Le droit d'auteur rend-il fou ?

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MF
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Message par MF » lun. août 17, 2009 8:24 am

Lensman a écrit :Je n'ai pas une telle expérience de la chose, mais la citation, me semble-t-il, ne pose vraiment, en France, aucun problème, dans un essai. Pour les textes, en tout cas...
...
Il y a forcément de la subjectivité dans ma remarque, mais très souvent, en feuilletant rapidement, on fait facilement la différence entre un essai, et une exploitation commerciale (qui peut par ailleurs être un truc très intéressant)...
En France, le CPI est clair :
L'auteur d'une œuvre divulguée ne peut interdire : "a) Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l'œuvre à laquelle elles sont incorporées ; ".
Il faut donc que l'utilisateur des analyses et courtes citations (la notion de courte est laissée à l'appréciation du juge) créée lui-même une œuvre (au sens CPI du terme).
Comme d'habitude, c.f. le billet d'Eolas précité où tout cela est abondamment commenté.

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Lensman
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Message par Lensman » lun. août 17, 2009 8:35 am

MF a écrit :
Lensman a écrit :Je n'ai pas une telle expérience de la chose, mais la citation, me semble-t-il, ne pose vraiment, en France, aucun problème, dans un essai. Pour les textes, en tout cas...
...
Il y a forcément de la subjectivité dans ma remarque, mais très souvent, en feuilletant rapidement, on fait facilement la différence entre un essai, et une exploitation commerciale (qui peut par ailleurs être un truc très intéressant)...
En France, le CPI est clair :
L'auteur d'une œuvre divulguée ne peut interdire : "a) Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l'œuvre à laquelle elles sont incorporées ; ".
Il faut donc que l'utilisateur des analyses et courtes citations (la notion de courte est laissée à l'appréciation du juge) créée lui-même une œuvre (au sens CPI du terme).
Comme d'habitude, c.f. le billet d'Eolas précité où tout cela est abondamment commenté.
Oui, le principe est clair. Mais dans l'application, on s'aperçoit que même les gens qui sont apparemment parfaitement d'accord sur les principes ne voient pas tous la même chose. Remarque, l'inverse aurait quelque chose d'un peu inquiétant, quand on y réfléchit..
Oncle Joe

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Message par MF » lun. août 17, 2009 8:43 am

Lensman a écrit :Oui, le principe est clair. Mais dans l'application, on s'aperçoit que même les gens qui sont apparemment parfaitement d'accord sur les principes ne voient pas tous la même chose. Remarque, l'inverse aurait quelque chose d'un peu inquiétant, quand on y réfléchit.
C'est bien pour cela que j'ai insisté à plusieurs reprises sur le caractère oiseux de la question, en tant que telle.
Le principe juridique est affirmé et clair. Son interprétation (et donc son application) est laissée, au cas par cas, au juge si une procédure est introduite par les ayant droits.

Mais c'est pas le caractère oiseux qui va nous arrêter :twisted:

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Message par Lensman » lun. août 17, 2009 8:53 am

Bon, un message inutile (un autre suit...)
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Message par Lensman » lun. août 17, 2009 8:54 am

Bon, un message inutile..
Oncle Joe
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Message par Lensman » lun. août 17, 2009 8:55 am

Lensman a écrit :
MF a écrit :
Lensman a écrit :Oui, le principe est clair. Mais dans l'application, on s'aperçoit que même les gens qui sont apparemment parfaitement d'accord sur les principes ne voient pas tous la même chose. Remarque, l'inverse aurait quelque chose d'un peu inquiétant, quand on y réfléchit.
C'est bien pour cela que j'ai insisté à plusieurs reprises sur le caractère oiseux de la question, en tant que telle.
Le principe juridique est affirmé et clair. Son interprétation (et donc son application) est laissée, au cas par cas, au juge si une procédure est introduite par les ayant droits.

