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Dossier Libraire : L'Atalante à Nantes
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Dossier Libraire : L'Atalante à Nantes

Actusf : Quels chemins avez-vous suivis pour devenir libraire et vous occuper du rayon “Imaginaire” ?
Gwen Le Bars : J'ai commencé il y a une quinzaine d’années. A l'époque, je faisais des études d'archéologie et pour les payer, je travaillais à mi-temps dans une librairie. Et finalement, vu les perspectives d'emplois en archéologie, et puisque le travail de libraire me plaisait, je me suis orienté vers ce secteur. J'ai donc appris le métier sur le tas, notamment au Furet du Nord à Lille. Je me suis occupé successivement des rayons universitaire, informatique, histoire, sciences et médecine... Puis j'ai eu des postes de direction dans plusieurs librairies jusqu'à ce que les hasards de la vie m'amènent à travailler dans l'Imaginaire chez l'Atalante. Ce qui tombe bien puisque j'étais déjà un gros lecteur de science-fiction,de fantasy, et de polar également.

Actusf : Parlez-nous de votre librairie et de sa taille. Pouvez-vous nous la présenter ?
Gwen Le Bars : La librairie de l'Atalante a été fondée il y a trente ans à Nantes par Pierre Michaut. Pierre est un passionné des mauvais genres. Il a ressenti assez vite un certain vide du coup il a fait de l’édition. Elle est spécialisée en cinéma, policier et littérature de l’imaginaire. Aujourd'hui nous avons une surface totale de 90 m² dans laquelle nous avons essentiellement des livres relevant de l'Imaginaire, du policier et du cinéma.

Actusf : Comment choisissez-vous les titres que vous prenez en rayon ?
Gwen Le Bars : Comme tous les libraires, je travaille avec des représentants qui me proposent leurs catalogues. Je travaille bien sûr aussi avec des éditeurs en direct. Je fais mon marché en fonction du potentiel de vente dans la librairie et aussi en fonction de mes goûts.


Actusf : Quels sont les titres qui fonctionnent le mieux ?

Gwen Le Bars : Notre lectorat est historiquement plutôt porté sur la science-fiction et le polar. J'aime bien les auteurs qui permettent de faire la passerelle entre les deux genres comme Thomas Pynchon ou Sean Steward. J'aime les livres inclassables. Après question chiffres, les coups de cœur font beaucoup pour les ventes. On a dû vendre 250 exemplaires de Janua Verra de Jean-Philippe Jaworski aux Moutons Electriques, 200 ex du Déchronologue de Stéphane Beauverger en grand format chez La Volte et plus d'une centaine en poche chez Folio SF... Et puis bien entendu chez nous il y a tous les livres des éditions de l'Atalante. Il ne faut pas oublier que nous sommes libraires et éditeurs. Les lecteurs qui viennent nous voir veulent aussi voir notre catalogue. (Certains d’ailleurs viennent de loin !)

Actusf : Y a-t-il des genres qui se vendent mieux que les autres ?
Gwen Le Bars : Chez moi la science-fiction marche bien. Même chose donc pour le "transgenre" à condition qu'on mette ces livres bien en avant... C’est le cauchemar des grandes surfaces dites culturelles qui ne savent pas où mettre ce genre de bouquins (rires). Et puis les gens qui lisent de la SF sont curieux, et chez nous, ils nous font plutôt confiance pour le choix de leurs livres.

Actusf : D'après vous, quelles sont les raisons qui font qu'un livre marche bien dans votre librairie ? Quelle est la part de votre conseil, de la couverture, de l'importance de l'auteur ou du "buzz" autour du livre ?
Gwen Le Bars : Essentiellement la prescription. Je l'ai dit, les gens viennent chez nous parce qu'ils nous font confiance. Ils savent qu'on est capable de les renseigner. Il y a les couvertures bien sûr mais c’est surtout le conseil qui l’emporte. Le buzz peut marcher mais c’est rare. Lunes d’Encre y arrive parfois. Les forums aident beaucoup. Et certains prix font encore vendre chez nous comme le prix Hugo. Le GPI provoque quelques ventes, mais pas à chaque fois.

