
Comment fait-on parler de son premier roman quand on est incapable de postillonner dans un micro ou de gesticuler devant une caméra ?
La réponse est d’une simplicité confondante ; on se cale derrière son clavier et on fait comme d’habitude, on appuie sur les touches avec les doigts, une clope à la bouche et un café à portée de main. On préfère s’user les yeux sur un écran que de croiser un regard. C’est con de parler avec les doigts, mais c’est mieux que de n’avoir rien à dire avec la bouche.
La réponse est d’une simplicité confondante ; on se cale derrière son clavier et on fait comme d’habitude, on appuie sur les touches avec les doigts, une clope à la bouche et un café à portée de main. On préfère s’user les yeux sur un écran que de croiser un regard. C’est con de parler avec les doigts, mais c’est mieux que de n’avoir rien à dire avec la bouche.
Alors, je tape sur les touches.
Je couche ma pensée.
J’accouche de la première question.
Je couche ma pensée.
J’accouche de la première question.
Mon premier roman s’intitule Lemashtu, un titre qui ne veut rien dire de prime abord pour un roman qui raconte quoi ?
Imaginons que les vampires ne soient pas un mythe, qu’ils soient les représentants d’une sous-espèce de la branche homo, les homo sapiens incubus. Victimes de génocides à répétition orchestrés par l’espèce humaine, ils vivent parqués dans un ghetto en Europe de l’Est. Pour échapper à la misère, Lemashtu Miazza Noptii, voïvode strigoï et futur roi de Walachie a dû fuir la Roumanie, en compagnie de ses tuteurs, un prêtre stryge peu fréquentable et un maître enseignant moralisateur. En exil à Londres, il étouffe sous la surveillance de ses aînés et sous les innombrables règles de sécurité édictées par le Vatican.
A 15 ans, Lem ignore tout du monde des humains et de son propre peuple. Il n’a aucune idée de qui il est, de sa valeur, ni de la haine qu’il cristallise sur sa personne.
A 15 ans, Lem ignore tout du monde des humains et de son propre peuple. Il n’a aucune idée de qui il est, de sa valeur, ni de la haine qu’il cristallise sur sa personne.
Donc Lemashtu est une « vampire story » pour adolescents. Les vampires courent les rues en ce moment, avec les Twilight et autres historiettes bit-lit pour jeunes filles en fleur, était-ce nécessaire d’allonger la soupe avec un roman de 400 pages ?

Le vampire n’est qu’un prétexte.
Oui, mais quand même pourquoi le vampire ? Pourquoi tout ce chahut autour d’un vieux keum aux canines télescopiques ?
Pourquoi se sentir obligé de parler « jeuns » quand on aborde les vampires ? Et si, je me permettais un truc de ouf, comme par exemple utiliser des mots latins et roumains, ou encore plus dingue, de replacer le vampire dans son contexte mythique originel.
Pour Lemashtu, je ne me suis pas inspiré du vampire actuel, le bellâtre romantico-gothique, mais de la « Striga », le vampire romain, la créature qui hurle dans la nuit, celle qui figure le chaos et la folie.

Vlad l’Empaleur est une figure historique complexe. C’était à la fois un tyran sanguinaire sans commune mesure, et un croisé membre de l’ordre des chevaliers dragons. Encore aujourd’hui, les roumains le considèrent comme un héro parce qu’il a repoussé les Turcs et l’Islam.
Dracula montre à quel point tout est affaire de point de vue. Un même homme peut être un monstre ou un sauveur, en fonction de l’intérêt particulier de celui qui le juge.
Pour moi, il ne fait aucun doute que Vlad était fou et qu’il a entraîné une partie de l’Europe et l’Eglise catholique toute entière dans sa folie. Son histoire nous démontre que les hommes jugent en fonction de la fin ou des moyens selon si le crime leur profite ou pas.
J’ai fait beaucoup de recherche, principalement sur le mythe roumain, car il véhicule plus que le vampire actuel. Le strigoï est plus qu’un buveur de sang démoniaque, il a aussi un côté « fatalité » qui vous tombe sur le coin de la tête qui me plaisait. On ne choisit pas de devenir vampire chez les roumains, un strigoï est aussi bien le 7ème fils d’un 7ème fils que tout simplement un enfant roux. En Roumanie, on naît vampire, on ne le devient pas. Le terme strigoï véhicule une part de xénophobie ; la peur de ce qui est Autre et qui nourrit toutes les superstitions. C’est pourquoi je me suis inspirée du bestiaire vampirique roumain pour créer les différentes castes de stryges présentent dans Lemashtu.

