Le film Edge of Tomorrow, avec Tom Cruise en vedette et dont la sortie est prévue dans les salles le 4 juin 2014, est en fait l’adaptation d’un roman japonais de Hiroshi Sakurazaka, qui a recueilli suffisamment de succès pour être également adapté en manga. Les éditions Kazé proposent en français la traduction du roman pour le 7 mai, et celle du manga pour le mois de juin. L’occasion pour nous de revenir sur le phénomène des light-novel, avant de parler plus précisément du roman All you need is kill.
Retour sur les light-novel
Qu’est-ce qu’un light-novel ? Pour dire les choses simplement, c’est l’équivalent des romans young adult, créneau qui s’est développé récemment en France, mais qui existe en tant que tel au Japon depuis les années 1970. Le terme a quant à lui fait son apparition dans les années 1990, et s’est imposé comme un terme générique pour désigner les romans écrits pour un public adolescent. Ce sont des ouvrages relativement courts (autour de 200 pages) qui fonctionnent sur le même principe que les mangas : des séries plus ou moins longues publiées dans un premier temps dans des revues spécialisées sous forme de feuilleton, avant de sortir en livre de poche. Dotés d’illustrations de mangakas connus, c’est un véritable média de masse avec des milliers de titres par an, et dont les têtes d’affiche sont régulièrement adaptées en animé ou en manga. À titre d’exemple, Les Chroniques de Lodoss, Slayers, ou encore Orphen étaient des romans avant d’être des dessins animés.


On vous invite à jeter un œil aux interviews de quelques auteurs publiées en 2009 sur notre site, notamment celle de Nozomi Ohmori qui donne quelques détails sur ce phénomène, les autres auteurs nous faisant aussi part de leurs impressions :
L'interview de Nozomi Ohmori.
L'interview de Yûsuke Kishi.
L'interview de Mariko Ohara.
L'interview de Osamu Makino.
L'interview de Toh Enjoh.
All you need is kill
Hiroshi Sakurazaka est un auteur de light-novel né en 1970, auquel on doit une série de romans se déroulant dans un univers où les programmes informatiques permettent de modifier la réalité, Yoku Wakaru Gendai Mahô (La magie moderne pour tous). On lui doit aussi un autre roman lié aux jeux en ligne, Slum online, disponible en anglais chez Viz Media.

* dans la revue Kono light-novel sakka ga sugoi! (Les auteurs de light-novel sont super !), Takarajimasha, numéro d'avril 2005.
Jeux vidéo et roman
On l'a vu, le personnage principal est comme un joueur derrière son écran, avec la possibilité de recommencer sa partie à l'infini, qui dure ici une trentaine d’heures avant ce qui s'apparente à un game over. Dans l’un de ses essais**, Hiroki Azuma (l’auteur de Génération Otaku) considère ainsi All you need is kill comme un ouvrage appartenant à ce qu’il qualifie de « réalisme ludique », où la façon d’appréhender un jeu (on peut appuyer sur reset et recommencer l’aventure autant de fois que nécessaire pour avancer) sert de préalable au récit, et apporte ainsi un autre regard sur le thème par ailleurs classique du voyage temporel. D’après lui, All you need is kill est représentatif d’une catégorie de romans qui utilisent la narration pour mettre en scène l’expérience de jeu : ce qui est valable autant pour les jeux vidéo que pour le jeu de rôle sur table, avec par exemple Les chroniques de Lodoss, en tant que récits de parties réellement jouées.
** AZUMA Hiroki, Gêmuteki riarizumu no tanjô (La naissance d’un réalisme ludique), Kôdansha, 2007.

On est en tout cas curieux de voir comment Hollywood aura rendu tout ça... en espérant que l’édition française ait repris les illustrations intérieures de l'édition japonaise, sachant que la couverture originale a été remplacée par l’affiche du film. Ce n’est pas du meilleur effet, surtout quand on la compare à celle réalisée par Yoshitoshi ABe (Serial experiments Lain, NieA_7...), illustrateur bien connu. Le manga quant à lui a été dessiné par Takeshi Obata (Death Note et Bakuman), dont le trait nerveux devrait rendre à merveille le dynamisme du récit. La publication à la fois du roman et du manga est en tout cas une excellente initiative de Kazé, qui permet de découvrir cette œuvre dans toute sa richesse.