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CoCyclics : bêta-lecture et conseils d’écriture - octobre 2015
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CoCyclics : bêta-lecture et conseils d’écriture - octobre 2015

 La chaîne du livre 
 
(source : book chain challenge - Seattle book library, 2013)
 
Auteur, éditeur, libraire, bibliothécaire ou simple lecteur, chacun participe à sa manière à ce que l’on nomme la « chaîne du livre ». 
 
Ce mois-ci,  nous aborderons le fonctionnement de cette chaîne. Une meilleure compréhension de son processus vous permettra de mieux en maîtriser les rouages.
 
Une double définition, l’une économique, l’autre militante
 
Sous un angle strictement économique, la chaîne du livre fait intervenir une suite d’acteurs (certains obligatoires, d’autres facultatifs) et un ensemble d’étapes, qui vont de la production du manuscrit par l’auteur jusqu’à la commercialisation du livre, produit culturel. L'éditeur constitue l'acteur central qui fait alors le lien entre les différents maillons de la chaine.
 
Chacun des acteurs de cette chaîne perçoit une partie du prix de vente du livre. Ce partage s’effectue selon des contraintes légales spécifiques au secteur.
 
Sous un angle « symbolique », la chaîne inclut une représentation du livre qui dépasse la sphère économique. 
 
Le livre n’est plus considéré comme un produit mais comme une œuvre intellectuelle
 
Son statut d'œuvre entraine l'intervention d'acteurs supplémentaires chargés des activités de création, de diffusion et de médiation. La chaîne désigne alors un réseau de solidarités autour du livre. Les différents maillons de la chaîne sont présentés comme des passeurs de livres, qui trouvent leur force dans leur cohésion : soutien d'événementiels littéraires par les éditeurs et les collectivités ; promotion du livre et des auteurs dans les bibliothèques, les blogs et webTVs de lecteurs et détaillants ; opérations de "bookcrossing" ; projets d'édition visant à élargir l'accès à la lecture (notamment auprès des personnes en situation de handicap ou de précarité), etc.
 
Les deux définitions de la chaîne ne sont pas opposées. Elles cohabitent, la seconde agissant le plus souvent afin de prévenir les risques économiques perçus dans l’industrie du livre. Par exemple, la loi du 10 août 1981, ou Loi Lang, a pour objectif de maintenir l'existence d'un réseau de librairies indépendantes qui se trouvent menacées par le développement des grandes surfaces du livre. Cette loi précise notamment le principe du prix unique  : en France, un livre neuf vendu doit avoir un prix unique fixé par l'éditeur, qui doit être imprimé sur la couverture du livre. Le détaillant est alors autorisé à proposer une réduction allant jusqu'à 5% du prix indiqué sur la couverture lorsqu'il vend le livre aux particuliers, et jusqu'à 9% du prix lorsqu'il vend aux collectivités. Ce prix unique limite la concurrence sur le prix de vente au public afin de protéger la filière et d'assurer l'égalité des citoyens devant le livre. 
 
Dans la même logique, un dispositif de soutien financier à la librairie indépendante (ADELC) a été mis en place par des éditeurs de littérature générale, et plusieurs bourses locales ou nationales sont proposées afin de soutenir les créateurs (nous en reparlerons dans une prochaine chronique).
 
Les différents acteurs de la chaîne du livre
 
- L’auteur : a priori, lui, vous le connaissez ! C’est lui qui écrit un manuscrit et cherche à le faire publier. Il se trouve au début de la chaîne. Ses œuvres sont protégées par le droit d’auteur, qui rassemble un droit moral et un droit patrimonial (ou pécuniaire). Le plus souvent, en France, l’auteur négocie seul ses contrats d’édition avec l’éditeur. Il gagne en moyenne 6 à 12% du prix de vente du livre.
 
- L’agent littéraire : encore peu présent en France, l’agent est un intermédiaire à qui l’auteur délègue la négociation des contrats d’édition.
 
- L’éditeur : comme dit plus haut, l’éditeur est le pivot de cette chaîne du livre. Sans lui, pas de publication à la sortie. Au sens économique, il est le véritable producteur du livre. Il sélectionne les textes pour la publication, il les met en forme (correction éditoriale, contact avec d’autres acteurs tels que les illustrateurs, les traducteurs,…) et les fait imprimer. Enfin, il en coordonne la promotion, la diffusion, la commercialisation. Il gagne en moyenne 12 à 21% du prix de vente du livre.
 
