Actusf : Comment est née l'idée de Ciel ? Qu'est-ce qui t'a donné envie d'écrire ce roman ?
Johan Heliot : Plusieurs choses. D’abord, cela faisait un moment que je voulais me lancer dans une saga post-apo, ou l’équivalent roman d’un film catastrophe, mais en évitant si possible les paysages dévastés par la bombe, les rebuts d’humanité zombiesques ou ce genre de décors vus et revus, lus et relus... Et je trouvais plus intéressant de situer l’action au moment du basculement de l’humanité dans le monde d’après, plutôt qu’une ou deux générations plus tard. Enfin, je voulais m’attacher à des personnages proches du lecteur francophone, d’où le choix d’une famille éclatée entre des lieux que je connais bien (les Vosges par exemple puisque j’y vis, même si je me suis un peu arrangé de la réalité !) ou qui parlent à l’imaginaire européen (Paris, Berlin, l’Italie, etc.) et non pas à une re-création plus ou moins fantasmatique de l’Amérique. Bref, en plus de tout ça, il me fallait bien entendu le bon angle d’attaque. Le déclic est venu en feuilletant un hors-série de magazine scientifique consacré à divers scénarios de possibles fins du monde. J’ai choisi la grande panne générale d’électricité, que j’ai adaptée à un thème plus SF (celui de la Singularité et de l’IA qui prend le contrôle des opérations), et voilà... Enfin, il me fallait trouver l’éditeur prêt à me suivre sur la distance – 4 volumes en tout, quand même. J’ai eu la chance que le projet séduise rapidement Paola Grieco, pour Gulfstream (coucou et merci en passant à Charlotte qui a fait le lien !).
Actusf : Le thème de la domination totale par une intelligence artificielle est un thème qui a déjà été utilisé dans plusieurs romans et films. Y a-t-il des œuvres là-dessus qui t'ont marqué ?
Johan Heliot : Bien sûr ! Avec cette série, je paie mes dettes à plusieurs films qui ont plus que certainement contribués à ma passion de la SF. En premier lieu, le Terminator de James Cameron, magnifique claque reçue dans une salle de cinéma au milieu des années 1980. Aussi Kubrick, bien sûr, dont j’ai découvert le 2001 à peu près à la même époque, mais à la télé – grosse gifle quand même, l’impression d’avoir vu un chef-d’oeuvre puisque je n’avais rien capté mais que j’avais été hypnotisé ! CIEL, c’est le mariage de HAL 9000 et du T900 mais avec une conscience écolo ! Je voulais vraiment retrouver l’ambiance noire et pesante du Cameron, qui m’avait prise aux tripes à l’adolescence – j’espère que mes jeunes lecteurs le seront tout autant !
Actusf : Parlons un peu de tes personnages, peux-tu nous présenter chaque membre de cette famille un peu spéciale puisque tout le monde est dispersé en France et même en Europe ?
Johan Heliot : Les Keller sont une famille contemporaine, puisqu’éclatée, divorcée, et avec pas mal de traumas et de comptes à régler !
Thomas, le fils, ado en avance d’une classe, est interne dans un lycée parisien quand l’action débute. Jenny, sa soeur aînée, est étudiante à Berlin, mais plus intéressée par la teuf que ses études. Peter (prononcez à la germanique), le père, a refait sa vie dans le sud de la France avec une nouvelle petite amie ; c’est un jeune retraité des services secrets, spécialisés dans les missions d’infiltration à l’étranger – une formation idéale quand il s’agira de prendre le maquis contre les machines ! Sarah, la mère, dirige la Fondation Internationale pour la Protection des Espèces en Danger, une ONG très active, mais se trouve en vacances avec des collègues en Italie quand tout commence – ses convictions écolos lui attireront l’attention particulière de l’IA. Enfin, Tomi, le grand-père, est un ancien grand reporter vivant reclus dans un chalet des cols vosgiens depuis la mort de sa femme, qui a vu venir la catastrophe et s’y est préparé à la façon des survivalistes.
Johan Heliot : Plusieurs choses. D’abord, cela faisait un moment que je voulais me lancer dans une saga post-apo, ou l’équivalent roman d’un film catastrophe, mais en évitant si possible les paysages dévastés par la bombe, les rebuts d’humanité zombiesques ou ce genre de décors vus et revus, lus et relus... Et je trouvais plus intéressant de situer l’action au moment du basculement de l’humanité dans le monde d’après, plutôt qu’une ou deux générations plus tard. Enfin, je voulais m’attacher à des personnages proches du lecteur francophone, d’où le choix d’une famille éclatée entre des lieux que je connais bien (les Vosges par exemple puisque j’y vis, même si je me suis un peu arrangé de la réalité !) ou qui parlent à l’imaginaire européen (Paris, Berlin, l’Italie, etc.) et non pas à une re-création plus ou moins fantasmatique de l’Amérique. Bref, en plus de tout ça, il me fallait bien entendu le bon angle d’attaque. Le déclic est venu en feuilletant un hors-série de magazine scientifique consacré à divers scénarios de possibles fins du monde. J’ai choisi la grande panne générale d’électricité, que j’ai adaptée à un thème plus SF (celui de la Singularité et de l’IA qui prend le contrôle des opérations), et voilà... Enfin, il me fallait trouver l’éditeur prêt à me suivre sur la distance – 4 volumes en tout, quand même. J’ai eu la chance que le projet séduise rapidement Paola Grieco, pour Gulfstream (coucou et merci en passant à Charlotte qui a fait le lien !).

