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Existences

Ruby (Coloriste), Eric Corbeyran (Scénariste), Richard Guérineau (Dessinateur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/03/2002  -  bd
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Existences

Corbeyran est un scénariste très en vogue depuis un moment. Il a travaillé avec de nombreux dessinateurs au style très différent de La Digue avec Alfred au Fond du monde avec Falque en passant par Le Régulateur, récemment paru, avec Moréno. Il sait choisir les gens avec lesquels il collabore et s'adapter à leur dessin. Cependant, l'univers qu'il a créé avec Le Chant des Stryges a révélé son talent de scénariste de thriller. Il a saisi la manière de créer de la tension en distillant les informations petit à petit. Il sait donner ce qu'il faut au lecteur pour à la fois ne pas le frustrer et exciter sa curiosité. Se sont greffées à ce monde deux nouvelles séries dont il est l'auteur, Le Maître de Jeu où l'intrigue débute sur un jeu de rôles en grandeur nature et Le Clan des Chimères dont l'action se déroule au Moyen-Age.

Guérineau est surtout connu pour la série Le Chant des Stryges, qui est sa seule BD majeure. Sa rencontre avec Corbeyran date de 1991. Ils collaborent alors sur L'As de Pique, paru dans un premier temps chez Dargaud puis réédité en intégrale chez Delcourt. C'est toujours avec le même scénariste qu'il participe au collectif Paroles de Taulards qui a obtenu le prix Tournesol à Angoulême en 2000. Son dessin s'adapte parfaitement au thriller qu'est Le Chant des Stryges. Aimant les gros plans et les plans américains serrés, son découpage est très cinématographique surtout dans ce dernier album où il semble s'inspirer des films de guerre américains. Leur collaboration fait de ce sixième opus, qui clôt le premier cycle, une histoire très bien ficelée, très structurée où l'on peut suivre aisément les différentes intrigues qui se nouent en parallèle.

Un étrange inconnu

La première planche qui ouvre ce dernier album met en scène le Président des Etats-Unis attendant, de nuit, quelqu'un ou quelque chose dont on ne connaîtra l'identité que dans la dernière planche. On retrouvera ensuite Nivek et l'Ombre à l'endroit même où ils se sont rencontrés la première fois. Depuis leurs relations ont quelque peu évolué et Nelly ne semble plus vraiment apprécier de tenir la chandelle. En outre, durant la séance d'invocation d'une stryge, un message a été délivré. Après décodage par l'armée, un endroit a été localisé en plein cœur de la forêt amazonienne. Nivek, Graham et Josh s'y rendent en compagnie de quelques soldats pendant que l'Ombre, suivant les ordres de " niveau 3 ", participe à un bal costumé durant lequel elle doit rencontrer le très mystérieux Sandor Welmtman. Au bout de cet album une grande révélation sera faite. Mais loin d'être un soulagement, c'est une batterie de questions qui sont alors soulevées, sans compter toutes celles qui sont loin d'être encore résolues.

Dénouement surprenant

Toujours dans la lignée des précédents, cet album en révèle moins que ce qu'il laisse paraître dans un premier temps même si bien évidemment on est " bluffé " par la fin. C'est tout l'art de nos deux compères de savoir gérer leur effet d'attente. L'art du suspens n'a plus aucun secret pour Corbeyran qui a un plaisir presque sadique à faire languir son lecteur mais pour le plus grand plaisir de celui-ci. En effet, contrairement à ce que l'on pourrait penser, il n'y a pas de longueurs et toutes les scènes servent l'intrigue. Le grand événement de ce volume, c'est la plus grande présence des Stryges. Ces créatures qui ne se donnent à voir que rarement (trop rarement ?) se laissent admirer plus longtemps dans cet album au nom annonciateur d'" Existences". Esthétiquement parlant, on est loin de la Stryge représentée dans la gravure qui illustre le conte de Charles Nodier, Smarra ou les Démons de la nuit, dans l'édition de 1846 de ses Contes et qui est reprise sur la page de garde du Chant des Stryges. Les Stryges de Guérineau semblent moins sorties d'une vision cauchemardesque que d'un autre temps, un temps plus ancien que celui de l'Humanité où leurs formes harmonieuses et leurs grandes ailes noires étaient les canons de la beauté. Et leur chant est aussi beau que les Sirènes de l'Antiquité auxquelles elles ressemblent morphologiquement, mais est-il aussi dangereux ?

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