Du sense of wonder à la SF métaphysique

Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 1:16 am

Fabien Lyraud a écrit :Besson c'est quand même de la métaphysique de bazar.
De mon point de vue, Le cinquième élément est le plus mauvais film de Besson ; je préfère cent fois La sentinelle de Despleschins pour rester dans les noms cités par Cazenave.
Mais peu importe.
Ce qui compte, dans l'extrait précité, c'est cette intuition, ce ressenti de la SF comme mise en scène du métaphysique (et du religieux, éventuellement), avec les émotions associées.
Aujourd'hui, ça ne pose plus de problème car ces questions sont à nouveau légitimes.
Mais vous imaginez les effets négatifs d'un tel ressenti entre 1950 et 1990 ? (C'est l'hypothèse M, évidemment.)
Modifié en dernier par Lem le lun. févr. 15, 2010 5:26 am, modifié 2 fois.

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 5:22 am

Gérard Klein a écrit :
Sand a écrit :Aujourd'hui, à la table ronde avec Jacques Baudou, un autre intervenant (…) a dit que ce qui diffenciait fondamentalement la fantasy de la SF, c'était le côté religieux et spirituel de la fantasy, contre le matérialisme de la SF.
J'ai souvent été frappé par la dimension de croyance au surnaturel et au salut par la surnature que dégagent de nombreux textes de fantasy et que révèle plus encore la lecture qui en était faite telle qu'on me l'exposait.
On peut toujours se faire plaisir avec ce genre d'analyses, certes…

Mais c'est évacuer un peu vite le problème du régime de croyance.

Pour ce que j'en connais (c'est à dire peu de choses, au fond, hormis les classiques), je pense que la fantasy est sans enjeu. Elle ne parle jamais, ne fait jamais semblant de parler et n'est jamais reçue comme parlant du monde que nous connaissons. Personne ne sort d'un roman de fantasy en croyant à la magie, aux dragons et aux épées enchantées. Personne ne croit qu'un tel monde ait existé, encore moins qu'il pourrait advenir ou revenir un jour. Personne n'en cherche les traces ou les signes dans la réalité, ni ne prépare son avènement. L'effet de réel est circonscrit à la fiction et le merveilleux cultivé pour son pouvoir divertissant (on peut écrire "consolateur" si on est de mauvais poil mais ça ne change rien à l'affaire).

Le merveilleux-scientifique – la science-fiction – et l'imaginaire scientifique au sens large sont beaucoup plus ambigus. Leur prétention à la rationalité vise naturellement le monde tel que nous le connaissons (quoi de plus normal puisqu'ils sont déclarés au moins potentiellement compatibles avec lui ?) et on ne sort pas tout à fait des œuvres comme on y est entré. C'est un aspect inattendu de la fameuse "action sur l'intelligence du progrès" dont parle Renard. Au XXème siècle, c'est l'imaginaire scientifique (et non magique) qui a été la matrice d'à peu près toutes les croyances modernes, du monstre du Loch Ness aux ovnis en passant par le yéti et les agents secrets aux pouvoirs PK. C'est en lui que sont enracinées des entreprises sectaires comme la scientologie, Rael, le Temple Solaire etc. Et je discerne des éléments du même type dans certains discours sur le posthumain, les clônages secrets… Dire que ces choses sont des déviations, des aberrations ne règle rien du tout.

On peut donc sourire tant qu'on veut de la fantasy, stigmatiser son recours à la magie et au surnaturel. Mais sa portée cognitive est nulle. De ce point de vue, elle est aussi inoffensive que les contes de fée. Elle fait plaisir le temps de la lecture – et c'est tout.

Ce n'est pas le cas de la science-fiction et c'est un problème qui doit être pensé aussi (y compris dans le cadre de ce fil car il a à voir avec le sense of wonder et ses sources métaphysiques).

