Clifford D. SIMAK - Dans le torrent des siècles
Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m
Clifford D. SIMAK - Dans le torrent des siècles
Hop !
Une fois n’est pas coutume, je vais ouvrir ce compte rendu sur une banalité : j’ai déjà eu maintes fois l’occasion de dire du bien de Clifford D. Simak. En multipliant ici ou là les allusions à son chef-d’œuvre Demain les chiens, notamment, mais aussi en traitant de manière plus approfondie de Voisins d’ailleurs ou Au carrefour des étoiles. J’ai aimé, chez cet auteur du soi-disant « âge-d’or-de-la-science-fiction™ », ses fameuses atmosphères bucoliques, son profond humanisme (encore que le terme ne soit pas forcément bien choisi, mais voir plus bas), son imagination débridée enfin.
[...]
Adonc, Dans le torrent des siècles. Ce roman, c’est tout d’abord un pitch formidable, que je m’en vais tâcher de vous présenter (ce qui ne s’annonce pas facile, le roman étant foisonnant comme peu le sont). Nous sommes plusieurs millénaires dans le futur. L’humanité a essaimé à travers la galaxie. Partout, sauf sur 61 du Cygne, pour une raison inconnue. On y a envoyé il y a vingt ans de cela Asher Sutton afin de percer ce mystère. Mais à l’évidence Asher Sutton est mort…
Mais un soir, Christopher Adams, une sorte de super chef de la sécurité, reçoit la visite d’un étrange individu prétendant venir du futur, et lui disant qu’Asher Sutton va rentrer ; mais ce n’est pas tout : il demande qu’on l’abatte à vue… car il ne faut pas qu’il écrive un certain livre.
Or peu de temps après, Asher Sutton revient effectivement sur Terre, dans un vaisseau endommagé, sans carburant, sans air, sans vivres. Comment a-t-il fait pour survivre ? Mais est-ce seulement lui ? Ou plus exactement s’agit-il encore d’un humain ? Car il se pourrait bien qu’Asher Sutton soit mort depuis longtemps, en fin de compte…
Quoi qu’il en soit, le bonhomme se retrouve au centre d’un très complexe affrontement opposant des factions mystérieuses à travers l’espace… et le temps. Et la clé de l’énigme pourrait bien se trouver quelques siècles dans l’avenir… ou par une après-midi ensoleillée de juillet 1977, dans une ferme du Wisconsin.
Alléchant, non ? Moi, des pitchs comme ça, j’en redemande volontiers. C’est énigmatique à souhait, à l’évidence d’une richesse et d’une densité extrême – époque heureuse où les romans de science-fiction se montraient d’une inventivité phénoménale, plutôt que de pratiquer le tirage à la ligne contemporain, rhalala c’était mieux avant (faut que je fasse gaffe, à force de lire Simak, je pourrais moi aussi tourner réac !) –, bref, tous les ingrédients semblent réunis pour donner un très bon, un très grand roman de SF.
Donc Dans le torrent des siècles est un très bon, un très grand roman de SF.
…
Sauf que je me suis fait chier comme un rat mort à le lire.
Non, plus, en fait, vu que le rat, lui, au moins, il est mort.
(Oui, je sais, je l’ai déjà faite, celle-là.)
