Mécenépagravdutou.Roland C. Wagner a écrit :Mézalor, pas du tout.
Du sense of wonder à la SF métaphysique
Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m
Rappelle-moi l'intrigue de "L'Homme qui voulut être roi" ?Lem a écrit :C'est évidemment un point très délicat. Mais je pense qu'avant toute discussion sur les critères objectifs – ou disons : hypothétiquement consensuels – d'attribution du nom "dieu" à telle ou telle entité, il faut garder en tête que la SF, c'est de la littérature. Qu'il y a des auteurs qui choisissent soigneusement leur lexique. La remarque de Clute & Nicholls ne peut pas être ignorée : "Le nom Dieu ou dieux est l'un de ceux dont la fréquence d'apparition dans les titres des œuvres SF est la plus élevée." On ne peut pas dire : tous ces auteurs se sont trompés ou ont manipulé le vocabulaire à mauvais escient. Herbert aurait dû titrer : "L'homme-ver de Dune" au lieu de "L'empereur-Dieu de Dune". Farmer aurait dû titrer : "Les extraterrestres omnipotents du Fleuve" au lieu de etc. (Je ne reprends pas l'exemple de Dick puisque le Dieu centaurien est une invention française. Par contre, il a bien écrit "Deus Irae" et non "Atomic wrath" ).MF a écrit :J'ai de plus en plus l'impression que la notion de "dieu" est totalement inadaptée...
Il y a un effet qui est délibérément recherché ici et cet effet fait partie intégrante de la SF – ne serait-ce que parce que le mainstream n'y recourt pour ainsi dire jamais.
Edit : ah et puis aussi le vocabulaire employé dans "Moby Dick" tant qu'on y est.
Modifié en dernier par Erion le lun. mars 01, 2010 12:41 pm, modifié 1 fois.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/
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Elle est dans le titre, qui n'est pas "L'homme qui voulut être dieu"Erion a écrit :Rappelle-moi l'intrigue de "L'Homme qui voulut être roi" ?
Moi aussi j'édite : tu retournes au XIXème siècle, Erion. A ce moment-là, c'est encore licite. Cf Dieu… de rien moins que Victor Hugo.
Modifié en dernier par Lem le lun. mars 01, 2010 12:42 pm, modifié 1 fois.
mais cet effet va bien, comme le dit Erion, dans le sens d'un désenchantement du monde : ces créatures surpuissantes ne sont la plupart du temps présentées que pour être expliquées.Lem a écrit : Il y a un effet qui est délibérément recherché ici et cet effet fait partie intégrante de la SF – ne serait-ce que parce que le mainstream n'y recourt pour ainsi dire jamais.
Donc la SF, contrairement à la fantasy ou au fantastique, contribue plutôt à rendre le monde terre-à-terre...
ou plus exactement, et c'est une voie moyenne, elle donne le moyen de faire semblant de croire, tout en sachant très bien que la croyance est fausse. En somme, c'est de la fiction qui fait aimer le fun.
Ben non. Il est pris pour un dieu.Lem a écrit :Elle est dans le titre, qui n'est pas "L'homme qui voulut être dieu"Erion a écrit :Rappelle-moi l'intrigue de "L'Homme qui voulut être roi" ?
C'est un peu léger de ne commenter que les titres.
néanmoins, je ne vois pas l'intérêt de pinailler : le divin est présent dans la SF, mais il est une escroquerie intellectuelle, comme une insuffisance du langage. A mon sens, il faudrait partir de là.
Mais, moi, je pars manger.
Précisément. Ce que l'on essaie de te faire comprendre : ce sont des archétypes. L'Empereur-Dieu de Dune, c'est un "homme qui voulut être roi" réussi. Mais Leto n'est PAS un dieu. C'est bien beau le langage, mais il y a aussi le sens. Il s'agit bien dans ces cas-là de "désenchanter le monde". Leto II n'a rien de merveilleux, tout au contraire.Lem a écrit :Elle est dans le titre, qui n'est pas "L'homme qui voulut être dieu"Erion a écrit :Rappelle-moi l'intrigue de "L'Homme qui voulut être roi" ?
Moi aussi j'édite : tu retournes au XIXème siècle, Erion. A ce moment-là, c'est encore licite. Cf Dieu… de rien moins que Victor Hugo.
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Je crois que tu superposes beaucoup trop vite scientifisation et désenchantement.silramil a écrit :mais cet effet va bien, comme le dit Erion, dans le sens d'un désenchantement du monde : ces créatures surpuissantes ne sont la plupart du temps présentées que pour être expliquées.
Le propre de la SF, c'est de procéder à une scientifisation qui préserve l'enchantement. Pour parler de la cet imaginaire scientifique hors-littérature (IRL), le fait que le monstre du Loch Ness soit un dinosaure n'est en rien moins "enchanteur" que son origine surnaturelle antérieure : c'est même le contraire. Sa scientificisation est le prix à payer, la condition indispensable pour que l'enchantement se poursuive.
