
Du sense of wonder à la SF métaphysique
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- dracosolis
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Allez, cadeau.
Le texte intégral du papier fondateur de MR, Du merveilleux-scientifique et de son action sur l'intelligence du progrès. J'agrandis un peu le corps parce que les lignes de plus de cent signes, c'est inhumain.
Le merveilleux-scientifique et La force mystérieuse de J.-H. Rosny aîné (critique approfondie de Rosny dans le cadre de la théorie), in La vie, 1914
Depuis Sinbad (sur le m-s, écrit à la demande de Jean Ray, in L’Ami des livres, 1923
Les contes du whisky de Jean Ray (critique), in Vient de paraître, 1925
Anticipations (sur le rapport du m-s au futur), in Paris-Soir, 1925
Gaston Leroux (hommage posthume), in Chronique de la Société des Gens de Lettres de France, 1927
Que devons-nous à Jules Verne ? (où MR revoit un peu sa position sur JV), L’Intransigeant, 1928
Le roman d’hypothèse (reformulation et condensation de la théorie), in ABC, 1928
Le texte intégral du papier fondateur de MR, Du merveilleux-scientifique et de son action sur l'intelligence du progrès. J'agrandis un peu le corps parce que les lignes de plus de cent signes, c'est inhumain.
Autres articles intéressants :S’il n’est pas prématuré de discuter des choses à la minute où elles achèvent seulement d’affirmer leur existence, le roman merveilleux-scientifique est mûr pour l’étude critique. Produit fatal d’une époque où la science prédomine sans que s’éteigne pourtant notre éternel besoin de fantaisie c’est bien un genre nouveau qui vient de s’épanouir et dont L’île du docteur Moreau de Wells et Le peuple de pôle de Derennes peuvent nous fournir deux exemples assez typiques (le docteur Moreau étant un chirurgien qui fabrique des hommes avec des animaux, et le peuple du Pôle étant une tribu d’être intelligents et civilisés, provenant de la même origine antédiluvienne que nous, mais qui seraient demeurés sauriens pendant que nous devenions mammifères).
Je dis bien que c’est un genre nouveau. Jusqu’à Wells, on en pouvait douter. En effet, avant l’auteur de La guerre des mondes, les rares ouvriers de ce qu’on devait nommer plus tard le merveilleux-scientifique ne se sont livrés à son œuvre que de loin en loin, occasionnellement et, semble-t-il, par jeu. Tous l’ont traité comme une fantaisie sans lendemain ; aucun ne s’y est spécialisé ; la plupart l’ont combiné avec d’autres éléments : Cyrano de Bergerac en fait un support d’utopies ; Swift l’utilise comme armature à dresser des satires ; de nos jours, Flammarion lui demande de concrétiser un peu certaines métaphysiques trop abstraites pour le lecteur moyen ; quant à Edmond About, il le prend à l’envers, le tourne au comique et fait ainsi, avant la lettre, la parodie d’un genre à venir. La série de ces productions bâtardes, mixtes, est d’ailleurs loin d’être close ; les utopistes qui ont “besoin d’un monde” possèdent là un moyen de dépaysement trop précieux pour l’abandonner, et les satiriques ne sauraient se priver des ressources que leur offre un tel procédé d’allégorie et d’allusion.
Edgar Poe, avec deux contes seulement, La vérité sur le cas de M. Valdemar et Les souvenirs de M. Auguste Bedloe, fonda le roman merveilleux-scientifique pur, comme il instaura le roman policier avec trois autres nouvelles prototypes, mais celles-là si complètes et synthétiques, si absolument définitives, qu’en cette matière, il ne pouvait susciter que des imitateurs et pas un seul disciple. Par contre, dans le monde merveilleux-scientifique, il eut des apôtres célèbres puisque Villiers de l’Isle-Adam écrivit L’Eve moderne, Stevenson Le docteur Jeckyll et Mr Hyde et puisqu’enfin, voici H. G. Wells.
Avec ce dernier, le genre qui nous occupe se déploie dans toute son ampleur intégrale, et ce mot composé, dont les hommes se prennent à le désigner, consacre sa vie et certifie son être à la manière d’un baptème.