- Le fabricant (ou imprimeur) : cet acteur est le plus souvent un prestataire en contrat avec l’éditeur. Son travail intervient dès que le manuscrit a été mis en forme et est prêt à être publié. Le fabricant s’occupe de l’impression et du façonnage, c’est-à-dire la découpe des pages et la reliure des cahiers. Il gagne 12 à 20% en moyenne du prix de vente du livre.
 
- Le diffuseur : avec une ou plusieurs équipes de représentants, le diffuseur prend en charge le démarchage des points de vente et la mise en place du livre (c’est-à-dire le nombre d’exemplaires commandés par les différents points de vente avant publication). Le diffuseur fait le lien entre l’éditeur et les librairies, en présentant à ces dernières les nouveautés éditoriales. Il gagne 5 à 8% en moyenne du prix de vente du livre.
 
- Le distributeur : cet acteur se charge de la gestion de stocks de livres ainsi que leur emballage, leur acheminement vers les points de vente. Le distributeur répond aux commandes (que ce soit pour les nouveautés ou les anciens titres du fonds) et s’occupe également du recouvrement des factures et de la gestion des retours. Il gagne 10 à 12% en moyenne du prix de vente du livre.

- Le libraire (ou détaillant) : les points de vente peuvent prendre des formes très différentes : librairie de quartier, hypermarché, grande surface culturelle, maison de la presse, site internet… Le rôle du libraire est d’accueillir les lecteurs et de proposer les livres à la vente dans les conditions prévues par la loi. Il gagne 32 à 38% en moyenne du prix de vente du livre.
 
- Enfin, tous ces acteurs ne sont rien sans le dernier, celui qui se trouve en bout de chaîne : le lecteur. C’est pour lui  et l’objet de son affection, le livre, que la chaîne tourne ! Qu’il soit un particulier ou une collectivité (bibliothèque, administration, etc.), le lecteur est aussi le seul rôle endossé par tous les autres acteurs de cette chaîne.
 
(source : SNE)
 
(source : La Charte des auteurs et des illustrateurs jeunesse, 2015)
 
Le numérique : Une chaîne du livre en mutation
 
Aujourd’hui, le livre numérique représente plus de 6% du chiffre d’affaires des éditeurs français, contre 4,1% en 2013 (Repères statistiques SNE 2014-2015). L’édition SFFF est particulièrement concernée, car la littérature de genre occupe une place importante dans les ventes de titres numériques, et les lecteurs de littérature de l’imaginaire se tournent facilement vers ce support (Etude Babelio sur les lecteurs de l’imaginaire, juin 2015).
 
Aussi, le numérique engendre des bouleversements dans la chaîne du livre telle que nous la connaissons actuellement.
 
Les éditeurs s'adaptent peu à peu à ce support. Ils travaillent avec de nouveaux acteurs dans la chaîne, afin d’enrichir le livre numérique de contenus interactifs. Ces dernières années, des éditeurs exclusivement numériques (appelés Pure players) ont vu le jour, et l’impression à la demande (ou POD, pour "print on demand", qui est un mode d'impression numérique très rapide, privilégié pour de petits tirages) s’est aussi développée.
 
Une chaîne numérique simplifiée permet désormais l’auto-édition (que nous détaillerons dans une prochaine chronique) : ne subsistent alors dans cette chaîne que l’auteur, le diffuseur et le lecteur. 
 
De plus, grâce aux plateformes de financement participatif, que ce soit pour de la publication numérique ou papier, les éditeurs peuvent maintenant s’adresser directement aux lecteurs, sans solliciter les diffuseurs ou les détaillants. 
 
Dans un monde de plus en plus concurrentiel, avec l’importance accrue du numérique, auxquels s'ajoutent les débats actuels autour du droit d’auteur et la rémunération de ses différents acteurs, la chaîne du livre est en mutation perpétuelle. À la fois maillage économique et réseau de solidarité culturelle, elle se transforme au gré des évolutions de la littérature mais aussi et surtout des lecteurs, car c'est avant tout pour eux et grâce à eux qu'elle continue d'exister.
 
A bientôt pour une nouvelle chronique made in CoCyclics !
 
 

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