Steve Jackson et Ian Livingstone sont les deux fondateurs de Games Workshop Limited en 1975. Ils écriront ensemble plusieurs ouvrages de la série Défis fantastiques.
Des débuts fracassants
En 1983 débute une collection de livres-jeux assez étonnants : Un livre dont vous êtes le héros, avec sa série emblématique Défis Fantastiques. Si le roman commence de manière traditionnelle à la première page, il en va différemment pour la suite : chaque paragraphe est numéroté et laisse des choix multiples, qui mènent à d’autres paragraphes et permettent de poursuivre la narration sur des chemins différents.
Le lecteur est mis à la place du narrateur et incarne dans chaque livre un aventurier qui va devoir traverser de nombreuses épreuves. Comme dans les jeux de rôle, le héros dispose de caractéristiques qui seront mises à contribution lors de l’aventure, et qui permettront de définir la réussite ou non de certaines tâches. Si la majeure partie des romans se déroulent dans un même univers médiéval-fantastique, plusieurs incursions dans la science-fiction (Le combattant de l’autoroute ou Le mercenaire de l’espace) l’horreur (Le manoir de l’enfer) sont aussi à noter.
L’une des caractéristiques de chacun des romans qui composent la série est de proposer des variantes aux règles de base. Si le premier volet des Défis fantastiques, Le sorcier de la montagne de feu, amène ce qui sera la base du système de jeu (qui revient à lancer deux dés et à comparer le résultat aux trois caractéristiques centrales de la série, Habileté, Endurance et Chance), La citadelle du chaos apporte des règles supplémentaires de magie, Le manoir de l’enfer un score de peur à ne pas dépasser... chaque livre offre de nouvelles variantes, une nouveauté bienvenue qui évite à la série de sombrer dans la monotonie, et qui explique sans doute le succès des Livres dont vous êtes le héros pendant les années quatre-vingt. Si l’aventure est assez courte au final, il est possible de la reprendre pour voir les conséquences de choix différents, et les Défis fantastiques sont plutôt ardus à terminer, en règle générale. Les labyrinthes sont assez vicieux, et certains choix indispensables pour terminer l’aventure.
La Nuit du Loup-Garou
Gallimard jeunesse propose de redécouvrir cette série à l’occasion de ses trente ans, ce qui devrait ravir les nostalgiques et permettre à un nouveau public de découvrir des livres-jeux particulièrement ludiques. L’un de ces titres inédits en français est la nuit du loup-garous : le héros que vous incarnez a été mordu et doit trouver un moyen de rompre la malédiction de lycanthropie qui le touche avant la prochaine lune. On retrouve les règles habituelles de la série Défis fantastiques, avec cette fois une règle concernant le total de métamorphose : le score augmente pendant l’aventure, afin de simuler la part de bestialité qui prend le dessus sur votre humanité. Un système astucieux qui permet d’ajouter un peu de tension à la narration. Le lecteur hésite ainsi entre faire preuve de célérité ou prendre le temps de s’arrêter pour trouver des objets ou des alliés et lui permettre de parvenir à la conclusion de l’aventure.
Cet inédit est intéressant à plus d’un titre : on sent l’expérience des auteurs qui offrent un scénario bien ficelé dans un univers sombre et pas du tout rassurant. Les passages de description sont plus nombreux et élaborés, les paragraphes plus longs, et la lecture est vraiment agréable. L’ouvrage dépasse ici les 400 paragraphes habituels de la série, et multiplie les possibilités de choix.
Un livre dont vous êtres le héros mature en somme, qui réunit le meilleur du jeu et d’une intrigue bien construite. On retrouve également avec plaisir les superbes illustrations qui contribuent à l’ambiance de la série, et qui lui donne son identité visuelle.
Une belle initiative en tout cas que cette réédition et publication d’inédits, pour une série ludique et interactive qui est une porte d’entrée à la lecture et l’imaginaire.