Pourquoi "Littérature de l'imaginaire" ?

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Lensman
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Message par Lensman » mar. déc. 06, 2011 12:34 pm

JDB a écrit :[et d'ailleurs, j'y pense : l'un des ouvrages fondateurs de la SF, La Guerre des mondes, n'est-il pas -- entre autres choses -- une métaphore du colonialisme ?]
Heu... ce n'est pas une métaphore: c'est la description du colonialisme marsien, beaucoup plus radical que le colonialisme habituel entre humains... Le colonialsme humain est cité dans le livre, puisqu'il est question de l'extermination des Tasmaniens.

Oncle Joe

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bormandg
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Message par bormandg » mar. déc. 06, 2011 12:40 pm

Lensman a écrit :. et les mateurs
Oncle Joe
Après la remarque sur les couvertures, c'est trop. :shock: :lol:
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

caliban
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Message par caliban » mar. déc. 06, 2011 12:42 pm

Lensman a écrit : Ce que je veux dire aussi, mais apparemment ça n'intéresse pas grand monde,
c'est qu'un pulp de SF, puis une revue de SF, c'est un support éditorial tout à fait
particulier, par rapport à ce que l'on trouvait en France.
Il me semble que tout le monde est d'accord avec ça.
Lensman a écrit : Des gens motivés l'ont utilisé, mais encore fallait-il que ce type de structure
éditoriale (avec ce système de spécialisation, qui fait grimacer les critiques n'appréciant
pas les littératures "commerciales"), si typiquement américain, existe.
C'est sur le "typiquement américain" que je ne te rejoins pas. Il est vrai qu'on n'a observé
ce phénomène, à ma connaissance, qu'aux USA et pendant une période bien définie.
Mias ça ne suffit pas à le rendre "typiquement américain" — on a vu des choses
comparables ailleurs dans d'autres domaines ; en France, Gérard évoquait les revues
d'électronique ; on peut aussi penser aux réseaux de radio-amateurs, etc.

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Message par bormandg » mar. déc. 06, 2011 12:43 pm

Lensman a écrit : Ce que je veux dire aussi, mais apparemment ça n'intéresse pas grand monde, c'est qu'un pulp de SF, puis une revue de SF, c'est un support éditorial tout à fait particulier, par rapport à ce que l'on trouvait en France.
En France, comme le dit Gérard, il y avait des publications fasciculaires (Les Aventuriers du ciel, par exemple), des romans populaires pas chers (les Tallandier bleus, par exemple), des textes en revue (dans sciences & Voyages, dans Lecture pour tous, etc), des romans conjecturaux plus chers publiés dans le circuit "normal"... Mais il n'y a pas de revues spécialisées.
D'une certaine façon, il y a des "revues spécialisées", mais elles n'ont pas le même mode de fonctionnament que les pulps US de science-fiction. Ce n'est pas la spécialisation, c'est vraiment le fonctionnement "club" avec courrier des lecteurs, critiques des autres parutions, etc... qui font la différence.
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Message par bormandg » mar. déc. 06, 2011 12:46 pm

caliban a écrit :
Lensman a écrit : Des gens motivés l'ont utilisé, mais encore fallait-il que ce type de structure
éditoriale (avec ce système de spécialisation, qui fait grimacer les critiques n'appréciant
pas les littératures "commerciales"), si typiquement américain, existe.
C'est sur le "typiquement américain" que je ne te rejoins pas. Il est vrai qu'on n'a observé
ce phénomène, à ma connaissance, qu'aux USA et pendant une période bien définie.
Mias ça ne suffit pas à le rendre "typiquement américain" — on a vu des choses
comparables ailleurs dans d'autres domaines ; en France, Gérard évoquait les revues
d'électronique ; on peut aussi penser aux réseaux de radio-amateurs, etc.
Je plussoie. Ceci étant, le fait que ce comportement ne soit pas apparu en France est, en partie, dû à "l'esprit français" plus individualiste, mais aussi à l'effet psychologique de la Grande Guerre. D'une certaine façon, "Plus jamais ça" bouche le regard sur l'avenir.
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Message par Lensman » mar. déc. 06, 2011 12:55 pm

