- le  

Butcher Bird

Jean-Pierre Pugi (Traducteur), Lasth (Illustrateur de couverture), Richard Kadrey ( Auteur)
Langue d'origine : Anglais US
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 05/04/2012  -  livre
voir l'oeuvre
Commenter

Butcher Bird

Richard Kadrey est écrivain et photographe. Auteur rare - cinq de ses sept romans ont moins de dix ans -, il a déjà été publié deux fois en France avant Butcher Bird, écrit en 2007 : Métrophage et Kamikaze L'Amour. Il s'est lancé depuis 2009, à raison d'un volume par an, dans une nouvelle série de fantasy urbaine, Sandman Slim. Le premier volume est attendu en France, également dans la collection Lunes d'encre, pour 2013.
 
Welcome to Demon City
 
Spyder Lee est tatoueur, fana d'Orson Welles et d'occultisme. Après s'être fait plaquer par sa copine, il décide de se saouler pour oublier. Un soir, après une discussion avec Loulou, sa meilleure amie, sur la pire manière de mourir, il se fait agresser par un démon à la sortie d'un bar. Alors que celui-ci est sur le point de l'achever, il est sauvé in extremis par la canne-épée de Pie-grièche, une aveugle que le handicap ne semble nullement gêner. Les ennuis ne font alors que commencer. Le lendemain, dans son San Francisco natal se côtoient désormais humains, anges, démons et autres créatures hybrides cauchemardesques... que personne ne semble remarquer. Même Loulou a perdu son apparente normalité. Dans cet univers complètement chamboulé, une seule personne peut l'aider : Pie-grièche. Prêt à tout pour retrouver son ancienne vie, il se retrouve embarqué dans une quête qui pourrait bien le conduire... jusqu'en Enfer.
 
Voyage au pays de la peur
 
Spyder Lee fait partie de ces losers que la littérature sait si bien décrire : ancien voleur de voitures reconverti dans le tatouage, il a coupé les ponts avec son père qui ne lui a jamais pardonné de préférer Orson Welles à James Dean. Fortement attaché à son amie Loulou, lesbienne et pierceuse de son état, il papillonne de filles en filles mais ne supporte pas de s'être fait largué par sa dernière conquête, Jenny. Sa rencontre avec Pie-grièche, cliché vivant de l'héroïne sexy et au fort caractère propre aux livres de fantasy urbaine - la cécité en plus -, ne pouvait produire que des étincelles. Car tout y passe : l'artefact contenant une magie aussi puissante qu'ancienne que tous convoitent, éternelle guerre entre le Ciel et l'Enfer, panoplie de créatures difformes et parfois grotesques dignes d'une série B et même l'amant traître qui ne cherche qu'à assouvir sa soif de pouvoir. Et pourtant, rien ne semblait prédestiner Spyder à participer à cette quête de grande envergure : toujours un peu paumé, jamais vraiment à sa place, on finit par s'attacher à ce type qui cherche jusque dans le Pandémonium à se raccrocher à quelques brins de normalité.
 
Butcher Bird possède tous les atouts d'un excellent divertissement : humour ravageur, dialogues surréalistes mais décapants (certains échanges ne sont pas sans rappeler les discussions mythiques de John Travolta et Samuel L. Jackson dans le Pulp Fiction de Tarantino), action sans temps morts et personnages aussi caricaturaux que déjantés. Sans oublier les nombreuses références démonologiques, qui apportent au roman une touche d'érudition et une profondeur bienvenues. Entre l’aérostat de la Fraternité séraphique, réplique à grande échelle d'un coeur enflammé ceint d'épines, les travaux de réhabilitation du Pandémonium pour construire un Ciel sous terre et un Lucifer aussi blasé que son homologue décrit par Glen Duncan dans Moi, Lucifer, la visite dépeinte de l'Enfer par Richard Kadrey mâtine d'un léger voile d'exotisme des images convenues. Les personnages ne sont pas les seuls à risquer l'inattendu au détour d'une page : entre inventions loufoques et propos sérieux, le lecteur ne sait jamais vraiment à quoi s'attendre des prochaines révélations.
 
Le roman n'échappe pourtant pas à quelques faiblesses. Un début un peu poussif, qui ne décolle vraiment (sans mauvais jeux de mots) qu'avec la bataille entre aérostats et l'arrivée près de la ville des souvenirs, Bérénice (par ailleurs, l'un des moments les plus intéressants dans le roman). On voit également arriver certains rebondissements à des kilomètres et le véritable effet de surprise se fait parfois attendre. Mais ne boudons pas notre plaisir : l'originalité n'est pas le point fort de Butcher Bird. C'est dans les détails que l'on apprécie à sa juste valeur ce roman.
 
Au final, si Butcher Bird n'est pas le chef-d'oeuvre de 2012, il n'en reste pas moins un divertissement de haute qualité, exemple parfait de ce que la fantasy urbaine peut faire de meilleur. Comme le dit si bien le dicton, "c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes". Et on en redemande !

Genres / Mots-clés

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?