Absolument. Et pour les gens à peu près solide, ça devrait suffire. De l'enchantement comme expérience esthétique. Après tout, c'est le principe même de la civlisation : on ritualise, on transforme en jeux, en sports, en arts, des passions qui deviennent contradictoires avec le développement culturel et social mais dont on ne peut se passer.c'est une voie moyenne, la SF donne le moyen de faire semblant de croire, tout en sachant très bien que la croyance est fausse. En somme, c'est de la fiction qui fait aimer le fun.
Pff. Si tu veux. Dravot est pris pour le fils d'Alexandre ou Alexandre lui-même (me souviens plus) parce qu'il a un médaillon à son effigie et aussi parce qu'il a continué à combattre avec une flèche en pleine poitrine (en fait, plantée dans sa cartouchière). Et qu'au Kafiristan, le souvenir d'Alexandre se transmet depuis l'antiquité. Dravot est couronné par le grand prêtre. Est-ce qu'on couronne un dieu ? Il est un héros aux pouvoirs surnaturel – un roi – mais pas un dieu, si mes souvenirs sont bons.silramil a écrit :Ben non. Il est pris pour un dieu.
C'est un peu léger de ne commenter que les titres.
Et puis quoi ? Non seulement c'est à la charnière du XIXème et du XXème mais c'est Kipling écrivant un récit quasi-parfait de monde perdu. On n'est vraiment pas très loin du genre.
Ah, désolé.silramil a écrit :le divin est présent dans la SF, mais il est une escroquerie intellectuelle, comme une insuffisance du langage. A mon sens, il faudrait partir de là.
Si tu donnes ta conclusion comme point de départ, il ne sert à rien de discuter. (Moi au moins, j'ai précisé que M était une hypothèse.)
Publie simplement ton papier : La présence massive du divin dans la science-fiction : une escroquerie intellectuelle.
Je le lirai avec intérêt.
J'ai dit que le désenchantement était plutôt celui de Weber, dont j'ai donné la substance. Mais tu soulèves un point intéressant. Je vais y réfléchir sérieusement.Erion a écrit :Le réenchantement du monde, si on en croit Maffesoli qui a beaucoup écrit sur le sujet, il passe d'abord par la fin des "grands récits" : églises, idéologies, raison et progrès. Si ta théorie était juste, on devrait assister actuellement à une EXPLOSION de la SF, parce qu'elle réenchanterait le monde. Or, ce n'est pas le cas, on a vu plutôt la poussée de la fantasy et de la bit-lit.
Ce qui indiquerait, plutôt, que la SF est directement associée au désenchantement à travers le culte de l'avenir et du progrès.
Dans le texte, il n'est PAS présenté comme étant merveilleux. Il est sinistre, terrifiant, autoritaire, alors que Paul était charismatique. Pour le lecteur, Leto II n'est pas quelqu'un qu'on aimerait rencontrer.Lem a écrit :En fait, vous êtes assez sinistres comme lecteurs.Erion a écrit :Leto II n'a rien de merveilleux, tout au contraire.
Un homme-ver-géant-doué-de-prescience-qui-règne-sur-la-galaxie, tu ne trouves pas ça merveilleux ? Je ne peux rien pour toi.
Alors que Jésus, ca a l'air d'être un super pote, avec tous ses amis.
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Et le Dieu de l'Ancien Testament, tu crois qu'il est gentil ? Il extermine l'humanité. Il rase des villes. C'est la différence entre le Beau et le Sublime. Dans les pays anglo-saxons, on sait très bien que Dieu n'est pas cool. Au contraire. Le contact est très souvent terrifiant. Il n'y a que les naïfs pour croire que le divin, c'est sympa, écolo, et pro-droits de l'homme. J'ai vu Shutter Island, il y a deux jours, et il ya dedans un superbe monologue du chief de l'île-prison dont l'axiome de base est : "Dieu aime la violence."Erion a écrit :Dans le texte, il n'est PAS présenté comme étant merveilleux. Il est sinistre, terrifiant, autoritaire, alors que Paul était charismatique. Pour le lecteur, Leto II n'est pas quelqu'un qu'on aimerait rencontrer.
Par ailleurs, même sans y réfléchir très profondément…
… j'aurais pu faire cette objection tout de suite : l'avenir et le progrès sont typiquement l'un de ces métarécits auxquels le XXème siècle (en Europe en tout cas) s'est chargé de mettre fin.la SF est directement associée au désenchantement à travers le culte de l'avenir et du progrès
Comme le prouve parfaitement ton usage spontané de "culte".
Modifié en dernier par Lem le lun. mars 01, 2010 1:35 pm, modifié 1 fois.
Salut,
Pour L'Homme qui voulut être roi, la question est complexe, car il s'y trouve un confusion (voulue?) entre roi et dieu.
