Du sense of wonder à la SF métaphysique

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systar
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Message par systar » ven. nov. 20, 2009 11:17 pm

Lensman a écrit :Cela a déjà été dit, mais quel silence assourdissant quant à la Fantasy et la métaphysique... ce n'était pas le sujet, certes, mais alors, il faudrait en ouvrir un...
Avis aux courageux irresponsables et bavards (nombreux sur le Forum, heureusement...)
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Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » ven. nov. 20, 2009 11:52 pm

systar a écrit :
Lensman a écrit :Cela a déjà été dit, mais quel silence assourdissant quant à la Fantasy et la métaphysique... ce n'était pas le sujet, certes, mais alors, il faudrait en ouvrir un...
Avis aux courageux irresponsables et bavards (nombreux sur le Forum, heureusement...)
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Peut-être une perspective mythologique serait-elle encore plus adaptée à la Fantasy, aussi...

systar
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Message par systar » ven. nov. 20, 2009 11:57 pm

Shalmaneser a écrit :
systar a écrit :
Lensman a écrit :Cela a déjà été dit, mais quel silence assourdissant quant à la Fantasy et la métaphysique... ce n'était pas le sujet, certes, mais alors, il faudrait en ouvrir un...
Avis aux courageux irresponsables et bavards (nombreux sur le Forum, heureusement...)
oncle Joe
C'est tentant...!
Peut-être une perspective mythologique serait-elle encore plus adaptée à la Fantasy, aussi...
ça dépend si on veut parler:
- d'une possible "essence" de la fantasy
- du rejet, de l'accueil, du succès éventuels, de la fantasy dans la culture française.

Selon ce qu'on veut identifier, on ne discutera pas avec les mêmes discours bien établis dans l'histoire de la pensée.

Papageno
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Message par Papageno » sam. nov. 21, 2009 12:57 am

systar a écrit : ça dépend si on veut parler:
- d'une possible "essence" de la fantasy
- du rejet, de l'accueil, du succès éventuels, de la fantasy dans la culture française.

Selon ce qu'on veut identifier, on ne discutera pas avec les mêmes discours bien établis dans l'histoire de la pensée.
Oui, mais là, comme la Fantasy est publiée dans des collections dites de Science-fiction, on risque de nous ressortir "L'imaginaire" - Au-secours!

PS: Le débat de ce fil était passionnant à suivre - faut remercier pour ça, tous les participants, Toi-même, Lem, Oncle Joe, Dieu, Roland et tout les autres - merci !
(et si moi-même et d'autres on n'est pas intervenu, c'est qu'on avait rien d'intelligent a rajouter !)

systar
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Message par systar » sam. nov. 21, 2009 1:03 am

Papageno a écrit :
systar a écrit : ça dépend si on veut parler:
- d'une possible "essence" de la fantasy
- du rejet, de l'accueil, du succès éventuels, de la fantasy dans la culture française.

Selon ce qu'on veut identifier, on ne discutera pas avec les mêmes discours bien établis dans l'histoire de la pensée.
Oui, mais là, comme la Fantasy est publiée dans des collections dites de Science-fiction, on risque de nous ressortir "L'imaginaire" - Au-secours!

PS: Le débat de ce fil était passionnant à suivre - faut remercier pour ça ça, tout les participants, Toi-même, Lem, Oncle Joe, Dieu, Roland et tout les autres - merci !
(et si moi-même et d'autres on n'est pas intervenu, c'est qu'on avait rien d'intelligent a rajouter !)
Arf, il y a de quoi être gêné, là.
Il n'est pas normal que des gens comme toi aient cru n'avoir rien d' "intelligent" à rajouter.
La discussion aurait dû/pu être plus accueillante, même si on voit mal comment...
A cogiter.

sur l'imaginaire comme catégorie englobante, je crois que, née illégitime et bâtarde, elle pourrait, à terme, s'imposer comme pertinente et légitime, surtout quand il s'agit d'attirer d'autres lecteurs.
De la Horde du Contrevent, on passe sans souci (mais je ne sais pas pourquoi), à de la SF pure et dure. J'ai pu l'observer depuis un certain temps.