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » lun. févr. 15, 2010 8:00 am

Lem a écrit : Aujourd'hui, ça ne pose plus de problème car ces questions sont à nouveau légitimes.
Mais vous imaginez les effets négatifs d'un tel ressenti entre 1950 et 1990 ? (C'est l'hypothèse M, évidemment.)
Je ne vois pas où tu trouves l'hypothèse M là dedans. La SF est considérée par certains comme "pas sérieuse" non pour son contenu, dont ils se moquent, mais parce qu'elle n'est pas sérieuse tout court, dans leur esprit. Les raisons "précises" prennent toutes les formes que tu veux, selon l'occasion.
Cazeneuve, esprit ouvert et curieux, fait feu de tout bois pour parler de ce qu'il intéresse, et il a parlé de philosophie, de religion, de métaphysique sur France Cuture pendant des années et des années (jusqu'à ce qu'on l'écarte il y a un ou deux ans, je crois).Un exemple précis? L'essai de Jean-Paul Dumont et Jean Monod, "Le foeus astral", entièrement consacré à "2001", paru chez Christian Bourgois. Regarde ce qu'ils disent:

"Film sur l'intelligence, "2001" met tout être pensant au défit de rendre compte de l'émotion provoquée à la vue de son épanouissement mythique.
Nous partons d'une œuvre cinématographique et d'une méthode afin des les soumettre chacun à l'épreuve de l'autre. Si nous n'accordons de valeur absolue à aucune, nous n'entendons pas non plus les enfermer dans les limites des interprétations restrictives comme celles qui voudraient confiner le "structuralisme dans un statisme plat, réduire le cinéma à n'être que la copie du réel, et faire de "2001" un film de science-fiction. Il y aurait en effet un paradoxe insoutenable à faire l'"analyse structurale d'un film qui retrace le genèse et projette l'au-delà de de l'intelligence humaine, si le structuralisme était, comme certains l'affirment, incapable de rendre compte de l'"histoire"".


Dans l'essai de ces deux auteurs, la métaphysique ne va pas manquer, c'est le moins que l'on puisse dire… Et c'est une des raisons principales pour laquelle il ne faut pas faire de ""2001" un film de science-fiction", bien sûr… Que voient-ils dans la science-fiction? C'est en fait sans importance: c'est un motif de rejet ou de mépris en soi, c'est tout.
Et nous sommes, avec cet exemple, en 1970. La métaphysique? bien sûr! La SF? vous n'y pensez pas, mon bon monsieur! un peu de sérieux. En plein cœur de la période du prétendu déni de la métaphysique, qui a bond dos.
Regarde l'article du "Monde" et l'attitude du spécialiste du cinéma qui a restauré "Metropolis". Nous sommes en 2010 (40 ans après l'essai sur "2001"). C'est le même discours: la SF, ce n'est pas de la "vraie" culture sérieuse.
Il est impossible de lutter contre cette attitude, car nous ne sommes plus dans le domaine de la réflexion "objective". Toutes les personnes intelligentes qui ont envie de s'intéresser à la SF s'y intéressent et c'est cela la véritable légitimation. La SF n'a pas à devenir légitime, par contre, on reconnaît les intellectuels légitimes au fait qu'ils parviennent à s'y intéresser. Et ça, ce n'est ni toi, ni moi ni personne d'autre qu'eux-mêmes qui puisse les pousser à le faire. Il faut juste qu'ils cessent de se préoccuper des critères de légitimation de la culture officielle dans laquelle ils se trouvent.

Donc, il faut travailler sur la SF, mais laisser de côté cette préoccupation de légitimation, qui est une impasse "structurelle".

Oncle Joe
Modifié en dernier par Lensman le lun. févr. 15, 2010 9:09 am, modifié 1 fois.

