L'auteur devrait-il vivre de sa plume ?

Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m

Répondre
Avatar du membre
Don Lorenjy
Messages : 1442
Enregistré le : jeu. mars 09, 2006 9:03 am
Contact :

Message par Don Lorenjy » sam. oct. 02, 2010 6:53 pm

Jean-Claude Dunyach a écrit : De plus, si l'idée de lire les livres devant un public qui paye se généralise, cela deviendra ipso facto une exploitation industrielle. Pas de chance :-)!
Je ne vois pas pourquoi tu penses que généralisation = industrialisation.
Le théâtre ne s'est pas industrialisé quand le cinéma l'a fait. Et les deux cohabitent. On voit même des têtes d'affiche fortement markettées dans la logique industrielle du cinéma rester dans le domaine artisanal au théâtre (nombre de représentations limité, nombre d'entrées limité au nombre de représentation...). Bref, les deux approches ne s'annulent pas et sont poreuses sans se confondre.

Je me pose plus la question de l'offre et de la demande en ce qui concerne une approche artisanale de la littérature : les auteurs sont-ils prêts à se mettre en scène pour faire passer leurs écrits autrement que par le support livre (audio ou imprimé), et les "lecteurs" sont-ils prêts à consommer l'écrit autrement que dans un rapport individuel avec le livre ?
Les marques Don Lorenjy et Don Lo sont retirées des rayons

Fabien Lyraud
Messages : 2278
Enregistré le : mer. oct. 24, 2007 10:35 am
Localisation : St Léonard
Contact :

Message par Fabien Lyraud » sam. oct. 02, 2010 7:02 pm

Pour rebondir sur ce que dit Joseph, les anglo saxons distinguent la fiction qui est la création littéraire dans son ensemble et la littérature qui en est la frange la plus ambitieuse. Nous, n'avons pas cette dichotomie, ce qui est la cause de la césure dont parle Joseph.

En ce qui concerne la littérature d'exploitation, Jean Marc Lofficier aime répéter qu'il y a là des auteurs qui innovent et qui souvent le font en suivant des thèmes très éloignés de la littérature ambitieuse. Jean Marc illustre ça avec...Max André Rayjean notamment et explique que certains de ses romans développent des idées spéculatives rarement vues ailleurs. Et le problème c'est qu'en France, les auteurs ambitieux ne les ont pas repris pour en faire autre chose contrairement à ce qui passe pour la littérature d'exploitation américaine. Lorsqu'un auteur populaire innove, là bas, il y a toujours un auteur ambitieux pour reprendre le thème novateur dans un autre contexte et en faire le moteur d'une oeuvre plus ambitieuse. Donc SF populaire et SF ambitieuse sont les deux faces d'une même pièce.
Bienvenu chez Pulp Factory :
http://pulp-factory.ovh


Le blog impertinent des littératures de l'imaginaire :
http://propos-iconoclastes.blogspot.com

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » sam. oct. 02, 2010 7:03 pm

Gregory Drake a écrit :
J'ai bien compris, merci. D'ailleurs Bernard-Henri Levy est un grand philosophe car il écrit des livres d'une portée extraordinaire et pas parce que les médias le présentent comme tel. Il n'y a pas de manipulation mentale. .
Ce n'est pas de la manipulation mentale, c'est de la fausse information...
Si tu lis BHL, tu t'aperçois tout de suite que ce n'est pas un grand philosophe.
Il y aurait manipulation si, après l'avoir lu, tu continuais à penser que c'est un grand philosophe (ou alors, effectivement, il n'y a pas manipulation mentale, mais c'est que tu es fou...)
Oncle Joe

Avatar du membre
Sybille
Messages : 1115
Enregistré le : sam. sept. 30, 2006 11:10 am

Message par Sybille » sam. oct. 02, 2010 7:13 pm

Don Lorenjy a écrit :Je me pose plus la question de l'offre et de la demande en ce qui concerne une approche artisanale de la littérature : les auteurs sont-ils prêts à se mettre en scène pour faire passer leurs écrits autrement que par le support livre (audio ou imprimé), et les "lecteurs" sont-ils prêts à consommer l'écrit autrement que dans un rapport individuel avec le livre ?
Quel intérêt ?
Je veux dire : évidemment, on peut apprécier ponctuellement la lecture d'une oeuvre par une belle voix montée sur scène, mais la lecture est avant tout... de la lecture.
Pourquoi consommer le livre autrement ?
En général, quand on cherche "autre chose", c'est que le truc initial ne nous convient pas...

