Que de nouveautés.
Ambition est le premier roman de Yoann Dubos mais aussi le premier roman de la Collection Ciel sans étoiles des éditions SNAG, jeune maison d’édition d’à peine un an. Ce premier roman fait appel à une suite dont la date n’est pas encore annoncée. Nous partons donc avec que du neuf et donc, sans a priori.
La résonance originelle, le grand bouleversement.
An 2312, alors en mission à la conquête de l’espace, Miranda Clay et le reste de l’équipage du Stremnon font face à une barrière infranchissable et non-substantielle, au fin fond du système solaire. L’équipage tentant de franchir l’obstacle déclenchera sans le vouloir la Résonance originelle, dévoilant sur Terre un monde surnaturel jusqu’alors caché de tous. Accusée à tort d’être à l’origine du bouleversement, Miranda Clay sera contrainte de vivre en paria dès son retour sur une Terre gouvernée par un conglomérat d’entreprises planétaires.
De la “cyber fantasy”, ou de la fantasy d’anticipation : un peu de fraîcheur dans le genre.
Soyons francs, je n’aurais pas acheté ce livre. La couverture, vraiment bien réalisée, ne semblait pas s’adresser à moi, car en adepte bas du front de Fantasy plus classique – entendez heroic fantasy, sword and sorcery ou dark fantasy - , j’aurais eu peur de ne pas apprécier un univers visiblement caractérisé Urban fantasy et destiné aux jeunes adultes. Voilà un raisonnement ridicule qui m’aurait privé de ce très bon roman.
J'ai d'abord cru lire de la SF d’anticipation mais j’ai découvert finalement un univers de fantasy très riche et complet aux nombreuses ramifications. Pourtant, enlevez les créatures surnaturelles, et vous aurez un substrat de roman d’anticipation intelligent et réfléchi ; les thèses avancées sont cohérentes, crédibles. Quand la création du Conglomérat planétaire nous est expliquée, j’ai eu la certitude – momentanément du moins – que cela se passerait exactement de cette façon. (Peut-être que les lecteurs d’Orwell ou d’Huxley avaient-ils eu le même sentiment de leurs temps lors des sorties respectives de leurs deux monuments). Et bien sûr, Ambition interroge son lecteur, sans donner de réponse et avec une forme de subtilité. Dans tous les cas, il est difficile pour moi d’exprimer pleinement mon enthousiasme : l’univers est parfait, immersif, complet et cohérent et surtout, il ne rentre pas dans un genre étiqueté (à ma connaissance), d’où ma qualification assez libre de “Cyber Fantasy”.
Concernant l’intrigue, je l’ai trouvé somme toute assez secondaire dans le sens où la simple découverte de cet univers m’aurait presque suffi. Elle servait néanmoins de trame de fond à ce que j’ai accueilli presque comme une vision prophétique.
Enfin, les personnages sont mûrement réfléchis et bien caractérisés. On a envie de les connaître davantage. Et, chose à laquelle je suis sensible, la notion de bien ou de mal est absente : pas de conception simpliste des personnages, mais au contraire des individus complexes et nuancés (En voilà un roman moderne!).
Pour l’anecdote, l’auteur Yoann Dubos est également un invétéré de l’univers vidéo ludique et à ce titre, je ne peux qu’entrevoir une familiarité avec la licence DEUS EX de Square Enix. Bien entendu, c’est l’univers cybernétique et l’ambiance générale qui nous y renvoi sans plus de références ou de similarités, mais pour les adeptes de la licence, ce roman est d’autant plus savoureux. Cela est peut-être étrange à dire mais en tant qu’auteur, c’est un roman que j’aurai aimé avoir écrit!
Alors, me direz-vous, est-ce le livre parfait?
Malheureusement non. J’ai pris énormément de plaisir à le lire – trop probablement - (380 pages en trois jours) et c’est une des lectures les plus marquantes de cette année 2019, mais ce roman m’a laissé tombé alors que je n’étais pas prêt à le reposer. Trop de questions fourmillent et, de manière générale et sans trop en dire, ce roman n’a pas de conclusion. J’en tire une frustration inouïe! J’ai finalement percuté qu’il y aurait un tome 2 alors que j’ai cru un long moment que c’était un One Shot. Alors je ronge mon frein et je reprends ma fantasy épique et bas du front en attendant la suite.