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Interview 2017 :  Mireille Rivalland pour L'Atalante !
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Interview 2017 : Mireille Rivalland pour L'Atalante !

ActuSF : Bonjour. Le 26 mai dernier, les éditions L’Atalante ont lancé leurs six premiers titres en format poche. Mais avant de parler de cette nouvelle collection, pouvez-vous nous présenter en quelques mots les éditions L’Atalante, qui vont prochainement fêter leurs trente ans !
 
Mireille Rivalland : C’est avec émotion que je vois arriver ces 30 ans car ils correspondent, à quelques mois près, à mon arrivée dans cette maison aux côtés de Pierre Michaut en juillet 1989. J’aurai 30 ans de boîte en 2019 ! ça fiche un coup. C’est une grande fierté de faire partie d’un établissement qui a su grandir suffisamment et durer dans une période charnière pour l’édition et la librairie française, et la science-fiction, en particulier – concurrence accrue, émergence de tout en tas de segments, arrivée du livre numérique, du livre audio…
Une occasion de rappeler que la librairie L’Atalante préexiste de 10 ans à l’édition et que deux libraires y défendent farouchement la science-fiction, la fantasy, le polar et le cinéma ; l’édition, qui est devenue dès les années 1990 l’activité porteuse, compte, quant à elle, sept salariés. Nous nous sommes transformés en SCOP en 2012 (après 20 ans en SARL), par adhésion aux valeurs collectives de ce mouvement, mais aussi parce que c’est un outil précieux pour assurer l’indépendance et la transmission d’une entreprise.
L’Atalante, c’est une aventure à triple détente : la librairie, l’édition et l’entreprise. Rendez-vous en 2039 pour le cinquantenaire.
 
 
Bragelonne lance sa collection poche Milady en 2008, Les Indés de l’imaginaire Helios en 2013… Vous dites que vous y pensez « depuis le début des années 2000 ». Qu’est-ce qui vous a motivés à la lancer aujourd’hui ? Un désir éditorial ? Une volonté de vous diversifier sur un marché du livre parfois difficile ?
 
Faire du poche, c’est accompagner les titres d’un catalogue vers de nouveaux lecteurs et les mettre à portée de tous les budgets. C’est une belle et noble idée.
Mais de même qu’il y a une économie spécifique pour chaque type de production en agriculture selon qu’on cultive en intensif, en raisonné ou en bio, de même un petit éditeur indépendant (de province) doit trouver comment assurer sa survie en évitant les pièges de la surproduction et en faisant de la qualité du texte et de l’objet ses fers de lance.
Très rapidement, avec Pierre Michaut, nous avons compris que « passer un livre en poche », pour quelques rares cas de démultiplication des ventes, appauvrirait notre catalogue et diminuerait notre présence en librairie liée aux ventes du fonds. Nous avons donc, avec l’accord des auteurs, limité ces cessions et, quand il n’y avait pas le choix, nous les avons reculées à cinq ans après parution du grand format a minima.
Du coup, nous avons dès la fin des années 90 pensé à faire du poche nous-même. La première réunion à ce sujet a eu lieu en 1999 dans les bureaux de Liana Levi, avec Marion Henneberg et Jean Viard, des éditions de L’Aube, et Philippe Picquier, sous la houlette de notre diffuseur commun, Harmonia Mundi. Nous n’avons pas trouvé d’accord pour avancer ensemble ; eux visaient le semi-poche à l’image d’Actes Sud, quand nous pensions alors que notre catalogue devait offrir aux lecteurs un format, une cadence et un prix « poche ». Au début des années 2000, nous avons eu l’idée de trouver un partenaire poche « officiel », avec lequel opérer en co-édition ; le projet le plus abouti, avec Folio, a finalement fait long feu. Nous avons repris ensuite des discussions au sein d’Harmonia Mundi, du fait de la présence de Bragelonne – mais cette fois eux étaient plus pressés et plus ambitieux que nous.
Bref, nous n’avons pas cessé d’y penser et de ne pas le faire jusqu’en 2010, parce que nous estimions qu’il fallait que nous ayons une diffusion plus large pour une telle collection. Or dans le même temps, les choses ont commencé à changer et du poche a fleuri, dans les petites et moyennes maisons, en se contentant du même canal de diffusion que les grands formats, en publiant à un rythme variable… mais nous, nous étions fort occupés : à changer de distributeur/diffuseur en 2011 ; à passer en SCOP en 2012 ; à lancer notre offre numérique en 2013 ; à absorber le départ en retraite de Pierre Michaut en 2014.
Une fois la situation stabilisée, nous avons entrepris de réfléchir à la mise en valeur du fonds. En premier, dès 2014 nous avons changé de format et renouvelé les couvertures de bon nombre de nos livres restés dans le format d’origine (13 x 18 cm) pour harmoniser le catalogue ; en 2015 nous avons créé notre collection patrimoniale en fiscagomma « Classiques de l’imaginaire » ; et en 2016 nous avons repris notre réflexion sur le poche.
Voilà toute l’histoire.
 
