Clifford D. SIMAK - Dans le torrent des siècles

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Lem

Message par Lem » ven. déc. 03, 2010 4:52 pm

Erion a écrit :Ce qui m'intéresse, dans les critiques, c'est d'être certain que les oeuvres sont critiquées de manière juste, pour de bonnes raisons
Définir "juste".
Définir "bonnes".
Prouver que ces invariants a priori ne sont pas l'extension de ton point de vue particulier et qu'ils échappent donc au reproche que tu formules plus haut : "c'est juste une sensibilité contre une autre. Ca n'est pas une discussion."

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Nébal
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Message par Nébal » ven. déc. 03, 2010 4:56 pm

Bon courage.

Gérard Klein
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Message par Gérard Klein » ven. déc. 03, 2010 5:01 pm

Lensman a écrit :
Cachou a écrit :Par exemple: Ishiguro
J'ai failli sortir une idiotie (de plus) en voulant faire de l'humour pour compliquer le débat et écrire:
"Tu lis le japonais?"... alors qu'une rapide recherche sur Google me pousse à croire que cet auteur écrit en anglais..
Il n'empêche... Cela a été remarqué (par Nébal, d'ailleurs), avec Simak, on parle de traduction.
C'est tout de même un problème très curieux. Le style se traduit-il d'une langue à l'autre? Ou bien les critiques parlent-ils du style du traducteur? Quelle est l'opinion du monde littéraire sur ce problème, qui me semble pour le moins ardu?
Ne pourrait-on pas dire qu'il y a deux sortes d'oeuvre, celles qui supportent la traduction, et celles qui ne la supportent pas, et ne pourrait-on pas poser que ce sont celles qui ne la supportent pas qui ont vraiment du "style"? Le "style" étant vu comme quelque chose de tellement lié à la langue que cela n'aurait pas de sens de vouloir s'en préoccuper lorsqu'on fait une traduction...
Oncle Joe
La question est très intéressante. On est tenté de répondre que non, le style ne se traduit pas, même d'une langue à une autre qui lui est cousine, de l'italien au français ou de l'américain au français (la syntaxe courante étant très proche, ce qui n'est pas toujours le cas pour l'anglais de GB).
Mais le style est plus compliqué que ça. Il a nombre de niveaux. Dont la longueur des phrases, celle des paragraphes, les temps des verbes, bref une respiration, etc. qui passent entre langues cousines (quand le traducteur et l'éditeur les respectent).
Évidemment, quand on traduit du chinois ou du japonais, ou même de l'arabe, c'est plus compliqué, plus opaque, et la traduction est au fond une recréation qui, au mieux, respecte les idées et l'intention de l'auteur.

Le style, idéalement, c'est la façon dont l'inconscient de l'auteur communique avec l'inconscient de ses lecteurs, même si, aux deux bouts, une bonne dose d'intention et de culture commune est nécessaire. C'est la façon dont l'auteur communique son état d'esprit et vise à provoquer chez son lecteur un état neurologique (neurones miroirs?) voisin du sien propre, à créer ce que j'ai appelé ailleurs une subjectivité collective.L'idée, la part purement intentionnelle, il pourrait la communiquer en principe à travers un langage formalisé (voir ma traduction d'Andromaque dans La loi du talion). Mais il manquerait alors l'expérience de cette idée qu'il cherche à transmettre.

Quant à des textes remarquablement écrits mais à mes yeux d'un intérêt faible, je citerai Le Rivage des Syrtes, que j'ai tenté récemment de relire, à plusieurs reprises. Au bout de quelques dizaines de pages, je cale, inévitablement. Ça ne m'intéresse absolument pas.
Ce n'est même pas une question de statisme. Beckett que j'aime beaucoup n'est pas un forcené de l'action.
Proust, c'est un peu pareil. Je peux en lire quelques pages et trouver ça très intéressant du point de vue de l'écriture, mais comme les personnages et l'intrigue ne m'intéressent absolument pas, j'abandonne.

J'ai du reste les mêms réactions vis à vis du cinéma. Mais là, c'est une toute autre histoire. Plutôt inverse. Il y a des tas de films dont l'histoire ne m'intéresse absolument pas mais que j'ai du mal à lâcher en raison de leur style. Des films anglais ou américains, généralement.
Mon immortalité est provisoire.