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » lun. févr. 15, 2010 8:37 am

Lem a écrit :[ Au XXème siècle, c'est l'imaginaire scientifique (et non magique) qui a été la matrice d'à peu près toutes les croyances modernes, du monstre du Loch Ness aux ovnis en passant par le yéti et les agents secrets aux pouvoirs PK. C'est en lui que sont enracinées des entreprises sectaires comme la scientologie, Rael, le Temple Solaire etc. Et je discerne des éléments du même type dans certains discours sur le posthumain, les clônages secrets… Dire que ces choses sont des déviations, des aberrations ne règle rien du tout.

Ce n'est pas le cas de la science-fiction et c'est un problème qui doit être pensé aussi (y compris dans le cadre de ce fil car il a à voir avec le sense of wonder et ses sources métaphysiques).
Mais alors, dans ta perspective de lutte contre le déni, et dans la manière dont tu perçois le déni, le moins que l'on puisse dire, c'est que ça va être contre-productif… Le simple fait d'associer, d'une quelconque manière que ce soit, SF à soucoupes volantes, scientologie, Rael, etc, y compris des trucs bien inoffensifs, donne immédiatement aux "prescripteurs" des arguments pour se moquer de la SF. Si tu te mets à parler de cela, tu ne peux parler de "littérature" au sens de littérature sérieuse (celle des fameuses histoires de la littérature, avec l'imprimatur des censeurs de la culture), l'association ne peut pas être acceptée.
Oncle Joe
Modifié en dernier par Lensman le lun. févr. 15, 2010 8:46 am, modifié 1 fois.

kemar
Messages : 260
Enregistré le : jeu. déc. 11, 2008 8:53 am
Localisation : annecy
Contact :

Message par kemar » lun. févr. 15, 2010 8:44 am

"Ce n'est pas le cas de la science-fiction"

Ce n'est pas le cas d'une certaine partie de la science fiction. Il y a également une grosse part de la SF qui est sans autre enjeu que le divertissement, ce qui n'enlève rien à ses charmes.
D'un côté tu généralises la fantasy avec les clichés habituels ( à l'instar des élites qui sont tant fustigées ici parce qu'elles parlent avec mépris d'un genre qu'elles ne connaissent pas), et de l'autre tu généralises la SF comme genre qui amènerait systématiquement à la réflexion.
Si tu dois définir la SF, autant que la définition tienne également compte des pistolasers, des aliens et des vaisseaux qui vont à la vitesse de la lumière, comme éléments de divertissements assumés et partie intégrante du genre.

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 9:17 am

Lensman a écrit :
Lem a écrit : C'est l'hypothèse M, évidemment.
Je ne vois pas où tu trouves l'hypothèse M là dedans. La SF est considérée par certains comme "pas sérieuse" non pour son contenu, dont ils se moquent, mais parce qu'elle n'est pas sérieuse tout court, dans leur esprit. Les raisons "précises" prennent toutes les formes que tu veux, selon l'occasion.
Tu ne rejettes pas l'hypothèse après examen.
Tu la rejettes parce qu'elle ne colle pas avec ton schéma général sur culture/subculture.
Tu fais la même chose que quand tu me demandais quelles étaient mes "convictions" : de l'idéologie.

Avatar du membre
MF
Messages : 4466
Enregistré le : jeu. déc. 28, 2006 3:36 pm
Localisation : cactus-blockhaus

Message par MF » lun. févr. 15, 2010 9:20 am

Gérard Klein a écrit :Non, mais le problème de Michel Cazenave (mais je ne crois pas qu'il tienne cela pour un problème) que je connais un peu et dont j'ai même édité un livre jadis est qu'il un jungien et qu'il attache une grande importance aux archétypes.
Fondamentalement, ça n'a rien à voir avec l'ésotérisme, ce qui infirme la thèse de MF.
Je n'expose pas de thèse, je me limite à lire les déclarations de Michel Cazenave.
Il est tout à fait possible de traiter de la psychologie analytique et du concept d'archétype sans verser dans la référence à l'alchimie, au mysticisme et à l'orientalisme.
Mais faire l'un (*) en le mélangeant allègrement avec l'autre c'est ouvrir grand une porte sur l'ésotérisme.

