Une table ronde sur l'Uchronie le 23 octobre

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jerome
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Une table ronde sur l'Uchronie le 23 octobre

Message par jerome » ven. sept. 10, 2010 6:46 am

Histoire et uchronie : L’histoire réinventée s’écrit comme un roman est le titre d'une uchronie qui aura lieu le Samedi 23 octobre de 14h à 17h à l'Auditorium Austerlitz du musée de l’Armée.

Et si Napoléon Ier avait perdu à Austerlitz ? Et si la France avait continué la guerre en 1940 ? Toutes ces questions ont la même origine : l’uchronie. Très en faveur auprès des écrivains, des historiens ou des journalistes, l’uchronie est une utopie appliquée à l’histoire : le rêve d’une histoire qui ne fut jamais.

Et si vous veniez en débattre au musée de l’Armée samedi 23 octobre 2010
après-midi avec :
• Éric Henriet, auteur de L’Uchronie, éd. Klinsieck.
• Laurent Henninger, chargé d’études à l’Institut de recherche stratégique
de l’École mlitaire (ISERM).
• Jacques Sapir, économiste et auteur de 1940, et si la France avait continué
la guerre ?, éd. Tallandier.
• Jean-Pierre Pécau, scénariste de bande dessinée, Série Jour J, éd. Delcourt.
• Laurent Poujois, auteur du roman L’Ange Blond, éd. Mnémos.


Réservation obligatoire avant le 20 octobre
histoire-ma@invalides.org - t. : 33 (0)1 44 42 51 73
Auditorium Austerlitz
Musée de l’Armée - Hôtel national des Invalides
129 rue de Grenelle - 75007 Paris (pas de parking)
Métro : Latour-Maubourg, Invalides, Varenne
RER : Invalides (ligne C)

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Jérôme
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bormandg
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Message par bormandg » jeu. oct. 28, 2010 10:15 pm

Quelques photos sur une page dédiée Picasa
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Lensman
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Message par Lensman » ven. oct. 29, 2010 8:35 am

Tant qu'à faire, autant ajouter le compte-rendu fait par J.-C. Carbonel (on excusera la forme bancale et l'embrouillamini possible dans les notes, entièrement de ma faute, car j'ai essayé de trafiquer le format du document de JCC):