Les tables de classification m’ont toujours mise mal à l’aise ; cette propension générale à toujours vouloir tout ranger dans une case, au mépris de l’individu, de la part qui déborde du cadre.
Dans « Lemashtu », deux axes « cadrant » d’habitude opposés se croisent, la religion d’un côté, qui refuse de reconnaître que les Stryges ont une âme, (comme pour les homosexuels, les noirs et les animaux ….) et la science qui préfère créé une sous espèce plutôt que d’intégrer les stryges dans l’espèce homo sapiens.
A partir de quand peut-on prétendre être humain ?
Lemashtu étant un voïvode strigoï, il peut se reproduire avec une femme humaine. Étonnamment, la science et la religion se concentrent sur ses différences faisant fi de cette extraordinaire ressemblance …
Dans « Lemashtu », deux axes « cadrant » d’habitude opposés se croisent, la religion d’un côté, qui refuse de reconnaître que les Stryges ont une âme, (comme pour les homosexuels, les noirs et les animaux ….) et la science qui préfère créé une sous espèce plutôt que d’intégrer les stryges dans l’espèce homo sapiens.
A partir de quand peut-on prétendre être humain ?
Lemashtu étant un voïvode strigoï, il peut se reproduire avec une femme humaine. Étonnamment, la science et la religion se concentrent sur ses différences faisant fi de cette extraordinaire ressemblance …
Je voulais aussi « rendre hommage » à la pire des tables de classifications jamais inventée, le Manuel Diagnostique et Statistique des troubles Mentaux ou DSM dans lequel je me suis baladée un certain nombre d’année à la faveur de diagnostics contradictoires pour finir dans une case portant la magnifique étiquette : « high functionning autism ».
« Autisme de haut fonctionnement », un oxymoron qui m’amuse aujourd’hui, mais qui m’a pourri un certain nombre d’années. C’est quoi un autiste de haut niveau de fonctionnement, eh bien attention les yeux ! c’est un autiste qui parle, qui travaille à temps plein, qui est même marié, c’est un autiste comme tout le monde… Hormis quelques minuscules bizarreries.
Pour dé »monstrer » mais également créer une différence subtile entre les hommes et les stryges, j’ai construit la psychologie des différentes castes de stryges sur les caractéristiques de quelques psychoses dites « non délirantes ».

Aratar Déochétor, le nékurat, est construit comme un autiste qui a compensé son handicap social par la cognition. Il peut se mouvoir très rapidement. Ses sens sont exacerbés et il perçoit les choses différemment. Il dissimule ses émotions et ne parle jamais de lui, comme s’il n’avait pas d’intérêt propre et pas de subjectivité. Il dit rarement « je ». C’est une éponge et une forteresse en même temps. Il parle par aphorisme. Il n’est pas bon pédagogue. Il a toujours ce ton doct. Il n’a pas beaucoup d’humour. Il est chiant … (Rires).
Lemashtu, le voïvode strigoï, est à mi-chemin entre ses deux aînés. Il est très narcissique. Il se méfie de ses instincts comme et à cause du nékurat. Il analyse avant d’agir, comme le nékurat encore. Il est manipulateur, menteur, agressif et désobéissant comme devait l’être Féhik à son âge. Il est imbu de sa personne, égoïste mais il a aussi cette capacité à la transcendance, le samodiva …
Merlin, le moroï repenti, passe toute son énergie à se contrôler pour ne pas tuer et violer son prochain (dans cet ordre ou dans le désordre), c’est un psychopathe compensé.
Tous se nourrissent de sang, tous ont une faiblesse identitaire et manquent parfois de substance, tous pourraient perdre leur reflet dans le miroir … tous devenir des « moroïs », des fous ou de vrais monstres, sauf le nékurat.
Dans Lemashtu, les humains, de leur côté, sont tous névrosés … (rires).
Lemashtu est un roman à plusieurs voix, avec plusieurs narrateurs. A sa lecture, on passe d’un ton à l’autre, de la neutralité à la subjectivité, de la littérature de divertissement pour adolescents au pamphlet scientifique ou philosophique, n’est-ce pas un peu déstabilisant ?
