De la littérature comme exutoire aux fantasmes des auteurs
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La morale, déjà, à la base, c'est caca, mais encore plus en art/littérature. Wilde disait ça plus joliment, mais il est vrai que c'était un sodomite pédophile.
Lolita, c'est très très très bien.
L'imagination, c'est sans doute utile chez un auteur.
Ce post hautement constructif vous a été offert par Nébal. Merci, c'était vraiment très intéressant.
Lolita, c'est très très très bien.
L'imagination, c'est sans doute utile chez un auteur.
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Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
- Virprudens
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Merci Nébal, c'était très intéressant.
Et sinon, une question con : pourquoi donc Kubrick a-t'il changé l'age de Lolita, la faisant passer de 12 ans chez Nabokov à 15 ? C'est juste passqu'elle a des poils ou bien ?
(Merci virprudens, c'était très intéressant aussi)
Et comme le conseille cette chère Bouse : lisez Brussolo.
Ou alors, Di Rollo.
Et sinon, une question con : pourquoi donc Kubrick a-t'il changé l'age de Lolita, la faisant passer de 12 ans chez Nabokov à 15 ? C'est juste passqu'elle a des poils ou bien ?
(Merci virprudens, c'était très intéressant aussi)
Et comme le conseille cette chère Bouse : lisez Brussolo.
Ou alors, Di Rollo.
- Please, be polite.
- Go fuck yourself.
- Go fuck yourself.
Pas ou bien, pubiens (ah ah). Kubrick a changé son âge parce qu'on a beau vouloir provoquer, il y a des limites imposées au cinéma qui ne le sont pas à la littérature.Virprudens a écrit :Merci Nébal, c'était très intéressant.
Et sinon, une question con : pourquoi donc Kubrick a-t'il changé l'age de Lolita, la faisant passer de 12 ans chez Nabokov à 15 ? C'est juste passqu'elle a des poils ou bien ?
Idem pour ORANGE MECANIQUE, où on trouve des viols de fillettes et des tortures abominables (tiens, j'aurais dû le citer celui-là, dans ma liste de quêtes fantasmatiques). Un film avec une fillette de 12 ans, c'était juste impensable. D'ailleurs, même dans le plus récent remake, la fille reste une adolescente.
Kubrick est d'ailleurs un bon exemple d'artiste aux thèmes obsessionnels, sauf qu'il était plus intéressé, dans LOLITA, par le combat moral d'un homme plutôt que par la pédophilie en tant que tel (on retrouve ce combat intérieur dans ORANGE MECANIQUE, FULL METAL JACKET, EYES WIDE SHUT, etc.). Donc en fin de compte Kubrick était un artiste à la vision très morale, malgré l'aspect provocateur de son oeuvre, à la différence de Nabokov.
De manière plus pragmatique, c'était aussi mieux pour avoir une actrice capable d'interpréter un rôle tout de même sacrément complexe... Au passage, Sue Lyon est magistrale. Et aujourd'hui encore, au cinéma comme à la téloche, les rôles d'ados sont très généralement joués par des jeunes adultes (et pas toujours hyper jeunes d'ailleurs : voyez Di Caprio... ou Jackie Chan qui continuait d'incarner des jeunes crétins à 50 ans passés !).
Autre aspect : la problématique est très différente chez Kubrick et chez Nabokov ; Lolita est plus sulfureuse dans le film, sa maturité sexuelle est très tôt soulignée (et même mise en avant...), sa souffrance est moins marquée que dans le livre, et quant à Humbert Humbert, même s'il reste un tantinet pervers certes, c'est son côté de victime qui ressort le plus dans le film ; la construction n'y est pas pour rien, outre la composition de James Mason, Peter Sellers et Sue Lyon.
Pour revenir à Orange mécanique, là encore dans le roman Alex est un tout jeune ado, voire pré-ado... ce qui n'est pas vraiment le cas de Malcolm McDowell, qui n'en est pas moins magistral lui aussi.
Mais le combat moral d'un homme ? dans Lolita et dans les autres films que tu cites ? Franchement, je suis pas sûr...
Autre aspect : la problématique est très différente chez Kubrick et chez Nabokov ; Lolita est plus sulfureuse dans le film, sa maturité sexuelle est très tôt soulignée (et même mise en avant...), sa souffrance est moins marquée que dans le livre, et quant à Humbert Humbert, même s'il reste un tantinet pervers certes, c'est son côté de victime qui ressort le plus dans le film ; la construction n'y est pas pour rien, outre la composition de James Mason, Peter Sellers et Sue Lyon.