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Erion
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Message par Erion » ven. déc. 03, 2010 5:08 pm

Lem a écrit :
Erion a écrit :Ce qui m'intéresse, dans les critiques, c'est d'être certain que les oeuvres sont critiquées de manière juste, pour de bonnes raisons
Définir "juste".
Définir "bonnes".
Prouver que ces invariants a priori ne sont pas l'extension de ton point de vue particulier et qu'ils échappent donc au reproche que tu formules plus haut : "c'est juste une sensibilité contre une autre. Ca n'est pas une discussion."
Justes, c'est par rapport aux intentions de l'auteur. Comprendre ce qu'il a voulu faire, comment il a voulu le faire, et si c'est réussi. Si l'auteur a voulu faire une oeuvre tragique, et que, quand on le lit, on ne peut pas s'empêcher de rire, c'est que l'auteur a loupé son truc.
Et, pour lire pas mal de critiques, rien que ça suffirait à contenter pas mal d'auteurs.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
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Nébal
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Message par Nébal » ven. déc. 03, 2010 5:10 pm

Parce que les critiques doivent contenter les auteurs, maintenant ?

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Aldaran
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Message par Aldaran » ven. déc. 03, 2010 5:10 pm

Soslan a écrit :
Aldaran a écrit :
Soslan a écrit :Je pense que si, l'écriture est une technique, comme celle de la peinture ou de la musique, et il existe des critères objectifs de qualité qui tiennent à la musique de la langue, au rythme, à la fluidité. Quand on bute presque sur chaque mot, c'est un défaut, tout comme une intrigue bancale ou des personnages inutiles.
C'est ici qu'on parle de musique ?
J'imagine qu'on pourrait pousser l'exercice de la musique de la langue, de son rythme et de sa fluidité au maximum et... obtenir un texte exécrable voire totalement incompréhensible.
Mais je peux me tromper !
Ben en effet, j'ai du mal à imaginer en quoi un texte fluide et au bon rythme pourrait être incompréhensible. J'ai parlé de fluidité, pas d'ornements pour faire zouli, hein.
Replonge-toi dans certains albums de Dead Can Dance et Lisa Gerard. Textes fluides, rythmes géniaux (je ne parle que de sa voix, là), musicalité de la langue. C'est... beau. A dire comme à écouter. Et ça n'a strictement aucun sens. C'est juste beau.
MF a écrit :
Soslan a écrit :Francis Berthelot, Mélanie Fazi, Jaworski et bien d'autres apprécieront ...
Ah ouais, mais là, c'est pas sérieux.
Évidemment que le style est important en fantasy.
Faut bien masquer le manque d'idées...:arrow: :arrow: :arrow:
Non, non, sors pas tout de suite. J'ai pensé exactement ça à la lecture de Janua Vera. Rien de nouveau dans ce recueil pour quelqu'un qui a lu ne serait-ce qu'un peu de Fantasy mais, putain (pour Cachou, celui-là), j'ai adoré !
Je rejoins l'avis de Tonton au sujet du style mais, dans certains cas, rien d'autre n'explique pourquoi j'ai aimé le bouquin.
EDIT : dans un tout autre... style, pourtant, je pense plus ou moins la même chose d'Outrage et rébellion.
Du coup, je me dis, mince, pour aimer un bouquin, c'est un peu... mince. Et pourtant !
Modifié en dernier par Aldaran le ven. déc. 03, 2010 5:14 pm, modifié 1 fois.

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Cachou
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Message par Cachou » ven. déc. 03, 2010 5:13 pm

Aldaran a écrit :Rien de nouveau dans ce recueil pour quelqu'un qui a lu ne serait-ce qu'un peu de Fantasy mais, putain (pour Cachou, celui-là), j'ai adoré !
On dit "sacrebleu" jeune homme. Attention, au prochain synonyme de péripatéticienne, vous me ferez une recherche étymologique sur le mot utilisé...

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Sand
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Message par Sand » ven. déc. 03, 2010 5:14 pm

Cachou a écrit :
Sand a écrit :Ce qui ne répond pas à ma question (mal formulée, admettons ^^), qui est de savoir comment appliquer l'ordre "t'as pas le droit de dire que c'est mal écrit, dis que t'as pas aimé" quand on a aimé quand même. :wink:
Ben si, j'ai répondu plus haut ^_^ (parce qu'il manque un mot dans ta formulation).
non ma chère, pas plus que MF. Vos reformulations contiennent en substance "j'ai aimé".
Or l'ordre est de dire "j'ai pas aimé".

Bug.

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Cachou
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Message par Cachou » ven. déc. 03, 2010 5:17 pm

Sand a écrit :
Cachou a écrit :
Sand a écrit :Ce qui ne répond pas à ma question (mal formulée, admettons ^^), qui est de savoir comment appliquer l'ordre "t'as pas le droit de dire que c'est mal écrit, dis que t'as pas aimé" quand on a aimé quand même. :wink:
Ben si, j'ai répondu plus haut ^_^ (parce qu'il manque un mot dans ta formulation).
non ma chère, pas plus que MF. Vos reformulations contiennent en substance "j'ai aimé".
Or l'ordre est de dire "j'ai pas aimé".