Mais c'est pas le caractère oiseux qui va nous arrêter :twisted:
Je suis d'accord... sur le principe!
Cependant, l'idée est aussi que l'on ne soit pas obligé de faire sans arrêt appel à un juge pour trancher une question, heureusement... Et je pense que c'est ce qui se passe le plus souvent. Car le plus souvent, c'est assez simple: tout le monde s'en fout! Il n'y a donc pas de question, ça résout automatiquement le problème...
Les exemples de controverse (Tintin, Disney) sont toujours les mêmes : des trucs où on n'est pas tellement en manque...
Oncle Joe

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Eons
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Message par Eons » lun. août 17, 2009 9:06 am

’tention, oncle Joe, tu viens d'enregistrer un tiercé (même pas gagnant).
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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Lensman
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Message par Lensman » lun. août 17, 2009 6:45 pm

Eons a écrit :’tention, oncle Joe, tu viens d'enregistrer un tiercé (même pas gagnant).
L'âge, les soucis, les corvées de corrections, surtout...
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Askaris
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Message par Askaris » mer. août 19, 2009 9:23 pm

Je pense qu'il n'est pas immérité à ce stade de remercier les intervenants de ce fil de discussion, et en particulier Dieu,JCD et Oncle Joe pour leurs éclairages respectifs concernant notre "douloureux problème du droit d'auteur"...et ses exceptions :wink: .


LA REPRODUCTION NUMÉRIQUE & ses obscurités


Je voudrais profiter du dernier rebondissement de l'actualité numérique (les négociations en cours entre la BnF et Google Books) pour évoquer plus précisément un sujet qui semble encore confidentiel : le livre, et plus largement, l'édition numérique.
La question de la reproduction numérique des documents graphiques, des oeuvres artistiques et littéraires a sucité une nombreuse littérature. 2 thèses circulent sur le net et se retrouvent jusque dans les écrits professionnels dont je donne les références ci-après.


1 . Le raisonnement par analogie



La première veut que la communication électronique se voit appliquer par "analogie" les règles déjà existantes pour les médias traditionnels. Cette thèse développée dans l'article de Maître Éolas est admise par des professionnels de la numérisation comme Alain Jacquesson. Selon ce dernier, « rendre publiquement accessible un fichier numérique sur Internet est comparable à la publication par impression d'exemplaires multiples, la numérisation d'un document analogique n'[étant] pas différente de la reproduction par photocopies ou microfilms. »
Rappellons que la loi DADSVI du 1er Août 2006 ne modifie pas le délai fixé par l'article L. 122-3 du CPI (1992) qui précise que les oeuvres soumises au droit de la propriété littéraire et artistiques ne peuvent être librement reproduites sans autorisation des ayants droit dans un délai de 70 ans après la mort de l'auteur.


2 . Une gestion des droits laissée à l'éditeur ?


Si le document reproduit est un manuscrit d'archives, il faut en obtenir l'autorisation directement auprès des ayants droit ou par l'intermédiaire de leurs représentants (Trident Media pour l'Herbert L.P.). Les correspondances privées font également intervenir des droits liés au respect de la vie privée (accord des destinataires).
Si le document reproduit est un document publié, c'est souvent à l'éditeur qu'est confiée la gestion de ces droits. En France, la plupart des éditeurs sont groupés au sein du CFC (Centre français d'exploitation) qui dispense des autorisations de reproduction et perçoit des redevances à ce titre.
Contrairement à d'autres sociétés de gestion de droits en Europe ou aux États-Unis, le CFC, en vertu de la loi du 3 Juillet 1995, n'est pas habilité à accorder des autorisations de copie numérique, son mandat ne s'étendant qu'à la reprographie, c'est-à-dire "la reproduction sous forme de copie sur papier ou support assimilé par une technique photographique ou d'effet équivalent permettant une lecture directe". Il faut donc s'adresser directement à l'éditeur -papier- du document dont on souhaite établir une copie numérique.


