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Le réseau des mages
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Le réseau des mages

Richard Cowper est l'un de ces auteurs pour lesquels on souhaiterait voir réunis un jour ses nouvelles et romans dans les pages de quelques forts volumes cartonnés. Son cycle de romans intitulé L'oiseau blanc de la fraternité, en particulier, pourrait alors renaître pour une seconde vie bien méritée. Dans cet univers à la fois poétique, mystique et discrètement post-apocalyptique, le lecteur attentif découvrira sans doute quelques points communs avec les îles de l'Archipel du rêve de son ami Christopher Priest... Souvent à la croisée des genres, entre science-fiction, fantastique et fantasy, Richard Cowper évite les poncifs avec beaucoup de finesse. Il fut également un novelliste talentueux, comme le démontrent les quelques recueils parus en français, dont Le réseau des mages n'est pas le moins intéressant.

Des personnages à l’écoute du temps et de l’espace…

La première nouvelle du recueil débute avec un exposé comparant l'imagerie de la science-fiction populaire des années cinquante et les débuts de la conquête spatiale. Une mise en abyme introduit ensuite le récit des déboires d'un exoarchéologue aux prises avec des créatures extra-terrestres plutôt surprenantes... Parabole destinée à l'édification des écoliers du futur ou épisode authentique de l'exploration d'une autre planète, l'histoire de Peter Mahler constitue une convaincante introduction à la démarche littéraire de l'auteur, entre aventure et réflexion. La seconde nouvelle aurait pu être écrite par Arthur Conan Doyle ou Algernon Blackwood, deux auteurs dont les préoccupations spirituelles et l'imaginaire possèdent plus d'un point commun avec ceux de Richard Cowper. Un scientifique, précurseur de la recherche en zététique, enquête sur d'étranges manifestations métapsychiques... Le style de Richard Cowper est idéalement adapté pour cette histoire victorienne à laquelle le post-scriptum du narrateur apporte une conclusion des plus amères... La troisième nouvelle aborde le versant poétique des œuvres de l'auteur, particulièrement apparent dans sa trilogie de L'oiseau blanc de la fraternité. Superbe, ce texte subtil semble comme d'autres récits de Richard Cowper, influencé par une philosophie orientale centrée sur une vision non dualiste du monde.

Reste-t-il encore des vallées perdues ?

Le recueil se conclut par une novella qui s’inscrit dans la lignée des trois récits précédents. L’ambiance rappelle un peu certains récits d’Abraham Merritt ou de Rudyard Kipling, comme L’homme qui voulut être roi. Tous les ingrédients sont réunis pour en faire un bon récit de monde perdu, avec amazones, religion et divinités antiques, ainsi qu'un final aux implications mystico-cosmiques époustouflantes. Encore une fois, l’histoire des religions fournit la trame et l’auteur exploite brillamment les doctrines dualistes de la Perse antique. Comme pour la nouvelle « L’esprit d’Attlebourough », il crée un contraste entre le style et la forme très classiques, qu'il parvient à transcender dans les dernières pages par un éclairage moderne. En raison de son style à la fois poétique et philosophique, ainsi que d'une thématique d'une grande profondeur, Richard Cowper est un auteur atypique passionnant. Il parvient à élever la réflexion tout en faisant preuve d'un goût marqué pour l'aventure mystérieuse, se hissant ainsi au niveau des plus fascinants d’entre les conteurs. 

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