caliban a écrit :
Lensman a écrit : Des gens motivés l'ont utilisé, mais encore fallait-il que ce type de structure
éditoriale (avec ce système de spécialisation, qui fait grimacer les critiques n'appréciant
pas les littératures "commerciales"), si typiquement américain, existe.
C'est sur le "typiquement américain" que je ne te rejoins pas. Il est vrai qu'on n'a observé
ce phénomène, à ma connaissance, qu'aux USA et pendant une période bien définie.
Mias ça ne suffit pas à le rendre "typiquement américain" — on a vu des choses
comparables ailleurs dans d'autres domaines ; en France, Gérard évoquait les revues
d'électronique ; on peut aussi penser aux réseaux de radio-amateurs, etc.
Je parle pour la littérature de fiction, et je parle précisément pour la période bien définie des années vingt aux années cinquante. Ensuite, dans d'autres pays que les USA, du fait de l'existence de ces revues américaines de fiction, de nombreuses tentatives ont été faites soit de les traduire, soit de les imiter, ou les deux en même temps.
Je remarque que Analog (ex Astounding) existe encore aujourd'hui, que F&SF, plus tardif, est toujours là. Ce sont des phénomènes remarquables, n'ayant que fort peu d'équivalents sur des durées pareilles (je parle de revue proposant très majoritarement de la fiction dans leur contenu). J'aimerais bien que l'on me cite des équivalents non US, d'ailleurs.

Je pense que nous sommes tellement habitués à ces objets que nous en oublions leur caractère exceptionnel.

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Message par bormandg » mar. déc. 06, 2011 1:01 pm

Lensman a écrit :
caliban a écrit :
Lensman a écrit : Des gens motivés l'ont utilisé, mais encore fallait-il que ce type de structure
éditoriale (avec ce système de spécialisation, qui fait grimacer les critiques n'appréciant
pas les littératures "commerciales"), si typiquement américain, existe.
C'est sur le "typiquement américain" que je ne te rejoins pas. Il est vrai qu'on n'a observé
ce phénomène, à ma connaissance, qu'aux USA et pendant une période bien définie.
Mias ça ne suffit pas à le rendre "typiquement américain" — on a vu des choses
comparables ailleurs dans d'autres domaines ; en France, Gérard évoquait les revues
d'électronique ; on peut aussi penser aux réseaux de radio-amateurs, etc.
Je parle pour la littérature de fiction, et je parle précisément pour la période bien définie des années vingt aux années cinquante. Ensuite, dans d'autres pays que les USA, du fait de l'existence de ces revues américaines de fiction, de nombreuses tentatives ont été faites soit de les traduire, soit de les imiter, ou les deux en même temps.
Je remarque que Analog (ex Astounding) existe encore aujourd'hui, que F&SF, plus tardif, est toujours là. Ce sont des phénomènes remarquables, n'ayant que fort peu d'équivalents sur des durées pareilles (je parle de revue proposant très majoritarement de la fiction dans leur contenu). J'aimerais bien que l'on me cite des équivalents non US, d'ailleurs.

Je pense que nous sommes tellement habitués à ces objets que nous en oublions leur caractère exceptionnel.

Oncle Joe
Ce n'est pas sur le caractère exceptionnel que Cal te reprend, c'est sur l'idée que cette exception serait liée à un trait typique des américains. Si tel était le cas, nous aurions d'autres exemples qui opposeraient américains et non-américains de la même façon.
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Fabien Lyraud
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Message par Fabien Lyraud » mar. déc. 06, 2011 1:19 pm