Mais qu’on ne s’y trompe pas. Si la maîtrise de Wells à imaginer et à mettre en valeur des thèmes de merveilleux-scientifique a fait la gloire du romancier anglais, tous ses livres sont loin d’en être autant de types. Je ne retiens comme tels que cinq romans et quelques nouvelles. Sans parler des vaticinations socialistes et de certaines œuvres d’un modèle assez quelconque, il y a en effet quelques écrits de Wells où le merveilleux-scientifique n’est qu’un prétexte à philosopher, un facteur secondaire de l’intrigue, et que, pour cela, nous récuserons. Exemple : Place aux géants. (Ce n’est pas, remarquons-le, que dans les cinq romans et nouvelles retenus, Wells se prive de satires ou d’enseignements. Au contraire. Mais les hautes leçons qu’il nous y donne se dégagent si naturellement de l’affabulation m-s q’il n’a même pas besoin de les exprimer, et que, d’un bout à l’autre du roman, il poursuit sans une digression , sans une révélation de sous-entendu, l’histoire de la découverte prodigieuse ou de l’événement extraordinaire. Exemple, cet apologue formidable : L’île du docteur Moreau. Il y a aussi d’autres ouvrages – fort curieux du reste, et qui font de Wells un véritable novateur – où ce n’est plus la science, mais la seule logique (considérée non comme science mais comme habitude de l’esprit) qui vient se mêler au merveilleux. Je les écarte aussi et propose d’appliquer à ces fables (exemple : La merveilleux visite)l’épithète de merveilleux-logique, réservant celle de merveilleux-scientifique pour celles qui nous présentent l’aventure d’une science poussée jusqu’à la merveille ou d’une merveille envisagée scientifiquement.
Aussi bien, voilà une définition, si vague soit-elle, et nous pouvons nous en contenter provisoirement, en attendant qu’une autre, plus concise, se dégage d’un examen plus approfondi.
Quelle est la génèse d’un roman m-s ? Où prendre des sujets qui se puissent traiter ? Quelle est la technique de cet art récent ? Il est captivant d’analyser, œuvre par œuvre, toute la production des auteurs précités, de démêler les disciplines particulières qui ont réglé leur fantaisie dans l’élaboration des données et dans la poursuite des développements ; puis d’en tirer les lois d’une méthodologie générale. C’est là une rude épreuve, à laquelle résisteraient bien peu de genres romanesques. Le nôtre en sort triomphalement. Cette vivisection nous le montre établi sur une ossature puissante qui est la raison elle-même ; elle nous le révèle comme un organisme tissu de sagesse et d’ingéniosité. C’est en effet le mode de la littérature contemporaine qui confine le plus à la philosophie – qui est la philosophie mise en scène, de la logique dramatisée. Né de la science et du raisonnement, il s’efforce de devancer l’une avec l’autre, et il nous apparaît, enfin, avec ses tendances noblement instructives et moralisatrices, avec ses effets éducateurs médiats ou immédiats, comme une des plus belles créations de l’esprit humain, une très grande œuvre d’art qu’une illusion d’optique peut seule faire sembler petite à ceux qui en sont trop distants, et qui ne saurait paraître enfantine qu’aux intelligences puériles.
Il nous est impossible ici de suivre chaque auteur à travers chacun de ses romans. Je tacherais donc d’indiquer les généralités principales qu’une pareille inspection fait obtenir en dernière analyse, et dont l’ensemble constituerait presque une sorte de manuel du romancier m-s (assez ridicule d’ailleurs) s’il ne fallait pour devenir émule de Poe je ne sais quelle chance ou quel instinct qui arrête la pensée en quête à l’endroit du trésor dans le labyrinthe, où la logique ne peut que la guider sans lui dire : « c’est là. »
Si nous considérons l’univers comme partagé en trois divisions correspondant aux trois degrés classiques d’assentiment, il y a trois sortes de choses : celles que nous ignorons, celles dont nous doutons, et celles que nous savons. Les deux premières catégories – dont le champ se rétrécit à mesure que notre science se développe, mais qui sans doute existeront toujours parce que nous ne saurons jamais tout, et dont le champ, du reste, nous paraît sans cesse grandir parce que la science a moins pour effet de nous renseigner sur la nature des choses que d’en découvrir de nouvelles au sujet de quoi elle ne peut rien nous apprendre – les deux premières catégories, dis-je, forment le domaine du merveilleux-scientifique. C’est là, dans le monde des choses ignorées ou douteuses, qu’il doit puiser la substance de ses diverses réalisations, et non pas dans le monde des choses connues et certaines. Car la science est incapable de nous montrer nulle part nulle merveille, au sens propre du mot. Loin de là, elle est la grande tueuse de mircles. Et il n’y a de merveille que dans le mystère, dans l’inexpliqué. Tout prodige cesse d’en être un aussitôt que nous pénétrons ses causes réelles et sa véritable nature, dès qu’il passe du ressort de l’ignorance ou de celui du doute dans celui de la science.