Pour revenir à Orange mécanique, là encore dans le roman Alex est un tout jeune ado, voire pré-ado... ce qui n'est pas vraiment le cas de Malcolm McDowell, qui n'en est pas moins magistral lui aussi.
Mais le combat moral d'un homme ? dans Lolita et dans les autres films que tu cites ? Franchement, je suis pas sûr...
Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
Dans ORANGE MECANIQUE, on veut changer la nature d'un homme mauvais pour le forcer à devenir bon. Dans FULL METAL JACKET, Joker, face à la barbarie de la guerre, se voit contraint de faire des actes que son éducation et sa culture réprouvent (cf. la dualité entre le symbole peace and love et le born to kill de son casque). Dans EYES WIDE SHUT, Cruise s'essaye à des expériences interdites par bravoure, parce que sa femme lui a avoué qu'elle fantasmait sur d'autres hommes... Chez Kubrick, il y a toujours ce questionnement moral, avec un contraste net entre ce qui est moral et ce qui ne l'est pas. Enfin tout ça pour dire que quand il adapte LOLITA, à mon avis ses motivations sont autres que celles de Nabokov. D'ailleurs, d'une manière générale, il utilisait les livres qu'il adaptait pour explorer SES propres thèmes de prédilection, plutôt que ceux des auteurs. Il vampirisait le livre.
Modifié en dernier par Florent le mar. août 12, 2008 10:05 pm, modifié 1 fois.
Mouais...Florent a écrit :Dans ORANGE MECANIQUE, on veut changer la nature d'un homme mauvais pour le forcer à devenir bon. Dans FULL METAL JACKET, Joker, face à la barbarie de la guerre, se voit contraint de faire des actes que son éducation et sa culture réprouve (cf. la dualité entre le symbole peace and love et le born to kill de son casque). Dans EYES WIDE SHUT, Cruise s'essaye à des expériences interdites par bravoure, parce que sa femme lui a avoué qu'elle fantasmait sur d'autres hommes... Chez Kubrick, il y a toujours ce questionnement moral, avec un contraste net entre ce qui est moral et ce qui ne l'est pas. Enfin tout ça pour dire que quand il adapte LOLITA, à mon avis ses motivations sont autres que celles de Nabokov. D'ailleurs, d'une manière générale, il utilisait les livres qu'il adaptait pour explorer SES propres thèmes de prédilection, plutôt que ceux des auteurs. Il vampirisait le livre.
Dans Orange mécanique, justement, le changement est imposé au nom de la morale à Alex. Lui ne livre pas un combat, il est contraint, sans échappatoire. Et le film s'empresse de dénoncer l'immoralité tant du traitement Ludovico que de ceux qui le combattent ; Alex est "guéri" quand la possibilité du "mal", la possibilité de se livrer à ses passions, lui est rendue. Et le plan final le montre bien applaudi par la bonne société...
Dans Full Metal Jacket, Joker lui-même, au-delà du badge qui tient quand même un peu de la philosophie de comptoir et du foutage de gueule - eh, c'est Joker, après tout... -, déclare qu'il est venu au Vietnam pour tuer des Vietnamiens, de même qu'il ne se prive pas de participer à la torture de Baleine. Son comportement est à vrai dire immoral tout au long du film... sauf à la fin, et c'est ce qui la rend si dérangeante (notamment dans le jugement porté sur son acte). Si Full Metal Jacket n'est pas un film contre la guerre - à la différence des Sentiers de la gloire - mais un film sur la guerre, selon les propres mots de Kubrick, il n'en montre pas moins la réalité d'une institution dépassant la morale et rendant difficile voire absurde tout jugement. C'est le problème posé notamment par la formation cruelle infligée par le pragmatique sergent Hartman, qui dépasse là encore le jugement...
Dans Eyes Wide Shut, la jalousie de Cruise l'amène à tenter des expériences mais jamais à les accomplir. Non pas parce qu'elles seraient "immorales", mais simplement parce qu'elles le dépassent, qu'elles ne sont pas pour lui, ce qui ressort particulièrement de la scène de l'orgie ; il est pris de l'envie de tromper sa femme, mais n'y parvient à aucun moment. Quant à sa bravoure, elle est plus que douteuse : j'aurais davantage envie de parler de lâcheté, Cruise s'inventant plus ou moins des excuses pour ne pas passer à l'acte quand il n'accumule pas les actes manqués, jusqu'à sombrer dans la théorie du complot. Cette lâcheté explique d'ailleurs ses illusions "morales" et profondément machistes, tous les purs fantasmes par lesquels il passe (car ce n'est jamais rien d'autre - Traumnovelle) comme son impossibilté de communiquer avec sa femme, jusqu'à la scène finale et sa phrase de conclusion dont je doute qu'elle paraisse morale aux chantres de la bienséance... et où c'est bien, finalement, Nicole Kidman qui domine un Cruise complètement paumé parce que son monde de certitudes s'est effondré.