Ma réponse est toujours la même : des revues paraissant chaque mois, avec des textes nombreux (le problème de la qualité se résout avec le temps), des éditoriaux, une politique éditoirale volontarise, un véritable contact avec les 9 lecteurs repérés par Gérard, un courrier des lecteur dense (rédigé sous pseudo par le rédactaur en chef et éventuellement les 3 lecteurs, sur les 9, qui savaient écrire), les fanzines, les clubs (9 membres, de manière générale...)
Impossible à mettre en place après 1924 et le procès Offenstadt. Ce procès, mentionné par Jacques Van Herp comme une attaque contre cette littérature de merveilleux scientifique, a été intenté contre l'éditeur populaire à propos de la publication du roman de José Moselli, la fin d'Illa. Paru dans une revue pour adolescent, Sciences et Voyages, le texte est accusé de démoralisation de la jeunesse. Les plaignants sont des prêtres mené par une certain abbé Calippe, directeur du grand séminaire de Bordeaux. Je sais bien que Gérrard, par exemple considère ce procès comme anecdotique et qu'il ne prouve rien. Je ne suis pas d'accord. Il fixe la limite que les éditeurs ne peuvent pas se permettre de franchir. Je crois si le genre n'a pas autant progressé que chez les Américains c'est surtout parce que le monde de l'édition populaire avait peur d'autres procès du même genre. La fin des années 20 et le début des années 30 voit le développement des ligues d'extrême droite dont certaines sont liées à l'église. Donc ça doit théoriquement renforcer une certaine chape de plomb.
La première tentative de revue date de 1938 avec Messac. Donc on se rend compte que la deuxième moitié des années 30 avait rendu certaines chose possible. Mais que de temps perdu.
Bienvenu chez Pulp Factory :
http://pulp-factory.ovh


Le blog impertinent des littératures de l'imaginaire :
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Message par Lensman » mar. déc. 06, 2011 2:14 pm

bormandg a écrit :Ce n'est pas sur le caractère exceptionnel que Cal te reprend, c'est sur l'idée que cette exception serait liée à un trait typique des américains. Si tel était le cas, nous aurions d'autres exemples qui opposeraient américains et non-américains de la même façon.
Je ne sais pas si c'est liés à un "trait typique des américains", je ne sais pas sonder l'âme des peuples (si cela veut dire quelque chose...), mais je constate qu'il n'y a qu'aux Etats-Unis (d'après moi, d'après ce que je connais, mais je ne suis qu'un amateur) que s'est développé ce système de revues spécialisées de fiction. En raclant bien, on trouvera des trucs comme la fameuse publication allemande luxueuse largement dédiée au fantastique dont je viens d'oublier le nom, mais je parle du système dans son caractère... systématique (et industriel, et vendu très peu cher): pulps d'histoires policières, d'histoires d'horreur, de mariage (je jure que c'est vrai... et elles ne se confondaient pas toujours avec la catégorie précédente...), d'histoires de sport, d'histoires de SF (tiens?), d'aviation, de western, consacrées à un héros spécifique (The Shadow, Doc Savage, The Spider..), etc.
A cette époque, c'est une manière très particulière de diffuser et vendre de la fiction (j'insiste, je parle de fiction, je repécise parce que j'ai le sentiment angoissant que je m'exprime très mal, peu de camarades me donnant l'impression de comprendre ce que j'essaie de dire..), qui n'était pas employée en France, et dont il me semble (mais on me détrompera peut-être) qu'elle ne se trouvait pas non plus ailleurs. (Maintenant, je rappelle que l'on était parti sur les différences et ressemblances France/USA).

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Gérard Klein
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Message par Gérard Klein » mar. déc. 06, 2011 2:25 pm

bormandg a écrit :
dracosolis a écrit :je parlais de la saignée^^
Autrement dit tu prends parti pour la position de Gérard et limites les causes du non-développement du merceilleux scientifique au seul motif démographique?
Je n'ai jamais limité la question au "seul" facteur démographique. Il est tout de même incroyable de voir combien de mauvaises fois peuvent s'immiscer dans ce débat. On est dans l'idéologie sans fard.
J'ai dit et je maintiens que c'est un facteur important. Parmi d'autres. Mais celui-là est énorme.
Sur le nombre des auteurs, trois sélectionnés et disons peut-être une dizaine de lisibles. Les autres on ne sait pas. Oui, la saignée est passée par là.
Du côté des lecteurs aussi sans doute: les hommes jeunes qui constituaient et constituent toujours l'essentiel du lectorat se sont beaucoup réduits. Les morts lisent peu et mal.