À cela essentiellement trois raisons : la première, et la plus flagrante, tient au style. Mondieumondieumondieu. C’est tout simplement ATROCE. Or, sans faire de Simak un grand styliste, je n’avais pas eu ce ressenti à la lecture de ses autres ouvrages, cités en tête de ce compte rendu ; donc, même si je n’exclus pas sa part de responsabilité – elle ne saurait faire de doute par endroits –, la faute en incombe probablement au traducteur, Georges H. Gallet, qui, m’est avis, a salopé le boulot. Et là, très franchement, c’était trop pour moi. Ado, j’aurais sans doute pu faire l’impasse là-dessus : c’était l’époque où, après tout, je n’attendais pas autre chose d’un livre qu’une bonne histoire – or l’histoire de Dans le torrent des siècles est dans l’ensemble très bonne (mais voir plus bas, cependant). Mais aujourd’hui, je ne peux plus. Nope. A pu possib’. Au risque de passer (une fois de plus) pour un traître à la Cause, je réclame de mes lectures science-fictionnelles un minimum de style ; et là, c’est peu de dire qu’on est très loin du compte : on est vraiment dans ce qui se faisait de pire en matière de traductions à l’arrache. Du coup, j’ai peiné, mais peiné sur ce livre, alors qu’il méritait sans doute bien mieux… Or, à ce que j’en ai vu sur la NooSFere, c’est toujours cette seule traduction qui est disponible aujourd’hui ; ben en voilà une qu’il serait bon de dépoussiérer…
La deuxième raison tient à l’histoire, et le pitch, dans toute sa richesse, vous en a peut-être déjà donné une idée : Dans le torrent des siècles est un « roman touffu à l’extrême, le plus vanvogtien de l'auteur (space opera doublé d’un time opera centré sur l’existence d’un super-héros qui, au départ, ne connaît ni l’étendue de ses pouvoirs ni le but ultime qui le motive inconsciemment) », pour reprendre les mots de Denis Philippe. Or vous savez dans quelle estime je tiens Van Vogt… Ben oui, difficile de prétendre le contraire : même si j’ai trouvé le pitch alléchant, il faudrait être le dernier des hypocrites (ou des aveugles) pour ne pas y voir des traits vanvogtiens. Et régulièrement, avec un frisson, je n’ai pu m’empêcher de penser au Monde des Ā, cet odieux machin « bâti » (?) sur un canevas finalement assez proche. Et, parfois, les reproches que j’adresse habituellement à Van Vogt m’ont semblé applicables à Simak dans ce roman : une certaine tendance au partage en couille, et, avouons-le, un côté super-héros à baffer chez Asher Sutton, qui fait plus qu’à son tour penser à Gilbert Gosseyn…
La troisième raison est propre à Simak. Et là, surprise : c’est son « humanisme » (en l’occurrence, ici, le terme n’est pas très bien choisi, sans doute, puisqu’il s’agit de dépasser l’humain et sa soi-disant « destinée manifeste » – le choix de ce dernier terme n’est bien évidemment pas innocent…) qui m’a saoulé. En temps normal, j’aime beaucoup l’humanisme simakien. Mais, cette fois, il en fait tout simplement trop, d’autant que le roman, en versant parfois dans la philosophie (de comptoir), tend à se montrer horriblement bavard. Ce qui nous vaut des pages et des pages de « réflexions » sur la « destinée » d’une niaiserie insupportable… que, si j’étais méchant, je dirais qu’un Bernard Werber pourrait les reprendre à son compte aujourd’hui ; heureusement que je ne suis pas méchant.
Reste quoi, alors ? Un pitch formidable, oui. Et, tout de même, quelques pages superbes – je ne parle bien évidemment pas du style, groumf… –, qui viennent remonter le niveau : sans véritable surprise, il s’agit essentiellement des scènes prenant place au XXe siècle, dans le Wisconsin rural cher au cœur de Simak. On ne fait pas exactement dans le progressiste, ici, tout cela sent fort le « retour à la terre » et peut donc asticoter les narines les plus sensibles, mais les faits sont là : c’est ici que Simak se montre à son meilleur.
Donc [...] je ne peux pas prétendre avoir aimé Dans le torrent des siècles (même si je pense, encore une fois, que la traduction y est pour beaucoup). Je ne saurais donc non plus en recommander la lecture. Contemporain de ce roman, mieux vaut lire, et de loin, l’immense Demain les chiens. Il ne faudrait en effet pas rester sur une mauvaise impression à cause de Dans le torrent des siècles : je vais conclure sur une banalité, ainsi que j’ai commencé, mais Simak est bel et bien un grand auteur de « l’âge-d’or-de-la-science-fiction™ », et cette fausse note ne m’empêchera pas de poursuivre la découverte de son œuvre.
