Du sense of wonder à la SF métaphysique
Modérateurs : Eric, jerome, Jean, Travis, Charlotte, tom, marie.m
Voilà qui est agréablement et clairement résumé.
Pour ma part, concernant la première partie (survol historique du développement de la SF en France), je pense qu'il y a surestimation du phénomène.
Je veux dire par là que corpus n'était pas si visible, au fur et à mesure qu'il s'est constitué. Malgré les tentatives de Renard, il n'est pas si évident de s'apercevoir de la naissance et du développement d'un genre puissant et original. Il ne suffit pas d'accumuler (comme nous adorons le faire) des masses de textes que l'on qualifie de "vieille SF française" pour que cela fasse vraiment un genre, même en mettant en avant telle ou telle œuvre d'un écrivain vraiment "reconnu", qui donne dans ce genre... en constitution.
(Note, Pascal, que ce que je dis là ne présume en rien du rapport entre le genre (ou l'absence de genre, ou le genre en gestation, ou la proto-histoire du genre, c'est à voir) avec le statut de la métaphysique dans la France de, disons, 1850-1950)
Comme je considère (ce sont mes prémisses à moi) qu'il y a surestimation du phénomène (et on peut y trouver des raisons, avec Versins par exemple), je ne considère donc pas très étonnant que le genre en question, qui n'existe pas vraiment, ne reçoive pas d'attention critique spécifique de la part la critique dominante ou des prescripteurs dominants (je ne sais pas trop comment les désigner) de la culture "officielle".
Je ne vais pas prétendre que la SF est née aux USA! Par contre, ce que je vais prétendre, c'est que c'est là qu'elle est devenue visible, d'une manière considérable, aveuglante même, avec ce terme "science-fiction". Je ne rappellerai pas son histoire, ni la violence des attaques dont il a été l'objet (parfois au sein même du milieu concerné, dont certains tenants pensaient qu'il était "honteux": science... jamais les littéraires n'accepteront l'idée que l'on puisse faire de la littérature avec ça...il faut le changer, etc). Le problème de la "reconnaissance" (que tu déplaces sur celui du "déni", ce qui est un des aspects passionnants de ton discours), il se pose, chez nous (en France) dès l'arrivée de la SF américaine en 1950, dès l'apparition du mot. Et c'est à partir de ce moment que va se construire une histoire d'une SF française spécifique, mais dont la cohérence va être très exagérée, pour les besoins bien compréhensibles de la cause.
en résumé donc, pour moi, la SF, en France, elle ne commence à être visible qu'en 1950, non pas à cause d'un déni, mais parce qu'avant elle était très difficilement repérable.
C'est à partir de ce moment là que se pose, à mon sens, le problème de la réception de la SF.
J'ai l'air là de défendre une position non érudite (comment, il ne connaît pas ce fabuleux corpus de la SF française d'avant-guerre?), pourtant, comme tu le sais, je le connais assez bien. Mais, à mon avis, il ne "tient" pas vraiment.
Je pourrais dire ça autrement: sans structuration, en effet, je considère que la SF n'existe pas.
Et pour voir cela (comment elle se met à exister, pour elle, et pour le milieu extérieur), il nous faut aller aux USA. C'est un autre problème.
Oncle Joe
Pour ma part, concernant la première partie (survol historique du développement de la SF en France), je pense qu'il y a surestimation du phénomène.
Je veux dire par là que corpus n'était pas si visible, au fur et à mesure qu'il s'est constitué. Malgré les tentatives de Renard, il n'est pas si évident de s'apercevoir de la naissance et du développement d'un genre puissant et original. Il ne suffit pas d'accumuler (comme nous adorons le faire) des masses de textes que l'on qualifie de "vieille SF française" pour que cela fasse vraiment un genre, même en mettant en avant telle ou telle œuvre d'un écrivain vraiment "reconnu", qui donne dans ce genre... en constitution.