Nous voilà donc forcés de chercher nos thèmes romanesques soit dans l’inconnu, soit dans l’incertain. Mais puisqu’il s’agit d’un merveilleux scientifique, comment pourrons-nous concilier ces exigences, d’aspect contradictoire, qui veulent que nous prenions nos sujets à la fois dans la science et dans ce qui n’est pas la science ? Nous agirons exactement comme fait le savant qui s’attaque aux problèmes de l’inconnu ; nous appliquerons à l’inconnu et au douteux les méthodes de l’investigation scientifique. Mais alors, en quoi nos solutions imaginaires différeront-elles des véritables solutions de la science ? En d’autres termes, puisque nous savons pertinemment ne pas faire de vraies découvertes, qu’est-ce qui distingue le raisonnement m-s du raisonnement scientifique ? C’est l’introduction volontaire, dans la chaîne des propositions, d’un ou de plusieurs éléments vicieux de nature à déterminer, par la suite, l’apparition de l’être, ou de l’objet, ou du fait merveilleux (c’est à dire qui nous semble actuellement merveilleux. Car l’avenir peut démontrer que l’élément supposé vicieux ne l’était nullement et que notre merveilleux scientifique était purement et simplement de la science, involontaire comme la prose de M. Jourdain. L’avancement du savoir peut démontrer que notre sophisme n’en était pas un mais, pour la minute où nous écrivons, c’en est un. Observons, en passant, que l’intérêt passionné, la vraisemblance inquiétante du récit est en raison directe du petit nombre d’éléments vicieux qu’on y insinue. Moins il y a de faussetés, plus la logique sauvegardée prête à l’œuvre cet air de vérité si émouvant. Aussi la plupart des romans m-s se bornent-ils à falsifier une seule des lois naturelles et à nous la montrer, ainsi modifiée, dans ses rapports avec les autres lois restées indemnes.)
Ce procédé général pour construire la charpente d’une histoire revêt des formes infiniment variées. Exemple : nous pouvons admettre comme certitudes des hypothèses scientifiques et en déduire les conséquences de droit (habitation de Mars acceptée et confrontée avec ce que l’étude de la planète nous a enseigné ou suggéré : La guerre des mondes.) Nous pouvons encore confondre deux notions : prêter à l’une certaines propriétés de l’autre, subterfuge qui nous permettra d’appliquer à la première tel système d’investigation en réalité impraticable mais qui nous aidera à solutionner un problème en le supposant résolu. (Qualités de l’espace prêtées au temps : La machine à explorer le temps). Nous pouvons aussi appliquer des méthodes d’exploration scientifique à des objets, des êtres ou des phénomènes créés dans l’inconnu par des moyens rationnels d’analogie et de calcul, avec des présomptions logiques. (Etude d’un peuple extrahumain : Le peuple du pôle.) Et ici, j’ouvrirai de nouveau une parenthèse. IL s’agit de lancer la science en plein inconnu et non pas d’imaginer qu’elle a enfin accompli telle ou telle prouesse en voie réelle d’exécutions. Il s’agit, par exemple, d’avoir l’idée d’une machine à explorer le temps et non pas d’admettre qu’un personnage fictif a construit un sous-marin dans le moment même où les ingénieurs authentiques sont sur la piste de cette découverte. Et si j’insiste là-dessus, c’est que là, justement, réside la grande différence entre Wells et Jules Verne, si souvent confondus. Verne n’a pas écrit une seule ligne de m-s. De son temps, la science était grosse de certaines trouvailles ; il s’est bornée à l’en croire accouchée avant qu’elle ne le fût. Il a à peine anticipé sur des découvertes en germination. Tout au plus pourrait-on dire qu’il restait dans ses problèmes une seule inconnue à dégager. Et puisque nous sommes sur ce terrain, creusons un fossé plus profond encore entre Wells et Robida qui, dans son trop fameux XXème Siècle, n’a fait que supposer exaucés quelques-uns de nos désidératas les moins relevés et les plus superflus, sans se soucier d’obtenir ce résultat de façon cohérente, ni d’en tirer la moindre conséquence.
Telle est donc la structure élémentaire de toute œuvre de m-s, quelle qu’en soit souvent l’apparence élégamment littéraire : qu’elle semble être le développement scénique d’un paradoxe ou même la paraphrase en action d’une métaphore. Et si nous poussons plus avant notre analyse, alors, ce passage du connu à l’inconnu, ce perpétuel va-et-vient de la science à l’ignorance – si rapidement exécuté que les deux antinomies se fondent pour nous en un seul tout surnaturel – nous apparaît le plus souvent sous la forme d’un syllogisme dont l’une des prémisses est volontairement fausse. Un roman m-s s’appuie toujours sur un sophisme ; et la plupart du temps, il suffit d’un seul sophisme placé au début de l’ouvrage, il suffit d’une déviation initiale de l’idée même, pour conserver au sujet son double caractère de merveilleux et de scientifique, sans que l’auteur se voie obligé, pour obtenir ce résultat, de soumettre au cours de son travail d’autres raisonnements frauduleux. Souvent, la démonstration mathématique la plus serrée est susceptible de s’adapter à une longue procession de faits qui s’enchaînent avec une logique impressionnante, tout en s’écartant de plus en plus de la vérité à partir du point où s’est perpétrée l’erreur intentionnelle. Ah, ce point faible, ce lien fantôme entre le monde de la certitude et le monde de la conjecture ! Ce serait encore une étude passionnante que celles des ruses employées par les écrivains pour le dissimuler ! Rien de plus gracieux que leurs stratagèmes pour couvrir l’entrée en scène de l’idée équivoque et pour parvenir à présenter, avec une évidence fallacieuse d’axiome, les propositions les plus étourdissantes ; rien de plus curieux que la patiente habileté avec laquelle, peu à peu, ils gauchissent un raisonnement et faussent un jugement, à petits coups imperceptibles de bon sens truqué.