Une fois n’est pas coutume, je vais ouvrir ce compte rendu sur une banalité : j’ai déjà eu maintes fois l’occasion de dire du bien de Clifford D. Simak. En multipliant ici ou là les allusions à son chef-d’œuvre Demain les chiens, notamment, mais aussi en traitant de manière plus approfondie de Voisins d’ailleurs ou Au carrefour des étoiles. J’ai aimé, chez cet auteur du soi-disant « âge-d’or-de-la-science-fiction™ », ses fameuses atmosphères bucoliques, son profond humanisme (encore que le terme ne soit pas forcément bien choisi, mais voir plus bas), son imagination débridée enfin.
[...]
Adonc, Dans le torrent des siècles. Ce roman, c’est tout d’abord un pitch formidable, que je m’en vais tâcher de vous présenter (ce qui ne s’annonce pas facile, le roman étant foisonnant comme peu le sont). Nous sommes plusieurs millénaires dans le futur. L’humanité a essaimé à travers la galaxie. Partout, sauf sur 61 du Cygne, pour une raison inconnue. On y a envoyé il y a vingt ans de cela Asher Sutton afin de percer ce mystère. Mais à l’évidence Asher Sutton est mort…
Mais un soir, Christopher Adams, une sorte de super chef de la sécurité, reçoit la visite d’un étrange individu prétendant venir du futur, et lui disant qu’Asher Sutton va rentrer ; mais ce n’est pas tout : il demande qu’on l’abatte à vue… car il ne faut pas qu’il écrive un certain livre.
Or peu de temps après, Asher Sutton revient effectivement sur Terre, dans un vaisseau endommagé, sans carburant, sans air, sans vivres. Comment a-t-il fait pour survivre ? Mais est-ce seulement lui ? Ou plus exactement s’agit-il encore d’un humain ? Car il se pourrait bien qu’Asher Sutton soit mort depuis longtemps, en fin de compte…
Quoi qu’il en soit, le bonhomme se retrouve au centre d’un très complexe affrontement opposant des factions mystérieuses à travers l’espace… et le temps. Et la clé de l’énigme pourrait bien se trouver quelques siècles dans l’avenir… ou par une après-midi ensoleillée de juillet 1977, dans une ferme du Wisconsin.
Alléchant, non ? Moi, des pitchs comme ça, j’en redemande volontiers. C’est énigmatique à souhait, à l’évidence d’une richesse et d’une densité extrême – époque heureuse où les romans de science-fiction se montraient d’une inventivité phénoménale, plutôt que de pratiquer le tirage à la ligne contemporain, rhalala c’était mieux avant (faut que je fasse gaffe, à force de lire Simak, je pourrais moi aussi tourner réac !) –, bref, tous les ingrédients semblent réunis pour donner un très bon, un très grand roman de SF.
Donc Dans le torrent des siècles est un très bon, un très grand roman de SF.
…
Sauf que je me suis fait chier comme un rat mort à le lire.
Non, plus, en fait, vu que le rat, lui, au moins, il est mort.
(Oui, je sais, je l’ai déjà faite, celle-là.)
