Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Lensman
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Message par Lensman » mer. août 18, 2010 10:47 am

MF a écrit : De certaines "vérités" sur l'univers, pourquoi des poètes ne seraient-ils pas mystérieusement avertis tout autant qu'un physicien du XXe siècle ?
[/quote]

Personnellement, je me demande plutôt pourquoi ils en seraient avertis (mystérieuresment ou pas). Mais bon, d'un autre côté, je ne suis pas poète non plus, les rayons cosmiques et les boissons alcoolisées ne dovient pas avoir le même effet sur mon cerveau...
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jeandive
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Message par jeandive » mer. août 25, 2010 3:37 pm

sans doute en a -t-on deja parlé ici , mais vu le nombre de messages ...et je n'ai pas trouvé le titre dans " recherche"
donc juste pour info :
" fantomes et fantoches " de maurice renard , FN ed., col. super poche 1999 , avec du materiel de claude deméocq , qui cite dans sa longue preface le désormais fameux texte de renard , dans son contexte litteraire , a la section " le merveilleux scientifique "

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NeF
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Message par NeF » ven. oct. 01, 2010 12:35 pm

Désolé pour le "up", mais j'ai l'esprit d'escalier, et c'est seulement maintenant que je crois avoir trouvé ce qui cloche dans la fameuse préface de Lehman (désolé aussi si je répète des choses déjà dites).

Fait 1 : il paraît évident que la SF souffre bel et bien d'un "déni" de la part de l'intelligentsia littéraire - même si ce déni ne concerne pas que la seule SF, mais les littératures de l'imaginaire, je l'ai déjà dit.

Fait 2 : on peut admettre, au vu de la liste d'exemples de Lehman, que certaines oeuvres de SF abordent des questions métaphysiques et/ou religieuses - même si cela peut être purement fortuit, et non pas constitutif de la "sensibilité" SF en soi.

En revanche, il n'y a pas la moindre preuve que le fait 1 soit corrélé au fait 2 - il faudrait au moins une recension d'un corpus significatif de critiques d'ouvrages de SF faisant apparaître une réticence tacite pour l'aspect métaphysique de ces oeuvres (c'est ce que réclamerait un prof d'histoire littéraire à qui Lehman viendrait soumettre sa thèse).

Et surtout, il faudrait montrer que toute oeuvre abordant des questions métaphysiques se voit rejetée, qu'elle soit SF ou non.

Et là, malheureusement, les contre-exemples sont nombreux (par ordre alphabétique) :
- Becket (ex : "En attendant Godot" au titre explicite) ;
- Borges et ses concepts impossibles ;
- Buzzati (et le vide existentiel dans "Le Désert des Tartares") ;
- Kafka qu'on a beaucoup lu à la sauce métaphysique ;
- Ionesco (ex : "Le Roi se meurt") ;
- Sartre ("Huis clos" sur l'enfer ou "Les Mouches" sur les relations hommes-dieux)
- plus tous les écrivains catholiques ayant connu un bon succès critique et/ou public(Claudel, Mauriac, Cesbron), et d'autres que j'oublie sans doute.

Il faudrait donc trouver une autre raison (la stratégie des éditeurs et la paresse des critiques, par exemple)...

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » ven. oct. 01, 2010 12:49 pm

Je voudrais remercier chaleureusement Serge Lehman qui me rend hommage dans son interview du Monde daté d'aujourd'hui :

" Superposez les deux registres et projetez le résultat à cinquante ans, vous obtiendrez une amplification des peurs contemporaines. La bonne science fiction est celle qui parvient à aller au delà. "

Ben ouais.

Et c'est une parfaite description des Futurs Mystères de Paris, série commencée, je le rappelle, au siècle dernier.

Faut croire que c'est toujours comme ça quand on est trop en avance sur son temps.

:lol: :lol:
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Message par MF » ven. oct. 01, 2010 1:22 pm

En plus de te rendre hommage, il flingue à vue la notion de blocage fictionnel par la Singularité souvent exposé comme une des causes de la "disparition" de la SF : " Superposez les deux registres et projetez le résultat à cinquante ans, vous obtiendrez une amplification des peurs contemporaines. La bonne science fiction est celle qui parvient à aller au delà. "

Lu au pied de la lettre, la Singularité ne devient qu'une peur parmi d'autre et la bonne SF est celle qui parvient à aller au delà.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

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Lensman
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Message par Lensman » ven. oct. 01, 2010 1:30 pm

MF a écrit :En plus de te rendre hommage, il flingue à vue la notion de blocage fictionnel par la Singularité souvent exposé comme une des causes de la "disparition" de la SF : " Superposez les deux registres et projetez le résultat à cinquante ans, vous obtiendrez une amplification des peurs contemporaines. La bonne science fiction est celle qui parvient à aller au delà. "

Lu au pied de la lettre, la Singularité ne devient qu'une peur parmi d'autre et la bonne SF est celle qui parvient à aller au delà.
La peur du blocage par la "Singularité" est effectivement peu compréhensible. Il suffit de lire la SF depuis les années quarante du siècle dernier pour s'en rendre compte...
J'ai l'impression que la critique qui s'inquiète de la Singularité n'a pas lu de SF...
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Nébal
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Message par Nébal » ven. oct. 01, 2010 1:36 pm

Moi j'aimerais toujours qu'on m'explique ce que la Singularité a de singulier.