(* au passage, Michel Cazenave serait bien inspiré de se poser la question du rituel eucharistique à l'œuvre lorsque le "public" applaudit les films lors du festival de Cannes...)
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Avatar du membre
MF
Messages : 4466
Enregistré le : jeu. déc. 28, 2006 3:36 pm
Localisation : cactus-blockhaus

Message par MF » lun. févr. 15, 2010 9:22 am

Gérard Klein a écrit :Il me semble que Michel Cazenave connaît assez bien, et peut-être mieux que ça, la meilleure science-fiction, mais qu'il l'interprète à la lumière de ses connaissances, de sa culture et de son expérience, comme, me semble-t-il, font quelques uns sur ce fil.
dit l'archétype du genre... ^^
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 9:29 am

Lensman a écrit :[Mais alors, dans ta perspective de lutte contre le déni, et dans la manière dont tu perçois le déni, le moins que l'on puisse dire, c'est que ça va être contre-productif…
Hé… C'est vous qui fantasmez sur "propagande", "déformation" etc.
Je te l'ai dit hier : je ne veux pas corriger la représentation ambiante parce qu'elle est source de déni. Je veux la corriger parce qu'elle est fausse. J'ai la faiblesse de croire qu'assumer le genre dans toute histoire et toute sa complexité (y compris ses à côtés déplaisants) est une bien meilleure manière de s'imposer. Admettre qu'il y a dans la SF un tropisme métaphysique, voire religieux qui a des prolongements hors de la fiction au lieu de s'accrocher comme des perdus à une rationalité largement idéale, c'est un signe de maturité.

Avatar du membre
MF
Messages : 4466
Enregistré le : jeu. déc. 28, 2006 3:36 pm
Localisation : cactus-blockhaus

Message par MF » lun. févr. 15, 2010 9:32 am

Lem a écrit :Ce qui compte, dans l'extrait précité, c'est cette intuition, ce ressenti de la SF comme mise en scène du métaphysique (et du religieux, éventuellement), avec les émotions associées.
Je crois que la SF, au cas particulier du 5ème élément est surtout un support.
Exactement comme l'est le polar pour Da Vinci Code.
Michel Cazenave, à propos du 5ème élément a écrit :Ce que je trouve absolument extraordinaire, c’est comment, à travers ce féminin de mort, Besson aboutit finalement au féminin de vie et au féminin spirituel - ce qui correspond à une des théologies les plus anciennes et les plus argumentées
Quelle différence avec le bouquin de Dan Brown ? Aucune ! C'est la même histoire. Pas de concept qui ne soit pas "simplement" mythique (comme le signale Gérard).

Et, en plus, dans les deux cas, le produit n'est pas acceptable dans le genre concerné (SF ou Polar) car il ne respecte même pas les règles minimales de cohérence interne.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 9:34 am

kemar a écrit :Ce n'est pas le cas d'une certaine partie de la science fiction. Il y a également une grosse part de la SF qui est sans autre enjeu que le divertissement, ce qui n'enlève rien à ses charmes.
Tu te trompes, je crois, dans l'usage du mot "enjeu".
La SF qui a nourri les prolongements barjo, c'est typiquement celle du divertissement pur : c'est elle qui est pleine de soucoupes volantes, terre creuse, conspiration, monstres cryptozoologiques, etc. Les auteurs n'ont pas écrit pour faire que croire que ces choses étaient réelles et escroquer des gogos. Mais dans leurs écrits, le rapport à la plausibilité (qui est celui de toute la SF) est tel que des escrocs ont pu s'emparer de ces objets.
C'est en ce sens que je dis que la fantasy est "sans enjeu" : aucun escroc ne créera jamais une secte pour attendre le retour des hobbits.

