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Interview 2018 : Anne Besson pour le Mooc Science-fiction
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Interview 2018 : Anne Besson pour le Mooc Science-fiction

ActuSF : L’équipe de l’Université d’Artois a proposé trois sessions du MOOC (Massive Open Online Course ou MOOC ou formation en ligne ouverte à tous) Fantasy de 2015 à 2017. Quel bilan en tirez-vous ? D’un niveau pédagogique, qu’est-ce qui a fonctionné - ou moins fonctionné ?

Anne BESSON : Le MOOC Fantasy a été un grand succès – à la fois quantitatif (avec près de 25000 inscrits sur 3 sessions) et qualitatif (taux de satisfaction très élevé, 96,8% pour la première session). On est particulièrement satisfaits de la communauté qui s’est créée via le forum autour du cours et des activités proposées. Ce sont notamment les initiatives prises par les apprenants à partir de nos impulsions (comme un Wiki des sous-genres ou une démarche d’écriture collaborative particulièrement dynamique) qui nous ont inspirées les évolutions apportées au fil des sessions – sachant qu’on reste tributaires des possibilités techniques offertes par la plateforme qui nous héberge, FUN. Les parcours introduits en session 2 nous ont permis de nous adapter à l’hétérogénéité de nos publics, et pour les plus motivés, nous avons multiplié les activités d’évaluation (en introduisant une spécialité « Création » pour que les auteurs et autrices, ou ceux qui dessinent, peignent, etc., puissent soumettre leurs travaux à leurs pairs) ainsi que les moments d’interactivité – les « hang out », séance de questions-réponses en direct.

Des gens nous demandent encore régulièrement l’accès aux cours du MOOC Fantasy – on espère bien pouvoir les rendre rapidement accessibles (hors interactivité), pour finir d’en faire les contenus « ouverts » qu’on veut produire.

ActuSF : Vous proposez le 8 mai prochain un nouveau court gratuit en ligne : « Science-fiction, explorer le futur au présent ». S’adresse-t-il aux néophytes du genre ? Ou des personnes déjà aguerries sur ce thème peuvent-elles également approfondir leurs connaissances ?

Anne BESSON : Ce cours est destiné au grand public qui désire découvrir le genre, sans « pré-requis » nécessaires, comme aux amateurs et aux connaisseurs du genre : nous avons préévu deux parcours pour deux niveaux d’approfondissement (voir plus bas). Le Mooc se présente sous forme de modules disponibles en autant de vidéos, à visionner sur son ordinateur ou son téléphone, mais aussi, en fonction des préférences de chacun, de textes (pdf) et de bandes son (mp3), au choix. Les vidéos sont sous-titrées pour une meilleure accessibilité.

Le but de tels cours est de « vulgariser » le savoir universitaire : cette expression, qui n’a rien de péjoratif, implique une démarche de diffusion des connaissances auprès d’un public élargi ; cela demande un gros travail aux intervenants qui doivent adapter leur pédagogie, dans le sens d’une synthèse maximale (il faut pouvoir traiter, par exemple, « SF et cinéma » en 10-15minutes !), qui ne soit ni trop superficielle ni trop indigeste – pour cela, il faut les meilleurs spécialistes…

"Ce cours est destiné au grand public qui désire découvrir le genre, sans « pré-requis » nécessaires, comme aux amateurs et aux connaisseurs du genre" 

ActuSF : Nouvelle thématique, nouvelle équipe. Pouvez-vous s’il vous plait nous présenter les intervenants de ce MOOC ?

Anne BESSON : Pour tout ce qui relève de l’ingéniérie, de la conception technique et graphique, c’est la même équipe, celle des MOOC de l’Université d’Artois, qui a prouvé son talent et n’a cessé de monter en compétence : autour de Daniel Le Berre, Pr en informatique, chargé de mission délégué aux ressources numériques ouvertes, correspondant FUN MOOC, Catherine Couturier (SUP Artois, innovation pédagogique), Amélie Dumortier (PAM Artois, graphismes et vidéos) et Anne-Sophie Niklikowski (DSI, ingénierie pédagogique).