Il y a un narrateur principal extrêmement neutre, puis dans les archives du Vatican, ce sont les protagonistes eux-mêmes qui prennent la plume, le père Féhik Alamédu, Aratar Déochétor et le cardinal Vincent Brault.
La pluralité des points de vue sert le propos selon moi. Pour opérer une dé »monstration », il faut intégrer le plus de données possibles dans l’équation pour éviter de focaliser l’attention du lecteur sur un point de vue.
La pluralité des points de vue sert le propos selon moi. Pour opérer une dé »monstration », il faut intégrer le plus de données possibles dans l’équation pour éviter de focaliser l’attention du lecteur sur un point de vue.

Je pense que c'est en multipliant les vues subjectives qu'on arrive à une vue d'ensemble plus objective, et plus réaliste. Je ne voulais surtout pas que le narrateur juge, les personnages ont leur point de vue, mais la narration se devait d'être à l'écoute des personnages pour montrer sans juger.
La narrateur principal « le plus neutre possible » à très peu de recul sur ce qu’il décrit, il se contente de retranscrire les évènements sans les commenter, il lui arrive de rentrer dans la tête des protagonistes mais il le fait sans juger. Il est d’ailleurs aux prises avec des adolescents qui vivent l’instant présent en toute simplicité sans y insérer d’enjeux, en dehors de leurs besoins immédiats, à part peut-être Arthur, le meilleur ami humain de Lem, qui est plus cérébral que les autres.
Les enjeux véritables sont cachés, ce sont les aînés qui soulèvent le voile des apparences pour révéler le drame et sa véritable portée.
Les enjeux véritables sont cachés, ce sont les aînés qui soulèvent le voile des apparences pour révéler le drame et sa véritable portée.
Pourquoi avoir choisi de raconter une histoire dont les héros sont majoritairement des adolescents ?
L’adolescence à la force de la fraîcheur, de la découverte, de la conquête de l’autonomie et de soi. L’adulte est souvent blasé et aigri, négatif même. J’ai parfois l’impression que plus les hommes avancent en âge, plus ils se referment sur eux. Il est loin le temps des découvertes, l’adulte s’accroche à ce qu’il connaît déjà et se méfie du reste. L’adolescent est ouvert, il va vers l’Autre naturellement.
Dans Lem, ce sont les adolescents humains ou stryges qui créent les ponts entre les deux espèces.
Et je voulais décrire ce point de jonction entre des personnages différents qui acceptent d’apprendre les uns des autres, en faisant fi des a priori.
Dans Lem, ce sont les adolescents humains ou stryges qui créent les ponts entre les deux espèces.
Et je voulais décrire ce point de jonction entre des personnages différents qui acceptent d’apprendre les uns des autres, en faisant fi des a priori.
Lemashtu est un roman divertissant, avec beaucoup d’humour, du sexe, une intrigue, des rebondissements ? Tout ce que tu viens de dire apparaît plutôt entre les lignes ?
Oui, tout ce que je viens de dire est un peu complexe, alors que Lemashtu est une histoire qui cherche d’abord à divertir, à faire voyager dans un « ailleurs » proche de notre monde, avec quelques messages tapis derrière les apparences.

De façon générale, j’aime la complexité, j’intuite peu et j’analyse beaucoup. Avec Lemashtu, j’ai voulu aussi sortir de mes habitudes, sortir du concept pour aller vers le ressenti, la spontanéité, la « vraie vie » loin du monde des idées et des prisons d’abstraction.
J’ai voulu parler simplement de choses complexes, au lieu de faire l’inverse, expliquer de façon compliquée de trucs qui sont limpides d’eux-mêmes. Utiliser la métaphore et la pensée elliptique plutôt que de me lancer dans des explications interminables. J’ai d’ailleurs un peu le sentiment de me lancer dans une explication pénible pour dire que j’ai voulu être simple et limpide dans « Lemashtu » … chasser le naturel, il revient en rampant … (rires).
J’ai voulu parler simplement de choses complexes, au lieu de faire l’inverse, expliquer de façon compliquée de trucs qui sont limpides d’eux-mêmes. Utiliser la métaphore et la pensée elliptique plutôt que de me lancer dans des explications interminables. J’ai d’ailleurs un peu le sentiment de me lancer dans une explication pénible pour dire que j’ai voulu être simple et limpide dans « Lemashtu » … chasser le naturel, il revient en rampant … (rires).