Dans tous ces films, je vois avant tout une réflexion désabusée sur l'hypocrisie, la violence et les névroses résultant du refoulement des passions ou de leur remplacement par des passions ou sentiments factices. Et on pourrait rajouter ici Barry Lyndon, Shining, et Docteur Folamour sans problème, et probablement 2001. Le cinéma de Kubrick, dans l'ensemble, est quand même passablement pessimiste et nihliste. On peut lui accorder une posture de moraliste si 'on tient à mettre en avant la dénonciation des impostures, mais je ne suis pas certain que cela soit très judicieux. Maintenant, bon, c'est ma vision, et je dis peut-être des bêtises...
D'accord par contre sur les adaptations par Kubrick, il a toujours plié les ouvrages qu'il adaptait à ses envies et ses thématiques de prédilection.
Hop : Cédric FERRAND, Wastburg
Oui, mais pour revenir au sujet, parce que je perds un peu le fil, Kubrick a indéniablement un point de vue moral. Ses personnages sont moraux, immoraux ou amoraux, mais il y a des valeurs morales que les personnages acceptent ou dont ils se défient.
Pour revenir à LOLITA, la démarche de Nabokov est de renier la morale au nom de l'assouvissement d'un fantasme égoïste. L'auteur semble souhaiter - c'est mon interprétation - un retour à l'ère païenne, avant les religions monothéistes, quand les tabous sexuels étaient quasiment inexistants (pédophilie, inceste, viols, homosexualité...). C'est une démarche qui va à l'encontre de la morale, et qu'on peut donc qualifier d'immorale (et autrement plus profonde qu'un auteur pervers qui expose ses fantasmes en connivence avec un lecteur voyeur et complice).
Pour revenir à LOLITA, la démarche de Nabokov est de renier la morale au nom de l'assouvissement d'un fantasme égoïste. L'auteur semble souhaiter - c'est mon interprétation - un retour à l'ère païenne, avant les religions monothéistes, quand les tabous sexuels étaient quasiment inexistants (pédophilie, inceste, viols, homosexualité...). C'est une démarche qui va à l'encontre de la morale, et qu'on peut donc qualifier d'immorale (et autrement plus profonde qu'un auteur pervers qui expose ses fantasmes en connivence avec un lecteur voyeur et complice).
Et le couple Breton/Trotski: toute licence en art.Nébal a écrit :La morale, déjà, à la base, c'est caca, mais encore plus en art/littérature. Wilde disait ça plus joliment, mais il est vrai que c'était un sodomite pédophile.
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Je réponds à ce qui a été dit plus haut.
Céline: cas typique de l'auteur qui n'a pas une once de sincérité dans ses bouquins, mais qui avait une technique ahurissante pour donner l'impression.
Il explique tout ça dans un paquet d'entretiens radiophoniques, avec l'exemple tout con du bâton dans l'eau : pour qu'il apparaisse droit, il faut le tordre dès le départ: c'est le principe de l'art.
Pour faire vrai, il faut mentir.
Exemples:
Au théâtre, pour qu'on ait l'impression qu'un personnage tape fort sur une table normale, on met une lamelle de métal sous la planche, ça la fait vibrer et ça donne un effet de "vraisemblance".
Au théâtre toujours, les meilleurs acteurs ne deviennent pas leur personnage. Primat de la technique, là encore: donner à ressentir ce qu'on ne ressent pas soi-même, et ce qu'on ne pourra de toute façon jamais ressentir comme si l'on n'était qu'un spectateur.
Baudelaire: s'il n'y avait eu que du sentiment, du fantasme, dans ses poèmes, il n'aurait jamais été le poète qui a dépassé par le haut toutes les formes classiques (l'alexandrin, le sonnet, etc.), les utilisant une dernière fois d'une manière telle qu'après lui elles n'ont plus pu être utilisées de la même manière. La sorcellerie évocatoire, le mal, les correspondances, le spleen, oui, mais aussi et par-dessus tout: l'effort du technicien de la langue pour qu'elles soient plus et autres que des affects tout juste bons à être déblatérés sur un divan, ou dans une chambre capitonnée.