3 . Le problème du "droit de la preuve"



Certains auteurs, comme Jean-Yves Prax et Simon Larcher, soulignent néanmoins que la copie électronique est un document difficilement comparable à l'image ou au texte reprographié parce son immatérialité le rend inassimilable à ces documents en termes de pérennité (le doc numérique est altérable), d'autonomie (il ne peut être diffusé indépendamment du dispositif qui l'a produit), de "matérialité" (le code n'est pas un caractère), et d'opposabilité (il n'est pas authentifiable sauf par filigrane électronique). Tous ces éléments (sans compter le problème de la "délocalisation" sur des sites étrangers à la législation moins contraignante comme en Europe de l'Est) sont décrits comme autant de limites au principe d'analogie invoqué précédemment.

N'ayant pas eu d'échos d'une jurisprudence en la matière, je ne me prononcerai pas sur la valeur respective de ces arguments, même si le "droit de la preuve" me semble relever d'un contorsionnement juridique un peu périlleux. Les expériences et avis des uns et des autres seront sans doute plus éclairants que ces textes théoriques... :wink:


4 . Interrogations diverses autour des "born-digital", "databases" et pratiques du "fair use" :



Pour rendre le problème encore plus difficile qu'il ne l'est, notons que la plupart des auteurs s'accordent à dire, y compris Alain Jacquesson, que les oeuvres numériques "natives" ne peuvent relever de la législation actuelle, compte tenu de l'impossibilité technique de distinguer une copie d'un exemplaire autorisé (sauf implémentation de marquages spécifiques). Ce qui nous promet de longues réjouissances pour les futures hyperfictions...

Autre petit problème à l'égard de la citation -courte- dans le cas des bases de données. Un livre dont les notes de bas de page ou les annexes seraient truffées de trop larges citations est facilement repérable et attaquable en justice...Mais qu'est-ce qu'une base de données ? Peut-on l'assimiler à une oeuvre de l'esprit ? Peut-on la considérer comme un ensemble fini relevant de l'autorité d'un "auteur" justiciable des tribunaux en cas d'abus ? Qu'est-ce qu'une "courte citation" quand un livre se voit morcelé en plusieurs milliers de fragments dispersés dans autant de fichiers indépendants dont le rassemblement ne se fait qu'à la volée via un formulaire relationnel ? Un dictionnaire, une concordance ou une encyclopédie qui prendrait l'initiative de commenter paragraphe par paragraphe un livre au travers de plusieurs milliers de fichiers indépendants pourrait-il se voir attaquer en justice ? Sur quelle base ? Sachant que la granularité de l'information (c'est-à-dire l'impossibilité de discerner de manière irréfutable le tout de ses parties) règne sur le web, c'est là un combat perdu d'avance pour les éditeurs. Heureusement pour eux, il n'y a pas beaucoup de gens assez fous et téméraires pour se lancer dans ce genre de réalisations dantesques...

Tout cela nous ramène aux enjeux du "fair use" et de l'usage professionnel ou amateur de la citation. Mais la loi de 2006, loin de clarifier les choses, n'a semble-t-il qu'ajouté de l'imbroglio à une question déjà épineuse. Un acteur du chantier des UNT disait :"la seule formulation de cette mesure parle d'elle-même et pourrait prêter facilement à plaisanterie".