Aussi bien, ce sont là duperies auxquelles on trouve plaisir à se laisser prendre, et qu’on pardonne volontiers en faveur de l’intérêt de l’œuvre et de son utilité flagrante.
Il serait vain de démontrer que le roman merveilleux-scientifique est une lecture salutaire quand il comporte le développement d’une théorie sociale, si utopique soit-elle, ou quand il constitue un roman satirique, [effets bienfaisants] auxquels on peut adjoindre l’instruction indubitable qu’on y acquiert, toute œuvre de cette sorte contenant un véritable cours de paléontologie, ou d’optique, ou de chimie, ou de chirurgie, etc., et un cours assez peu banal puisque tout en rappelant les éléments d’une science, l’auteur en traite à fond une partie et se livre, de plus, à une métaphysique de cette science, question trop souvent négligée.
Mais – autre conséquence profitable – ayant remarqué chez un grand nombre de personnes, au sortir d’une telle lecture, je ne sais quel étonnement méditatif ; les ayant interrogées sur la cause qu’elles lui attribuaient, et m’étant moi-même questionné sur mes propres sentiments, j’ai été amené à cette constatation : qu’après la lecture de L’homme invisible ou de Dans l’abîme, par exemple, nous ne voyons plus les choses sous le même angle. Et ayant recherché quels rapports s’étaient modifiés, quelles proportions avaient changé, je me suis aperçu que ce bouleversement confus de nos jugements provenait, en somme, de l’action du roman merveilleux-scientifique sur l’intelligence du progrès.
Par le terme progrès, je veux désigner ici l’idée populaire de progrès. Quelle est-elle ? Quelle idée se font du progrès la majeure partie des hommes ?
Mettant de côté toute amélioration de l’ordre moral et politique – ce qui nous débarrasse d’une foule de divergences d’opinion sur des questions que la grande majorité des esprits ne se posent même pas et qui, par conséquent, n’ont rien à faire avec la notion spontanée d’un concept brusquement évoqué par un mot – je crois que le vulgaire entend par progrès l’ensemble des acquisitions humaines considéré à un certain moment par rapport à un autre moment. Cette définition est assez lâche pour contenter la plupart (en l’espèce, c’est là une qualité principale), et elle me semble exprimer convenablement la représentation cinétique que le premier venu se fait du progrès à l’énoncé du mot ; c’et l’enrichissement continuel du savoir humain.
Mais comment l’humanité prend-elle conscience du progrès ? Par la réalisation matérielle de ses aboutissements, par les manifestations pratiques qui en sont les critériums apparents et constituent les seuls indices perceptibles par la masse. Le progrès, dans l’esprit public, est donc une notion essentiellement utilitaire. La foule demande aux sciences d’être fécondes en découvertes utilisables. Toute science qui a fourni tout ce qu’elle semblait devoir donner dans ce sens, lui paraît s’être suffisamment développée ; on ne voit pas la nécessité d’en poursuivre l’étude. Toute science qui ne fait point mine de tendre vers une augmentation de notre bien-être ou de notre puissance nous paraît superflue ; on s’en moque doucement, comme d’un poème – il n’y a pas longtemps que l’astronomie a commencé d’être autre chose qu’un joli passe-temps de rêveur.
Or, nous nous sommes fait un petit lot assez modeste d’ambitions. Si l’on y réfléchit, elles reviennent à souhaiter uniquement des découvertes qui nous préservent d’une diminution matérielle, ou bien qui nous procurent une augmentation physique ou physiologique. Ces inventions absolissent donc un mal ou produisent un bien : les unes sont négatives, comme la guérison de la rage les autres, comme le télégraphe, sont positives. Tout ce qui est susceptible d’intensifier nos actes ou d’étendre notre sphère d’action à travers le temps et l’espace, et tout ce qui sait l’empêcher de se restreindre, engendre dans l’esprit populaire la conclusion que « voilà du progrès » – mais du progrès, toutefois, plus ou moins considérable.
En effet – toujours dans l’esprit populaire – le « bienfaiteur de l’humanité », c’est le chimiste de génie trouvant remède aux affections réputées incurables ; mais le héros, l’homme presque divin, le continuateur du Dieu de la Génèse, c’est l’ingénieur qui met à notre corps des sortes de rallonges, soit par une amplification factice de notre puissance musculaire, soit par une extension artificielle de nos facultés perceptives. C’est là une manière d’orthopédie renforçatrice de notre physique, ou de prothèse amélioratrice de notre physiologie.