 
Vous dites également que « Publier du grand format et faire du poche, c'était deux métiers différents ». Qu’est ce qui change quand on passe du grand format au poche ? C’est une question de choix éditoriaux ? De tirage ? De mode de diffusion ?
 
C’est ce que je croyais, mais j’ai changé d’avis. À force de voir certains de nos livres se vendre à 3000 ex. en poche dans les grandes maisons qui nous les achetaient. En constatant que nos confrères avaient passé le cap.
Nos livres de poche auront une diffusion identique au reste de notre catalogue, sauf exception et succès remarquable, et, à l’étude, les ratios coût d’impression, tirages, rotations, stockages, droits d’auteur ne sont guère différents de la gestion des grands formats. Toutefois, nous avons pris soin de travailler avec un imprimeur équipé pour ce type de production et avons étudié spécialement notre mise en page pour équilibrer au mieux la lisibilité et la pagination – nombre de lecteurs l’ont remarqué : merci ! Notre ambition est de proposer des prix « poches » tout en gardant la qualité typographique qui est une de nos marques de fabrique.
 
 
Quelle est la ligne éditoriale de cette collection poche ? Et qui en aura la charge aux éditions L’Atalante ?
 
La ligne éditoriale recoupe celle de nos publications habituelles. Nous ferons rentrer dans cette collection les livres dont le contrat le permet, qui ne sont pas ou plus en poche ailleurs et qui ne seraient pas mieux défendus sous un autre label. Pour l’instant, nous n’avons pas prévu d’y publier des inédits, cela ne nécessite donc pas de modifier notre fonctionnement en interne.
 
Pouvez-vous nous dire également un mot sur la conception graphique – une question importante pour une collection. Pour l’édition poche, quels étaient les intentions et le « cahier des charges » ?
 
C’était un véritable challenge nous concernant, tant le catalogue est éclectique. Nous souhaitions que ce soit classe mais pas ennuyeux, populaire mais pas bas de gamme, joyeux mais pas débridé, et, gageure ultime, que cela convienne – je force à peine le trait – pour Cygnis de Vincent Gessler et pour la série de David Weber, Honor Harrington.
Le graphiste était particulièrement motivé mais cela lui a demandé quelques mois de maturation à partir des éléments que nous avions dégagés avec lui à l’été 2016 : de l’illustration symbolique, jouer sur le bicolore et la matière (il est très fort en matière), trouver une typographie originale lisible (se méfier du graphiste fou de typo).
Ses premières propositions sont arrivées le 2 janvier 2017, puis nous avons fait des allers-retours jusqu’à la mi-février, date à laquelle nous présentions les nouveautés de mai aux représentants, dont les six premiers livres de la collection. L’accueil a été très favorable ; les libraires ont semblé aussi conquis ; nous sommes au taquet pour surveiller les réassorts de l’été !
 
 
Comment avez-vous choisi les six premiers titres lancés en mai dernier ?
 
Aux dés. Bon, pas tout à fait, mais franchement tant de livres nous font envie. Nous disposons d’une liste de 70 à 100 titres potentiels. Nous allons chercher l’équilibre entre la remise en valeur et les perspectives de ventes.
 
 
Quels seront les prochains titres 2017 ?
 
En septembre paraîtront Plaguers de Jeanne-A Debats, Or not to be de Fabrice Colin, La Plaie de Nathalie Henneberg et le 3e « Honor Harrington ».
 
Quel sera rythme de parution de cette collection? Pouvez-vous déjà nous donner un avant-goût de 2018 ?
 
Nous envisageons de sortir une dizaine de livres par an, sans doute deux par deux.
 

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