les critiques sont parvenus à saisir la problématique scientifique du texte (car beaucoup n'y sont pas parvenus et ont préféré se concentrer sur le sexe, ce que Houellebecq avait bien cherché), quand ils ont compris que le livre racontait le passage à la transhumanité par modification génétique, il y a eu dans presque tous les cas un arc-réflexe : génétique = eugéniste = fasciste. C'est le même genre de disjonction intellectuelle qui se produit, à une échelle plus réduite, chez Rinaldi : dès qu'il y a science (vocabulaire ou problématique, peu importe), ce n'est plus de la culture et les réflexes, les clichés parfois vieux d'un quasi-siècle tiennent lieu de pensée.

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Message par Erion » lun. nov. 30, 2009 1:56 pm

Lem a écrit :Le futurisme, par exemple, dont on parle rarement quand on étudie la sf ce qui est bizarre, produit l'essentiel de ses œuvres et de ses théories de 1900 à 1915 ; après la guerre, il ne disparaît pas mais végète, retombe lentement, éclipsé par Dada et le Surréalisme.
C'est vrai, alors qu'il existe un roman de SF qui parle entièrement du futurisme marinettien.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/

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Message par Roland C. Wagner » lun. nov. 30, 2009 2:13 pm

Erion a écrit :C'est vrai, alors qu'il existe un roman de SF qui parle entièrement du futurisme marinettien.
:lol: :wink:
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Sand
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Message par Sand » lun. nov. 30, 2009 2:21 pm

Lem a écrit : En tant que société, la France n'a pas refusé la science, ni même la technoscience.
En fait si, enfin, plus ou moins, si on se fit à la préface de Jean-Charles dans ses "perles" d'écoliers (la référence qui tue, je sais, je sais ...^^)

Il y explique assez clairement que les maths et les sciences, c'était zéro prestige à son époque (je ne rappelle plus la date exacte, c'était pré-68, je m'en souviens, mais à part ça...), les études de choix pour exercer des postes à responsabilité restant le latin, le grec, les lettres d'une façon générale.

Comme il y avait d'irréductibles scientifiques et ingénieurs, dans leurs branches, des réussites ont quand même été engrangées. Mais pas (ou très peu) de scientifiques en politique, dans le journalisme grand public, à la télévision...

La science n'a pas été déniée au sens propre, mais elle a été isolée. Les scientifiques sont des experts. Ils sont très respectés, mais dans leur rôle d'expert. Gare à eux s'ils s'aventurent à émettre une opinion politique, une position éthique, en dehors de leur domaine de compétence : ils sortent de leur pré carré, leur légitimité à s'exprimer est tout de suite contestée... alors que les chanteurs, les sportifs, les écrivains, eux, peuvent faire connaitre leurs opinions sans (trop) être accusés de se mêler de ce qui ne les regarde pas.

Bref, la France a mis ses scientifiques dans des tours d'ivoire.

D'où l'isolement de la SF ???

Lem

Message par Lem » lun. nov. 30, 2009 2:53 pm

Sand a écrit :La science n'a pas été déniée au sens propre, mais elle a été isolée. Les scientifiques sont des experts. Ils sont très respectés, mais dans leur rôle d'expert. Gare à eux s'ils s'aventurent à émettre une opinion politique, une position éthique, en dehors de leur domaine de compétence : ils sortent de leur pré carré, leur légitimité à s'exprimer est tout de suite contestée...
Effectivement. C'est ce que j'expliquais plus haut :
le pouvoir de prescription des scientifiques sur l'histoire culturelle fut au XXème siècle (en France), à peu près nul. C'est justement l'un des effets du tournant de 14-18. Les scientifiques n'ont jamais fait partie des élites germanopratines. Leur domaine d'expertise fut reconnu mais strictement confiné – alors que le droit des littéraires à s'exprimer sur tous les sujets n'a jamais été contesté.
Sand a écrit :D'où l'isolement de la SF ?
C'est une des explications classiques, comme l'antiaméricanisme ou la mauvaise réputation littéraire.

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Message par bormandg » lun. nov. 30, 2009 3:20 pm

Lem a écrit :
Sand a écrit :La science n'a pas été déniée au sens propre, mais elle a été isolée. Les scientifiques sont des experts. Ils sont très respectés, mais dans leur rôle d'expert. Gare à eux s'ils s'aventurent à émettre une opinion politique, une position éthique, en dehors de leur domaine de compétence : ils sortent de leur pré carré, leur légitimité à s'exprimer est tout de suite contestée...
Effectivement. C'est ce que j'expliquais plus haut :
le pouvoir de prescription des scientifiques sur l'histoire culturelle fut au XXème siècle (en France), à peu près nul. C'est justement l'un des effets du tournant de 14-18. Les scientifiques n'ont jamais fait partie des élites germanopratines. Leur domaine d'expertise fut reconnu mais strictement confiné – alors que le droit des littéraires à s'exprimer sur tous les sujets n'a jamais été contesté.
Sand a écrit :D'où l'isolement de la SF ?
C'est une des explications classiques, comme l'antiaméricanisme ou la mauvaise réputation littéraire.
Et elles expliquent partiellement un fait qui, AMA, n'a pas d'explication globale, et prétendre chercher la goutte d'eau qui a mis le feu aux poudres, la cerise sur le gateau ou le sommet de l'iceberg pour en faire L' explication globale et définitive me parait vain. :P
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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