Sur le long terme et en considérant ce qui s'est passé après la Seconde Guerre Mondiale en France jusqu'à nos jours, ôtons de la production éditoriale tout ce qui est importé, pour l'essentiel de l'anglais, que reste-t-il? Pas grand chose. Et si l'on se montre qualitativement délicat et qu'on exclut les neuf-dixièmes du Fleuve Noir (en se montrant généreux), c'est une toile d'araignée avec quelques fils.
La qualité du Fleuve est comparable à celle des pulps des années 1920 à 1950. Mais ici, la tradition ne s'est pas constituée, celle qui aux USA et en GB a conduit à l'émergence d'un grand nombre d'auteurs notables et parfois grands surtout à partir des années 1950, les Sturgeon, Dick, Bradbury, Silverberg et des dizaines d'autres (J'allais oublier de citer l'immense Van Vogt).
Cette tradition en France commençait à se constituer comme au Royaume-Uni au tout début du Vingtième siècle; elle tente, sans y parvenir, de se reconstituer entre les deux guerres. Depuis les années 1950, il y a en France des collections, des revues, des fanzines, des conventions, etc. Mais ça ne prend toujours pas. Je pense que plusieurs trous, durant les guerres notamment, n'ont jamais été comblés et que la place a été prise largement par les productions anglo-saxonnes ce qui n'a pas facilité le développement d'une tradition autochtone.. Aux USA et dans une moindre mesure en GB, la tradition, bien antérieure à Amazing, n'a jamais été rompue et n'a cessé de progresser. Jusqu'aux quinze dernières années, où là, c'est mauvais.
Mon immortalité est provisoire.

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Message par Lensman » mar. déc. 06, 2011 2:27 pm

Fabien Lyraud a écrit :
Ma réponse est toujours la même : des revues paraissant chaque mois, avec des textes nombreux (le problème de la qualité se résout avec le temps), des éditoriaux, une politique éditoirale volontarise, un véritable contact avec les 9 lecteurs repérés par Gérard, un courrier des lecteur dense (rédigé sous pseudo par le rédactaur en chef et éventuellement les 3 lecteurs, sur les 9, qui savaient écrire), les fanzines, les clubs (9 membres, de manière générale...)
Impossible à mettre en place après 1924 et le procès Offenstadt. Ce procès, mentionné par Jacques Van Herp comme une attaque contre cette littérature de merveilleux scientifique, a été intenté contre l'éditeur populaire à propos de la publication du roman de José Moselli, la fin d'Illa. Paru dans une revue pour adolescent, Sciences et Voyages, le texte est accusé de démoralisation de la jeunesse. Les plaignants sont des prêtres mené par une certain abbé Calippe, directeur du grand séminaire de Bordeaux. Je sais bien que Gérrard, par exemple considère ce procès comme anecdotique et qu'il ne prouve rien. Je ne suis pas d'accord. Il fixe la limite que les éditeurs ne peuvent pas se permettre de franchir. Je crois si le genre n'a pas autant progressé que chez les Américains c'est surtout parce que le monde de l'édition populaire avait peur d'autres procès du même genre. La fin des années 20 et le début des années 30 voit le développement des ligues d'extrême droite dont certaines sont liées à l'église. Donc ça doit théoriquement renforcer une certaine chape de plomb.
La première tentative de revue date de 1938 avec Messac. Donc on se rend compte que la deuxième moitié des années 30 avait rendu certaines chose possible. Mais que de temps perdu.
Oui, il y a cette fameuse affaire... elle prouve, au moins, une ambiance assez désagréable.
Intervient aussi un autre problème, celui de de ce que l'on met sout l'appellation "publication pour la jeunesse".
Là, il y a des travaux à faire (sans doute déjà faits quelque part...), mais la perception de ce qui est la jeunesse, dans le monde de l'édition, ne semblait pas (et ne semble sans doute pas aujourd'hui) être exacvtement la même en France qu'aux USA.
Je ne doute pas que des gamins se débrouillaient pour lire des pulps, aux USA. Cependant, les pulps n'étaient pas conçus pour un public de gamins (la "jeunesse", en France). Ils étaient destinés aux jeunes adultes, et aux adultes.
Or, en France, on semblait plutôt viser le public des "gamins" (je parle des périodiques destinés à la jeunesse, bien sûr). Cela relativise fortement, et pour d'autres raisons que celles déjà avancées, le parallèle fait, je trouve de manière un peu rapide, entre les publications populaires françaises et les pulps.

