Censure et polémiques rétrogrades qui poussent les écoles à bannir certains livres pour protéger l'esprit de leurs enfants ? On se croirait dans un blockbuster américain mais c'est pourtant la réalité.
Après Margaret Atwood et bien d'autres en mai dernier, la censure des livres considérés comme « dangereux » ou « obscènes » ( et évoquant souvent le racisme, l’homophobie, l’homosexualité, la bisexualité, la liberté de genre ou qui poussent à réfléchir sur notre société) sont retirés et bannis des bibliothèques scolaires du Missouri par exemple.
Cette vague de censure qui a commencé en 2021 se fait de plus en plus radicale. Elle résulte d'une véritable croisade pour la "pureté" menée par des conservateurs et des politiciens américains. On compte actuellement plus de 729 tentatives d'interdiction de 1597 livres, selon l'American Library Association.
Cette fois, ce sont les fans de comics qui se désolent. Souvent violent mais dénonçant de réels problèmes de société, ce genre littéraire est la nouvelle cible de l'état du Missouri. Batman : White Knight de Sean Murphy (critique symbolique des justiciers masqués et de la notion même de justice) et le cultissime Watchmen d'Alan Moore et Dave Gibbons, ont été supprimés sans remords des étagères des bibliothèques. Ces comics sont pourtant des figures emblématiques de l'histoire et de la culture américaine puisque ces histoires de super-héros ont commencé aux USA dans les années 50 et sont devenus des outils sociaux-culturels extrêmement populaires.
Malheureusement, difficile d'appeler au bon sens et d'arrêter cette vague qui nous ramène à Fahrenheit 451 puisque le droit de censure résulte d'un amendement mis en place dans certains états. La Senate Bill 775 indique que toute œuvre mise à disposition des étudiants dans les écoles ne doit pas posséder de contenu explicite sous forme de photos, dessins, vidéos ou images générées par ordinateur." un réglement strict qui, si on l'applique au pied de la lettre, met déjà sur le carreau une bonne partie des romans de SF, de fantasy et autres fictions qui permettent aux jeunes d'accéder au plaisir de la lecture et de se cultiver. En cas de refus des personnels scolaires le risque encouru est une amende de 2000 dollars et un an de prison, en plus d'une polémique publique qui entacherai sans aucun doute la réputation de l'établissement scolaire, ainsi que des individus et de la commune concernée.
Comme l'explique l'American Civil Liberties Union of Missouri (ACLU) qui se bat contre ce radicalisme, la mise en vigueur de cette loi n'est rien d'autre qu'un moyen détourné de "mettre sous silence les points de vue des communautés marginales en préconisant de retirer les livres comprenant des auteurs ou personnages non blancs et LGBTQ+."
Une adaptation en BD du Journal d'Anne Frank en août 2022 au Texas, Maus, roman graphique sur la Shoah en février dernier, The Handmaid's tale version roman et version BD, All Boys Aren't Blue de George M. Johnson ou encore Gender Queer de Maia Kobabe. Cette censure touche autant des publications récente à destination justement du jeune public, que des textes plus classiques. Paradoxalement, beaucoup de ces titres dénoncent eux-mêmes certaines formes de censure et de conservatisme radical.
Des scènes grotesques et inimaginables se déroulent donc dans les établissements de la maternelle à l'université et chaque bibliothécaire se retrouve à effeuillé chaque roman de son catalogue pour ne pas risquer d'enfreindre la loi comme l'explique la présidente de la Missouri Association of School Librarians. Heureusement, quelques opposants réussissent à capter l'attention de l'opinion publique pour tenter de repousser cette vague de censure aberrante au XXIème siècle, commencée en février où deux étudiants ont attaqué en justice la Wentzville School District pour avoir banni huit livres écrits par et sur la communauté queer, et d'autres minorités.
Cette réalité effrayante n'est pour le moment pas d'actualité chez nous et vous pouvez retrouver tous les titres cités dans cet article dans les bonnes librairies. Cependant, c'est un événement insidieux qui tente de se faire discret dans les médias mais qu'il ne faut pas oublier, au risque de voir cette idéologie s'étendre et contaminé peu à peu les esprits d’autres gouvernements. Continuons à lire et à profiter de la culture qui nous est offerte, mais surtout à nous informer et à mettre en avant ce genre d'informations.