(Note, Pascal, que ce que je dis là ne présume en rien du rapport entre le genre (ou l'absence de genre, ou le genre en gestation, ou la proto-histoire du genre, c'est à voir) avec le statut de la métaphysique dans la France de, disons, 1850-1950)
Comme je considère (ce sont mes prémisses à moi) qu'il y a surestimation du phénomène (et on peut y trouver des raisons, avec Versins par exemple), je ne considère donc pas très étonnant que le genre en question, qui n'existe pas vraiment, ne reçoive pas d'attention critique spécifique de la part la critique dominante ou des prescripteurs dominants (je ne sais pas trop comment les désigner) de la culture "officielle".
Je ne vais pas prétendre que la SF est née aux USA! Par contre, ce que je vais prétendre, c'est que c'est là qu'elle est devenue visible, d'une manière considérable, aveuglante même, avec ce terme "science-fiction". Je ne rappellerai pas son histoire, ni la violence des attaques dont il a été l'objet (parfois au sein même du milieu concerné, dont certains tenants pensaient qu'il était "honteux": science... jamais les littéraires n'accepteront l'idée que l'on puisse faire de la littérature avec ça...il faut le changer, etc). Le problème de la "reconnaissance" (que tu déplaces sur celui du "déni", ce qui est un des aspects passionnants de ton discours), il se pose, chez nous (en France) dès l'arrivée de la SF américaine en 1950, dès l'apparition du mot. Et c'est à partir de ce moment que va se construire une histoire d'une SF française spécifique, mais dont la cohérence va être très exagérée, pour les besoins bien compréhensibles de la cause.
en résumé donc, pour moi, la SF, en France, elle ne commence à être visible qu'en 1950, non pas à cause d'un déni, mais parce qu'avant elle était très difficilement repérable.
C'est à partir de ce moment là que se pose, à mon sens, le problème de la réception de la SF.
J'ai l'air là de défendre une position non érudite (comment, il ne connaît pas ce fabuleux corpus de la SF française d'avant-guerre?), pourtant, comme tu le sais, je le connais assez bien. Mais, à mon avis, il ne "tient" pas vraiment.
Je pourrais dire ça autrement: sans structuration, en effet, je considère que la SF n'existe pas.
Et pour voir cela (comment elle se met à exister, pour elle, et pour le milieu extérieur), il nous faut aller aux USA. C'est un autre problème.
Oncle Joe
Je comprends bien cette réticence. Scrupule d'historien.Lensman a écrit :je pense qu'il y a surestimation du phénomène.
Je veux dire par là que corpus n'était pas si visible, au fur et à mesure qu'il s'est constitué. Malgré les tentatives de Renard, il n'est pas si évident de s'apercevoir de la naissance et du développement d'un genre puissant et original. Il ne suffit pas d'accumuler (comme nous adorons le faire) des masses de textes que l'on qualifie de "vieille SF française" pour que cela fasse vraiment un genre, même en mettant en avant telle ou telle œuvre d'un écrivain vraiment "reconnu", qui donne dans ce genre... en constitution.
Le merveilleux-scientifique, ou le roman scientifique, ou le roman d'hypothèse (le simple fait qu'il y ait hésitation sur le nom est significatif) n'était pas un "genre" au sens où nous l'entendons aujourd'hui, avec collections dédiées, représentations massives (même très simplifiées, voire fausses), imagerie, etc. Je crois plutôt que quand les critiques employaient ce terme, il représentait pour eux une catégorie à l'intérieur du "roman", au sens le plus général, un peu comme "roman de mœurs" ainsi que je l'ai dit plus haut.
Mais on ne peut nier qu'à l'intérieur de cette catégorie, les auteurs et théoriciens aient eu conscience d'œuvrer dans une continuité.
Interrogé par George Gamat à propos de Renard, J.-H. Rosny déclare en 1925 (dans "Vient de paraître" n° 41) :
Le même Gamat achève son interview ainsi :Il sait intéresser, construire une fiction émouvante, multiplier les péripéties qui passionnent, faire vivre ses personnages et nous faire partager leurs impressions. Ce sont les qualités qui manquent le plus souvent aux écrivains de merveilleux-scientifique.