À cela essentiellement trois raisons : la première, et la plus flagrante, tient au style. Mondieumondieumondieu. C’est tout simplement ATROCE. Or, sans faire de Simak un grand styliste, je n’avais pas eu ce ressenti à la lecture de ses autres ouvrages, cités en tête de ce compte rendu ; donc, même si je n’exclus pas sa part de responsabilité – elle ne saurait faire de doute par endroits –, la faute en incombe probablement au traducteur, Georges H. Gallet, qui, m’est avis, a salopé le boulot. Et là, très franchement, c’était trop pour moi. Ado, j’aurais sans doute pu faire l’impasse là-dessus : c’était l’époque où, après tout, je n’attendais pas autre chose d’un livre qu’une bonne histoire – or l’histoire de Dans le torrent des siècles est dans l’ensemble très bonne (mais voir plus bas, cependant). Mais aujourd’hui, je ne peux plus. Nope. A pu possib’. Au risque de passer (une fois de plus) pour un traître à la Cause, je réclame de mes lectures science-fictionnelles un minimum de style ; et là, c’est peu de dire qu’on est très loin du compte : on est vraiment dans ce qui se faisait de pire en matière de traductions à l’arrache. Du coup, j’ai peiné, mais peiné sur ce livre, alors qu’il méritait sans doute bien mieux… Or, à ce que j’en ai vu sur la NooSFere, c’est toujours cette seule traduction qui est disponible aujourd’hui ; ben en voilà une qu’il serait bon de dépoussiérer…
La deuxième raison tient à l’histoire, et le pitch, dans toute sa richesse, vous en a peut-être déjà donné une idée : Dans le torrent des siècles est un « roman touffu à l’extrême, le plus vanvogtien de l'auteur (space opera doublé d’un time opera centré sur l’existence d’un super-héros qui, au départ, ne connaît ni l’étendue de ses pouvoirs ni le but ultime qui le motive inconsciemment) », pour reprendre les mots de Denis Philippe. Or vous savez dans quelle estime je tiens Van Vogt… Ben oui, difficile de prétendre le contraire : même si j’ai trouvé le pitch alléchant, il faudrait être le dernier des hypocrites (ou des aveugles) pour ne pas y voir des traits vanvogtiens. Et régulièrement, avec un frisson, je n’ai pu m’empêcher de penser au Monde des Ā, cet odieux machin « bâti » (?) sur un canevas finalement assez proche. Et, parfois, les reproches que j’adresse habituellement à Van Vogt m’ont semblé applicables à Simak dans ce roman : une certaine tendance au partage en couille, et, avouons-le, un côté super-héros à baffer chez Asher Sutton, qui fait plus qu’à son tour penser à Gilbert Gosseyn…
La troisième raison est propre à Simak. Et là, surprise : c’est son « humanisme » (en l’occurrence, ici, le terme n’est pas très bien choisi, sans doute, puisqu’il s’agit de dépasser l’humain et sa soi-disant « destinée manifeste » – le choix de ce dernier terme n’est bien évidemment pas innocent…) qui m’a saoulé. En temps normal, j’aime beaucoup l’humanisme simakien. Mais, cette fois, il en fait tout simplement trop, d’autant que le roman, en versant parfois dans la philosophie (de comptoir), tend à se montrer horriblement bavard. Ce qui nous vaut des pages et des pages de « réflexions » sur la « destinée » d’une niaiserie insupportable… que, si j’étais méchant, je dirais qu’un Bernard Werber pourrait les reprendre à son compte aujourd’hui ; heureusement que je ne suis pas méchant.
Reste quoi, alors ? Un pitch formidable, oui. Et, tout de même, quelques pages superbes – je ne parle bien évidemment pas du style, groumf… –, qui viennent remonter le niveau : sans véritable surprise, il s’agit essentiellement des scènes prenant place au XXe siècle, dans le Wisconsin rural cher au cœur de Simak. On ne fait pas exactement dans le progressiste, ici, tout cela sent fort le « retour à la terre » et peut donc asticoter les narines les plus sensibles, mais les faits sont là : c’est ici que Simak se montre à son meilleur.
Donc [...] je ne peux pas prétendre avoir aimé Dans le torrent des siècles (même si je pense, encore une fois, que la traduction y est pour beaucoup). Je ne saurais donc non plus en recommander la lecture. Contemporain de ce roman, mieux vaut lire, et de loin, l’immense Demain les chiens. Il ne faudrait en effet pas rester sur une mauvaise impression à cause de Dans le torrent des siècles : je vais conclure sur une banalité, ainsi que j’ai commencé, mais Simak est bel et bien un grand auteur de « l’âge-d’or-de-la-science-fiction™ », et cette fausse note ne m’empêchera pas de poursuivre la découverte de son œuvre.
Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
Mouais , pas trop d'accord , ça doit bien faire 20 ans que je l'ai lu pour la dernière fois et il faudrait donc que je me rafraichisse la mémoire , mais le souvenir que j'en garde est excellent .
En fait , pas d'accord du tout , tes remarques récurrentes sur le "style" me laissent perplexe quand , dans le même temps , tu revendiques ne pas apprécier la poésie...