Johan Heliot : Bien sûr ! Avec cette série, je paie mes dettes à plusieurs films qui ont plus que certainement contribués à ma passion de la SF. En premier lieu, le Terminator de James Cameron, magnifique claque reçue dans une salle de cinéma au milieu des années 1980. Aussi Kubrick, bien sûr, dont j’ai découvert le 2001 à peu près à la même époque, mais à la télé – grosse gifle quand même, l’impression d’avoir vu un chef-d’oeuvre puisque je n’avais rien capté mais que j’avais été hypnotisé ! CIEL, c’est le mariage de HAL 9000 et du T900 mais avec une conscience écolo ! Je voulais vraiment retrouver l’ambiance noire et pesante du Cameron, qui m’avait prise aux tripes à l’adolescence – j’espère que mes jeunes lecteurs le seront tout autant !
Actusf : Parlons un peu de tes personnages, peux-tu nous présenter chaque membre de cette famille un peu spéciale puisque tout le monde est dispersé en France et même en Europe ?
Johan Heliot : Les Keller sont une famille contemporaine, puisqu’éclatée, divorcée, et avec pas mal de traumas et de comptes à régler !
Thomas, le fils, ado en avance d’une classe, est interne dans un lycée parisien quand l’action débute. Jenny, sa soeur aînée, est étudiante à Berlin, mais plus intéressée par la teuf que ses études. Peter (prononcez à la germanique), le père, a refait sa vie dans le sud de la France avec une nouvelle petite amie ; c’est un jeune retraité des services secrets, spécialisés dans les missions d’infiltration à l’étranger – une formation idéale quand il s’agira de prendre le maquis contre les machines ! Sarah, la mère, dirige la Fondation Internationale pour la Protection des Espèces en Danger, une ONG très active, mais se trouve en vacances avec des collègues en Italie quand tout commence – ses convictions écolos lui attireront l’attention particulière de l’IA. Enfin, Tomi, le grand-père, est un ancien grand reporter vivant reclus dans un chalet des cols vosgiens depuis la mort de sa femme, qui a vu venir la catastrophe et s’y est préparé à la façon des survivalistes.
Leurs situations me permettent de confronter cinq points de vue autour de l’évènement – la grande panne générale d’électricité qui éteint littéralement le monde (comme le fait Snake Plissken à la fin de Los Angeles 2013 de John Carpenter, un autre film qui m’a influencé, tiens !). Lorsqu’elle survient, un peu avant Noël de l’année 2030, il était prévu que la famille se réunisse chez Tomi pour les fêtes, dans une tentative de réconciliation. Une fois les communications abolies, chacun devra s’arranger pour sauver sa peau et se faire une place (ou pas) dans le nouveau monde...
Actusf : Ciel impose à l'humanité un régime très dur pour sauver la Terre de la catastrophe. C'est une sorte de dictature écologiste. Est-ce tu avais envie de dénoncer quelque part le risque qu'une bonne intention puisse dériver vers quelques choses de totalitaire ?
Johan Heliot : Oui et non. Pas une dénonciation directe d’un certain “écolo-terrorisme” auquel je ne crois d’ailleurs guère (mes convictions en la matière sont d’ailleurs presque aussi radicales que celles de mon IA !). Mais je m’intéressais effectivement au mécanisme du totalitarisme, qui peut naitre n’importe où, à partir de n’importe quelle idée – y compris les plus généreuses en apparence. De son point de vue de super intelligence artificielle, connectée à l’ensemble des connaissances du monde (l’Internet de demain), mon IA a raison de vouloir mettre un terme à l’aventure de l’humanité (avec une solution “douce” quoi que radicale) pour épargner l’avenir de la planète et laisser sa chance à une nouvelle espèce dominante ; cela ne fait aucun doute pour elle, dans la mesure où notre comportement mène irrémédiablement à la catastrophe (le combat écolo est perdu d’avance, ce que je crois moi-même, hélas) et que nous aurons tout fichu en l’air avant d’avoir trouvé une autre Terre à coloniser... Elle (l’IA) dispose à la fois des moyens (le contrôle total des réseaux) et de la justification de ses actes. Donc elle ne se prive de rien !
Actusf : On a connu en 2000 la crainte d'un big bug. Depuis, la dépendance à l'électricité et désormais au réseau global est encore plus forte. Est-ce que tu crains une panne générale ? Et est-ce que tu avais envie de parler de la fragilité de notre système de société ?