Céline: cas typique de l'auteur qui n'a pas une once de sincérité dans ses bouquins, mais qui avait une technique ahurissante pour donner l'impression.
Il explique tout ça dans un paquet d'entretiens radiophoniques, avec l'exemple tout con du bâton dans l'eau : pour qu'il apparaisse droit, il faut le tordre dès le départ: c'est le principe de l'art.
Pour faire vrai, il faut mentir.
Exemples:
Au théâtre, pour qu'on ait l'impression qu'un personnage tape fort sur une table normale, on met une lamelle de métal sous la planche, ça la fait vibrer et ça donne un effet de "vraisemblance".
Au théâtre toujours, les meilleurs acteurs ne deviennent pas leur personnage. Primat de la technique, là encore: donner à ressentir ce qu'on ne ressent pas soi-même, et ce qu'on ne pourra de toute façon jamais ressentir comme si l'on n'était qu'un spectateur.
Baudelaire: s'il n'y avait eu que du sentiment, du fantasme, dans ses poèmes, il n'aurait jamais été le poète qui a dépassé par le haut toutes les formes classiques (l'alexandrin, le sonnet, etc.), les utilisant une dernière fois d'une manière telle qu'après lui elles n'ont plus pu être utilisées de la même manière. La sorcellerie évocatoire, le mal, les correspondances, le spleen, oui, mais aussi et par-dessus tout: l'effort du technicien de la langue pour qu'elles soient plus et autres que des affects tout juste bons à être déblatérés sur un divan, ou dans une chambre capitonnée.
Bruno - http://systar.hautetfort.com
De la façon dont tu le présentes, tu places une barrière arbitraire entre deux types de perversion pour te dédouaner, comme si la lecture d'un côté de la barrière était "bas" (tu l'associes à Voici) et que l'autre côté soit "haut" (grande littérature).Florent a écrit :C'est une démarche qui va à l'encontre de la morale, et qu'on peut donc qualifier d'immorale (et autrement plus profonde qu'un auteur pervers qui expose ses fantasmes en connivence avec un lecteur voyeur et complice).
Tu poses cette barrière, donc, mais tu ne l'explicites pas ; en quoi une démarche immorale serait-elle plus profonde qu'une démarche perverse, l'immoralité étant une perversité ?
Et, encore, il faudrait définir l'immoralité, la perversité... et voir l'homosexualité dans la même liste que le viol ou la pédophilie, ça fait carrément peur.
Je n'ai pas lu Lolita et, a priori, ce bouquin ne m'intéresse pas du tout, mais, s'il faisait l'apologie de la pédophilie de quelque manière que ce soit, j'ose imaginer qu'il aurait subi la censure (la vraie censure, celle de la loi, pas les cris des bien pensant)...
Et, sinon, je plussoie totalement Systar ; si l'auteur nous fait croire à son propos, c'est qu'il est bon, qu'il a de la technique.
- dracosolis
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je plussoie Systar déjà, comme ça c'est fait.
la technique et l'empathie sont les bases de l'écrivain que je suis, moi ce qui m'intéresse entre autres lorsque j'écris n'est pas tant de m'exposer, pas plus que n'importe qui je veux dire, mais de tenter de comprendre l'autre (c'est à dire vous
)
l'écriture est le seul endroit où je peux prétendre y arriver à peu près exhaustivement (à comprendre et à compatir)
parce que je sais pas vous, mais IRL c'est moins flambant...
(et encore, lorsque les retours me parviennent sur mes persos, ce n'est pas rare que mes lecteurs me démontrent qu'en fait je n'avais rien capté sur tel ou tel, ou bien que j'ai planté mon effet et créé "quelqu'un d'autre")
bref tout ça pour dire quoi ?
l'écrivain (en tout cas, le seul que je connaisse vraiment pas trop mal) ne se "montre " pas forcément, il n'est pas obligatoirement en train de se foutre à poil devant l'assemblée, il peut éventuellement (et c'est mon cas) essayer de donner à voir ce qu'il voit lui-même, pas ce qu'il est.*
et d'une.
ensuite,
Nabokov
pour faire vite
déjà, le perso finit très mal, il meurt, y'a un asile quelque part et si je me souviens bien le récit est présenté comme un document "pathologique" et la condamnation portée par le toubib et la société est très nette.