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Histoire et Uchronie Auditorium Austerlitz, Musée de l’Armée. Hôtel national des Invalides 23 octobre 2010 (NB : tous les notes sont des commentaires du rédacteur)
PRESENTATION GENERALE Participants à la table ronde : Eric Henriet (EBH): auteur de deux ouvrages analytiques sur l’Uchronie (principalement littéraire mais aussi cinéma, BD, chanson, objet ....) Laurent Henninger (LH) : chargé d’études à l’Instut de Recherche Stratégique de l’Ecole Militaire, spécialiste de l’histoire soviétique, directeur de collection chez Tallandier Jacques Sapir (JS) : économiste, professeur à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, auteur de « 1940, et si la France avait continué la guerre ? » Laurent Poujois (LP) : producteur de courts-métrages, auteur de sciencefiction, (auteur de l’uchronie « L’Ange Blond ») Jean-Pierre Pécau (JPP) : enseignant en histoire, auteur de nombreux articles sur le jeu de rôle et les jeux de stratégie, scénariste des séries de bandes dessinées « le Jour J » , « le Grand Jeu » , « l’Histoire Secrète », « Impériales » Spectateurs : auditorium de 150 places, bien rempli. Présentation par EBH : EBH souligne que c’est la première fois en France que l’Uchronie est présenté dans un cadre historique (Musée –d’histoire- de l’Armée) et non dans un cadre littéraire / cinématographique. Définition de l’uchronie : « L’histoire telle qu’on peut la refaire logiquement » (Charles Renouvier, auteur, inventeur du mot « uchronie ») Selon EBH l’uchronie a trois facettes un jeu ludique « divertissement mélancolique » (1) un message critique (politique) une interrogation sur l’Histoire L’uchronie se caractérise par un point de divergence c’est à dire l’événement à partir duquel l’Histoire diverge. Ouvrage fondateur : « Napoléon et la conquête du monde » par Louis Geoffroy en 1836. Dans cet ouvrage apparaissent aussi deux effets classiques des romans uchroniques : 1. les clins d’œil au lecteur (par référence à des lieux historiques dans « notre » ligne temporelle) 2. mise en abîme avec un roman dans le roman qui raconte « notre » Histoire.
Ce fait nuit aussi aux uchronies trop « à clé »... ainsi le 1er tome du « Grand Jeu » a été mal reçu par les amateurs de BD qui n’y comprenaient rien et JP Pécau a reçu comme consigne de son éditeur d’alléger les références historiques ... ce qui fait perdre beaucoup d’intérêt à la série !
LES INTERVENTIONS Intervention de LH : l’uchronie peut être un « divertissement mélancolique » mais c’est aussi un jeu (au sens mathématique du terme) et un exercice pour la réflexion des historiens. C’est une forme de liberté pour les historiens. Certes l’uchronie n’est pas l’Histoire mais c’est une histoire alternative et un exercice d’Histoire indispensable pour explorer les processus historiques. Le danger c’est d’une part d’attirer des lecteurs que l’ont ne souhaiterait pas (« révisionistes » et autres) et d’autre part de se laisser influencer par les évènements considérés comme sur ou sous-déterministes dans l’Histoire (exemple : une victoire de Napoléon à Waterloo n’aurait pas changé grand-chose, une défaite à Austerlitz aurait tout changé). Il faut se méfier des obsessions sur le fantasme de la victoire nazie, qui trouve son origine dans une fascination pour l’esthétique nazie « nazisme de sex-shop ». Et dégonfler des mythes comme l’excellence militaire allemande ou la nullité de l’armée française de 1940. Cette vision est celle qui a été donnée par le procès de Riom et la propagande de Vichy. C’est donc le point de vue de Vichy qui a « gagné la guerre ». Il faut lire l’introduction de « France 1940 » car elle propose une méthodologie pour l’expérimentation historique tout en restant dans les hypothèses réalistes. C’est un ouvrage très important car c’est la première incursion de l’uchronie « sérieuse » (par des historiens) en France. EBH note qu’il y a 3 tabous pour les historiens / auteur d’uchronies en France : L’Indochine, L’Algérie, Mai 40. Intervention de BS : Pour écrire sérieusement un ouvrage comme « France 1940 » il faut se donner des règles pour une histoire alternative réaliste 3 : Règles logistiques Règles économiques (ce sont les commandes militaires françaises depuis 1936 –puis anglaises ensuite- qui ont permis de lancer l’industrie américaine à un moment critique pour celle-ci. Et l’arrêt des commandes en juin 40 a posé un problème industriel aux américains. Règles tenant aux structures décisionnelles incluant leurs variables psychologiques. « on ne change pas les cerveaux [des décideurs politiques et militaires] et encore moins leur contexte décisionnel. Ainsi la décision de demander un armistice n’a été prise que très tardivement selon les témoignages dont nous disposons : Churchill, De Margerie (sur Paul Reynaud) 4 . Darlan 5 déclarait le 2 juin vouloir continuer la guerre avec les anglais alors que quelques jours plus tard il va soutenir l’Armistice. A l’inverse certains militaient pour une fin de guerre rapide –donc pour un armistice- dès 1939. Notre point de divergence a inversé les influences sur Paul Reynaud en redonnant la main à Margerie et au général Noguès (6) . L’uchronie [France 40] ne peut prétendre respecter les impératifs de réalisme que jusqu’à fin 1940. Au-delà on doit raisonner de manière plus macroscopique, il n’est plus possible de garantir le réalisme dans les détails. Intervention de LP : A l’origine de « L’Ange blond » il y avait un projet de jeu vidéo qui a dérivé. L’univers a été construit puis il a fallut le justifier à la fois