Et il y a un essai (que je ne connais pas) d'un certain Jacques Morel paru au Mercure de France en 1926 intitulé J.-H. Rosny et le merveilleux-scientifique.C'est sur l'évocation de cette puissance magique de Maurice Renard que je quitte le maître, en écoutant chanter en mon esprit les noms associés mais bien disctincts d'Edgar Poe, Villiers de l'Isle Adam, J.-H. Rosny, Wells et Maurice Renard.
Dans la préface à la réédition de sa Grande Panne en 1935, Théo Varlet dénonce un plagiat commis par deux auteurs américains de Wonder Stories et son texte.
Je suis sûr que si on dépouillait l'intégralité de la presse de l'époque, on trouverait des dizaines de notules, de présentations de texte, de critiques ou d'articulets où le terme "roman scientifique" serait correctement employé.Et je remercie mon bon confrère ès-anticipations, Régis Messac, romancier, traducteur et historien de la littérature d’imagination scientifique, qui a eu l’amabilité de me signaler ce plagiat.
Sans rien surestimer, je pense qu'on peut quand même soutenir que le roman scientifique avait une existence, un début d'identité, un embryon d'histoire et une mini-liste de classiques dans l'entre-deux-guerres en France. Après tout, la thèse de Jean-Jacques Bridenne, le disciple de Messac, s'intitulait Le roman scientifique français et si la version librairie est parue en 1950, il a dû la soutenir quelques années avant. "Ça existait" – même si ce n'était pas encore sous la forme d'un dispositif comme celui de la SF moderne. On en trouve même trace assez tard, de cette existence, puisque dans la réédition de La mort de la Terre chez Présence du Futur en 1958 figure à la fin du volume une page qui récapitule les œuvres de Rosny disponible et qui commence ainsi :
Et à l'intérieur de cette existence, il y a eu très tôt la perception d'un problème. Pour le plaisir, je remets les trois citations données il y a quelques jours :CHEZ D'AUTRES EDITEURS
Romans de merveilleux-scientifique
La force mystérieuse
Les navigateurs de l'infini
etc…
Pour l'heure, le roman merveilleux-scientifique sans doute trop jeune et trop surprenant encore, ne connaît ici qu'ne réputation de singularité.
Ses rares partisans l'aiment avec fanatisme.
Des autres, il en est qui le poursuivent d'une haine incompréhensible et profèrent contre lui les plus hargneuses sottises ; il en est aussi qui, sans le vilipender, méconnaissent étrangement sa nature.
Maurice Renard, 1914
Mais qui sait donc qu’une littérature existe, insoupçonnée, consacrée à décrire ces mondes, ces hypermondes ? On ne s’en soucie guère, ordinairement. Le public vit sur l’idée que ces sujets, exclusivement destinés à la jeunesse, sont abandonnés à des auteurs de second ou même de quatorzième ordre, qui peuvent se permettre toutes les faiblesses, ayant affaire à des lecteurs peu exigeants. (…) Sans doute, il existe des œuvres de ce genre. Il en existe même beaucoup. Mais il en existe d’autres. S’il y a Jules Verne [et des douzaines de sous-Jules Verne], il y a aussi Wells et Poe. Et des auteurs que Wells et Poe ont utilisés, et qu’ils nous masquent pour ainsi dire. Il y a les étrangers que l’on n’a jamais songé à traduire, et les Français qu’on ne songe pas à lire. (…) Ils savent, ces magiciens, nous entraîner à leur suite quand nous formons le vœu de partir n’importe où pourvu que ce soit hors du monde : anywhere out of the world. (…)
Régis Messac, préface à Quinzinzinzili, 1935
Donc, pas de surestimation, mais pas de sous-évaluation non plus. Les gens qui ont pris en charge la SF en France à partir de 1950 (Queneau, Le Lionnais, Vian, Bergier, Gallet, et je pense la plupart des autres) connaissaient bien le roman scientifique. Ce n'est pas un hasard si ce sont eux qui ont supervisé l'introduction de la SF américaine. Il y a une filiation directe entre les deux formes.Qu’on lise ces nouvelles, et peut-être conviendra-t-on, après les avoir lues, qu’il était difficile de mieux montrer par l’exemple toutes les ressources inédites que peut offrir ce genre injustement dédaigné]du récit scientifique. »
Régis Messac, préface à La guerre du lierre, 1937
Mais tu sais tout cela, Oncle. Et si tu souhaites, pour que le débat soit plus clair et qu'on raisonne sur des données plus tangibles, qu'on ne prenne en compte que ce qui se nomme science-fiction, c'est à dire qu'on parte de 1950 et qu'on intègre la SF américaine dans l'équation, pas de problème. Je pense que l'hypothèse reste valide et ses effets seront, effectivement, plus visibles.