(je t'accorde florent qu'ils sont tous assez ridicules les autres mais bon, je ne crois pas justement que ça entache mon propos, celui qui va suivre, encore moins celui de nabokov)
ensuite le narrateur c'est "je", un journal, il ne peut s'y trouver de justification morales autres que celles que s'accorde (très faiblement) humbert humbert
par conséquent, il me semble que la position de nabokov est assez claire, ou en tout cas la vision "en creux" évidente.
de mon point de vue, en créant le personnage attachant, fin sensible et intelligent mais pervers de Humbert Nabokov démontre
si ce n'est pas un nette distanciation de nabokov avec le perso, je ne sais pas ce que c'est
pour moi le message de Nabokov dans Lolita "le message moral" si j'ose dire c'est que les carcans sociaux engendrent des monstres pervers, si sensibles et intelligents qu'ils soient au départ
(même Lolita est limite, elle aussi est contaminée, coincée, pervertie par les carcans, elle contribue à son propre supplice et à celui d'humbert)
ET SURTOUT QUE TOUT LE MONDE SOUFFRE, MÊME LES MONSTRES.
de plus,
une bonne dénonciation de la peine de mort ne fonctionne que si l'assassin est réellement coupable
autre chose, tout le monde a des fantasmes dangereux pour les voisins, ce qui est grave est le passage à l'acte, peut-on considérer un bouquin comme un passage à l'acte ? Lorsque Nabokov cause peut-on le traiter en porte parole des pédophiles ?
(alors que Matzneff je suis moins sûre déjà, je l'ai entendu en conférence une fois, il m'a foutu une trouille bleue)
en tout état de cause, je ne vois pas où se situe ton propos Florent, même et y compris si N était ce que tu prétends, je ne vois pas ce que tu envisages quant à son oeuvre...
*(on peut rétorquer "dis-moi qui tu regardes" mais sauf à penser que j'ai comme fantasme de me faire troncher par un bestiau de 40 tonnes... ou de manger des petites filles et des transexuels. Non je vous jure, mes perversions sont plus basiques que ça...)
la technique et l'empathie sont les bases de l'écrivain que je suis, moi ce qui m'intéresse entre autres lorsque j'écris n'est pas tant de m'exposer, pas plus que n'importe qui je veux dire, mais de tenter de comprendre l'autre (c'est à dire vous

l'écriture est le seul endroit où je peux prétendre y arriver à peu près exhaustivement (à comprendre et à compatir)

parce que je sais pas vous, mais IRL c'est moins flambant...

(et encore, lorsque les retours me parviennent sur mes persos, ce n'est pas rare que mes lecteurs me démontrent qu'en fait je n'avais rien capté sur tel ou tel, ou bien que j'ai planté mon effet et créé "quelqu'un d'autre")
bref tout ça pour dire quoi ?
l'écrivain (en tout cas, le seul que je connaisse vraiment pas trop mal) ne se "montre " pas forcément, il n'est pas obligatoirement en train de se foutre à poil devant l'assemblée, il peut éventuellement (et c'est mon cas) essayer de donner à voir ce qu'il voit lui-même, pas ce qu'il est.*
et d'une.
ensuite,
Nabokov
pour faire vite
déjà, le perso finit très mal, il meurt, y'a un asile quelque part et si je me souviens bien le récit est présenté comme un document "pathologique" et la condamnation portée par le toubib et la société est très nette.
(je t'accorde florent qu'ils sont tous assez ridicules les autres mais bon, je ne crois pas justement que ça entache mon propos, celui qui va suivre, encore moins celui de nabokov)
ensuite le narrateur c'est "je", un journal, il ne peut s'y trouver de justification morales autres que celles que s'accorde (très faiblement) humbert humbert
par conséquent, il me semble que la position de nabokov est assez claire, ou en tout cas la vision "en creux" évidente.
de mon point de vue, en créant le personnage attachant, fin sensible et intelligent mais pervers de Humbert Nabokov démontre
si ce n'est pas un nette distanciation de nabokov avec le perso, je ne sais pas ce que c'est
pour moi le message de Nabokov dans Lolita "le message moral" si j'ose dire c'est que les carcans sociaux engendrent des monstres pervers, si sensibles et intelligents qu'ils soient au départ
(même Lolita est limite, elle aussi est contaminée, coincée, pervertie par les carcans, elle contribue à son propre supplice et à celui d'humbert)
ET SURTOUT QUE TOUT LE MONDE SOUFFRE, MÊME LES MONSTRES.
de plus,
une bonne dénonciation de la peine de mort ne fonctionne que si l'assassin est réellement coupable
autre chose, tout le monde a des fantasmes dangereux pour les voisins, ce qui est grave est le passage à l'acte, peut-on considérer un bouquin comme un passage à l'acte ? Lorsque Nabokov cause peut-on le traiter en porte parole des pédophiles ?