Bug.
o_O J'ai pas tout compris...

Lem

Message par Lem » ven. déc. 03, 2010 5:18 pm

Gérard Klein a écrit :Le style, idéalement, c'est la façon dont l'inconscient de l'auteur communique avec l'inconscient de ses lecteurs, même si, aux deux bouts, une bonne dose d'intention et de culture commune est nécessaire. C'est la façon dont l'auteur communique son état d'esprit et vise à provoquer chez son lecteur un état neurologique (neurones miroirs?) voisin du sien propre, à créer ce que j'ai appelé ailleurs une subjectivité collective.L'idée, la part purement intentionnelle, il pourrait la communiquer en principe à travers un langage formalisé (voir ma traduction d'Andromaque dans La loi du talion). Mais il manquerait alors l'expérience de cette idée qu'il cherche à transmettre.
Par Zarathoustra !
Nietzsche, dans [i]Ecce Homo[/i] a écrit :Communiquer un état intérieur, une tension intérieure, de la passion par les signes – y compris le tempo de ces signes – voilà le sens de toute espèce de style.

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Nébal
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Message par Nébal » ven. déc. 03, 2010 5:20 pm

L'est pas censé avoir tué Dieu, lui ?

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Sand
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Message par Sand » ven. déc. 03, 2010 5:27 pm

je m'en suis aperçue ^^

Le reproche le plus fréquent, à la suite d'un avis "c'est mal écrit", c'est "'mais comment tu oses, t'en sais rien, et puis d'abord on dit pas "les choux c'est dégueu", mais "je n'aime pas""

Bref, ce reproche se transforme en injonction, en ordre, de ne pas dire "c'est mal écrit", mais de dire "je n'ai pas aimé".

Donc, quand je demande "que devient l'ordre de ne pas écrire c'est mal écrit mais je n'ai pas aimé quand j'ai aimé quelque chose de mal écrit ?", une réponse de reformulation incluant "j'ai aimé" ne peut pas convenir.

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Message par Sand » ven. déc. 03, 2010 5:30 pm

Nébal a écrit :Parce que les critiques doivent contenter les auteurs, maintenant ?
Et être discutables !

Tu découvres sincèrement seulement maintenant qu'Erion prêche - aussi - pour sa paroisse quand il part en croisade anti-j'aime pas ?

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Nébal
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Message par Nébal » ven. déc. 03, 2010 5:32 pm

Non.

Mais je ne peux pas m'empêcher de relever les conneries grosses comme moi, c'est maladif.

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Cachou
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Message par Cachou » ven. déc. 03, 2010 5:34 pm

Sand a écrit :je m'en suis aperçue ^^

Le reproche le plus fréquent, à la suite d'un avis "c'est mal écrit", c'est "'mais comment tu oses, t'en sais rien, et puis d'abord on dit pas "les choux c'est dégueu", mais "je n'aime pas""

Bref, ce reproche se transforme en injonction, en ordre, de ne pas dire "c'est mal écrit", mais de dire "je n'ai pas aimé".

Donc, quand je demande "que devient l'ordre de ne pas écrire c'est mal écrit mais je n'ai pas aimé quand j'ai aimé quelque chose de mal écrit ?", une réponse de reformulation incluant "j'ai aimé" ne peut pas convenir.
Ah ben si alors, j'avais bien compris, et c'est bien parce qu'il manque un mot (sous-entendu pourtant) dans ton propos:

Quand tu veux exprimer ton dégoût des choux de Bruxelles dans un plat de steak-frites-choux de Bruxelles,on te dit de ne pas dire "Les choux de Bruxelles, c'est dégeu", mais "Je n'aime pas (sous-entendu "les choux de Bruxelles")", ce qui ne veut pas dire que tu n'aimes pas tout le plat mais juste les choux de Bruxelles, le steak pouvant donc être à ton goût (ainsi que les frites)(mais tu n'as rien exprimé à ce propos, donc les gens s'en tiendront à ton avis sur les choux ^_^).

Ben pareil ici. Quand on dit: "il ne faut pas dire "c'est mal écrit" mais "je n'aime pas", il est bien sûr sous-entendu que le "je n'aime pas" porte uniquement sur l'écriture, et non sur le bouquin dans son entièreté. Du coup, tu peux dire que tu n'as pas aimé l'écriture tout en ayant apprécié le bouquin. Pas d'impossibilité ici.

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