La fabrication de la première hache fut la première découverte marquant un progrès aux yeux des troglodytes originels, parce que avec son tranchant de silex et son manche de bois, elle brandissait un poing plus meurtrier au bout d’un bras plus long. Les agencements successifs de la fronde, de l’arc, de l’arbalète, de l’arquebuse, du fusil, forment les étapes de la même progression, au cours de laquelle nos poings s’alourdissent de plus en plus, nos bras s’étirent sans cesse. L’homme a vu se réaliser son rêve, il a vu le conte où ses désirs s’exprimaient devenir de l’histoire, puisque monter en automobile c’est chausser les bottes de l’ogre, et que tirer le canon, c’est mettre des gans de sept lieues.
Nous considérons également comme des témoignages de progrès, avec cette classe d’engins appelés à la rescousse de nos muscles, ceux qui, ayant pour objet de corriger la faiblesse de nos organes sensoriels, sont à ceux-ci ce que l’échasse est à la jambe : le microscope avivant la vue ; le téléscope et le téléphone qui amplifient démesurément le pouvoir de nos rétines, de nos tympans, et suppriment pour eux la distance ; le phonographe qui annule en matière auditive le temps et l’éloignement ; le cinématographe, machine à explorer le passé oculairement ; et d’autres découvertes retentissantes dont la conséquence est de nous doter, selon notre bon plaisir, d’un œil et d’une oreille de Titan.
Entre autres appoints dynamiques, nous avons désiré surtout d’être lotis de membres démesurés, car la rapidité de la translation tient beaucoup plus de place dans nos vœux ainsi que la multiplication des moyens de transport. Enfin, l’adjonction d’ailes, réalisées par l’invention des dirigeables et surtout des aéroplanes, nous a semblé le comble du progrès, parce qu’elle inaugure un mode de déplacement tout à fait inédit.
Plus inédit peut-être qu’on l’imagine d’emblée sans y réfléchir. En effet, toutes les découvertes positives antérieures à celle-ci ont pour résultat de développer en nous l’un de ces pouvoirs ancestraux que nous possédons depuis l’origine bestiale de notre espèce, et par conséquent elles ne font qu’améliorer chez l’homme certaines facultés dont il partage le monopole avec tel ou tel animal. User d’un téléscope, c’est voir plus loin, c’est voir très loin, ce n’est que le comparatif et le superlatif de voir ; c’est voir mieux qu’un aigle, dont la vue normale est pourtant meilleure que la nôtre. Plonger en submersible, en scaphandre, ou bien tout nu, c’est toujours plonger, comme plongeaient nos ancêtres lacustres. Et rouler dans une cent-chevaux, n’est-ce pas encore cheminer, si c’est cheminer plus vite que le pithécanthrope sur les sentiers de la forêt pliocène ? Tel de nos appareils les plus admirés se bornent donc à raffiner la nage et tel autre la marche.
Au contraire la navigation aérienne, elle, nous projette dans un élément jusqu’alors inabordable et pour l’accès duquel nous n’avions pas de moteur naturel, nos bras sachant devenir des nageoires et non pas des ailes. Elles nous rend maîtres d’une immensité vierge, ardemment convoitée depuis l’âge le plus reculé, depuis que nous avons compris qu’elle était libre, qu’elle s’offrait à nos évolutions et n’opposait à l’assaut des hommes que le rempart de leur impuissance. Elle assouvit enfin notre désir millénaire, exaspéré par cette tentation éternellement exercée au-dessus de nos fronts et par l’attente fiévreuse d’un savoir plus profond, capable de la satisfaire. Elle nous fait souverains d’un espace plus vaste que la surface du globe, et si beau d’azur et de pureté, et si embelli d’être une zone interdite mais promise que déjà les mythes anciens chantent l’essort des mortels à travers les cieux ; que nous y logeons nos divinités et nos paradis ; et qu’aux épaules de nos séraphins comme aux épaules des vieux génies de l’Egypte, s’éploie l’envergure d’un cygne ou d’un ibis. Des ailes ! Voilà des siècles et des siècles que nous poussons ce cri, devenu rengaine prudhommesque à force d’être répété. Des ailes, la navigation aérienne nous en donne, et ainsi elle nous égale complètement aux oiseaux, les seules bêtes qui, au dire de notre orgueil, nous fussent restées supérieures en quelque chose. La navigation érienne symbolise donc le comble du progrès et cette brève méditation que nous venons de faire à son propos, nous montre, mieux que vingt paragraphes d’analyse mentale, ce que le peuple nomme ainsi.
Certes, plus une chose a été souhaitée longtemps et fervemment, plus sa réalisation nous semble un progrès. A l’inverse, certaines découvertes capitales – comme celle des rayons X ou du radium, dont le besoin ne se faisait pas sentir, auxquelles on ne songeait guère et qui furent faites dans un ordre d’idées étranger au public – ont paru, de ce fait, d’autant moins un progrès malgré l’immense stupéfaction qu’elles ont répandue. Röntgen et Curie n’ont pas goûté la popularité éclatante et soudaine d’un Wright ou d’un Blériot, à cause des raisons précédentes et aussi parce que leurs trouvailles ne semblaient pas d’abord susceptible d’application pratique.