@ RCW : Toujours aussi modeste, hein ?

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Message par Lensman » ven. oct. 01, 2010 1:40 pm

Nébal a écrit :Moi j'aimerais toujours qu'on m'explique ce que la Singularité a de singulier.
Justement, rien... La situation de se trouver, ou de croire se trouver confronté à des problèmes trop complexes pour être appréhendés est un motif habituel, on peut même dire banal, de la SF depuis... depuis... Après, on voit si la manière dont c'est amené tient debout et, surtout, est intéressante, et ce que l'auteur en fait....
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Message par Nébal » ven. oct. 01, 2010 1:43 pm

Ben j'ai même pas l'impression que ça soit spécifique à la SF... Pour moi, c'est ce qui a toujours rendu toute prospective à moyen ou long terme hasardeuse pour ne pas dire totalement foutraque, et cette Singularité-là n'a rien de bien particulier par rapport à quelques révolutions considérables de l'histoire humaine. Ce qui n'empêche pas, et n'a jamais empêché, de s'amuser avec de chouettes fictions qui essayent de s'en dépatouiller de manière relativement plausible...

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Message par Lensman » ven. oct. 01, 2010 1:50 pm

Nébal a écrit : cette Singularité-là n'a rien de bien particulier par rapport à quelques révolutions considérables de l'histoire humaine. Ce qui n'empêche pas, et n'a jamais empêché, de s'amuser avec de chouettes fictions qui essayent de s'en dépatouiller de manière relativement plausible...
Pour tout dire, à supposer que ça veuille dire quelque chose, personne ne sait à quoi ça ressemblera... sauf à s'amuser à l'imaginer en tant que SF, ce qui est justement un des intérêts... alors...
Vraiment, ça fait partie de tous ces machins qui semblent angoisser des tas de critiques pour des raisons qui m'échappent... la plupart des gens sont déjà totalement largués par ce qui arrive en temps normal, dans les conditions habituelles, et ce depuis longtemps. Alors...
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Message par Gérard Klein » ven. oct. 01, 2010 2:09 pm

Lensman a écrit :
Nébal a écrit :Moi j'aimerais toujours qu'on m'explique ce que la Singularité a de singulier.
Justement, rien... La situation de se trouver, ou de croire se trouver confronté à des problèmes trop complexes pour être appréhendés est un motif habituel, on peut même dire banal, de la SF depuis... depuis... Après, on voit si la manière dont c'est amené tient debout et, surtout, est intéressante, et ce que l'auteur en fait....
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Rien… Non. La Singularité a déjà été évoquée dans les années 1940, de façon particulièrement explicite mais évidemment sans employer le terme, par Fredric Brown dans sa très courte nouvelle, la Question qui s'achève comme on sait sur la réponse du Superordinateur: "Maintenant, il y en a un." (Un Dieu). Et comme le disait en substance Michel Jeury, "ce qui arriva ensuite ne peut pas être dit avec des mots humains.
J'ai un peu de mal à percer le snobisme de Nébal sous son aveu prétendu d'ignorance. Comme chacun sait, la Singularité est un concept extrêmement simple: dans un avenir proche, la capacité de logique et de calcul des ordinateurs dépasse celle des humains. À partir de là, ils s'auto-développent à une vitesse foudroyante, et strictement rien ne put être prévu de leurs possibilités et comportements notamment à l'endroit de leurs créateurs involontaires, les humains. Typique d'une évolution non linéaire dont les conditions initiales sont insaisissables et dont le cours ne peut pas être prédit à partir de ce point, la Singularité.

C'est donc une idée précise, intéressante et hautement problématique quant à notre avenir. Je ne crois absolument pas à la vraisemblance de sa réalisation pour des raisons très profondes que j'ai exposées ailleurs et qui tiennent à notre échec total en matière d'intelligence artificielle.

