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Brut

Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/07/2011  -  livre
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Brut

Dalibor Frioux enseigne la philosophie à l'université Charles de Gaulle Lille-3 et a publié de nombreux essais. Il publie son premier roman en 2011, Brut.
 
Ce roman "prospectif" se déroule dans un futur proche mais non défini. L'auteur place les évènements en 20XX. Depuis le Black February qui a vu commettre trois énormes attentats non revendiqués, l'insécurité planétaire a fait exploser le prix du pétrole. Les nations se sont recroquevillées sur elles-mêmes. Les voyages par avion sont devenus hors de prix. La réduction des dépenses énergétiques s'est imposée au monde non pour des raisons idéologiques mais économiques.
 
Dans ce nouveau monde, la découverte d'une énorme réserve pétrolière dans les eaux norvégiennes a fait de ce pays l'équivalent d'un Emirat d'aujourd'hui. La découverte de ce paradis du Nord se fait en suivant un groupe de personnages éclectiques dont un philosophe chargé de dépenser vertueusement cette manne pétrolière, une ancienne mannequin traumatisée par les attentats du Black February souhaitant tout régenter, un dirigeant du Fond monétaire pétrolier cynique, un ancien plongeur malade et enfin une jeune femme qui réussit en tout mais qui ne trouve pas sa place dans ce paradis et qui veut se couper des vicissitudes du monde. Tout au long du livre, cet Eden est soumis à de fortes tensions idéologiques et politiques exacerbées par l'approche des élections législatives.
 
Comment ne pas gâcher tant de richesses ?
 
N'attendez pas un thriller politique, une enquête policière ou journalistique. Les personnages sont un prétexte et des vecteurs pour faire vivre et découvrir cette possible société d'un futur proche.
 
Tout ce qui est abordé dans ce livre tourne autour de la responsabilité et l'utilisation d'une manne pétrolifère estimée à 174 % du PIB. L'auteur nous questionne sur la place du salaire et du labeur dans une société où tout peut être offert à sa population grâce au pétrole. La Norvège peut-elle imposer aux autres états/peuples/entreprises sa notion de Bien universel sur le seul prétexte de sa richesse ? Quel discours écologique tenir et imposer aux autres quand la richesse provient d'une énergie destructrice ? Quel accueil faire aux immigrés des pays les plus pauvres ? Et surtout quel gâchis engendre cette abondance de biens ?

Une belle écriture mais un rythme branché sur courant alternatif
 
Le livre est bien écrit avec un style légèrement changeant en fonction des personnages suivis ou des situations décrites. Les dialogues sont bien menés et immersifs. Les descriptions et pensées des personnages sont souvent illustrés de métaphores drôles, dérangeantes et/ou pertinentes. Le monde imaginé est bourré de détails lui donnant du corps. On passe d'un pilote d'avion de ligne faisant aussi office de critique littéraire des poèmes de ses passagers, à un site Web diffusant, tel un clip, l'ensemble des salaires des travailleurs norvégiens, à une drôle de définition de l'artiste, à l'obligation d'avoir un psychiatre comme médecin référent ou encore à d'immenses maisons de retraite sur les bords de la Méditerranée quasi-obligatoires pour les personnes âgées du pays. L'auteur nous livre des moments très beaux, très marquants, comme cette scène où un groupe d'experts échange dans le noir pour choisir le nom d'un nouveau champ pétrolier. Cependant, malgré toutes ces qualités, l'ennui n'est pas loin. Cela vient du fait qu'il n'y pas d'effet d'entraînement à la fin d'un chapitre poussant à lire le suivant. Le manque d'intrigue y est sûrement pour quelque chose.
 
Brut est un bon livre mais sa prise en main n'est pas facile. L'auteur, à trop vouloir  montrer son monde et styliser son écriture, dilue le rythme et perd le lecteur. Ce qui est dommage car les différentes intrigues qui parsèment le roman auraient pu donner le souffle nécessaire si elles avaient été approfondies.

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