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 9:38 am

Ah, j'avais raté ça :
Lensman a écrit :Toutes les personnes intelligentes qui ont envie de s'intéresser à la SF s'y intéressent et c'est cela la véritable légitimation.
J'avais donc raison hier. Ta position est : si les gens sont trop cons pour s'intéresser, tant pis pour eux.
On peut sans doute penser ça. Mais ce n'est pas mon cas.

Avatar du membre
Erion
Messages : 5025
Enregistré le : sam. oct. 21, 2006 10:46 am

Message par Erion » lun. févr. 15, 2010 10:07 am

Lem a écrit : Admettre qu'il y a dans la SF un tropisme métaphysique, voire religieux qui a des prolongements hors de la fiction au lieu de s'accrocher comme des perdus à une rationalité largement idéale, c'est un signe de maturité.
Mais TOUT LE MONDE ici, admet qu'il y a de la métaphysique dans la SF. Je répète, au cas où tu aurais pas bien lu ce qui a été écrit sur ce fil : TOUT LE MONDE ADMET QU'IL Y A DE LA METAPHYSIQUE DANS LA SF.

Ceci étant posé.
Ce n'est pas la métaphysique qui est essentielle à la SF (on peut très bien écrire de la SF sans une once de métaphysique) et bien souvent la métaphysique est employée dans la SF pour "faire sérieux", pour faire respectable, ce qui la transforme souvent en métaphysique de pacotille (ex : Matrix 2 et 3, kirby).

Tu peux essayer, en vain, de montrer qu'il y a des récits de SF sans rationalité aucune (sans cognitive estrangement, pour faire simple), et il se peut que tu y arrives parfois, ce qui ne fera jamais que l'appel à la conjecture rationnelle englobe bien 90 à 95% du genre appelé SF. Tandis que la métaphysique, on a bien de la peine à savoir ce qu'elle peut recouvrir.

Et après, imaginons, (hypothèse) que tu démontres que la SF est liée à la métaphysique, voire au religieux, en quoi ce serait positif ? Ca renforcerait l'aspect "pas sérieux" de la SF (tendance Raël et Ron Hubbard "l'auteur de SF qui a fondé une secte"), sans augmenter son prestige littéraire pour autant.
Enfin, même pour les auteurs, c'est un truc qui tient pas la route. Ok, Werber a un tropisme métaphysique, c'est manifestement ce qui le branche le plus, mais tous les auteurs de SF ne sont pas werberiens.

Comme rappelé invariablement par plusieurs intervenants : la science a depuis longtemps investit le domaine de la métaphysique. Quand on raisonne sur l'intelligence, le libre arbitre, la conscience, c'est bien moins les mystiques qui guident les auteurs SF que les chercheurs en neurologie et en sciences cognitives. C'est l'extension du domaine de la science qui crée cette illusion métaphysique.
Le seul domaine où la science n'intervient pas tellement, c'est la religion en tant que vérité révélée (alors que le sentiment religieux, lui, est abordé soit par les sciences sociales, soit même - avec de grosses réserves- par la génétique et l'imagerie du cerveau).

En résumé, quand tu veux placer la métaphysique au centre, à la place de la rationalité, tu sembles croire que c'est la métaphysique qui s'est étendue, alors qu'au contraire, c'est la rationalité qui a conquis des domaines jusque là réservés à la métaphysique. C'est pour ça que la SF peut aborder des domaines exclus, parce que la rationalité s'est étendue.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/