Avatar du membre
Erion
Messages : 5025
Enregistré le : sam. oct. 21, 2006 10:46 am

Message par Erion » sam. oct. 02, 2010 7:53 pm

Don Lorenjy a écrit :
Erion a écrit :
Adapté au secteur du livre : le prix Goncourt, argument marketing par excellence, fait vendre 10 fois plus (100 fois ?) de livres qu'il n'en fait lire. Donc tu peux répéter tant que tu veux, ça ne te donne pas raison.
Sauf que c'est FAUUUuuUUUuux. Il y a des Goncourt qui ne vendent pas. Nan, mais vous lisez ce qu'on écrit, hein ? Il y a même des non-prix Goncourt qui vendent beaucoup plus que le Goncourt.
Sauf que c'est vraaaaiiii, non mais tu lis ce que j'écris ? Je parle de proportion : même un échec de Goncourt (disons 10 000 ex vendus) sera dix fois moins lu (1000 ex) qu'il n'est vendu.
Et C'EST de la manipulation mentale, parce que convaincre quelqu'un d'acheter un livre dont il n'a rien à secouer parce que c'est le Goncourt c'est une manipulation qui n'est pas physique.
Non, ce n'est pas de la manipulation mentale. La manipulation mentale, c'est de te convaincre qu'un mauvais livre est un bon livre. D'autre part, un Goncourt obtenu, c'est aussi un coût (plus de mise en place, promotion plus importante). Par conséquent, une mévente d'un Goncourt pèse plus sur les comptes d'un éditeur que les ventes médiocres d'un livre sans promotion.
Le Goncourt met en avant un ouvrage, il ne l'impose pas. Certaines grosses ventes surprises comme "Inconnu à cette adresse" ou "mémoire d'un paysan bas-breton", n'ont bénéficié d'aucun effet goncourt, ni marketing à l'origine.
Et les gens n'achètent pas un livre dont ils n'ont rien à secouer. Ils VEULENT acheter un livre et le fait d'avoir un goncourt est un critère comme un autre, dans leur décision. C'est pour ça que ces dernières années, le prix Goncourt des Lycéens a des ventes de plus en plus fortes, le public estimant que c'est un prix moins trafiqué.
Tu penses sérieusement que les lycéens font de la manipulation mentale ????

Le choix est énorme, plus gigantesque qu'il n'a jamais été, aussi, il faut bien trouver des moyens pour dire aux lecteurs potentiel qu'un ouvrage susceptible de les intéresser existe. C'est CA le marketing. Et bon sang, si les éditeurs français s'y mettaient vraiment au lieu de bricoler, qu'est-ce qu'on avancerait.

C'est sans doute au Japon qu'ils ont développé ça au maximum (trop, même, mais on est pas obligé d'aller jusqu'à ces excès). Les mangas sont publiés par chapitre dans les magazines, avec coupon réponse des lecteurs pour indiquer les titres préférés. Un manga est considéré comme populaire s'il reçoit 1 suffrage sur 5. Ca paraît pas mirobolant, mais quand on sait qu'il y a environ une 20aine d'histoire par magazine, on mesure mieux la difficulté.
On étudie attentivement les coupons réponses (avec trois niveaux, le premier, c'est les 100 premiers coupons, puis un échantillon de 1000, puis la totalité) pour adapter soit les séries, soit la mise en avant des auteurs, ou leur place dans le magazine (voire déplacer vers un autre magazine pour un public plus spécialisé).

Alors, quand on vient se plaindre des "ravages" du marketing dans l'édition en France, ben désolé, je rigole. Y'a rien qui se fait en France, mais rien de rien. Ce qui est sidérant, c'est plutôt l'incompétence générale qu'une prétendue manipulation.