(alors que Matzneff je suis moins sûre déjà, je l'ai entendu en conférence une fois, il m'a foutu une trouille bleue)
en tout état de cause, je ne vois pas où se situe ton propos Florent, même et y compris si N était ce que tu prétends, je ne vois pas ce que tu envisages quant à son oeuvre...
*(on peut rétorquer "dis-moi qui tu regardes" mais sauf à penser que j'ai comme fantasme de me faire troncher par un bestiau de 40 tonnes... ou de manger des petites filles et des transexuels. Non je vous jure, mes perversions sont plus basiques que ça...)
- dracosolis
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Cibylline a écrit :De la façon dont tu le présentes, tu places une barrière arbitraire entre deux types de perversion pour te dédouaner, comme si la lecture d'un côté de la barrière était "bas" (tu l'associes à Voici) et que l'autre côté soit "haut" (grande littérature).Florent a écrit :C'est une démarche qui va à l'encontre de la morale, et qu'on peut donc qualifier d'immorale (et autrement plus profonde qu'un auteur pervers qui expose ses fantasmes en connivence avec un lecteur voyeur et complice).
Tu poses cette barrière, donc, mais tu ne l'explicites pas ; en quoi une démarche immorale serait-elle plus profonde qu'une démarche perverse, l'immoralité étant une perversité ?
Et, encore, il faudrait définir l'immoralité, la perversité... et voir l'homosexualité dans la même liste que le viol ou la pédophilie, ça fait carrément peur.
Je n'ai pas lu Lolita et, a priori, ce bouquin ne m'intéresse pas du tout, mais, s'il faisait l'apologie de la pédophilie de quelque manière que ce soit, j'ose imaginer qu'il aurait subi la censure (la vraie censure, celle de la loi, pas les cris des bien pensant)...
Et, sinon, je plussoie totalement Systar ; si l'auteur nous fait croire à son propos, c'est qu'il est bon, qu'il a de la technique.
Le problème, c'est que tu lis mes posts très vite, et tu répètes ensuite mes propos de façon déformée en faisant des amalgames extrêmement tendancieux. Sur l'homosexualité par exemple, voilà très exactement ce que j'ai écris :
Je n'essaye pas de démontrer que Nabokov était un pédophile en puissance. Ce que je pense, c'est qu'il souhaitait écrire un roman dérangeant, et qu'il est allé puiser en lui les désirs les plus secrets, les plus inavouables (ça aurait pu être un fantasme homosexuel, ou autre, encore tabou à l'époque : je ne fais bien sûr pas de parallèle avec la pédophilie, mais avec le tabou lié aux pratiques rejetées par la société).
De même, quand je parle des obsessions d'un auteur, ça ne revient pas forcément à ses fantasmes. Lovecraft était un auteur à obsessions, par exemple.
La démarche de Nabokov est d'analyser la perversité, de trouver ses racines et de décortiquer son mécanisme. Et c'est une démarche qui va à l'encontre de la morale, et qu'on peut donc qualifier d'immorale dans la mesure où son analyse n'est pas objective, pas médicale, il n'y a pas de recul puisque c'est le narrateur qui s'exprime et qui, bien que lucide, ne cherche en rien à s'innocenter.
Donc il n'y a pas l'immoralité "noble" d'un côté et l'immoralité crapoteuse de l'autre. Mais il y a par contre l'immoralité intéressante parce qu'elle nous éclaire sur la face obscure des êtres humains et des sociétés, tout comme le DRAGON ROUGE de Thomas Harris est intéressant pour comprendre les tueurs en série. Or toi tu as réduit cela a du simple voyeurisme, d'où la référence à Voici.
La question sans réponse, c'est de savoir si Nabokov se mose en moraliste, comme Bret Easton Ellis qui se considère comme tel, ou s'il pronait l'abandon de toute morale.
(LOLITA a été censuré a sa sortie en 55, pour être publié en 58.)
(Si l'auteur nous fait croire à son propos, c'est qu'il sait de quoi il parle, d'où le travail de documentation de nombreux auteurs. La technique ne sert qu'à mettre en forme)