Enfin , le "prétendu âge d'or" est surtout celui qui a vu arriver sur la scène littéraire un paquet d'auteurs et de livres qui constituent effectivement la base moderne du genre , alors , le traiter avec condescendance , ça n'a pas grand sens .
En fait , pas d'accord du tout , tes remarques récurrentes sur le "style" me laissent perplexe quand , dans le même temps , tu revendiques ne pas apprécier la poésie...
Enfin , le "prétendu âge d'or" est surtout celui qui a vu arriver sur la scène littéraire un paquet d'auteurs et de livres qui constituent effectivement la base moderne du genre , alors , le traiter avec condescendance , ça n'a pas grand sens .
"Tout est relatif donc rien n'est relatif !"
Ce sont les pouètes et la polésie que j'exècre. Ca ne veut pas dire que je ne fais pas attention au style, ni même au style pour le style. Ce sont des choses différentes, tout de même. On ne peut pas réduire le style à la poésie. Et par ailleurs - j'aurai normalement bientôt l'occasion de revenir là-dessus - quand je parle de pouètes et de polésie, je ne parle pas forcément de tous les poètes et de toute la poésie...
Quant à "l'âge d'or", ben oui, même si j'aime beaucoup d'auteurs de cette époque, je trouve quand même qu'on en fait un peu trop, qu'on reste un peu trop obnubilé par cette période, et qu'avant comme après il y avait des choses intéressantes, voire (souvent ?) bien plus intéressantes. Et la meilleure définition à mes yeux reste celle de la blague, comme l'avait rappelée, je crois, Scott Westerfeld aux Utopiales :
- What is the Golden Age of science-fiction?
- Thirteen.
Quant à "l'âge d'or", ben oui, même si j'aime beaucoup d'auteurs de cette époque, je trouve quand même qu'on en fait un peu trop, qu'on reste un peu trop obnubilé par cette période, et qu'avant comme après il y avait des choses intéressantes, voire (souvent ?) bien plus intéressantes. Et la meilleure définition à mes yeux reste celle de la blague, comme l'avait rappelée, je crois, Scott Westerfeld aux Utopiales :
- What is the Golden Age of science-fiction?
- Thirteen.
Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
Exactement ! Moi qui suis pourtant un vieux, c'est l'âge que j'ai dans ma tête.Nébal a écrit :. Et la meilleure définition à mes yeux reste celle de la blague, comme l'avait rappelée, je crois, Scott Westerfeld aux Utopiales :
- What is the Golden Age of science-fiction?
- Thirteen.
Ce Simak est bien sûr excellent, lisez le tous, ceux qui ne l'ont pas lu !
Et relisez-le, les autres !
Oncle Joe
(Je magereais bien quelques chamallows, là...)
C'est amusant, je me demandais dans quel contexte j'allais pouvoir citer l'extrait ci-dessous. Eh bien voilà, je sais.
C'est tiré du Fond du ciel, le dernier roman de Rodrigo Fresan (Seuil), dont le sujet est – au premier degré – la nostalgie de la science-fiction originelle et l'impossibilité d'y revenir :
C'est tiré du Fond du ciel, le dernier roman de Rodrigo Fresan (Seuil), dont le sujet est – au premier degré – la nostalgie de la science-fiction originelle et l'impossibilité d'y revenir :
Ne dirait-on pas que ça a été écrit pour Nébal ?Le plus étrange (ou le plus normal, car les distorsions de l'espace-temps sont des lieux communs très fréquentés du genre), est peut-être qu'à présent, alors que je commence à la perdre, la mémoire m'inflige une douleur aigüe et palpitante – j'essaie de me rappeler en écrivant ce dont je ne me souviens plus si je ne me sers pas de mes mains.
Et je ne le fais pas à l'aide du langage fonctionnel et presque télégraphique de la science-fiction.
Je veux parler de ce style qu'est l'absence de style, où ce qui compte vraiment est la trame, la bonne idée, la prophétie novatrice. L'intérêt constant pour le futur servi par une écriture vraiment primitive.