C'est un noble sentiment (ou combat ? croisade ? comme tu préfèreras...) mais franchement, "inscrire la SF dans la littérature française" alors qu'elle s'y trouve déjà c'est relativement comique.Lem a écrit :Même avec la meilleure volonté du monde, on ne peut pas soutenir que Renard et Messac sont des grands écrivains. Ce sont de bons écrivains, c'est différent (ne parlons pas de La Hire, que je vénère par ailleurs pour l'invention du Nyctalope). La seule manière d'inscrire ces noms dans l'histoire de la littérature française, c'est d'y inscrire la SF en tant que telle, ce que je vise.
Que certains estiment qu'elle n'y a pas sa place est une chose, qu'elle n'en fasse pas partie est totalement différent. Il n'y a pas qu'en littérature qu'on croise des négationnistes, hein ? Ce n'est pas dans la SF, que se trouve le problème...
Personnellement, adhérer à ta thèse... pourquoi pas.
Sauf que tu te fous autant que moi, je crois, qu'elle passe, cette thèse. Ce qui est vraiment important à tes yeux (et à mon avis la seule variable cachée dans cette histoire) est qu'on reconnaisse que ton objectif de faire entrer la SF en littérature est le bon. Désolé, je ne peux pas. Que ce soit en gommant ce que tu estimes l'empêcher d'y entrer, ou en obligeant tous les sérieux du monde à rester des enfants qui vivent pour le futur avant qu'ils se laissent persuader qu'ils sont devenus "grands" et doivent se consacrer au présent (et à leur gueule).
Et ce n'est pas en lisant "non, non, non, vous n'avez pas compris je vais tout ré-expliquer et vous verrez que j'ai raison" que je vais pouvoir. Pour deux raisons :
1) ça ressemble trop à une méthode éprouvée pour faire passer des pilules bien plus grosses à certaines tranches de population ;
2) il faudrait que les explications soient moins foutraques, moins contradictoires, moins prétentieuses.
En fait, je voulais mettre "+1" au "non" de JD "j'aime pas les boulets" B mais ça me paraissait un peu court.
PS : (Me sachant souvent peu clair, dans le doute, merci de m'adresser au préalable une demande de précision en MP avant de me tomber dessus.)
Je ne comprends pas cette remarque.Erion a écrit :Et puis, comme je disais auparavant, Bradbury, que tu as cité, était considéré par les critiques du genre en 1950, comme n'étant pas vraiment SF avec les Chroniques martiennes. Preuve que c'était pas la dimension métaphysique qui posait problème.
Quand on a parlé des Chroniques martiennes, j'ai expliqué (proposé d'expliquer) que le livre avait été légitimé justement parce qu'il ne contenait pas de métaphysique. Parce que "les martiens" (et par extension toute l'altérité, toute l'étrangeté) étaient ramenés par l'auteur à une chose que le mainstream pouvait admettre et comprendre : une métaphore de la condition humaine, un double, un reflet, une image de nous-mêmes. Le message du livre est clair : on aura beau aller sur Mars, on ne trouvera toujours que… nous-mêmes. Il n'y a pas d'ailleurs.
Si cette explication est bonne, elle rend compte aussi du fait que les fans de SF ont trouvé que ce livre n'était "pas vraiment SF" : parce qu'il ne produit pas le sense of wonder associé au maniement de concepts métaphysiques (c'est ansi que je l'ai lu quand j'avais douze ans : comme de la SF décevante).