Pour la fantasy, le débat sera intéressant, notamment parce qu'il éclairera en retour celui sur la science-fiction. (Célia, si tu passe par ici, je te laisse exposer ton hypothèse, à laquelle je souscris).

Lem

Message par Lem » sam. nov. 21, 2009 3:53 am

systar a écrit :@ Lem: est-ce qu'on refait toute la discussion, en remplaçant "métaphysique" par "mythologie"?
Arg, non. Pas tout de suite en tout cas.
Je suis assez déconcerté par l'impasse dans laquelle on est arrivé. D'un côté, Roland trouve que la présence des dieux dans la sf est un truisme (sans préjuger de leur interprétation). De l'autre, Oncle réfute que ce mot ait la moindre signification particulière. Ah bon. Quand des gens dont le métier est de manipuler le langage – des écrivains – emploient un terme aussi lourd, on peut vraiment douter que ça n'ait eu à leurs yeux aucune importance (mais je ne refais pas le débat). Entre les deux positions (données évidentes / pas de données), toute la gamme des attitudes possibles. Que je ne sois pas parvenu à stabiliser l'objet soumis à la critique après un mois et cinquante pages de fil me laisse perplexe, y compris sur mes propres capacités argumentatives.
Mais oui, c'était intéressant.

systar
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Message par systar » sam. nov. 21, 2009 5:01 am

Lem a écrit :Que je ne sois pas parvenu à stabiliser l'objet soumis à la critique après un mois et cinquante pages de fil me laisse perplexe, y compris sur mes propres capacités argumentatives.
Mais oui, c'était intéressant.
Remettons les choses en contexte.

Tu engages la discussion sur un thème: la présence du divin dans la SF. (d'ailleurs, chez toi, le plus souvent c'est pluriel, comme dans l'ouverture du livre des Ombres, "J'ai toujours vécu dans la lumière des dieux". Donc un polythéisme. Or la métaphysique, soit dit en passant, a assez peu accordé de sens au pluriel: quand on est le plus grand de tous les êtres, on est le seul à l'être, on est unique)
Ce faisant, tu changes radicalement le style de l'enquête: dans La physique des métaphores, tu disais, en somme: "trop de thèmes dans la SF, on ne la définira pas par son objet, par les thèmes qu'elle traite, mais par le type d'expérience qu'elle provoque".
Donc: la SF comme type d'expérience subjective.
On a peu ou prou retrouvé ici ce que tu pointais: le divin comme thème ne suffit pas à définir ce qu'est la SF. La fonction "deus ex machina" n'est pas proprement SF, dans l'économie d'une narration. La SF ne se définit pas par ce dont elle parle, mais par "comment elle se vit".

Ensuite, tu amènes le thème du divin en passant par l'idée de "grandes choses" ou "choses immenses". La mesure, c'est ce que la raison impose. La démesure, ou l'im-mense, dont souvent la SF parle, ce sera donc un pré-rationnel, quelque chose que la raison n'a pas encore nié comme objet pertinent de réflexion, ou un magma auquel la raison n'a pas encore apposé les structures qu'elle donne à tout objet qu'elle se donne (limitation spatio-temporelle, insertion dans un schéma causal, mathématisation possible, etc.).
Cela, la métaphysique en parle, si jamais on veut bien donner un sens très large au mot, mais quelques coups de sonde dans l'histoire de la métaphysique (auxquels Joseph a eu la bonne idée de m'inviter) montrent que celle-ci n'aime pas tant que cela parler du divin, ou des dieux.
Un autre coup de sonde montrera que la métaphysique elle-même n'est pas née pure, abstraite, ni rationnelle.
Elle a toujours été nourrie par, et en lutte avec, en même temps, un discours non rationnel, qui prenait pour méthode la mise en scène d'être démesurés dans un monde donné.
Prendre un monde comme théâtre et condition de possibilité pour penser, c'est ce que fait la SF.
Or, il se trouve qu'un mode de pensée a fait cela: la mythologie.
La mythologie est la pensée pré-rationnelle qui a nourri la métaphysique (sur ce point, je citerai pour ceux que cela intéresse un peu d'Anatole France, où l'élucidation de l'étymologie de notions de la métaphysique montre clairement leur origine mythique ou mythologique).

