Papageno a écrit :[...] Le succès, disons très relatif, des quatre romans de Greg Egan que j'ai publiés dans mes deux collections ne m'a pas vraiment incité à en remettre une couche. [...]
Egan (dont je suis Fan) n'est-il pas un auteur typique pour public SF spécialisé - public qui apparemment n'est n'est pas assez nombreux pour transformer un livre d' Egan en Best-seller,ou même assurer un simple succès, même si tous acheter leur exemplaire.
A terme cela ne va t-il pas obliger les éditeurs à se tourner vers des romans de plus en plus grand public, pour assurer leurs ventes. Les lecteurs connaisseurs n'ayant commercialement qu'un poids très négligeable!
En est-on déjà arrivé la ou est-ce une vision trop pessimiste?
PS: Méfiez-vous de la reine de la nuit, c'est elle donne le poignard à Tamina et lui ordonne de tuer Sarastro. Certes, on peut se laissez séduire, avec sa série de contre-fa, elle ordonne joliment, mais...!
Je pensais à l'interprétation de Nathalie Dessay ou à celle de Renée Fleming si toutefois cette dernière a jamais interprêté le rôle. Je rajoute ces deux divas à ma liste comprenant déjà Nicole Kidman et Diana Krall. Si Dessay me poignarde, je meurs assouvi.
À propos de Greg Egan, ne parlons pas à tort et à travers de best-sellers ni même de succès. Parlons plus simplement de livres qui font leurs frais. Je reviendrai plus loin en réponse à un autre message sur cette notion. Egan ne fait pas ses frais. Ou plus exactement, il n'a pas assez d'acheteurs en France pour couvrir les frais de traduction, d'édition, de publication et tout le reste. Il s'est vendu à ce jour 2861 exemplaires de Téranésie et à peine plus des précédents, ce qui couvre à peu près un quart des frais engagés.
Cela n'interdit pas de le publier mais cela incite à la réflexion. Imaginez que votre patron - enfin celui qui vous verse votre salaire ou vos subsides - vous dise, dommage, ce mois-ci pas de paie. Mais je compte bien que vous travaillerez pour la gloire. Quelle tête feriez-vous?
Bien entendu, les éditeurs qui essaient de survivre voire de vivre bien préfèrent publier des livres qui se vendent que des livres qui ne se vendent pas assez. Cela ne veut pas dire qu'ils renonceront à prendre des risques même lorsqu'ils savent la cause pratiquement perdue. Quand on n'aime, on ne compte pas (enfin pas toujours et généralement pas assez souvent).
Cela étant, le véritable problème est double: d'une part la volatilité du public qui se montre inconstant et imprévisible sauf en ce qui concerne d'indiscutables génies comme Bernard Werber ; d'autre part peut-être surtout la disparition de la notion de fonds chez les libraires, sans doute liée au point précédent. Au bout de trois à six mois, un livre de science-fiction est aujourd'hui pratiquement mort. Ce n'était pas le cas, il y a seulement vingt ans. Je faisais 50% des ventes d'Ailleurs et demain sur le fonds. Aujourd'hui plutôt 10%.Même chose, en pire, en édition de poche.
Certes, en littérature générale, la durée de vie, c'est trois semaines. Alleluiah, en science-fiction, nous avons presque trois mois devant nous. Pour combien de temps? Comme le bouche à oreille met d'un an à dix-huit mois à s'installer, quand un livre commence à faire son trou, il n'est pratiquement plus disponible en librairie. La surproduction y est pour quelque chose. La distribution du livre rejoint celle de la presse et des salades: la péremption est immédiate.
Admettons que pour un Egan, il y ait en France 10 000 amateurs, ce que je crois assez volontiers. Si, d'une part, on savait comment les toucher et si, d'autre part, ils groupaient leurs achats sur trois mois, il n'y aurait plus de problème. Mais le système actuel, que j'ai déjà décrit, consiste à envoyer presque au hasard des bouquins, en espérant que quelqu'un trébuchera dessus et voudra bien les acheter.
Je ne jette pas la pierre aux libraires : ils ne font que refléter le comportement du public même si, à force de l'anticiper, ils finissent par le provoquer.