"Preuve" que c'est la métaphysique réifiée de la SF qui pose problème et que quand elle n'est pas présente (comme dans Ravage, comme dans 1984, comme dans Malevil, comme dans les Chroniques martiennes), les textes sont plus faciles à légitimer.
(Inutile de citer des contre-exemples ; je sais qu'il y en a.)
Lem... Tu ne me lis pas.Lem a écrit :Sand, il faut rajouter une ligne à ton résumé du fil.Aldaran a écrit :Sauf que tu te fous autant que moi, je crois, qu'elle passe, cette thèse. Ce qui est vraiment important à tes yeux…
"Je crois" exprime un avis personnel. Tu ne me lis pas Lem, c'est mal. Très mal.
edit : et une fois de plus, tu virevoltes et tu esquives. La bonne blague à l'attention de Sand est ce que tu relèves de plus important dans le post ? Rien à dire sur l'importance du but que tu t'es fixé ? "Ce que je vise", c'est fort, pourtant...
Modifié en dernier par Aldaran le jeu. déc. 03, 2009 7:27 pm, modifié 1 fois.
Tous tes exemples, Pascal, sont pertinent, mais si j'ai parlé d'exagération, c'est en réponse à ta présentation du "déni". La conscience du genre (qui n'en est pas un encore) reste extrêmement diffuse. Le mot "scientifique" est là, mais on sent bien que ces textes sont regardés comme des curiosités, sur lesquelles on ne sait pas trop que dire. Un discours plus structuré vient de Messac, qui lui pense qu'il faut donner une visibilité au genre. Il crée d'ailleurs une collection pour cela (différentes raisons feront que cela, hélas, tournera court).
Mon point de vue est que les critiques, justement, ne se livrent pas à un déni. Ils ne voient pas le genre (il n'est pas vraiment visible), ils repèrent tout de même quelque chose (lié à la science). Mais c'est difficile à percevoir pour eux.
Pas de déni affiché (si j'ose dire). L'affaire devient problématique à partir de l'arrivée de la SF américaine, qui va poser des problèmes.
D'autre part, il faut bien être conscient qu'une grande partie du corpus "vieille SF française" est un corpus "littérature populaire". Quand tu discutes avec André Ruellan, tu te rends compte que, quand il était gamin, il lisait Jean de La Hire, Boussenard et Léon Groc, dont il a gardé des souvenirs vifs et très précis. Cet aspect "populaire" (et "jeunesse", évidemment) du genre en formation est aussi un problème pour la critique, qu'elle va avoir beaucoup de mal à gérer, d'autant que, comme tu le sais (nous en sommes de beaux exemples...), l'attachement des lecteurs de SF pour la partie "jeunesse" de leur corpus est considérable. Dans ces condition, le morceau est difficile à défendre devant la critique "sérieuse". Il faut se forcer à construire un corpus "adulte" assez artificiel pour faire "sérieux", alors que c'est le "genre" que l'on aime, dans toutes ces composantes. Le défenseur de la SF, face au critique "sérieux", se trouve dans une position schizophrénique, il doit faire semblant de se moquer, avec lui, de l'aspect "populaire" et enfantin", alors qu'au fond de lui-même, il le sent fondamental.
Oncle Joe
PS: d'ailleurs, une chose que les critiques du temps arrivent à voir, ce sont les "successeurs de Jules Verne". Mais évidemment, ça enferme le genre "naissant" dans la littérature pour la jeunesse.
Mon point de vue est que les critiques, justement, ne se livrent pas à un déni. Ils ne voient pas le genre (il n'est pas vraiment visible), ils repèrent tout de même quelque chose (lié à la science). Mais c'est difficile à percevoir pour eux.
Pas de déni affiché (si j'ose dire). L'affaire devient problématique à partir de l'arrivée de la SF américaine, qui va poser des problèmes.