Il me semble que l'on pourrait substituer "mythologie" à "métaphysique" dans ton hypothèse, et on arrivera à expliquer le rejet de la SF.
La mythologie, ce n'est pas sérieux.
Le pré-rationnel, ce n'est pas sérieux, il faut s'en débarrasser.
Donc la SF, ce n'est pas sérieux.

D'où mon envie qu'on discute aussi de la fantasy, qui fait de la mythologie décomplexée, invente des panthéons sans aucun problème, et pourtant, fonctionne commercialement, même si, culturellement, elle est aussi méprisée, sinon plus, que la SF...

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » sam. nov. 21, 2009 10:27 am

systar a écrit :Il me semble que l'on pourrait substituer "mythologie" à "métaphysique" dans ton hypothèse, et on arrivera à expliquer le rejet de la SF.
La mythologie, ce n'est pas sérieux.
Le pré-rationnel, ce n'est pas sérieux, il faut s'en débarrasser.
Donc la SF, ce n'est pas sérieux.
Je ne vois rien qui vienne étayer cette hypothèse; sinon une bonne vieille envie de troller.
systar a écrit :D'où mon envie qu'on discute aussi de la fantasy, qui fait de la mythologie décomplexée, invente des panthéons sans aucun problème, et pourtant, fonctionne commercialement, même si, culturellement, elle est aussi méprisée, sinon plus, que la SF...
Euh, la science-fiction fonctionnait très bien commercialement avant l'arrivée massive de la fantasy.

Accessoirement, les panthéons sans complexe c'est la SF plutôt que la fantasy, crois-en quelqu'un qui a essayé pour toi.
« Regarde vers Lorient / Là tu trouveras la sagesse. » (Les Cravates à Pois)

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Lensman
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Message par Lensman » sam. nov. 21, 2009 11:17 am

Première chose. Quand je parlais d'un nouveau fil, c'était une vraie suggestion.
Déjà, sur celui-là, il a été très difficile de construire des épisodes suvis (c'est la nature des fils, les trolls et les digressions sont très difficiles à éviter, cela fait aussi partie du plaisir, même si ça peut aussi exaspérer).
Il ne s'agirait pas de relancer le débat comparatif ou antagoniste (?) entre SF et Fantasy, il s'agirait de voir ce qui se passe lorsque qu'on suggère un lien fort entre Fantasy et métaphysique, comme Lem a proposé ce lien entre SF et métaphysique. Sa proposition a provoqué des réactions vives et passionnées. Je serais très curieux de voir ce qui se passerait pour la Fantasy (et puis, les brillants théoriciens de la Fantasy sortiraient un peu de leur trou de hobbit, on entend surtout ici les robots radoteurs de la SF...)

Deuxième remarque qui me frappe, celle de Rolland disant:
Euh, la science-fiction fonctionnait très bien commercialement avant l'arrivée massive de la Fantasy.
Elle repose une question classique, de celle de la Fantasy remplaçant la SF. Je me rappelle du temps, pas bien lointain, où c'était le fantastique moderne (vous vous souvenez?) qui remplaçait la SF. Ce "remplacement", on le constate sur les rayonnages des libraires, on peut donc parler de remplacement "commercial". Cependant, cela correspond-il à un remplacement d'un autre ordre (c'est obligatoire, tout de même), qui est que la Fantasy proposerait, ou bien quelque chose qui remplacerait la chose que proposait la SF, ou la même chose que la SF, mais en mieux. Quelles seraient ces choses? Tout en remarquant qu'il reste un cœur important (au moins en conviction!) de lecteurs (et d'auteurs) qui ne trouvent pas dans la Fantasy ce qu'il trouvent dans la SF (quoi?).
C'est une autre question que "Fantasy et métaphysique", même si forcément on trouvera des échos de cet état de fait (à interpréter) dans la discussion.