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Message par bormandg » mar. déc. 06, 2011 2:37 pm

Gérard Klein a écrit :
bormandg a écrit :
dracosolis a écrit :je parlais de la saignée^^
Autrement dit tu prends parti pour la position de Gérard et limites les causes du non-développement du merceilleux scientifique au seul motif démographique?
Je n'ai jamais limité la question au "seul" facteur démographique. Il est tout de même incroyable de voir combien de mauvaises fois peuvent s'immiscer dans ce débat. On est dans l'idéologie sans fard.
J'ai dit et je maintiens que c'est un facteur important. Parmi d'autres. Mais celui-là est énorme.
Sur le nombre des auteurs, trois sélectionnés et disons peut-être une dizaine de lisibles. Les autres on ne sait pas. Oui, la saignée est passée par là.
Du côté des lecteurs aussi sans doute: les hommes jeunes qui constituaient et constituent toujours l'essentiel du lectorat se sont beaucoup réduits. Les morts lisent peu et mal.

Sur le long terme et en considérant ce qui s'est passé après la Seconde Guerre Mondiale en France jusqu'à nos jours, ôtons de la production éditoriale tout ce qui est importé, pour l'essentiel de l'anglais, que reste-t-il? Pas grand chose. Et si l'on se montre qualitativement délicat et qu'on exclut les neuf-dixièmes du Fleuve Noir (en se montrant généreux), c'est une toile d'araignée avec quelques fils.
La qualité du Fleuve est comparable à celle des pulps des années 1920 à 1950. Mais ici, la tradition ne s'est pas constituée, celle qui aux USA et en GB a conduit à l'émergence d'un grand nombre d'auteurs notables et parfois grands surtout à partir des années 1950, les Sturgeon, Dick, Bradbury, Silverberg et des dizaines d'autres (J'allais oublier de citer l'immense Van Vogt).
Cette tradition en France commençait à se constituer comme au Royaume-Uni au tout début du Vingtième siècle; elle tente, sans y parvenir, de se reconstituer entre les deux guerres. Depuis les années 1950, il y a en France des collections, des revues, des fanzines, des conventions, etc. Mais ça ne prend toujours pas. Je pense que plusieurs trous, durant les guerres notamment, n'ont jamais été comblés et que la place a été prise largement par les productions anglo-saxonnes ce qui n'a pas facilité le développement d'une tradition autochtone.. Aux USA et dans une moindre mesure en GB, la tradition, bien antérieure à Amazing, n'a jamais été rompue et n'a cessé de progresser. Jusqu'aux quinze dernières années, où là, c'est mauvais.
Dans une certaine mesure je suis d'accord avec toi: il s'est créé aux Etats-Unis une tradition, une communauté, qui ne s'est pas créée en France. Mais j'en vois plus la raison dans l'individualisme des auteurs qui, finalement, malgré la saignée, n'étaient pas si rares en France, dans une certaine ambiance défavorable dûe, conjointement, à la Guerre et à l'Eglise et ses ligues.
Et dois-je te rappeler un autre immense auteur américain que tu as (volontairement?) omis de citer? Et dont la postérité dans la SF américaine est importante?
Autre détail auquel je réagis à la relecture: tu cites les fanzines et conventions en France. Depuis les années 50? Nous en serions à la 60° convention française? Pour les fanzines aussi j'ai un doute. Même s'il y en a eu certains avant, leur essor se fait dans les années 70, je crois.
Modifié en dernier par bormandg le mar. déc. 06, 2011 2:42 pm, modifié 1 fois.
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Message par Gérard Klein » mar. déc. 06, 2011 2:38 pm

Roland C. Wagner a écrit :Une piste que j'aimerais bien suivre, mais que je n'ai pas le temps d'explorer, c'est celle du rôle joué par… disons l'imaginaire colonial.