D'autre part, il faut bien être conscient qu'une grande partie du corpus "vieille SF française" est un corpus "littérature populaire". Quand tu discutes avec André Ruellan, tu te rends compte que, quand il était gamin, il lisait Jean de La Hire, Boussenard et Léon Groc, dont il a gardé des souvenirs vifs et très précis. Cet aspect "populaire" (et "jeunesse", évidemment) du genre en formation est aussi un problème pour la critique, qu'elle va avoir beaucoup de mal à gérer, d'autant que, comme tu le sais (nous en sommes de beaux exemples...), l'attachement des lecteurs de SF pour la partie "jeunesse" de leur corpus est considérable. Dans ces condition, le morceau est difficile à défendre devant la critique "sérieuse". Il faut se forcer à construire un corpus "adulte" assez artificiel pour faire "sérieux", alors que c'est le "genre" que l'on aime, dans toutes ces composantes. Le défenseur de la SF, face au critique "sérieux", se trouve dans une position schizophrénique, il doit faire semblant de se moquer, avec lui, de l'aspect "populaire" et enfantin", alors qu'au fond de lui-même, il le sent fondamental.
Oncle Joe
PS: d'ailleurs, une chose que les critiques du temps arrivent à voir, ce sont les "successeurs de Jules Verne". Mais évidemment, ça enferme le genre "naissant" dans la littérature pour la jeunesse.
je crois que ça restera l'essentiel des 127 pages, quand même.Tu ne me lis pas.
Avec du troll (dont j'ai été, suis, et serai certainement !)
un fil de forum normal, quoion s'en fout

(et je sais quelle préface je ne ferais pas. Quoique... je peux tenter l'altérité comme source du sens of wonder, et la xénophobie - dont les Suisses viennent de nous rappeler qu'elle est bien ancrée - comme origine du rejet de la SF.
mmmmh...
En fait non.)
Modifié en dernier par Sand le jeu. déc. 03, 2009 7:33 pm, modifié 1 fois.
Comment répondre à quelqu'un qui ne me croit pas sincère ?Aldaran a écrit :edit : et une fois de plus, tu virevoltes et tu esquives. La bonne blague à l'attention de Sand est ce que tu relèves de plus important dans le post ? Rien à dire sur l'importance du but que tu t'es fixé ? "Ce que je vise", c'est fort, pourtant...
Ton post énonce ce que tu pense que je pense. Je ne vais pas t'expliquer que je ne pense pas ce que tu penses que je pense, ça ne servirait à rien. Tu penses ce que tu veux ; tu l'exprimes. Moi aussi. Comme je l'ai dit plus haut, on est des grands garçons.
(édité deux fois ! Tous ces "ce" et ces "que" excédentaires dans mon premier jet suggèrent qu'effectivement, ce n'est pas une conversation pour moi.)
Modifié en dernier par Lem le jeu. déc. 03, 2009 7:50 pm, modifié 2 fois.
Les critiques portaient sur le fait que c'était plutôt de la fable, et pas un texte réaliste (donc l'anti critique du Verne réaliste).Lem a écrit : Si cette explication est bonne, elle rend compte aussi du fait que les fans de SF ont trouvé que ce livre n'était "pas vraiment SF" : parce qu'il ne produit pas le sense of wonder associé au maniement de concepts métaphysiques (c'est ansi que je l'ai lu quand j'avais douze ans : comme de la SF décevante).
Isherwood dit, à la sortie des Chroniques : Bradbury "est très peu un scientifique, mais beaucoup plus un poète philosophe". "La fiction prophétique philosophique est le vrai leg de Wells, et est aussi signifiant que n'importe quoi publié actuellement"
(Je rappelle que l'éditeur de Bradbury, n'était pas content du titre, et voulait éliminer la référence à Mars, parce que ça couperait du grand public. Le titre envisagé était "Way in the Middle of the Air")
Et tout l'effort de l'éditeur de Bradbury (Bantam), c'était de présenter l'auteur comme ANTI-scientifique, ce qui a provoqué l'inquiétude du milieu SF, qui a été voir Bradbury pour s'assurer qu'il n'était pas contre la science.