Et en effet, si je suis toujours responsable pédagogique, l’équipe d’intervenants autour de moi est entièrement renouvelée : ce n’est pas le même sujet et celui-ci demandait à ce qu’on aille chercher les meilleurs spécialistes universitaires partout en France, chacun dans leur domaine. Voici par ordre alphabétique notre dream team, paritaire bien entendu :

- Anne Besson est Professeur de Littérature Générale et Comparée à l’Université d’Artois (Arras). Spécialiste des ensembles romanesques et des constructions de mondes alternatifs, particulièrement en science-fiction, fantasy et littérature de jeunesse, elle est l’auteur de D’Asimov à Tolkien, cycles et séries dans la littérature de genre (CNRS Editions, 2004), La Fantasy (Klincksieck, collection « 50 questions », 2007) et Constellations (CNRS Editions, 2015). Impliquée dans l’organisation et la diffusion des activités de recherche, elle a organisé plusieurs colloques, coordonné une douzaine d’ouvrages collectifs et animé les trois sessions du MOOC « Fantasy ».

- Simon Bréan est Maître de conférences en littérature française à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université, membre du CELLF (UMR 8599) et secrétaire adjoint de la SELF XX-XXI. Auteur de La Science-fiction en France, Théorie et histoire d’une littérature (Presses Universitaires Paris-Sorbonne, 2012) et membre du comité de rédaction de la revue en ligne ReS Futurae, il collabore au programme ANR « Anticipation ».

- Irène Langlet est Professeur de littérature contemporaine à l’université de Limoges. Rédactrice en chef de la revue ReS Futurae, elle a publié notamment La science-fiction. Lecture et poétique d’un genre littéraire (Armand Colin, 2006) et L’Abeille et la balance, penser l’essai (Classiques Garnier, 2015) ainsi que de nombreux articles sur ce genre.

- Roland Lehoucq est astrophysicien au CEA Paris-Saclay et enseigne à l’Ecole polytechnique et à l’Institut d’études politiques. Il a publié de nombreux livres utilisant la science-fiction comme prétexte pour pratiquer les sciences, dont le dernier s’intitule Faire des sciences avec Star Wars (Le Bélial’ 2017). Enfin, il est depuis 2012 le président du festival de science-fiction Les Utopiales, qui se déroule chaque année à Nantes. Docteur en littérature française, agrégée de lettres modernes,

- Natacha Vas-Deyres enseigne dans un établissement du secondaire et à l’Université Bordeaux-Montaigne, où elle conduit ses recherches au sein du laboratoire CLARE (EA 4593). Spécialiste de la science-fiction française, ses travaux portent également sur la science-fiction anglo-saxonne contemporaine. Auteur de Ces Français qui ont écrit demain. Utopie, anticipation et science-fiction au XXème siècle (Honoré Champion, 2012, Grand prix de l’imaginaire 2013), elle a dirigé un programme de recherche en collaboration avec Patrick Bergeron (Université du Nouveau Brunswick) et Patrick Guay (UQAC) et publié Les Dieux cachés de la science-fiction française et francophone, 1950-2010 (Presses universitaires de Bordeaux, 2014) et C’était demain : anticiper la science-fiction en France et au Québec, 1880-1950 (PUB, 2018). Elle a également fondé la collection « SF Incognita » aux Presses universitaires de Bordeaux.

ActuSF : Comment avez-vous élaboré son contenu et sa progression pédagogique ? En parcours, comme le précédent ? Quelles seront les grandes parties abordées ?

Anne BESSON : Il y aura 5 grandes thématiques – une par intervenants : Histoire de la SF par Simon Bréan (des origines à nos jours, avec une forte prise en compte des spécificités nationales), Genres de la SF par moi Anne Besson (anticipation, space op, uchronies…), Médias de la SF par Irène Langlet (BD, séries, jeux vidéo…), Science-Fiction française par Natacha Vas-Deyres (les grands auteurs, les grandes étapes), et enfin Science et SF, un focus sur ce thème majeur par Roland Lehoucq (le temps, l’espace, les ET : comment la SF permet-elle d’envisager le possible scientifique ?).