(Une parenthèse qui va faire sourire Systar, qui lui est un pro de ces domaines, ce qui n'est pas mon cas: au fil des discussions, je me suis aperçu à quel point nous avions (à des degrés divers, et ça dépend de l'interlocuteur..) tendance à confondre "fait" et "interprétation de fait"; par exemple, pour le fait religieux, à moment donné... J'ai eu aussi l'impression qu'il nous arrive de demander trop de précision à des mots qui ont acquis des couches de significations diverses selon les époques, les contextes, ceux qui les emploient, etc. Sans doute suis-je là en train de sortir une banalité de base, mais quand l'un ou l'autre tentait de clarifier les choses en renvoyant à une définition tirée d'un dictionnaire honorable, bizarrement, ce n'était que très rarement satisfaisant).

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Lensman
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Message par Lensman » sam. nov. 21, 2009 11:46 am

Tiens, troisième remarque, grâce à Systar, qui a dit un truc évident qui ne m'était pas venu à l'idée de formuler (sic), à propos de l'emploi du concept de "dieu" dans la SF. Comme il le fait remarquer, la métaphysique n'aime guère l'idée de plusieurs "dieux", elle s'intéresse à "quelque chose" qui serait unique. Une raison de plus pour ne PAS voir dans l'emploi du concept de "dieux" dans la SF le signe d'un rapport particulier à la métaphysique. Mauvaise piste. (De fait, le rapport à la mythologie est, lui, plus flagrant, quand bien même il demande à être fortement précisé... hé hé!)
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Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » sam. nov. 21, 2009 1:15 pm

Lensman a écrit :la métaphysique n'aime guère l'idée de plusieurs "dieux", elle s'intéresse à "quelque chose" qui serait unique. Une raison de plus pour ne PAS voir dans l'emploi du concept de "dieux" dans la SF le signe d'un rapport particulier à la métaphysique. Mauvaise piste. (De fait, le rapport à la mythologie est, lui, plus flagrant, quand bien même il demande à être fortement précisé... hé hé!)
Oncle Joe
Ce "quelque chose qui serait unique", vu sous l'angle de la métaphysique, même s'il s'agit de "plusieurs dieux", pourrait être le divin : il me semble d'ailleurs que c'est le terme que Lem a employé. Dans ce cas, le polythéisme ne serait que l'épiphénomène du concept de divinité, un traitement thématique particulier, à la surface du récit, de ce concept proprement métaphysique, et lui permettrait simplement de se réaliser fictivement sous une forme particulière en fonction du sens qu'on lui accorde.

Pour le reste, je suis assez d'accord, a priori, pour remplacer "métaphysique" par "mythologie", mais sans oublier bien sûr que la mythologie a maille à partir avec la métaphysique : pourrait-on la considérer comme une application fictive des concepts métaphysiques (notamment celui de la transcendance divine, et plus largement de la transcendance) ?

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Message par Fabien Lyraud » sam. nov. 21, 2009 2:40 pm

D'où mon envie qu'on discute aussi de la fantasy, qui fait de la mythologie décomplexée, invente des panthéons sans aucun problème, et pourtant, fonctionne commercialement, même si, culturellement, elle est aussi méprisée, sinon plus, que la SF..
Le dénominateur commun entre la fantasy et la Sf c'est l'anthropologie. D'un coté des anthropologies rationnelles, de l'autre des anthropologies basée sur des conjonctures non rationnelles. La fantasy interroge la culture et les racines de nos civilisations et dailoguent avec. La SF s'interroge sur l'avenir de nos civilisations. D'un coté nous avons le "d'ou venons nous" de l'autre le "où allons nous".
Systar tu fais bien de mentionner la mythologie. C'est un élément important. Pendant longtemps les auteurs de Sf ont construits de véritables mythologies du futur (de Dune de Herbert à Inexistence de Zindell en passant par Radix d'Attanasio ont pourrait en citer des tonnes). Mais justement la SF s'éloigne de ces bases mythologiques aujourd'hui. Et Serge a raison, le questionnement métaphysique prend le pas sur le questionnement anthropologique. La thématique de la posthumanité et la transcendance possible de l'humain ça relève de la métaphysique. Et on en arrive a parler d'entité désincarnées ou de consciences collectives. On rend impossible toute approche anthropologique de la posthumanité. Hamilton s'en est assez bien tiré avec "l'Etoile de Pandore" mais ses post humains restent finalement très humains. On finit par créer des humains qui sont de véritables dieux mais finalement on ne peux créer de mythologie autour.