Non : maintenant, ce sont de longues lignes sinueuses (les parenthèses fonctionnent comme des pinces de crustacé agrandis et ennorgueillis par l'action des rayons Epsilon) qui semblent avoir été écrites par un gentleman expérimental et peu expérimenté du dix-neuvième sur les brisants du nouveau siècle.
Encore le passé.
La façon dont on écrivait par le passé, lorsque les livres pouvaient compter sur des lecteurs ayant tout leur temps et que tout le temps du monde était contenu dans ces livres qu'il était si difficile de refermer, car il se passait bien plus de choses à l'intérieur qu'au-dehors. Des livres à l'usage d'un lecteur d'une ère finissant pour qu'une autre commence, déjà prête à lancer l'idée et la théorie du futur lointain.
Tu veux dire, le ton un peu prétentieux et la philosophie nostalgique à deux sous? Pas sympa pour Nébal...Lem a écrit :C'est amusant, je me demandais dans quel contexte j'allais pouvoir citer l'extrait ci-dessous. Eh bien voilà, je sais.
C'est tiré du Fond du ciel, le dernier roman de Rodrigo Fresan (Seuil), dont le sujet est – au premier degré – la nostalgie de la science-fiction originelle et l'impossibilité d'y revenir :
Ne dirait-on pas que ça a été écrit pour Nébal ?Le plus étrange (ou le plus normal, car les distorsions de l'espace-temps sont des lieux communs très fréquentés du genre), est peut-être qu'à présent, alors que je commence à la perdre, la mémoire m'inflige une douleur aigüe et palpitante – j'essaie de me rappeler en écrivant ce dont je ne me souviens plus si je ne me sers pas de mes mains.
Et je ne le fais pas à l'aide du langage fonctionnel et presque télégraphique de la science-fiction.
Je veux parler de ce style qu'est l'absence de style, où ce qui compte vraiment est la trame, la bonne idée, la prophétie novatrice. L'intérêt constant pour le futur servi par une écriture vraiment primitive.
Non : maintenant, ce sont de longues lignes sinueuses (les parenthèses fonctionnent comme des pinces de crustacé agrandis et ennorgueillis par l'action des rayons Epsilon) qui semblent avoir été écrites par un gentleman expérimental et peu expérimenté du dix-neuvième sur les brisants du nouveau siècle.
Encore le passé.
La façon dont on écrivait par le passé, lorsque les livres pouvaient compter sur des lecteurs ayant tout leur temps et que tout le temps du monde était contenu dans ces livres qu'il était si difficile de refermer, car il se passait bien plus de choses à l'intérieur qu'au-dehors. Des livres à l'usage d'un lecteur d'une ère finissant pour qu'une autre commence, déjà prête à lancer l'idée et la théorie du futur lointain.
Oncle Joe
Fresan fait-il un constat relatif à l'émergence d'un goût pour le style ou bien plutôt à l'apparition de la langueur, concomitante au vieillissement ?Lem a écrit :Je veux dire : l'impossible conjonction entre le souvenir qu'on en a ou l'imagination qu'on s'en fait et le goût du style.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.
Arrêtez, z'allez me filez une crise de la quarantaine alors que j'ai pas trente balais...
Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
Oh, mais je suis d'accord pour vieillir, moi.MF a écrit :'un goût pour le style ou bien plutôt à l'apparition de la langueur, concomitante au vieillissement ?
Qui voudrait avoir treize ans éternellement ?
Veinard. Dis-toi que c'est comme sauter une classe.Nebal a écrit :Arrêtez, z'allez me filez une crise de la quarantaine alors que j'ai pas trente balais...
Et puis, il y a l'option de retomber en enfance, un peu avant de mourir... ça, c'est l'idéal!Lem a écrit :Oh, mais je suis d'accord pour vieillir, moi.MF a écrit :'un goût pour le style ou bien plutôt à l'apparition de la langueur, concomitante au vieillissement ?
Qui voudrait avoir treize ans éternellement ?
Oncle Joe