Si ce qui se fait pour promouvoir les livres, c'est de la manipulation mentale, alors ce que fait ActuSF c'est de la manipulation mentale (regardez les bandeaux autour du site), ce que fait le Cafard, c'est pareil. Bref, dès qu'on parle d'une oeuvre, dès qu'on la cite, c'est de la manipulation mentale.
Z'allez pas aller loin avec ça.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/

Fabien Lyraud
Messages : 2278
Enregistré le : mer. oct. 24, 2007 10:35 am
Localisation : St Léonard
Contact :

Message par Fabien Lyraud » sam. oct. 02, 2010 8:07 pm

le prix Goncourt, argument marketing par excellence, fait vendre 10 fois plus (100 fois ?) de livres qu'il n'en fait lire.
Ca c'est l'effet snobisme. Dans certains milieux il est de bon ton de faire croire qu'on a un certain niveau de culture alors que ce n'est pas le cas. Et dans ces milieux on achète les Goncourt et les Renaudot, on les met bien en évidence dans sa bibliothèque comme ça ils sont en bonne place quand on reçoit. Cela permet à certains de donner l'illusion de tenir un certain rang dans la société alors que l'on a un niveau de culture assez quelconque.
Bienvenu chez Pulp Factory :
http://pulp-factory.ovh


Le blog impertinent des littératures de l'imaginaire :
http://propos-iconoclastes.blogspot.com

Avatar du membre
bormandg
Messages : 11906
Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 2:56 pm
Localisation : Vanves (300 m de Paris)
Contact :

Message par bormandg » sam. oct. 02, 2010 8:59 pm

En traitant le marketing de manipulation mentale, Don Lorenjy fait la même confusion d'objet que ceux qui prétendent que l'enseignement est de l'embrigadement ou la circulation à droite une loi fasciste. Publicité et manipulation mentale ne sont pas de même nature, n'utilisent pas les mêmes procédés, ne poursuivent pas les mêmes buts, etc...
Peut-être tout simplement a-t-il confondu manipulation mentale, objet lourd et précis, et propagande, qui, elle, est une forme de super-publicité avec l'emploi de méthodes analogues poussées à un degré plus éleve... 8)
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

Avatar du membre
Sybille
Messages : 1115
Enregistré le : sam. sept. 30, 2006 11:10 am

Message par Sybille » sam. oct. 02, 2010 9:10 pm

Juste pour le fun, le lien qui va bien vers Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Manipulation_mentale

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » sam. oct. 02, 2010 9:15 pm

bormandg a écrit :En traitant le marketing de manipulation mentale, Don Lorenjy fait la même confusion d'objet que ceux qui prétendent que l'enseignement est de l'embrigadement ou la circulation à droite une loi fasciste. Publicité et manipulation mentale ne sont pas de même nature, n'utilisent pas les mêmes procédés, ne poursuivent pas les mêmes buts, etc...
Peut-être tout simplement a-t-il confondu manipulation mentale, objet lourd et précis, et propagande, qui, elle, est une forme de super-publicité avec l'emploi de méthodes analogues poussées à un degré plus éleve... 8)
Je suis d'accord. L'expression "manipulation mentale" me semble devoir être un peu clarifiée, par rapport à la publicité, au marketing, à la propagande, à l'enseignement, etc.
Je ne pense pas que l'on puisse l'employer hors du contexte particulier de personnes se trouvant dans des sectes, ou tout organisme qui les affaiblit physiquement, les stressent, etc, de manière à les fragiliser psychiquement.
En fait, dans la discussion, c'est évidemment de publicité, de marketing, de propagande, de mode, etc, dont on parle tous, pas de "manipulation mentale" qui, comme tu le dis, est quelque chose de lourd et très particulier, sans rapport avec le commerce de la culture, qu'il soit grossier ou raffiné.

Il est frappant de voir comme des tendances paranoïaques, sans qu'on y fasse bien attention, se manifestent de plus en plus dans des tas de discussions, de manière inattendue, sur des tas de sujets, depuis un certain temps. Pour le coup, peut-être que ça dénote une atmosphère générale de malaise... mais que je ne dirais pas provoquée par de la manipulation mentale, sinon cela démonterait le contraire de ce que je veux dire !

Oncle Joe

Avatar du membre
Le_navire
Messages : 2341
Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 4:15 pm
Localisation : Au milieu.

Message par Le_navire » sam. oct. 02, 2010 9:24 pm

Vous me faites peur...