Ce qui nous amène à la remarque d'Oncle Joe :
Elle repose une question classique, de celle de la Fantasy remplaçant la SF. Je me rappelle du temps, pas bien lointain, où c'était le fantastique moderne (vous vous souvenez?) qui remplaçait la SF. Ce "remplacement", on le constate sur les rayonnages des libraires, on peut donc parler de remplacement "commercial". Cependant, cela correspond-il à un remplacement d'un autre ordre (c'est obligatoire, tout de même), qui est que la Fantasy proposerait, ou bien quelque chose qui remplacerait la chose que proposait la SF, ou la même chose que la SF, mais en mieux. Quelles seraient ces choses? Tout en remarquant qu'il reste un cœur important (au moins en conviction!) de lecteurs (et d'auteurs) qui ne trouvent pas dans la Fantasy ce qu'il trouvent dans la SF (quoi?).
La SF a déserté le champ de l'anthropologie au profit de la métaphysique. Si Dick est un auteur classique, il a toujours été un auteur peu populaire. Ce qui prouve s'il en est que l'approche métaphysique n'a guère les faveurs du public. Si l'on veut que la Sf retrouve son "rang" publions des oeuvres questionnant les thématiques civilisationnelles et culturelles.
D'ailleurs il ne faut pas chercher autre part les causes du succès du steampunk. Ce genre en effet met en perspective la société industrielle, ses origines et son histoire. On peut même trouver une perspective anthropologique dans le cyberpunk : un questionnement sur la société de l'information et un avertissement montrant qu'elle ne doit pas garder les structures économiques de la société industrielle. Mais pour se faire on créé toute une véritable mythologie autour de l'informatique et de la robotique.
Bienvenu chez Pulp Factory :
http://pulp-factory.ovh


Le blog impertinent des littératures de l'imaginaire :
http://propos-iconoclastes.blogspot.com

Lem

Message par Lem » sam. nov. 21, 2009 3:06 pm

Dans la généalogie de la pensée occidentale (mode Systar-is-watching-you on), on peut établir le découpage à gros grains suivant :

– mythologie (le monde est gouverné par des forces intelligentes, les dieux)
– physique présocratique (née d'une "vidange" sémantique de la mythologie – voir Vernant, Mythes et pensée chez les Grecs – : le monde est gouverné par des forces impersonnelles, l'eau, le feu, etc. qui sont, pourrait-on dire, les cadavres des dieux)
– métaphysique (le monde est gouverné par des principes premiers situés au-delà de lui-même mais qu'on peut atteindre par la raison)
– métaphysique chrétienne (le monde est gouverné par un principe premier dont tout le reste découle, Dieu, et qui ne peut être atteint uniquement par la raison ; il y a là un mystère qui excède le travail humain mais qu'on peut comprendre par la charité ou la grâce)
– physique postchrétienne (le monde est gouverné par les mathématiques)
– métaphysique postéchrétienne (le monde est dans le sujet ; l'enquête sur les principes premiers est en fait une enquête sur les catégories humaines de la représentation, l'espace, le temps, la causalité, etc.)
– tournant linguistique (le monde est une question mal posée et, du coup, il ne reste que les mathématiques, seul langage rigoureux)
– physique quantique (le monde n'est pas une question scientifique ; tout ce qu'on peut faire, c'est des prédictions sur le comportement des instruments => réhabilitation paradoxale de la métaphysique dont on commence à peine à percevoir les effets aujourd'hui)

La SF est née entre le tournant linguistique et la physique quantique. Questions visant à informer un débat futur : qu'a-t-elle embarqué des formes de pensée antérieures, qu'a-t-elle pressenti des formes de pensée futures ?

