Battle Royale est le premier roman de l’auteur japonais Takami Koushun, qui travaille actuellement à un second ouvrage. Battle Royale a remporté un grand succès aussi bien au Japon qu’en Occident, ce qui a conduit à plusieurs adaptations, en film et en manga principalement.
Bienvenue dans le Programme
L’histoire se déroule dans la République de Grande Asie, dictature militaire qui a remplacé l’Empire du Japon à la fin de la seconde guerre mondiale. Afin de maintenir l’ordre et l’obéissance du peuple, le gouvernement organise tous les ans le Programme, présenté comme un « jeu », qui implique une classe de troisième dans chaque département. Les élèves sont littéralement « enlevés », souvent au cours d’un voyage de classe, déportés sur un terrain vide – en l’occurrence une île – et doivent s’entretuer. Le dernier survivant gagne un autographe du chef de l’Etat et une pension à vie.
Le roman met en scène, sur une île, le déroulement du Programme au sein de la classe de troisième tirée au sort dans le département de X. Nous suivons les personnages récurrents dans leur fuite, leurs stratégies pour tenter de s’en sortir ou leur adhésion pleine et entière au Programme.
Anticipation et réalité alternative
L’action du roman, qui se situe dans une réalité alternative, est bien construite : le rythme ne faiblit pas, alternant scènes d’action pure, réflexions politiques ou flash-back pour nous introduire dans le passé des personnages. Les réactions des élèves soumis à l’intense pression du Programme sont bien analysées : on comprend pourquoi untel se met à paniquer, pourquoi un autre choisit de participer plutôt que de s’allier avec d’autres camarades... pourquoi le Programme, qui paraît si horrible au début, fonctionne finalement.
Les détails de la vie quotidienne d’un collégien – téléphone portable, club de sport ou sorties – évoqués dans les souvenirs des personnages, sont également là pour soutenir l’intrigue et la replacer dans un contexte de réalité déformée par l’horreur du jeu.
Manque de crédibilité
Cependant, on peut déplorer le manque de crédibilité de certains personnages ou de certaines situations, alors même que le roman se veut une description réaliste d’une horreur devenue banale. Les élèves, sensés n’avoir que quatorze ou quinze ans sont capables d’avoir de profondes réflexions sur la vie ou sur la politique de leur pays, certains ont un passé très lourdement chargé – hacker, prostituée ou musicien surdoué – beaucoup sont des champions de sport… Le tout concentré dans une seule classe de troisième. On ne peut s’empêcher de penser que ceux-ci sont plus dimensionnés pour le manga que pour le roman, leurs capacités physiques ou intellectuelles étant clairement hors du commun et les rapprochant des « héros » ou des « méchants » classiques, sans rapport avec des collégiens ordinaires.
On peut par ailleurs regretter des faiblesses dans la traduction, ainsi que des coquilles nombreuses qui ne facilitent pas la lecture. Je tiens aussi à souligner un manque de clarté certain dans la présentation des personnages - tantôt nommés dans l'ordre japonais nom de famille/prénom, tantôt dans l'ordre français - d'autant que ceux-ci ont des patronymes typiques, ce qui les rend plus difficiles à retenir pour un lecteur occidental.
Malgré ses faiblesses, c'est un roman dépaysant, idéal pour occuper un week-end ou tout simplement pour se changer les idées.