Ainsi donc, sans beaucoup tenir compte de l’extension du savoir spéculatif, nous nous sommes habitués à considérer la science comme soumise à nos envies. Nous nous figurons volontiers qu’elle n’agrandit son patrimoine que pour mieux satisfaire nos exigences et rassasier plus totalement nos divers appétits, dans le cadre et dans les conditions où nous nous sommes accoutumés de vivre depuis que l’homme est l’homme, et nous ne l’admirons qu’en ceci. Car si la Terre n’est plus au centre de l’univers, l’humanité, du moins, s’y cramponne toujours, et chacun de nous peut-il faire autrement que de se croire au centre de tout ?
L’influence du roman merveilleux-scientifique sur une telle conception du progrès est considérable.
Avec une force convaincante puisée à même la raison, il nous dévoile brutalement tout ce que l’inconnu et le douteux nous réservent peut-être, tout ce qui peut nous venir de désagréable ou d’horrible du fond de l’inexprimé, tout ce que les sciences sont capables de découvrir en se prolongeant au-delà de ces inventions accomplies qui nous en paraissent le terme, toutes les conséquences à côté, toutes les suites imprévues et possibles de ces mêmes inventions, et aussi toutes les sciences nouvelles qui peuvent surgir pour étudier des phénomènes jusqu’alors insoupçonnés et qui peuvent nous créer de nouveaux besoins en créant par avance la manière de les flatter ou de les repaître. Il nous montre notre petit train de vie bouleversé par les cataclysmes les plus naturels et cependant les plus inopinés. Il nous révèle, avec une clarté neuve et puissante, l’instabilité des contingences, la menace imminente du possible. Il nous donne le malaise nauséeux du doute. Enfin, par lui, toute l’horreur de l’inconnu nous apparaît avec une intensité terrible. Il nous découvre l’espace incommensurable à explorer en dehors de notre bien-être immédiat ; il dégage sans pitié de l’idée de science toute arrière-pensée d’usage domestique et tout anthropocentrisme. Il brise notre habitude et nous transporte sur d’autres points de vue, hors de nous-mêmes.
A vrai dire, nous avons bien l’intuition queles éventualités qui nous menacent réellement ne sont pas celles-là mêmes dont nous lisons le récit ; mais nous sentons que des surprises identiques nous attendent, ou nos fils, et que ces événements produiront, chez les hommes, des bouleversements analogues à ceux qu’on y invente. Nous le sentons et nous le savons par expérience, parce que les résultats actuels de la science seraient des prodiges semblables et des sophismes aussi évidents pour un sujet de Sésostris, s’il revenait, et parce que des découvertes récentes et inattendues, comme celles des rayons X et du radium, ne nous ont pas moins surpris et émerveillés que celle du Nouvel Accélérateur.
Je n’insisterai pas davantage sur l’une des nombreuses questions engendrées par la naissance du roman merveilleux-scientifique. La façon sommaire dont je l’ai traité me dispense d’un résumé qui n’aurait pour résultat que d’allonger l’étude sans l’éclairer davantage.
Toutefois, les réflexions précédentes sur ce nouveau genre littéraire me paraissant contenir tous les éléments de sa définition, je la donnerai pour terminer, et je ne crois pas qu’on puisse mieux servir la cause de Wells et de ses pareils, ni mieux désigner leurs ouvrages à l’attention et au respect de tous qu’en disant : « le roman merveilleux-scientifique est une fiction qui a pour base un sophisme ; pour objets, d’amener le lecteur à une contemplation de l’univers plus proche de la vérité ; pour moyen, l’application des méthodes scientifiques à l’étude compréhensive de l’inconnu et de l’incertain.
(Le Spectateur n° 6, octobre 1909)
Le merveilleux-scientifique et La force mystérieuse de J.-H. Rosny aîné (critique approfondie de Rosny dans le cadre de la théorie), in La vie, 1914
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Je suis en veine.
Traduction (par mes soins, donc à la hache) de l'éditorial fondateur de Gernsback dans Amazing n°1 (avril 1926) :
Traduction (par mes soins, donc à la hache) de l'éditorial fondateur de Gernsback dans Amazing n°1 (avril 1926) :
Un autre magazine de fiction ! A première vue, il semble impossible qu’il y ait encore de la place pour un autre magazine de fiction dans ce pays ! Le lecteur s’étonnera sans doute : « N’y en a-t-il pas déjà sufisamment, avec tous ceux déjà publiés ici ? » C’est vrai. Mais ceci n’est pas juste « un autre magazine ». Amazing Stories est un nouveau genre de magazine ! C’est quelque chose de nouveau – de totalement différent –, qui n’a jamais été fait auparavant ici. C’est pourquoi Amazing mérite votre attention et votre intérêt.
Il y a les magazines de fiction habituels, consacrés aux histoires sentimentales ou sexy, à l’aventure, etc. Mais un magazine de scientifiction est un pionnier dans ce domaine en Amérique.