Mais rien ne l'empêche d'être évoquée, voire utilisée, par des écrivains de science-fiction, ainsi Charles Stross et tout récemment Robert J. Sawyer dans sa trilogie Éveil, Veille et merveille, en cours de publication dans Ailleurs et demain, où il décrit l'émergence, dans des conditions très particulières, voire singulières, d'une Intelligence sur le net..
La Singularité ne pourrait donc pas être un épisode comme un autre dans l'histoire humaine comme le croit (ou fait semblant de le croire) naïvement Nébal: elle signifierait tout simplement la fin de la suprématie humaine et probablement de l'humanité, ce qui serait au moins pour nous un accident d'une certaine ampleur. En particulier, la seule limite au développement de l'I.A. étant ses besoins énergétiques du fait de l'incontournable second principe de la thermodynamique, il en résulterait une compétition féroce entre elle et l'humanité pour le contrôle des sources d'énergie.
Sawyer imagine, dans son optimisme foncier que certains qualifieront de béat, une issue moins sombre, fondée sur une collaboration.
Mon immortalité est provisoire.

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Message par Lensman » ven. oct. 01, 2010 2:21 pm

C'est un motif que l'on peut décliner de manière raffinée.
Je crois que l'interrogation de Nebal venait surtout du fait que certains critiques (?) voient, dans le concept de "singularité", quelque chose qui participerait à une "crise" de la SF... Et de fait, non seulement ce n'est pas une gêne, mais c'est un de ses sujets les plus communs...
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Nébal
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Message par Nébal » ven. oct. 01, 2010 2:22 pm

"Snobisme", allons bon...

Je crois voir ce que la notion recouvre.

Ma question - peut-être naïve - est ailleurs ; peut-être faut-il que je la reformule, alors : en quoi l'impossibilité de déterminer ce qui se passera après la Singularité est-elle "singulière" ? Je n'ai jamais cru en la prospective, et la Singularité ne me paraît pas plus "singulière" que nombre de bouleversements de l'histoire humaine, tels que l'avènement de l'agriculture, l'invention de l'écriture, la découverte de la roue, les premiers systèmes philosophiques et juridiques, le développement du monothéisme, les conquêtes d'Alexandre, l'empire romain, l'avènement du christianisme, la chute de Rome et les invasions barbares, l'avènement de l'Islam... inutile que je continue la liste. Autant d'événements majeurs, largement imprévisibles, et à partir desquels on ne pouvait plus rien déterminer quant à la tournure ultérieure des choses. Qu'est-ce que la Singularité a de "singulier" par rapport à tout ça ?

C'est ça la question que je me pose. Parce que j'ai franchement l'impression que cette théorie, telle qu'elle est formulée, sent un peut l'historicisme et la "fin de l'histoire"... et ça me gêne un peu.
Modifié en dernier par Nébal le ven. oct. 01, 2010 2:26 pm, modifié 3 fois.

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Message par Lensman » ven. oct. 01, 2010 2:22 pm

C'est un motif que l'on peut décliner de manière raffinée.
Je crois que l'interrogation de Nebal venait surtout du fait que certains critiques (?) voient, dans le concept de "singularité", quelque chose qui participerait à une "crise" de la SF... Et de fait, non seulement ce n'est pas une gêne, mais c'est un de ses sujets les plus classiques... bizarre...
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Message par Gérard Klein » ven. oct. 01, 2010 2:27 pm

Nébal a écrit :"Snobisme", allons bon...

Je crois voir ce que la notion recouvre.

Ma question est ailleurs ; peut-être faut-il que je la reformule, alors : en quoi l'impossibilité de déterminer ce qui se passera après la Singularité est-elle "singulière" ? Je n'ai jamais cru en la prospective, et la Singularité ne me paraît pas plus "singulière" que nombre de bouleversements de l'histoire humaine, tels que l'avènement de l'agriculture, l'invention de l'écriture, la découverte de la roue, les premiers systèmes philosophiques et juridiques, le développement du monothéisme, les conquêtes d'Alexandre, l'empire romain, l'avènement du christianisme, la chute de Rome et les invasions barbares, l'avènement de l'Islam... inutile que je continue la liste. Autant d'événements majeurs, largement imprévisibles, et à partir desquels on ne pouvait plus rien déterminer quant à tournure ultérieure des choses. Qu'est-ce que la Singularité a de "singulier" par rapport à ça ?

C'est ça la question que je me pose. Parce que j'ai franchement l'impression que cette théorie, telle qu'elle est formulée, sent un peut l'historicisme et la "fin de l'histoire"... et ça me gêne un peu.
Non, ça n'est pas la fin de l'Histoire. Ce serait la fin de l'Espèce, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Quelque chose d'encore plus radical que l'astéroïde qui a mis fin au règne des dinosaures et a ouvert la voie aux mammifères.

Quant à la prospective, je reconnais que je suis un peu partisan, l'ayant pratiquée, souvent avec succès. Nébal devrait lire assidûment l'excellente revue Futuribles qui a publié du reste dans ses deux derniers numéros (septembre et octobre 2010) deux très bons articles illustrés de Lacaze sur les prospectives d'Albert Robida qui a souvent vu très juste sur notre Vingtième siècle.
Mon immortalité est provisoire.

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