Bref, la peur générale, ce n'était pas la métaphysique ou la philosophie, mais bien de savoir si c'était une oeuvre pro ou antiscientifique. Le fait qu'il ait été considéré comme un poète philosophe était un moyen d'éviter qu'on le rattache à l'aspect scientifique en SF.
Edit : ah, et au cas où ce serait nécessaire, il y a bien une dimension métaphysique, nietzschéenne dans les Chroniques Martiennes. Donc, si c'était la question métaphysique qui répulsait les instances de légitimation, les Chroniques aurait dû en faire partie.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
http://melkine.wordpress.com/
http://melkine.wordpress.com/
Oui. Les martiens comme reflets dans l'eau plutôt que comme êtres biologiques concrets. C'est bon.Erion a écrit :Les critiques portaient sur le fait que c'était plutôt de la fable, et pas un texte réaliste
C'est un autre problème.Et tout l'effort de l'éditeur de Bradbury (Bantam), c'était de présenter l'auteur comme ANTI-scientifique, ce qui a provoqué l'inquiétude du milieu SF, qui a été voir Bradbury pour s'assurer qu'il n'était pas contre la science.
Nietzsche est le dernier liquidateur de la métaphysique occidentale. Il n'y en a pas chez lui.il y a bien une dimension métaphysique, nietzschéenne dans les Chroniques Martiennes.
Comment aurais-je dû l'écrire ?Lem a écrit :Comment répondre à quelqu'un qui ne me croit pas sincère ?
Ton post énonce ce que tu pense que je pense. Je ne vais pas t'expliquer que ce que je ne pense pas que tu pense ce que je pense, ça ne servirait à rien. Tu penses ce que tu veux ; tu l'exprimes. Moi aussi. Comme je l'ai dit plus haut, on est des grands garçons.
Il semblerait que la chose la plus importante à tes yeux ne soit pas tant ce que tu estimes être la raison du déni mais bel et bien le moyen de le contourner afin que ce beau et noble pan de littérature qu'est la SF soit enfin reconnu par un groupe de personnes assez malvoyantes pour ne pas l'avoir fait plus tôt ? Me trompé-je ?
J'ai bon, là ? Ça peut entraîner une autre réaction que "t'es pas d'accord avec moi, je ne discute pas" ?
Même mal exprimée, même si ça t'a froissé, pourquoi cette l'hypothèse "faire entrer la SF en littérature semble inutile puisqu'elle s'y trouve déjà" n'appelle pas de réponse ? Pour la seule raison qu'elle est différente de la tienne ?
Mettons que ton hypothèse soit validée.
Quelle est l'étape suivante ? Parce que, si je puis me permettre de supputer plus avant, un tel débordement de convictions pour trouver cette fameuse variable cachée, tant d'énergie dépensée à montrer que ton intuition est la bonne appelle une suite. Une suite introduite par un certain "ce que je vise" qui laisse tout le monde halletant. Ça ne peut pas s'arrêter comme ça à un "j'ai raison et puis c'est tout". Ce ne serait pas sérieux. Pas assez "grand garçon".
Pas de métaphysique dans les Chroniques martiennes ?Lem a écrit : Nietzsche est le dernier liquidateur de la métaphysique occidentale. Il n'y en a pas chez lui.
http://www.highbeam.com/doc/1G1-91672859.html
Being Martian: spatiotemporal self in Ray Bradbury's The Martian Chronicles.(Critical Essay)
Parce que bon, on a donc une oeuvre métaphysique (les Chroniques martiennes), légitimée (un poète philosophe), et où tout le problème, toute l'inquiétude pour que cette oeuvre métaphysique soit reconnue du grand public, c'est non seulement que la science n'apparaisse pas, mais même qu'elle soit à portée anti-scientifique.
On en revient donc au cas classique de "ce qui fait peur aux critiques, c'est la science dans la littérature", pas la métaphysique.
Modifié en dernier par Erion le jeu. déc. 03, 2009 8:43 pm, modifié 1 fois.
"There's an old Earth saying, Captain. A phrase of great power and wisdom. A consolation to the soul, in times of need : Allons-y !" (The Doctor)
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