Par « scientifiction », j’entends les histoires à la Jules Verne, H. G. Wells, Edgar Poe – un récit passionnant, mêlé de faits scientifiques et de visions prophétiques. Depuis de nombreuses années, les histoires de ce genre ont été publiées dans les revues-sœurs d’Amazing – Science & Invention et Radio News.
Mais avec la demande toujours croissante d’histoires de ce type, il n’y avait qu’une chose à faire : publier un magazine exclusivement dédié à la fiction scientifique. Dans ce but, nous avons mis au point une stratégie complète, n’épargnant ni notre temps, ni notre argent.
Edgar Poe pourrait bien être considéré comme le père de la « scientifiction ». C’est lui, vraiment, qui a inauguré ce genre de récits, intelligemment basé et enveloppé dans une trame scientifique. Jules Verne, avec ses étonnants romans également appuyés sur le même genre de trame, est arrivé ensuite. Un peu plus tard est venu H. G. Wells dont les histoires de scientifiction, comme celles de ses prédecesseurs, sont devenues célèbres et immortelles.
Il faut se souvenir que nous vivons dans un monde entièrement nouveau. Il y a deux siècles, des histoires de ce genre n’étaient pas possibles. La science, à travers ses différentes branches de la mécanique, de l’électricité, de l’astronomie, etc, pénètre aujourd’hui si profondément dans nos vies et nous enveloppe à un point tel que nous prenons les nouvelles inventions et découvertes pour acquises. Tout notre mode de vie a changé sous l’effet du progrès et des situations fantastiques, qui auraient été impossibles il y a cent ans, nous émerveillent à peine aujourd’hui. C'est dans de telles situations que les nouveaux romanciers vont puiser le meilleur de leur inspiration.
Ces histoires étonnantes ne se contentent pas d’offrir des lectures extraordinairement intéressantes – elles sont aussi toujours instructives. Elles délivrent un savoir que nous n’aurions pu acquérir autrement – et elles le font de façon très savoureuse. Car les meilleurs auteurs modernes de scientifiction ont le don de transmettre connaissance, et même inspiration, sans jamais nous donner l’impression de faire un cours.
Et ce n’est pas tout ! Poe, Verne, Wells, Bellamy et bien d’autres se sont parfois révélés d’authentiques prophètes. Les prédictions contenues dans nombre de leurs étonnants récits sont en cours de réalisation – ou ont été réalisées. Pensez à l’extraordinaire sous-marin imaginé par Jules Verne dans Vingt Mille Lieues Sous Les Mers, par exemple. C’est une anticipation du sous-marin contemporain jusqu’au dernier boulon ! Les inventions nouvelles présentées dans la scientifiction d’aujourd’hui n’ont rien d’irréalisable demain. De nombreuses histoires scientifiques destinées ainsi à devenir des documents historiques restent à écrire, et Amazing Stories sera le moyen par lequel elles vous parviendront. La postérité les désignera pour avoir ouvert la voie, non seulement en littérature et dans la fiction, mais aussi pour le progrès en général.
Nous, éditeurs d’Amazing, réalisons notre responsabilité dans cette aventure et consacrerons toute notre énergie à vous présenter, tous les mois, le meilleur de ce que cette littérature a à offrir.
Des arrangements ont été conclus avec les ayants-droits de TOUTES les œuvres immortelles de Jules Verne. Beaucoup d’entre elles ne sont pas encore connues du public américain. Pour la première fois, elles seront facilement accessibles aux lecteurs grâce à Amazing. Un certain nombre de récits allemands, français et anglais de ce genre, signés des meilleurs auteurs de ces pays, ont déjà été acquises et nous espérons pouvoir très vite augmenter la pagination de notre magazine pour pouvoir présenter ce matériel à nos lecteurs.
La qualité future de la revue vous appartient. Lisez Amazing. Persuadez vos amis d’en faire autant. Et écrivez-nous, ensuite, pour nous dire ce que vous en avez pensé. Nous prendrons en considération toute critique constructive – car ce n’est qu’ainsi que nous saurons comment vous satisfaire.
- Roland C. Wagner
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- dracosolis
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Quelques extraits de son résumé (disponible en PDF)Lem a écrit :Ceci est plus récent et semble concerner le débat.
"However, while both postmodernist mainstream and science fiction shared the same core message and worldview, a number of differences remained present. Science fiction had its own, time-honored devices for constructing its alternative universe, and felt little need to adopt the formal techniques of mainstream fiction (fragmentation, refusal of closure, self-referentiality, etc.). While the gap between the two literary realms may have been bridged to a considerable extent, science fiction managed to preserve much of its generic identity and refused assimilation. This is why the next step in out investigation required us to focus on those elements that actually distinguish science fiction from mainstream fiction, and consider science fiction no longer as a literary genre, but as a manifestation of popular culture."