De l’humour et du sexe … Oui. DU sexe, parce que Lemashtu fait son apprentissage, et que le charme insidieux qu’il diffuse alentour fait se pâmer toutes les jeunes filles qui passent à sa portée. Mais le sexe est aussi l’ultime rapprochement ; Lemashtu étant un voïvode, il est le seul de son espèce à pouvoir se reproduire avec des humains, malheureusement ceux-ci le considèrent souvent comme un monstre, alors qu’en même temps ils sont son seul espoir de bonheur. Le hic, c’est que le sexe est aussi le lieu de tous les dangers pour Lem qui va devoir apprendre à dompter sa prédation pour éviter de saigner à blanc sa bien aimée, Pauline.
De l’humour ; … du comique de situation décalé frôlant le mauvais goût. Plein ! Plein !
Les stryges sont différents, tantôt grandioses et tantôt ridicules, minables même. Par exemple, quand ils s’énervent, leurs crocs s’érigent, ce qui les fait « chochoter » (rires). Pour les stryges, ce n’est pas drôle, au contraire, car quand tu « chochotes » tu gagnes en agressivité (rires) alors que ça fait marrer les humains qui ignorent le pourquoi de ce défaut de prononciation temporaire … L’humour sert à souligner le décalage et la différence, car bien souvent, certes la différence fait peur mais elle attire aussi les moqueries. Qu’est-ce que je me moque de mes personnages dans Lem !
Les stryges sont différents, tantôt grandioses et tantôt ridicules, minables même. Par exemple, quand ils s’énervent, leurs crocs s’érigent, ce qui les fait « chochoter » (rires). Pour les stryges, ce n’est pas drôle, au contraire, car quand tu « chochotes » tu gagnes en agressivité (rires) alors que ça fait marrer les humains qui ignorent le pourquoi de ce défaut de prononciation temporaire … L’humour sert à souligner le décalage et la différence, car bien souvent, certes la différence fait peur mais elle attire aussi les moqueries. Qu’est-ce que je me moque de mes personnages dans Lem !
Il est beaucoup question de religion et de spiritualité dans Lemashtu ? Un message à ce sujet ?
Euh non …
Je ne suis pas croyante, j’ai même une incapacité pathologique à croire. Je ne prends jamais rien pour argent comptant, il faut toujours que je comprenne tous les tenants et les aboutissants du moindre truc. Par contre, j’ai des valeurs et je me suis très longtemps documenté sur les religions pour essayer de percer le mystère de leur contagion. J’ai acquis au fil des années une forme d’admiration pour les croyants car ils font preuve d’une confiance et d’un lâcher prise dont je suis incapable.
Je ne suis pas croyante, j’ai même une incapacité pathologique à croire. Je ne prends jamais rien pour argent comptant, il faut toujours que je comprenne tous les tenants et les aboutissants du moindre truc. Par contre, j’ai des valeurs et je me suis très longtemps documenté sur les religions pour essayer de percer le mystère de leur contagion. J’ai acquis au fil des années une forme d’admiration pour les croyants car ils font preuve d’une confiance et d’un lâcher prise dont je suis incapable.
Le commandement « Tu aimeras ton prochain comme toi même » m’a toujours intrigué, en raison du terme « prochain » qui me semble un peu réducteur. Je sais que ce point de vue est certainement consécutif à ma « difficulté sociale », je laisse très peu de personnes vraiment m’approcher, On peut dire que d’une certaine façon, je n’ai pas beaucoup de « prochains ».
Pour moi, le défi a toujours été d’aimer mon « lointain », non pas comme moi-même parce que je n’ai pas beaucoup de confiance en ce que je suis, mais tout simplement comme il le mérite.
Pour moi, le défi a toujours été d’aimer mon « lointain », non pas comme moi-même parce que je n’ai pas beaucoup de confiance en ce que je suis, mais tout simplement comme il le mérite.
S’il y a un message dans Lemashtu, c’est qu’il faut aimer son « lointain », Plus que "prendre sur soi" , il faut s’ouvrir à l'autre pour le comprendre jusque dans ses différences.
L’un des personnages principaux, le père Féhik Alamédû n’est pas un exemple de pacifisme, ni de tolérance. C’est un nosférat, une caste de stryge très violente et sanguinaire. Il est très loin de l’idée que l’on peut se faire d’un prêtre …
Féhik Alamédû, le parrain de Lemashtu, est prêtre par accident (tiens encore un accident !). C’est un ancien chevalier dragon, il était croisé à l’époque ou l’église catholique avait vocation à évangéliser de force, et se préoccupait peu de ceux qui figuraient dans ses rangs. Il a ensuite renié l’ordre pour devenir une machine à tuer pendant la deuxième guerre mondiale en échange de sa liberté. Il en veut aux hommes de lui avoir menti, de s’être servis de lui, alors que lui même est un fieffé menteur et se sert des autres.