- Le Goncourt qui se plante c'est 60 000 exemplaires (Quignard), contre 350 000 en moyenne des bonnes années. Ah oui, hein, mon Zeus, le Goncourt ne fait pas vendre.
- Nathalie Sarraute vendait à 150 000 exemplaires, autant que Nothomb l'année dernière.
- Aujourd'hui, l'immense majorité des lecteurs occasionnels n'a jamais entendu parler de Quignard, Michon, etc. En 1960 tous les lecteurs occasionnels connaissaient le nom de Nathalie Sarraute. Il suffit de faire un peu d'Histoire de l'Edition en France pour connaître ces faits, le nier ne démontre qu'une méconnaissance profonde de cette Histoire, largement étudiée et documentée. Je vous renvoie par exemple aux travaux de Martin et Chartier, ou plus récemment, ceux de Parinet dont des synthèses sont disponibles, je crois dans des collections grand public.

Personnellement, j'en conclue deux choses :
- l'édition française privilégie depuis vingt ans une production de masse au dépend de la production d'oeuvre plus ambitieuses. Pour, à mon avis, une raison fort simple : la production de masse répond à des critères de stabilité qui n'existent pas dans les oeuvres complexes : la complexité est, par essence, source de contradictions, d'expérimentation, et donc la fidélisation du public est plus difficile à obtenir. Je passe sur les contraintes économiques du système, j'en ai déjà parlé cent fois.
- Les oeuvres ambitieuses n'ont plus aucune chance de toucher un public qui autrefois, aurait fait preuve de curiosité puisque leur mise en avant les rendait intrigantes, éventuellement objet de désir.

Le résultat est évident, les chiffres aussi. Pour un Michon qui s'envole à 50 000 exemplaires (Les Onze, porté par un grand nombre de prix dont celui de l'Académie Française, dont les ventes moyennes sont d'habitudes plus proche des 150 000), les autres titres culminent à 15 000 alors qu'il est l'un des auteurs phares de la nouvelle littérature française.

La discussion sur le marketing me laisse perplexe. Les études sur la création du désir sont au moins aussi nombreuses que celles consacrées à ses méthodes. On peut discuter du terme de manipulation mentale parce qu'il est connoté, n'en reste pas moins que la création du désir artificiel est référencée. Bon. Reprenons. On crée le désir d'acheter par le marketing : le public achète.

D'après Tonton et Erion, ça ne suffit pas. Je suis d'accord sur ce point : si ça suffisait, on serait tous riches parce qu'il y aurait des "recettes" qu'il serait facile d'appliquer. Or, nous l'avons tous constaté, les recettes ne fonctionnent pas pour tous les livres, pas de la même façon selon les pays, et les facteurs humains sont trop nombreux en la matière pour définir des stratégies imparables. Qui plus est, les attachés de presse sont de plus en plus souvent accueillis par les critiques comme des emmerdeurs, qui les envoient bouler comme des malpropres, surproduction oblige. Si tous les attachés de presse réussissaient à échanger sur leurs bouquins avec tous les critiques disponibles, ces derniers n'auraient plus le temps d'écrire leurs chroniques, et moins encore de lire les livres qu'on leur envoie.

Donc les livres qui marchent plaisent aux lecteurs, même les daubesques. Ok.

Ce n'est pas le marketing qui fait que les livres leurs plaisent. Ok.

Que disent-ils en général ? "Ça m'a passionné, j'ai aimé les personnages, ça m'a mis du baume au coeur", ou au contraire," j'ai frissonné, j'ai eu peur, ça m'a scotché".

Tout leur rapport au livre est à résumer en terme d'affect et de ressenti presque animal.

Au même titre que ce qu'ils ressentent en regardant la télé, ou un match de foot. (Tiens d'ailleurs, parenthèse : l'exemple de Tonton me fait rire, à propos des séries. Tonton, le jour ou on causera des soaps, genre production de chez AB ou soap Brésiliens, on pourra trouver ton exemple pertinent, du moins si quelqu'un nous sort un jour que "Amour Gloire et Beauté" c'est du même niveau que Buffy ou BSG...^^)

Conclusion ? Chacun la sienne. La mienne est que le livre a perdu son caractère particulier qui était, depuis l'invention de l'écriture, d'amener l'homme à réfléchir, sur lui même ou sur le monde. Le livre a été ramené à une distraction de masse.