"While a sizable number of science fiction texts and authors were recognized for their literary merits, being discussed and analyzed with the tools provided by conventional criticism, most scholarly approaches preferred to dismiss roughly nine tenths of genre products as deprived of literary value and therefore irrelevant. However, a pertinent analysis of the science fiction phenomenon cannot be based purely on criteria of
literary value, not as long a much of the genre’s specificity is related precisely to the production and consumption of those much despised popular texts."
"In a first stage, we examined those features that tend to separate science fiction from mainstream fiction, from the simplicity of plots and characters to the plain, straightforward style, and to the formulaic nature of the genre—not an art, but a craft requiring little or no originality. Then, we considered science fiction from the vantage point of the rules governing the culture industry, which almost unavoidably lead to streamlining, to a preference for old, tested recipes, to editorial practices that rarely, if ever, favor literary quality and sacrifice anything for the sake of a good sale.
The analysts of popular culture, however (de Certeau, Bennett, Fiske, etc), have taught us that such an approach is usually counterproductive, failing to reveal the actual mechanisms governing the production and circulation of meanings at popular level. As we know, the consumers of popular culture are all but passive recipients of prefabricated ideas. On the contrary, the act of popular consumption is in fact an act of popular production, as cultural products are received and employed in manners that usually go well beyond the original intentions of their authors and publishers. Thus, popular texts are not important for what they are, and cannot be judged strictly from the vantage point of their literary merit. Popular texts are important for what they do, or indeed for the manner in which consumers reuse them in a process of dynamic production and circulation of meanings (what de Certeau called cultural ‘poaching’). Operating with the criteria devised by R. Barthes (lisible, scriptible) and later adapted by Fiske (readerly, writerly, and producerly), we concluded that the value of popular texts has to do with the multiplicity of readings they allow, with the manner in which they lend themselves to a process of endless ‘writing into’ by the consumers. This is, in fact, what accounts for the tremendous success of products like Star Wars and Star Trek, marketed in a variety of forms and constantly subjected to a process of popular rewriting and expansion."
"In social terms, the environment of this popular consumption and rewriting is the science fiction fandom, the community of dedicated science fiction readers, which in itself is enough to set science fiction apart from both mainstream and any other genre of popular fiction. We discussed the fandom as a subcultural phenomenon, highlighting its distinctiveness, and then concluded by analyzing its rather unique relationship with the culture industry (run, to a large extent, by the fandom itself!) and its influence upon the genre."
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/
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- Roland C. Wagner
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Tu as essayé avec une madeleine?Gérard Klein a écrit :Voir dans le passé, ce n'est pas y retourner. Encore moins le remonter.
Quand je vois une photo du grand amour de mes dix huit ans, ça ne me laisse aucune chance de la retrouver à ce moment là. C'était une étoile
.
Et peu d'envie de la retrouver maintenant.
Je crains que ça ne soit réciproque.
Oncle Joe
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Et ceci, extrait du sommaire du colloque "Peut-on encore rêver la SF aujourd'hui ?" prouve au minimum que l'affaire de la métaphore réifiée n'est pas une pure lehmania…
Anne BESSON: La science-fiction dans la culture de masse contemporaine: un monde à part?
A partir de deux ouvrages de hard science récemment traduits, le recueil Axiomatique de Greg Egan et Rainbow’s End de Vernor Vinge, nous montrerons que la science-fiction, loin d’être reléguée à une position marginale dans les imaginaires contemporains par la concurrence de la fantasy, en informe au contraire en profondeur les représentations. Elle occupe une place centrale dans la manière dont sont pensés, et décrits, les univers multimédiatiques proposés à la consommation. Le rêve partagé de notre époque, celui d’un autre monde qui soit le nôtre, peut en effet y devenir la matière même de la narration, via l’opération de concrétisation de la métaphore qui caractérise le genre: prise de drogue ou modifications neurologiques chez Egan, extension des technologies du virtuel chez Vinge, en permettent l’exploration, y préparent les esprits...
Hum… ça prouve peut-être simplement qu'elle t'as lu (ce qui est agréable)…Lem a écrit :Et ceci, extrait du sommaire du colloque "Peut-on encore rêver la SF aujourd'hui ?" prouve au minimum que l'affaire de la métaphore réifiée n'est pas une pure lehmania…
Mais ça ne rend pas le concept plus clair à mes yeux. Je ne vois pas très bien en quoi il est utile de qualifier de "concrétisation de la métaphore" la mise en scène dans une fiction de drogues extrapolées ou d'extensions technologiques…
Mais j'avoue ne pas un être bon public pour ce genre d'approche, je dois me rendre à l'évidence (sur 500 pages, j'ai pu voir que je n'arrive pas à entrer dans ce type de description…). C'est peut-être, effectivement, ce qui caractérise ce que je ne suis pas, c'est-à-dire un "littéraire".
Si d'autres y trouvent leur compte, ma foi, pourquoi pas, Et Il y a un côté poétique dans la litanie des formules qui peut avoir un certain charme…
Oncle Joe
Modifié en dernier par Lensman le jeu. févr. 04, 2010 8:27 pm, modifié 1 fois.