Il a eu la chance de rencontrer un homme particulièrement ouvert et tolérant, le cardinal Vincent Brault qui a tout de suite compris que Féhik pouvait être un atout pour l’Eglise.
C’est Brault qui a fait de Féhik un prêtre, mais un prêtre qui ne peut officier qu’auprès des Stryges, qui ne peut rien pour le salut des hommes.
Féhik, de par sa nature, à une vision très belliqueuse de sa fonction. Dans le roman, Féhik décrit sa mission avec des termes peu catholiques :
« Je suis un mal plus grand que le mal oeuvrant pour le bien » « Le seigneur est mon berger et je suis le chien qui veille sur son troupeau » et « Qui fait peur au loup est un bon berger ».
Et on peut compter sur Féhik pour faire peur au loup … Il est le stryge idéal pour défendre les siens au sein de l’institution Vaticane.
Féhik est un personnage ambigu. Pour le cerner, il faut éviter de l’écouter et se concentrer sur son action, car si ses paroles le trahissent, ses actes démontrent une loyauté sans faille à un idéal chevaleresque.
Il a eu la chance de rencontrer un homme particulièrement ouvert et tolérant, le cardinal Vincent Brault qui a tout de suite compris que Féhik pouvait être un atout pour l’Eglise.
C’est Brault qui a fait de Féhik un prêtre, mais un prêtre qui ne peut officier qu’auprès des Stryges, qui ne peut rien pour le salut des hommes.
Féhik, de par sa nature, à une vision très belliqueuse de sa fonction. Dans le roman, Féhik décrit sa mission avec des termes peu catholiques :
« Je suis un mal plus grand que le mal oeuvrant pour le bien » « Le seigneur est mon berger et je suis le chien qui veille sur son troupeau » et « Qui fait peur au loup est un bon berger ».
Et on peut compter sur Féhik pour faire peur au loup … Il est le stryge idéal pour défendre les siens au sein de l’institution Vaticane.
Féhik est un personnage ambigu. Pour le cerner, il faut éviter de l’écouter et se concentrer sur son action, car si ses paroles le trahissent, ses actes démontrent une loyauté sans faille à un idéal chevaleresque.
Tous les personnages dans Lem sont plus ou moins ambigus, Lemashtu n’est pas en reste même si son côté obscur est plus subtil …

Au début du roman, on peut se demander pourquoi Féhik et Aratar sont si sévères avec Lem et au fur et à mesure, on comprend mieux leur comportement.
En résumé, si on met de côté tout le tralala tsoin tsoin vampirique, c’est quoi Lemashtu ?
Lors d’une interview, Arno Mothra m’a proposé un qualificatif qui me paraît juste. Pour lui, Lemashtu est une fable philosophique ancrée dans une thématique fantastique.
Philosophique ; parce que Lem propose une réflexion sous-jacente d’ordre philosophique ; la tolérance, la monstruosité, où commence l’humain, à partir de quand pour la science, pour la religion ou plus généralement dans le regard de l’Autre on peut se reconnaître comme humain. Il y a aussi des aspects plus psychologique voire psychiatrique sur le renoncement, la lutte contre la psychose … Des aspects plus sociaux : sur l’intégration et les concessions qu’elle nécessite, sur l’importance de l’éducation, sur l’exil, sur la culture, sur l’identité des peuples victimes de génocides.
Le tout distillé dans un récit de Fantasy urbaine, tinté d’uchronie.
Le tout distillé dans un récit de Fantasy urbaine, tinté d’uchronie.
Lemashtu est une métaphore, une caricature qui passe par le monstre pour mieux parler de l’humanité en général. Lemashtu, c’est Le Petit Prince au pays d’Elephant Man pour reprendre encore une fois un parallèle fait par Arno Mothra …
Une phrase du roman pour résumer 400 pages ?
La maxime secrète des chevaliers dragons : Pour que le Dragon ne devienne jamais Diable… Cette maxime résume tout ce pourquoi le prêtre / chevalier dragon Féhik Alamédu se bat et tout ce que le jeune Lemashtu devra affronter.