Actusf : On parle souvent d'un déclin de la science-fiction par rapport à un essor de la fantasy. Avez-vous l'impression que c'est le cas ? Est-ce que la SF se vend moins bien ces dernières années ? Et la Fantasy ?
Gwen Le Bars : Non. Pas chez moi. Mes clients regrettent même qu’il n’y ait plus assez de science-fiction. Mais je ne suis pas représentatif, chaque librairie a sa propre clientèle. Le dernier Robinson marche bien. Idem Bordage ou Weber... Mais c’est sans doute atypique. Est-ce que la Fantasy se vend bien parce que plus facile à vendre ?

 

Actusf : Avez-vous l'impression dans votre librairie que les acheteurs de Bit Litt', de science-fiction et de fantasy sont les mêmes lecteurs ?
Gwen Le Bars : Certains oui mais parce que ce sont de gros lecteurs.

Ils ont besoin de leur came (rire). Parfois, lorsqu'ils sont en manque de science-fiction, ils lisent d’autres trucs. J'ai aussi des jeunes femmes qui lisent de la bit lit et qui peu à peu découvrent d'autres livres. Mais c’est le rôle du libraire de leur proposer d’autres types de livres. Quand ça marche, c’est une ouverture sur un autre monde. Pareil pour les lecteurs de fantasy. Parfois, ils en ont marre des livres interchangeables et s'éloignent un peu de leur genre de prédilection pour aller vers d'autres rivages.

Actusf : On parle parfois de séparer, dans les rayons, la science-fiction de la fantasy. Etes-vous pour ou contre ? Et pourquoi ?
Gwen Le Bars : Contre. Je suis pour le mélange. J'aime faire des passerelles. (rire).

Actusf : Comment voyez-vous la multiplication des titres et des éditeurs ? Est-ce que cela est un problème pour vous ?
Gwen Le Bars : Oui quand la qualité moyenne baisse. Tant mieux s’il y a plein de bons bouquins. Mais ce n’est pas franchement le cas. Il y a des éditeurs qui produisent pour produire, et dans la quantité pas mal de livres plutôt moyens... Certains éditeurs essaient d’occuper de l’espace. L’Atalante a plutôt choisi de réduire un peu la voilure pour mieux travailler ses parutions... Je trouve cette décision à contre courant courageuse.

Actusf : Comment gérez-vous votre "fonds" ? Pouvez-vous avoir du fonds dans votre librairie ?
Gwen Le Bars : Oui parce que nous sommes une librairie spécialisée. Nous avons des catalogues entiers en rayon comme Pocket ou Rivage Polar. C’est notre spécificité. Et pour certains éditeurs, le fonds tourne beaucoup... Mais il faut vendre des nouveautés pour alimenter ce fonds.

Actusf : Votre métier a-t-il évolué ces dernières années ? Qu'est-ce qui a changé ?
Gwen Le Bars : Tout a changé. D'abord il y a aujourd'hui une formation de librairie. Cela implique une certaine professionnalisation du métier. Et c’est bien. Après, dans le monde de la librairie, ça bouge beaucoup. Les conditions se dégradent avec les gros distributeurs. Désormais on ne prend plus tout ce qui sort. On est obligé de faire des choix.

Actusf : Quelles ont été les meilleures ventes en 2010 ?
Gwen Le Bars : Dans le catalogue maison, nos meilleures ventes on été Pierre Bordage (La Fraternité du Panca 3), Allez les mages de Sir Terry Pratchett et bien sur l’excellent Cygnis de Vincent Gessler. Dans les autres catalogues, Janua Vera et Gagner la guerre de Jean Philippe Jaworski. Et puis l’excellent Déchronologue de Stéphane Beauverger aux éditions de la Volte et Fils des Brumes de Brandon Sanderson.


Actusf : Quels ont été vos derniers coups de cœur de lecteur ?
Gwen Le Bars : Le Cimetière de Prague d’Uberto Eco. Et puis Rêves de gloire de Roland C.Wagner, un véritable tour de Force.  Quant au Fleuve des Dieux de Ian McDonald, il m’a vraiment impressionné...

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