Panem et circences.

Je ne crois pas au complot, je crois aux conséquences. Le livre plaisir, sans autre but que la distraction du lecteur, pour moi (pour moi seulement, peut être) n'a plus grand chose à voir avec la littérature, et contribue à l'abrutissement des masses. Un nouvel opium du peuple. J'emploie des grands mots ? Ouais. C'est moi. Pas de quoi surprendre. Mes convictions n'engagent que moi.

Dans cette même optique, personne je gage ne s'étonnera de ce que je persiste à mépriser cette production, et à plaindre ses lecteurs.

De toute façon, je suis tout autant convaincue que cette forme de culture est morte, et qu'il est temps de tourner la page. Pas aujourd'hui, pas demain, mais à terme, c'est une évidence. Les ados que je fréquente tous les jours aujourd'hui ont un rapport à la connaissance qui n'a rien à voir avec celui de ma génération et de celles qui l'ont précédée. Ils remplacent l'analyse traditionnelle, qui consiste à se plonger dans une oeuvre, par exemple, pour en analyser le contenu, par une forme d'analyse par recoupement d'informations diverses grappillées çà et là dans la multiplicité.

Je ne suis même pas sûre qu'il faille le regretter. Parce que le livre va devoir se réinventer pour construire quelque chose de nouveau qui corresponde à cette nouvelle manière d'appréhender le monde. Et qu'il en sortira quelque chose de nouveau aussi, qui fera sans doute à terme table rase, mais qui donnera à nouveau de la place au sens, et de mon point de vue, c'est tout ce qui compte.
"Ils ne sont grands que parce que vous êtes à genoux"

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » sam. oct. 02, 2010 9:38 pm

Le Navire: Tiens, dans tout ça, quel statut tu donnes à Houellebecq?
Oncle Joe

Avatar du membre
Soslan
Messages : 3051
Enregistré le : sam. juin 13, 2009 1:22 pm
Localisation : Lille (ou presque)
Contact :

Message par Soslan » sam. oct. 02, 2010 9:40 pm

Le_navire a écrit : Le livre plaisir, sans autre but que la distraction du lecteur, pour moi (pour moi seulement, peut être) n'a plus grand chose à voir avec la littérature, et contribue à l'abrutissement des masses. Un nouvel opium du peuple. J'emploie des grands mots ? Ouais. C'est moi. Pas de quoi surprendre. Mes convictions n'engagent que moi.
Là par contre faut arrêter le délire.
C'est un comportemnt typiquement franco-français : le pays par excellence ou on n'aime pas que les gens se fassent plaisir, ou tout doit être ramené à une dimension édifiante pour avoir le droit d'exister.

La lecture de pur plaisir, c'est aussi Lewis Caroll, Boris Vian, Franquin et autres poétes de la BD franco-belge, le fantastique de Lovecraft, Jean Ray et consort. Même dépourvue de visée réflexive, elle peut être un prodigieux champs esthétique, un art à part entière (et personne n'a jamais demandé à l'art de remplacer un essai de philo ou de science humaine).
Si à tes yeux les auteurs cités plus haut méne à l'abrutissement des masses et sont l'opium du peuple, je ne peux plus rien faire pour toi.
Modifié en dernier par Soslan le sam. oct. 02, 2010 9:57 pm, modifié 1 fois.
"La Lune commence où avec le citron finit la cerise" (André Breton)

http://karelia.over-blog.com/
Et pour ne pas faire que ma propre promo :
http://musardises.moonfruit.fr/

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » sam. oct. 02, 2010 9:49 pm

Cela ne va rajeunir personne:

En 1836, la presse destinée au grand public, c'est-à-dire vendue à un prix modeste, voit le jour, grâce à Émile de Girardin qui a l'idée de faire paraître dans son quotidien, La Presse, des annonces publicitaires. Il est imité par Edmond Dutacq et son journal Le Siècle. La naissance de la littérature populaire est la conséquence directe de cette innovation. C'est La Presse qui publie, toujours en 1836, le premier roman-feuilleton français : La vieille fille, en douze épisodes, un roman que Balzac, dans une lettre à Madame Hanska, affirme avoir écrit " en trois nuits ".
Alexandre Dumas, George Sand et Eugène Sue suivent cette voie. Ils ne font pas l'unanimité. Sainte-Beuve traite ces œuvres de " littérature industrielle ". Eugène de Mirecourt fait paraître Fabrique de romans, Alexandre Dumas et Cie. Plus tard, Émile Zola écrira : " Tout Paul Féval n'est plus bon qu'à vendre à la livre. "


La "littérature industrielle"...