Un exemple shadockien :(messieurs les censeurs à vos réglettes ! )
L’exception de citation permet de reprendre un bref passage d’une œuvre (...) Il faut insister sur la condition de brièveté de l’emprunt à l’œuvre protégée : la citation doit être courte. Cette exigence s’apprécie en tenant compte de la longueur de l’œuvre citée et mais aussi de l’œuvre citante . Ainsi, reprendre cinq lignes d’un texte qui en compte dix ne permet pas de prétendre qu’il s’agit d’un bref extrait. En revanche, reproduire cinq lignes d’un texte de dix pages satisfait à l’exigence légale. Mais encore faut-il, ensuite, que ce passage soit inséré dans une œuvre qui sera elle-même suffisamment longue. Par exemple, si ces cinq lignes sont introduites dans un texte qui fait au total dix lignes, l’exception de citation ne s’appliquera pas. En revanche, si l’extrait s’insère dans un texte de dix pages, on pourra admettre la citation. (...) l’application [de ce principe] aux images, animées ou non, pose plus de difficultés. Pour autant, on doit considérer que l’exploitation d’une partie de l’œuvre est possible. Par exemple, un zoom sur une partie d’une photographie peut relever de l’exception de citation sous réserve du respect du droit moral de l’auteur. Mais il y a également une autre condition sur laquelle il faut s’arrêter : l’extrait doit être intégré dans une œuvre qui sera elle même protégée par le droit d’auteur. On s’assure ainsi qu’il ne sera pas exploité pour lui même mais bien pour permettre l’exercice de la liberté d’expression.
Voussa comprendro le coeff de citation de l'ouvrage cité rapporté à la masse du document citant ? Mais un fichier n'étant pas plus l'équivalent d'une page qu'une BDD celui d'une monographie, ce n'est pas très grave....pompons, pompons, pompons ! :cool:




Bibliographie pour aller plus loin :

ANDRÉ (Jacques) & CHABIN (Marie-Anne) /dir.
Les documents anciens, Numéro spécial de Document numérique, vol. 3, numero1-2,
Paris : Hermès [diff.], 1999.

LE MOAL (Jean-Claude) & HIDOINE (Bernard) /coord.
Bibliothèques numériques (Cours INRIA 9/13 octobre 2000, La Bresse)
Paris : ADBS Éditions/INRIA (coll. SI série Etudes & techniques),2000,246 p.

BURESI (Charlette) et CÉDELLE-JOUBERT (Laure) /dir.
Conduire un projet de numérisation
Paris : Tec et Doc (La boîte à outils),Villeurbanne, 2002, 326 p.

WESTEEL (Isabelle) & AUBRY (Martine) /coord.
La numérisation des textes et des images : techniques et réalisations.
Villeneuve-d’Ascq : Presses de l’université Charles de Gaulle - Lille III, 2003,190 p.

SALAÜN (Jean-Michel) & VANDENDORPE (Christian)
Les défis de la publication sur le Web : hyperlectures, cybertextes et méta-éditions
Villeurbanne : Presses de l’Enssib, 2004, 289 p.

LÉNART (Michèle)
La gestion documentaire : évolutions fonctionnelles et description de dix logiciels
Paris : A.D.B.S. Editions / Tosca Consultants, 2004, 185 p.

PRAX (Jean-Yves) & LARCHER (Simon)
La gestion électronique documentaire
Paris : Dunod, 2004, XVI-341 p.

PAPY (Fabrice) /dir.
Les Bibliothèques numériques
Paris : Hermès Science Publications (Traité IC2), 2005, 220 p.

JACQUESSON (Alain) & RIVIER (Alexis)
Bibliothèques et documents numériques : concepts, composantes, techniques et enjeux
Paris : Éd. du Cercle de la librairie, 2005, 573 p

CHARTRON (Ghislaine) & BROUDOUX (Évelyne) /dir.
Document numérique et société. Actes de la conférence organisée dans le cadre de la Semaine du document numérique à Fribourg (Suisse) les 20 et 21 septembre 2006.
Paris : ADBS éditions, 2006, 342 p.

CALDERAN (Lisette), HIDOINE (Bernard) & MILLET (Jacques) /coord.
Pérenniser le document numérique. Séminaire Inria : 2-6 octobre 2006, Amboise
Paris : ADBS éditions, 2006, 206 p.

PAPY (Fabrice) /dir.
Usages et pratiques dans les bibliothèques numériques
Paris : Hermes science publications/Lavoisier, 2007, 364 p.