Très brièvement, aux USA, on proclame la fin de la frontière en 1890. On assiste alors à une poussée coloniale (Cuba, Philippines, Porto Rico), finie depuis longtemps lorsque la guerre éclate en 1914. Cela prend quelques années, mais l'espace devient une nouvelle frontière, au moins dans l'esprit de certaines personnes, et cette idée s'implante dans l'imaginaire collectif.

En France, où la notion US de frontière n'existe pas vraiment, il me semble que les colonies demeurent une “frontière”. L'exposition coloniale de 1931, organisée pour le centenaire de la conquête de l'Algérie, se veut la vitrine d'un empire. À titre de comparaison, on peut jeter un coup d'œil à L'exposition universelle de Paris (1937), où les nations rivalisent pour monter qu'elles ont la plus grosse, puis la comparer avec la foire internationale de New York (1939) où, entre autres choses, la télévision fait ses débuts officiels.
C'est une piste intéressante. Mais je n'y crois guère. D'abord le western est un genre très important, voire dominant avec le polar dans les pulps américains jusque vers les années 1950. Idem au cinéma. Donc l'esprit "colonial" de la frontière n'a pas disparu, en tout cas pas dans les années 20 ni 30.
En France, faudrait voir, mais l'imaginaire colonial, et on est bien dans l'imaginaire, puissant avant 1914, me semble s'étioler dans l'entre-deux-guerres mais je ne connais guère cette littérature. Je ne vois pas là de concurrence entre deux champs de l'imaginaire qui auraient pu entraver le développement de celui du merveilleux scientifique. Ou alors, c'était pareil aux USA.
Il y a même des synergies anciennes, chez Verne et chez Kipling par exemple.
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Message par Gérard Klein » mar. déc. 06, 2011 2:47 pm

bormandg a écrit :
Lensman a écrit : Ce que je veux dire aussi, mais apparemment ça n'intéresse pas grand monde, c'est qu'un pulp de SF, puis une revue de SF, c'est un support éditorial tout à fait particulier, par rapport à ce que l'on trouvait en France.
En France, comme le dit Gérard, il y avait des publications fasciculaires (Les Aventuriers du ciel, par exemple), des romans populaires pas chers (les Tallandier bleus, par exemple), des textes en revue (dans sciences & Voyages, dans Lecture pour tous, etc), des romans conjecturaux plus chers publiés dans le circuit "normal"... Mais il n'y a pas de revues spécialisées.
D'une certaine façon, il y a des "revues spécialisées", mais elles n'ont pas le même mode de fonctionnament que les pulps US de science-fiction. Ce n'est pas la spécialisation, c'est vraiment le fonctionnement "club" avec courrier des lecteurs, critiques des autres parutions, etc... qui font la différence.
Les revues de radio en France (plutôt que d'électronique, le terme n'existe pas encore), de bricolage (l'immense Système D), de modélisme, fonctionnent bien sur un modèle proche de l'américain avec courrier des lecteurs, clubs et rencontres. Et cela au moins depuis les années 1920, probablement dès avant 14. Gernsback transpose un modèle qu'il connaît bien. Cette transposition ne s'est pas faite ici.
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Message par Lensman » mar. déc. 06, 2011 2:47 pm

Gérard Klein a écrit :La qualité du Fleuve est comparable à celle des pulps des années 1920 à 1950.
Gérard, je ne vois pas bien comment on peut comparer. Le Fleuve Noir, et les pulps sont deux périodes différentes qui ne se recoupent guère. Il faudrait au moins comparer sur une même période, les Français sur 20-39 (j'exclus la guerre, car ce ne serait déloyal) et les Américains sur 20-39.
Et même là, ce serait du sport ! Car il faudrait s'entendre sur le corpus SF. Ne doit-on comparer que magazine contre magazine (Sciences & Voyages versus Amazing Stories?) ou doit-on pêcher ailleurs que dans les magazines? (il y a aussi de la conjecture publiée hors pulps aux USA...)
Avec un minimum de mauvaise foi, on pourrait réussir à prouver que, à tout prendre, les Français sont meilleurs...
Je ne crois pas que des critères "qualitatifs" (au sens qualité littéraire) soient très utilisables, sur cette période, du moins.
En revanche, avec des critères du type "structuration" du genre (pardon, Georges...), je crois qu'il n'y aura pas photo...

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