Oncle Joe

Avatar du membre
Lensman
Messages : 20391
Enregistré le : mer. janv. 24, 2007 10:46 am

Message par Lensman » sam. oct. 02, 2010 9:54 pm

A méditer, les amis...

http://fr.wikisource.org/wiki/La_Litt%C ... dustrielle

Oncle Joe


PS: juste la conclusion pour ceux qui n'ont pas le courage tout lire...
D'accord? pas d'accord? Attention, bien réfléchir avant de répondre...


Pourtant, à chaque reprise de tentative, c'est pour tous ceux qui aiment encore profondément les lettres le moment de veiller. De nos jours le bas fond remonte sans cesse, et devient vite le niveau commun, le reste s'écroulant ou s'abaissant. Le mal sans doute ne date pas d'aujourd'hui; mais tout est dans la mesure, et aujourd'hui on la comble. Les ressources sont grandes, mais elles tournent aisément en sens contraire si on ne les rallie. Entrez dans les bibliothèques : quelle émulation ardente! que de jeunes gens étudient, et dans une bonne direction, ce semble ! Mais qu'il faut peu de chose à travers ces nobles efforts pour les faire dévier et avorter ! Il est donc urgent que tous les hommes honnêtes se tiennent, chacun d'abord dans sa propre dignité (on le peut toujours), et entre eux, autant qu'il se pourra et quel que soit le point de départ, par des convenances fidèles et une intelligence sympathique. C'est le cas surtout de retrouver le courage d'esprit et de savoir braver. Que cette littérature industrielle existe, mais qu'elle rentre dans son lit et ne le creuse qu'avec lenteur : il ne tend que trop naturellement à s'agrandir. Pour conclure : deux littératures coexistent dans une proportion bien inégale et coexisteront de plus en plus, mêlées entre elles comme le bien et le mal en ce monde, confondues jusqu'au jour du jugement : tâchons d'avancer et de mûrir ce jugement en dégageant la bonne et en limitant l'autre avec fermeté.


SAINTE-BEUVE.
Modifié en dernier par Lensman le sam. oct. 02, 2010 9:59 pm, modifié 1 fois.

Avatar du membre
bormandg
Messages : 11906
Enregistré le : lun. févr. 12, 2007 2:56 pm
Localisation : Vanves (300 m de Paris)
Contact :

Message par bormandg » sam. oct. 02, 2010 9:57 pm

Lensman a écrit :Cela ne va rajeunir personne:

En 1836, la presse destinée au grand public, c'est-à-dire vendue à un prix modeste, voit le jour, grâce à Émile de Girardin qui a l'idée de faire paraître dans son quotidien, La Presse, des annonces publicitaires. Il est imité par Edmond Dutacq et son journal Le Siècle. La naissance de la littérature populaire est la conséquence directe de cette innovation. C'est La Presse qui publie, toujours en 1836, le premier roman-feuilleton français : La vieille fille, en douze épisodes, un roman que Balzac, dans une lettre à Madame Hanska, affirme avoir écrit " en trois nuits ".
Alexandre Dumas, George Sand et Eugène Sue suivent cette voie. Ils ne font pas l'unanimité. Sainte-Beuve traite ces œuvres de " littérature industrielle ". Eugène de Mirecourt fait paraître Fabrique de romans, Alexandre Dumas et Cie. Plus tard, Émile Zola écrira : " Tout Paul Féval n'est plus bon qu'à vendre à la livre. "


La "littérature industrielle"...

Oncle Joe
Bien vu, Joe. :wink: :wink: :wink: :wink:
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

Répondre

Retourner vers « Du fond de la salle (pour parler d'autre chose) »