Lem

Message par Lem » lun. févr. 15, 2010 10:10 am

Lensman a écrit :Un exemple précis? L'essai de Jean-Paul Dumont et Jean Monod, "Le foeus astral", entièrement consacré à "2001", paru chez Christian Bourgois. Regarde ce qu'ils disent
OK, je regarde.
"Film sur l'intelligence, "2001" met tout être pensant au défit de rendre compte de l'émotion provoquée à la vue de son épanouissement mythique.
Nous partons d'une œuvre cinématographique et d'une méthode afin des les soumettre chacun à l'épreuve de l'autre. Si nous n'accordons de valeur absolue à aucune, nous n'entendons pas non plus les enfermer dans les limites des interprétations restrictives comme celles qui voudraient confiner le "structuralisme dans un statisme plat, réduire le cinéma à n'être que la copie du réel, et faire de "2001" un film de science-fiction. Il y aurait en effet un paradoxe insoutenable à faire l'"analyse structurale d'un film qui retrace le genèse et projette l'au-delà de de l'intelligence humaine, si le structuralisme était, comme certains l'affirment, incapable de rendre compte de l'"histoire"".


Dans l'essai de ces deux auteurs, la métaphysique ne va pas manquer, c'est le moins que l'on puisse dire… Et c'est une des raisons principales pour laquelle il ne faut pas faire de ""2001" un film de science-fiction", bien sûr… Que voient-ils dans la science-fiction? C'est en fait sans importance: c'est un motif de rejet ou de mépris en soi, c'est tout.
Qu'est-ce qu'on fait ? Tu nous livres l'ensemble de l'analyse de ces deux auteurs pour qu'on puisse se prononcer ou on analyse les quelques lignes postées ?

Dans ce bref texte, je ne vois pas vraiment d'allusion au métaphysique en tant que tel.

Il est question par contre du "l'épanouissement mythique de l'intelligence" (plus près de leur pensée serait sans doute : "mythe de l'épanouissement de l'intelligence") : c'est dans ces termes que l'argument central du film est résumé par les deux critiques. Et leur propos semble être d'analyser de "récit mythique" à l'aide d'un instrument théorique sans doute approprié à leur époque puisqu'il avait été précisément élaboré pour ce genre de choses par feu Lévi-Strauss : le structuralisme.

Dans leurs précautions rhétoriques, les auteurs disent que 2001 n'est pas un film de science-fiction. Sous réserve que le reste du texte ne me démente pas, je n'y vois pas trace de mépris mais plutôt une sorte d'exclusion technique. "Pas SF" semble signifier ici "ne relevant pas de la catégorie telle qu'elle est empiriquement défnie" (c'est à dire probablement par les objets : science et futur). Et pourquoi le film sort-il de la catégorie ? Parce qu'il retrace, sous forme de récit mythique, la génèse et l'au-delà de l'intelligence humaine. 2001, dans ce texte, est classé non SF parce que son argument central tel qu'il est perçu n'a rien à voir avec les sciences et le futur.

On n'est donc nullement dans le déni pour cause de mépris par principe (culture vs subculture). On est dans le dé-classement parce que la SF définie par les objets (en 1970) est trop étroite. Tu trouves ça dommage ? Moi aussi.
Modifié en dernier par Lem le lun. févr. 15, 2010 10:22 am, modifié 1 fois.

Avatar du membre
Erion
Messages : 5025
Enregistré le : sam. oct. 21, 2006 10:46 am

Message par Erion » lun. févr. 15, 2010 10:12 am

Lem a écrit : Dans leurs précautions rhétoriques, les auteurs disent que 2001 n'est pas un film de science-fiction. Sous réserve que le reste du texte ne me démente pas, je n'y vois pas trace de mépris mais plutôt une sorte d'exclusion technique. "Pas SF" semble signifier ici "ne relevant pas de la catégorie telle qu'elle est empiriquement défnie" (c'est à dire probablement par les objets : science et futur). Et pourquoi le film sort-il de la catégorie ? Parce qu'il retrace, sous forme de récit mythique, la génèse et l'au-delà de l'intelligence humaine. 2001, dans ce texte, est classé non SF parce que son argument central tel qu'il est perçu n'a rien à voir avec les sciences et le futur.
.
Ah ok. Donc Métropolis n'est pas non plus un film de SF.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/

Répondre

Retourner vers « Vos dernières lectures »