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Lensman
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Message par Lensman » sam. nov. 21, 2009 3:17 pm

Shalmaneser a écrit :
Lensman a écrit :la métaphysique n'aime guère l'idée de plusieurs "dieux", elle s'intéresse à "quelque chose" qui serait unique. Une raison de plus pour ne PAS voir dans l'emploi du concept de "dieux" dans la SF le signe d'un rapport particulier à la métaphysique. Mauvaise piste. (De fait, le rapport à la mythologie est, lui, plus flagrant, quand bien même il demande à être fortement précisé... hé hé!)
Oncle Joe
Ce "quelque chose qui serait unique", vu sous l'angle de la métaphysique, même s'il s'agit de "plusieurs dieux", pourrait être le divin : il me semble d'ailleurs que c'est le terme que Lem a employé. Dans ce cas, le polythéisme ne serait que l'épiphénomène du concept de divinité, un traitement thématique particulier, à la surface du récit, de ce concept proprement métaphysique, et lui permettrait simplement de se réaliser fictivement sous une forme particulière en fonction du sens qu'on lui accorde.

Pour le reste, je suis assez d'accord, a priori, pour remplacer "métaphysique" par "mythologie", mais sans oublier bien sûr que la mythologie a maille à partir avec la métaphysique : pourrait-on la considérer comme une application fictive des concepts métaphysiques (notamment celui de la transcendance divine, et plus largement de la transcendance) ?
Je pense que très vite, il y a eu deux débats qui ont été menés simultanément, deux débats qui ont l'air d'entretenir des liens, mais qui je crois sont très différents, et perdent beaucoup de leur intérêt si on les mélangent trop, ce que nous avons fait allègrement...
Le premier débat, lancé par Lem: il y aurait, a cœur même de la SF, une préoccupation métaphysique. Cette préoccupation fondamentale, qui ferait l'essence de la SF, pourrait d'ailleurs expliquer son relatif "rejet" par le monde culturel "sérieux", parce qu'à moment donné, les préoccupations métaphysiques ont été virées de la culture (je grossis le trait, mais Lem me pardonnera, je l'ai déjà bien davantage maltraité...). Par ailleurs, Lem pense détecter un changement d'attitude récent (entre autre, parce que la mécanique quantique redonnerait une sorte de jeunesse à l'approche métaphysique du monde, ce qui me fait rigoler, mais c'est uniquement une appréciation personnelle, là...)
Le second débat, c'est qu'il est possible, et légitime, de faire une analyse métaphysique de la SF.
Pour moi, la réponse au deuxième débat est évidemment oui: on peut le faire (comme dirait Francis Blanche...), et ça peut être passionnant, comme on peut porter une analyse sociologique, une analyse psychologique, une analyse politique, une analyse marxiste (c'est moins à la mode, mais il y a un ou deux critiques qui portent ce regard), une analyse psychanalytique, etc, de la SF.
Là où il y a eu très vite une grosse confusion, c'est quand Lem, devant l'étonnement provoqué par sa proposition de trouver la métaphysique au cœur de la SF, a sorti une liste étrange de "dieux" apparaissant dans la SF, avec, entre autres, les "dieux" lovecraftiens, le Grand Lunaire de Wells, le cerveau martien de Lerouge, etc; à partir de ce moment, on a basculé dans une grande confusion, où se mélangeaient l'idée que la métaphysique est au cœur de la SF (là, je suis en complet désaccord, et la liste de Lem n'a d'ailleurs rien à voir avec le problème, à mon sens), l'idée qu'il arrive à la SF de traiter de sujets métaphysiques (là, je suis tout à fait d'accord, mais je prétends que la liste de Lem n'en est nullement une preuve, ni même un indice, il y a bien mieux que cela, et très explicite), et l'idée qu'il est légitime d'adopter une approche métaphysique de la SF (ce avec quoi je suis parfaitement d'accord, même s'il n'est pas sûr que j'y trouve mon compte).
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Message par Lensman » sam. nov. 21, 2009 3:28 pm

Lem a écrit : – physique quantique (le monde n'est pas une question scientifique ; tout ce qu'on peut faire, c'est des prédictions sur le comportement des instruments => réhabilitation paradoxale de la métaphysique dont on commence à peine à percevoir les effets aujourd'hui)
Quels sont les effets que tu commences à percevoir? (ma question n'est pas persifleuse)
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