Ces thématiques seront dévoilées en deux temps correspondant à deux parcours, l’un de « découverte », le second d’ « approfondissement » pour ceux qui voudront continuer le voyage !

ActuSF : Concernant la validation des acquis, comment se fait-elle ? Une correction entre les personnes inscrites elles-mêmes ? Par l’équipe pédagogique ? La formation donnera-t-elle lieu à une certification ?

Anne BESSON : Chaque module peut être validé à l'aide d'exercices de type QCM, et des activités corrigées par les pairs sont proposées pour les participants les plus actifs. Mais il n'y a rien d'obligatoire... un MOOC, c’est avant tout du plaisir et une occasion unique d’enrichir sa culture personnelle sur un sujet attractif et peu traité par ailleurs !

Une attestation de réussite sera délivrée aux personnes ayant validé les différents exercices, selon le parcours suivi. Ça n’est pas une « certification » à proprement parler, comme cela se développe et peut être proposé sur d’autres MOOC : en effet, ces certifications sont payantes et nous ne souhaitons pas adopter ce modèle.

ActuSF : Quelle place pour l’animation de la communauté (forum dédiés, live avec les intervenants…) pendant la formation ?

Anne BESSON : Les MOOC mettent le co-apprentissage au sein d’une communauté de pairs au centre de leur innovation pédagogique. Les modules de cours ne sont que le support de cette interaction. Les forums du cours (forum général et par thématique) permettent à chacun de poser ses questions et d’interagir avec l’équipe pédagogique et de l’équipe technique, mais surtout avec le reste du groupe des apprenants - ces discussions nous impressionnent par leur richesse. Et on organise en effet des sessions de questions-réponses en live pour rythmer les semaines du MOOC, séances qui sont retransmises par la WebTV Artois, et sans doute cette année en streaming sur Facebook.

ActuSF : Cinq ans ont passé depuis le premier MOOC. Est-ce que le paysage français et les habitudes de ces nouvelles pédagogies en ligne ont évolués ? (mieux identifiés par les publics, davantage reconnues et proposées par les établissements d’enseignement… )

Anne BESSON : Oui, au point qu’on a pu entendre, dans divers articles à l’automne dernier, que les MOOC, c’était fini, mort, du passé ! En réalité, comme souvent avec les promesses technologiques, certains ont voulu y voir une révolution, annonçant la disparition des cours en présentiel et une nouvelle ère de la transmission du savoir. Etant enseignante, j’ai pour ma part toujours considéré que les MOOC et les cours classiques étaient deux choses complètement différentes, et pas du tout concurrentes - ce n’est ni le même public ni les mêmes objectifs. La révolution n’a (donc) pas eu lieu, mais une véritable évolution, oui : si nous étions parmi les pionniers au lancement de notre premier projet en 2014, aujourd’hui la plupart des universités, mais aussi des écoles (Les Gobelins), des institutions (comme les musées d’Orsay ou du Louvre) multiplient les propositions. Les MOOC se sont aussi imposés dans le domaine de la formation continue et dans les entreprises. Au passage, ils ont un peu changé de nature, et c’est le second problème, plus important à mes yeux : ces cours ouverts et gratuits, un peu comme Internet à ses débuts, n’ont pas de « modèle économique » et on constate malheureusement le développement de diverses stratégies de monétarisation des MOOC, notamment via le système des certifications payantes. Ce n’est pas notre cas !

ActuSF : Le MOOC est gratuit. Pour s’inscrire, comment fait-on ?

Anne BESSON : On se rend sur www.fun-mooc.fr, on se crée un compte lors de la première visite et on s’inscrit au cours « Science-fiction » - les inscriptions sont ouvertes !

Le cours commence le 8 mai, et en attendant, vous pouvez nous suivre sur les réseaux sociaux :

https://www.facebook.com/moocsf/

https://twitter.com/MoocSF

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