historiquement et technologiquement. C’est comme çà que je suis arrivé à un obscur amiral de Napoléon qui a été mon point de divergence. Ma démarche a donc été inverse de celle de LH : je n’ai pas changé un élément et regardé ce qui se passait derrière mais au contraire j’ai remonté le temps pour voir ce que je devais modifier pour avoir un monde cohérent. Intervention de JPP : L’important c’est que tout n’est pas joué, il y a toujours plusieurs options. L’Histoire n’a pas de Sens. (LH ajoute que non seulement elle n’a pas de Sens mais une multitude de sens, parfois divergents et contradictoires.) Tout peut changer avec des variations plus ou moins importantes. C’est un apport de l’uchronie qui peut avoir une importance pour la compréhension de l’actualité (du Présent). Le genre uchronique en tant que genre littéraire est très vaste avec des variantes comme le Steampunk (uchronie non datée inventée comme un gag par 3 auteurs de Science-Fiction américains qui se sont demandés ce qui se serait passé si la révolution de l’information avait été conjointe à la révolution industrielle, ce qui est imaginable sur la base des « Machines à Différences » inventées par Charles Babbage durant les années 1820-1870) (7) . (Pour EBH le succès du Steampunk vient de ce qu’il présente les avantages du confort technologique moderne tout en gardant un rythme de vie, moins stressant, du XIXe siècle) La série « l’Histoire Secrète » était là pour « réenchanter le monde ». EBH précise que l’uchronie ne nie pas l’Histoire puisqu’elle est une alternative à l’Histoire. Il souligne qu’il y a eu une occasion ratée de valoriser l’uchronie en 1931 quand Squire (8) a réalisé une anthologie d’histoire alternative écrite par des historiens comme Winston Churchill ou André Maurois. Malheureusement la nouvelle d’A. Maurois « Si Louis XVI... (9) » n’a eu aucun succès dans sa version française. Les QUESTIONS DE LA SALLE L’uchronie dans les pays anglo-saxons. EBH et LH indiquent que la notion française d’uchronie est traduite de 3 façons en anglais :
Uchronia : le mot initialement utilisé jusque dans les années 30, peu utilisé de nos jours Alternate histories : c’est le terme favorisé par les scientifiques et les auteurs de romans de fiction Counterfactual histories : c’est le terme, d’abord utilisé par les universitaires, qui est maintenant souvent utilisé. Il a été introduit par les psychiatres qui parlent de counterfactual psychology pour décrire les cas de personnes dont la vie s’est arrêtée suite à un événement et qui se cantonnent dans leur passé ou celles qui sont atteintes du « syndrome du survivant » et s’en veulent de survivre. Les archives peuvent-elles remettre en cause des uchronies ? JS indique c’est peu probable, au contraire l’ouverture des archives russes a permis de confirmer certaines hypothèses historiques (exemple : le massacre de Katyn) Uchronies et guerres futures EBH rappelle que les romans de « guerres futures » ne sont jamais des uchronies même lorsqu’ils se révèlent ensuite visionnaires (Wells « la guerre dans les airs (10) ») car l’objectif des auteurs de ce genre 11 est toujours futuriste. Uchronie et vision de l’histoire Pour LP et LH, en France nous avons une vision figée de l’histoire avec un début et une fin. Aux USA, en position dominante sur la scène mondiale peut avoir une vision du monde plus ouverte. EBH rappelle qu’il y a des pays comme le Japon où il n’y a pas d’Histoire (mais une fusion entre Mythe et Histoire comme en Chine), aussi en URSS (JS rappelle qu’avant le stalinisme il y avait des auteurs d’uchronie, c’est parce que l’Histoire est devenue un enjeu politique et donc contrôlée par le régime qu’il n’y a plus eu d’uchronie en URSS à partir des années 30). JS suggère que l’on écrit des uchronies quand il y a des cadavres dans les placards (exemple la Guerre Civile US) car cela mène à la contestation de l’ordre établi ou du moins à l’affirmation que l’ordre établi n’est pas inéluctable. Floraisons des uchronies fictionnelles de nos jours ? Selon JPP cela pourrait venir de ce que l’Histoire de l’Europe s’arrête et donc que les européens s’inventent des Histoires alternatives. Les autres membres de la table ronde trouvent cette vision trop pessimiste. EBH souligne par contre que depuis 1995 il y a deux genres qui se développent dans la fiction (livres, films, jeux) : les uchronies et la fantasy (le Seigneur des Anneaux , Donjons et Dragons...) parce qu’il y a une crise de la science fiction technologique (due au déclin de la conquête technologique –en particulier spatiale- pour laquelle on ne fait que dire qu’il n’y a « plus d’argent ») , que le roman de cape et d’épée est tombé en désuétude par méconnaissance de l’Histoire réelle (12) . Les histoires de complots Pour LH il est logique qu’il y ait dans la réalité plus de complots aujourd’hui qu’autrefois : la recherche de plus de transparence dans les décisions politiques / économiques implique que certaines décisions doivent être prises de manière cachée. Ce n’est pas parce que la « théorie du Complot » [international] est farfelue qu’il n’y a pas de [petits] complots. Histoire et Mémoire LH souligne que la tentative de réduire l’Histoire à la Mémoire est combattue par les enseignants français. Par ailleurs les élèves français sont parmi les meilleurs en histoire et un sondage récent a montré que pour 85% des sondés le peuple français se voit comme le produit de son histoire. EBH souligne que cette approche serait plutôt de nature à figer l’Histoire...et donc expliquerait la difficile percée de l’uchronie en France