Le mythème de base est celui du roi endormi, salvateur, appelé à revenir dans son royaume pour le reprendre en main. C'est Arthur, Charlemagne, etc. En ce sens, Dravot, considéré comme le fils d'Alexandre, est le roi qui revient pour reprendre en main son pays et le sauver, son retour "miraculeux" étant lui-même marqué d'un miracle (la flèche).
Mais, dans toute société traditionnelle indo-européenne (ce qu'est celle des Kafirs du Kafiristan, relativement proche de celle de l'Inde ancienne), la royauté est divine par essence. Le roi, humain, est forcément investi par la divinité, participe de la divinité.
Et c'est là que le film (je cite le film, ayant lu le texte de Kipling depuis trop longtemps), entretient le flou: Dravot, roi de retour, est censé être immortel comme un dieu. Il outrepasse donc largement le rôle d'un simple roi (même de droit divin).
Du point de vue des sociétés traditionnelles, le propos n'est donc pas clair quand il aurait dû l'être, car "dieu" ou "roi de droit divin", ça n'est pas la même chose.
A+
Patrice
Pour L'Homme qui voulut être roi, la question est complexe, car il s'y trouve un confusion (voulue?) entre roi et dieu.
Le mythème de base est celui du roi endormi, salvateur, appelé à revenir dans son royaume pour le reprendre en main. C'est Arthur, Charlemagne, etc. En ce sens, Dravot, considéré comme le fils d'Alexandre, est le roi qui revient pour reprendre en main son pays et le sauver, son retour "miraculeux" étant lui-même marqué d'un miracle (la flèche).
Mais, dans toute société traditionnelle indo-européenne (ce qu'est celle des Kafirs du Kafiristan, relativement proche de celle de l'Inde ancienne), la royauté est divine par essence. Le roi, humain, est forcément investi par la divinité, participe de la divinité.
Et c'est là que le film (je cite le film, ayant lu le texte de Kipling depuis trop longtemps), entretient le flou: Dravot, roi de retour, est censé être immortel comme un dieu. Il outrepasse donc largement le rôle d'un simple roi (même de droit divin).
Du point de vue des sociétés traditionnelles, le propos n'est donc pas clair quand il aurait dû l'être, car "dieu" ou "roi de droit divin", ça n'est pas la même chose.
A+
Patrice
Sur Kipling, de toute façon, il n'y a aucune ambiguité quant à la véritable nature de Dravot : c'est bien un humain, trop humain. Il n'y a aucun recours au surnaturel ni à quoi que ce soit. La flèche est en pleine poitrine n'est pas plus un miracle que l'éclipse solaire qui sauve Tintin dans Le temple du soleil. On a accès à la vision des Kafiris mais on n'est jamais dupe : Dravot est un homme qui joue un rôle.
Oui, c'est pour ça que le judaïsme est science-fictif, et pas le catholicisme. Quand tu emploies le terme "Dieu", il recouvre déjà, des réalités très différentes.Lem a écrit :Et le Dieu de l'Ancien Testament, tu crois qu'il est gentil ? Il extermine l'humanité. Il rase des villes. C'est la différence entre le Beau et le Sublime.Erion a écrit :Dans le texte, il n'est PAS présenté comme étant merveilleux. Il est sinistre, terrifiant, autoritaire, alors que Paul était charismatique. Pour le lecteur, Leto II n'est pas quelqu'un qu'on aimerait rencontrer.
Et dans l'Empereur-Dieu, c'est la continuation du Bene Gesserit. Or, il s'agit de manipulation.
Même si le dieu des juifs est un dieu terrible, il est aussi le guide et le protecteur, celui qui apporte la puissance pour triompher de l'ennemi. Il est d'autant plus terrible que ses bienfaits sont grands. Rien de tel chez Leto II : il n'apporte quelque chose à l'Humanité qu'à partir du moment où il est tué, au moment où l'Humanité se libère de dieu. Il a juste créé une illusion nécessaire pour changer les bases.
Pour le lecteur, Leto II n'est clairement pas quelqu'un de désirable (le personnage sympathique, c'est l'énième Idaho), contrairement à Paul. Même si son projet est vaste, même s'il s'agit de morale et d'évolution, ce qu'il fait n'a rien à voir avec le passage de la mer Rouge. Il emprunte aux références divines, se fait passer pour un immortel (comme dans "l'Homme qui voulut être roi"), puis est tué à la fin comme Dravot, en chutant dans un ravin.
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… j'aurais pu faire cette objection tout de suite : l'avenir et le progrès sont typiquement l'un de ces métarécits auquel le XXème siècle (en Europe en tout cas) s'est chargé de mettre fin.la SF est directement associée au désenchantement à travers le culte de l'avenir et du progrès
Comme le prouve parfaitement ton usage spontané de "culte".[/quote][/quote]
Tu aurais pu, mais heureusement que tu ne l'as pas fait, tu aurais dit une très grosse bêtise.
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