PÉDAUQUE (Roger T.) [pseudo-auteur coll.]
Le Document à la lumière du numérique. Forme, texte, médium : comprendre le rôle du document numérique dans l’émergence d’une nouvelle modernité.
Paris : C&F Éditions, 2006, 226 p.

BROUDOUX (Évelyne) & CHARTRON (Ghislaine) /dir.
Traitements et pratiques documentaires : vers un changement de paradigme ? Actes de la deuxième conférence "Document numérique et société", Paris, Cnam, 17-18 novembre 2008
Paris : ADBS Éditions, 2008, 456 p.
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orcusnf
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Message par orcusnf » mer. août 19, 2009 9:30 pm

Contrairement à d'autres sociétés de gestion de droits en Europe ou aux États-Unis, le CFC, en vertu de la loi du 3 Juillet 1995, n'est pas habilité à accorder des autorisations de copie numérique, son mandat ne s'étendant qu'à la reprographie, c'est-à-dire "la reproduction sous forme de copie sur papier ou support assimilé par une technique photographique ou d'effet équivalent permettant une lecture directe".
Mais la reproduction numérique repose sur la photographie non ? Après tout, scanner = photographier. Bon, il reste le problème du support papier, mais je ne pense pas que ce soit véritablement un obstacle.
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Message par Askaris » mer. août 19, 2009 10:46 pm

orcusnf a écrit :
Contrairement à d'autres sociétés de gestion de droits en Europe ou aux États-Unis, le CFC, en vertu de la loi du 3 Juillet 1995, n'est pas habilité à accorder des autorisations de copie numérique, son mandat ne s'étendant qu'à la reprographie, c'est-à-dire "la reproduction sous forme de copie sur papier ou support assimilé par une technique photographique ou d'effet équivalent permettant une lecture directe".
Mais la reproduction numérique repose sur la photographie non ? Après tout, scanner = photographier. Bon, il reste le problème du support papier, mais je ne pense pas que ce soit véritablement un obstacle.
Je cite Prax : "Une représentation analogique est une représentation d'un phénomène physique variant de manière continue. Une bande magnétique ou une une photographie sont des enregistrements analogiques de sons, de formes et de couleurs tels que les perçoivent nos sens." Par contre "la numérisation permet de passer d'une représentation analogique de la réalité à une représentation numérique par échantillonnage, technique consistant à ne prélever sur un signal que des échantillons à des intervalles réguliers et suffisamment proches pour conserver la fidélité au signal d'origine. (...) Les valeurs des échantillons sont ensuite quantifiées et codées pour former un signal numérique."

Rivier l'exprime plus simplement "La numérisation est le procédé qui convertit une information sous forme de signaux binaires, exploitable par un ordinateur".

Quel que soit le mode de numérisation adopté (mode image bitonal, mode image vectoriel, image de texte, mode caractère), le résultat n'est donc pas une reproduction du réel mais une "traduction" amputée du document originel. La chose est plus vraie encore dans le cas des documents compressés où les altérations de l'original sont parfois considérables.

Tout cela ne change rien à notre perception sensible des choses (et je pense que l'esprit de la loi outrepasse ces subtilités techniques).

Néanmoins, le document numérique vient tordre quelques évidences :
* ainsi, il n'y a pas d'"auteur" dans un forum, même si les administrateurs peuvent être assimilés à des "directeurs de publication" ;
* la différence entre l'espace privé et l'espace public est floue : on peut déposer sur une BDD ou un réservoir de texte en ligne des écrits qu'on pourra crypter et réserver à son usage personnel ou à un groupware informel (je plains le juge qui devra statuer sur le caractère "privé" et la géographie de ce qu'est "l'enceinte familiale")

Et j'ai à l'esprit une infinité d'autres exemples qui montrent bien que la législation et les professionnels de l'édition sont à mille lieues d'avoir intégré à leurs manières de raisonner les boulversements du cyberespace...Bref, les questions du droit d'auteur et du droit à la reproduction sont loin d'être épuisées...
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Message par orcusnf » mer. août 19, 2009 10:52 pm

J'ai rien compris à Prax, Rivier est plus clair, mais il y a peut être un malentendu. Pour moi, la numérisation est juste un scan des livres, comme on peut le voir sur google books. Or le scan n'est guère qu'une photocopie sur support immatériel.
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Message par Askaris » mer. août 19, 2009 11:02 pm

Une photocopie ne transforme pas l'image en code chiffré. C'est la différence entre analogique et numérique.