Notes :

(1) Terme utilisé par Emmanuel Carrère, scénariste de cinéma, membre du Jury du Festival de Cannes 2010
(2)Ainsi quasiment tous les personnages de la série « le grand jeu » de JP Pécau sont des personnages historiques, naturellement dans des « variantes » propres à l’univers. Sa technologie est aussi dérivée de projets réels (sauf le 3 e volume !)
(3) Pour l’avoir lu je trouve que les combats individuels (y compris rencontres navales) avantagent un peu trop les Alliés pour être toujours «réaliste »
(4) Roland de Margerie : diplomate attaché au cabinet de Paul Reynaud au printemps 40
(5) Amiral François Darlan, commandant de la flotte français en 1940
(6) Général Charles Noguès, commandant les forces françaises en AFN en 1940
(7) William Gibson et Bruce Sterling « la machine à différence » publié en VO en 1991
(8 ) JC Squire: If It Had Happened Otherwise: Lapses Into Imaginary History, Longmans, Green 1931.
(9) En VO :” If Louis XVI had an Atom of Firmness” réduit à “si Louis XVI...” pour la VF dans Mes songes que voici, Grasset 1932.
(10) Wells est un spécialiste puisqu’il a aussi prédit les « cuirassés de terre ». A noter aussi le fameux ouvrage, qui n’est pas une guerre future mais qui fait fantasmer car tellement proche de la réalité « Futility » écrit par Morgan Robertson en 1891 et qui décrivait en détails le naufrage du paquebot géant « Titan » suite à l’abordage d’un iceberg !!!
(11) En France les spécialistes du genre à l’époque pré-1914 sont Driant « Capitaine Danrit » et Robida.
(12) Ce fait nuit aussi aux uchronies trop « à clé »... ainsi le 1er tome du « Grand Jeu » a été mal reçu par les amateurs de BD qui n’y comprenaient rien et JP Pécau a reçu comme consigne de son éditeur d’alléger les références historiques ... ce qui fait perdre beaucoup d’intérêt à la série !

(Fin du compte-rendu)
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jerome
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Message par jerome » mar. déc. 21, 2010 9:53 am

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