Johan Heliot : Envie de montrer que nous sommes ultra dépendants d’un modèle de fonctionnement somme toute très récent (en perspective de notre propre évolution) mais que l’on croit assez solide pour durer toujours – or, la grande leçon de l’Histoire est que ce genre de modèle n’existe pas ! Avec l’urbanisation galopante (bientôt, la majorité des humains seront des citadins), nous dépendons quasi totalement de la production d’énergie électrique, pour nos moindres gestes du quotidien – y compris les gestes vitaux : la fourniture en eau potable de nos réseaux ne peut se passer d’électricité, elle non plus. C’est ce qui explique d’ailleurs qu’on ne se débarrassera jamais de nos centrales nucléaires (le Japon a déjà oublié Fukushima). Alors, je ne prône pas un retour à la terre (mon message n’est pas celui de Barjavel dans Ravages !), je sais qu’il existe des solutions alternatives et intermédiaires, qui passent entre autres par une indispensable décroissance, mais on s’éloigne un peu du sujet, là... Je souhaite juste que mes jeunes lecteurs réfléchissent à l’éventualité d’autres modèles, voilà tout. Disons que je suis à ce sujet un joyeux pessimiste !
Actusf : Ce premier tome est passionnant mais aussi un peu sombre. On y voit des individus basculer dans ce qu'ils ont de pire. Mais le tome 2 à venir porte un titre porteur d'espoir. Que peux-tu nous en dire ?
Johan Heliot : Le printemps de l’espoir, le titre du deuxième volume, est à double sens. Si certains personnages entrevoient une lueur d’espoir pour leur propre avenir, ce n’est pas forcément le cas du point de vue général. CIEL a aussi ses propres espoirs pour l’avenir, qui ne sont pas ceux des humains !
Actusf : Ciel impose à l'humanité un régime très dur pour sauver la Terre de la catastrophe. C'est une sorte de dictature écologiste. Est-ce tu avais envie de dénoncer quelque part le risque qu'une bonne intention puisse dériver vers quelques choses de totalitaire ?
Johan Heliot : Oui et non. Pas une dénonciation directe d’un certain “écolo-terrorisme” auquel je ne crois d’ailleurs guère (mes convictions en la matière sont d’ailleurs presque aussi radicales que celles de mon IA !). Mais je m’intéressais effectivement au mécanisme du totalitarisme, qui peut naitre n’importe où, à partir de n’importe quelle idée – y compris les plus généreuses en apparence. De son point de vue de super intelligence artificielle, connectée à l’ensemble des connaissances du monde (l’Internet de demain), mon IA a raison de vouloir mettre un terme à l’aventure de l’humanité (avec une solution “douce” quoi que radicale) pour épargner l’avenir de la planète et laisser sa chance à une nouvelle espèce dominante ; cela ne fait aucun doute pour elle, dans la mesure où notre comportement mène irrémédiablement à la catastrophe (le combat écolo est perdu d’avance, ce que je crois moi-même, hélas) et que nous aurons tout fichu en l’air avant d’avoir trouvé une autre Terre à coloniser... Elle (l’IA) dispose à la fois des moyens (le contrôle total des réseaux) et de la justification de ses actes. Donc elle ne se prive de rien !
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Johan Heliot : Envie de montrer que nous sommes ultra dépendants d’un modèle de fonctionnement somme toute très récent (en perspective de notre propre évolution) mais que l’on croit assez solide pour durer toujours – or, la grande leçon de l’Histoire est que ce genre de modèle n’existe pas ! Avec l’urbanisation galopante (bientôt, la majorité des humains seront des citadins), nous dépendons quasi totalement de la production d’énergie électrique, pour nos moindres gestes du quotidien – y compris les gestes vitaux : la fourniture en eau potable de nos réseaux ne peut se passer d’électricité, elle non plus. C’est ce qui explique d’ailleurs qu’on ne se débarrassera jamais de nos centrales nucléaires (le Japon a déjà oublié Fukushima). Alors, je ne prône pas un retour à la terre (mon message n’est pas celui de Barjavel dans Ravages !), je sais qu’il existe des solutions alternatives et intermédiaires, qui passent entre autres par une indispensable décroissance, mais on s’éloigne un peu du sujet, là... Je souhaite juste que mes jeunes lecteurs réfléchissent à l’éventualité d’autres modèles, voilà tout. Disons que je suis à ce sujet un joyeux pessimiste !
Actusf : Ce premier tome est passionnant mais aussi un peu sombre. On y voit des individus basculer dans ce qu'ils ont de pire. Mais le tome 2 à venir porte un titre porteur d'espoir. Que peux-tu nous en dire ?
Johan Heliot : Le printemps de l’espoir, le titre du deuxième volume, est à double sens. Si certains personnages entrevoient une lueur d’espoir pour leur propre avenir, ce n’est pas forcément le cas du point de vue général. CIEL a aussi ses propres espoirs pour l’avenir, qui ne sont pas ceux des humains !