Ce que Prax veut sans doute dire, c'est que la numérisation n'est pas une duplication de l'image mais sa transformation en code numérique. Cette transformation, il faut le souligner, est elle-même incomplète : une reproduction à l'identique nécessiterait des tailles de fichiers monstrueuses, il faut donc que le scan/la camera/l'objectif numérique économise de l'espace en procèdant à des échantillonages partiels.

Mais nos sens sont si limités (vue, ouïe) que nous sommes incapables de discerner si l'image/le son numérique a effacé 1,2,3 ou 5 % de la richesse chromatique ou sonore de l'original.

Donc, un document numérique ne reproduit pas le réel dans toute sa diversité mais le restitue plus ou moins partiellement.

C'est d'ailleurs pourquoi les livres d'art ne reposeront jamais sur la compression barbare du .jpg - qui suffit au grand public - mais sur des formats plus volumineux et riches de détails comme le .tiff : un zoom sur un tableau fait très vite la différence.

EDIT : J'ai trouvé une info utile sur le caractère analogique de la reprographie :
Faire une photocopie, c'est en quelque sorte réaliser des transferts de charges électriques pour attirer de l'encre sur une feuille de papier. Au cœur de la machine se situe un tambour constitué d'un matériau semi conducteur. Ce semi-conducteur à la particularité d'être électriquement résistant à l'état normal mais de devenir conducteur quand il est éclairé.

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Message par Lensman » mer. août 19, 2009 11:48 pm

Avec ce raisonnement, un "même" livre imprimé plusieurs fois ne représente pas non plus la même oeuvre: le papier n'est pas le même (évidemment...), pas plus que l'encre... On peut toujours prétendre (et ce n'est pas faux) que le ressenti ne sera pas le même vis-à-vis du texte si la typo n'est pas la même, par exemple.
Et pourtant, c'est la même oeuvre, évidemment (à moins que...)
Je ne vois pas trop ce que vient faire le numérique et l'analogique à ce niveau (je ne parle pas des éditions d'art, que d'ailleurs les bibliophiles ne lisent JAMAIS (j'exagère à peine...)). Là, ça devient des objets, la teneur du texte importe peu. En fait, pas du tout, le plus souvent.

Pas ailleurs, pour un tableau, la Joconde par exemple, le tableau de la Joconde reste unique, et tout le reste (scan, photo, copie, tout ce que l'on veut, que ce soit numérique ou analogique ou je ne sais quoi), c'est autre chose: quelque chose qui évoque l'oeuvre originale. Mais qui ne fait que ressembler. Rien à voir avec la reproduction d'un texte.
Après, on peut décider ce que l'on veut au point de vue des droits selon les méthodes de reproductions ou de pseudo reproductions utilisées, mais cela n'aura rien à voir avec la question de savoir s'il y a VRAIMENT reproduction.
Mais d'un point de vue pratique, si on fait une pas très bonne repro de la Joconde, avec des couleurs pas terribles, ce sera tout de même vu comme une reproduction de la Joconde. Le monde est bizarrement fait...

Enfin, il me semble, ou je n 'ai rien compris...
Oncle Joe

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Message par orcusnf » mer. août 19, 2009 11:55 pm

Mais il se contredit alors, car quand un livre passe à l'audio, ce n'estni une duplication ni analogique, c'est une transformation semblable à la numérisation puisqu'on change de format !
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