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Interview Armand Cabasson
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Interview Armand Cabasson

Actusf : Commençons par le début. Comment êtes-vous tombé dedans ? Quels sont les
auteurs de science fiction et de fantastique qui vous ont marqué ?
Armand Cabasson : Quand suis-je tombé dans l’Imaginaire ? Mais on naît dans l’Imaginaire et l’on n’en sort jamais. Il n’y a que les aveugles de la raison pour croire que eux ont un regard objectif sur le monde. On n’échappe pas à sa subjectivité ni à celle des autres, donc tout est en partie imaginé, imaginaire…
Voici les auteurs d’Imaginaire (au sens large) qui m’ont marqué (je les cite en vrac) : Tolkien, Frank Herbert, Lovecraft, Edgar Allan Poe, Stephen King, Clive Barker, Koontz, Lord Dunsany, Villiers de l’Isle Adam, Marie Shelley, Arthur Machen, Tanith Lee, Storm Constantine, Nosaka (« La vigne des morts du col des dieux décharnés »), Boulgakov (« Le Maître et Marguerite »), Léa Silhol, Mélanie Fazi…

Actusf : Quels sont les thèmes qui vous intéressaient ?
Armand Cabasson : M’évader du quotidien. Me plonger dans de vastes épopées. M’immerger dans une ambiance. Je trouve aussi que, bien souvent, l’Imaginaire permet d’aborder différemment et avec succès des thèmes très en lien avec les problèmes contemporains.

Actusf : Quand avez-vous commencé à écrire ?
Armand Cabasson : Cela fait plus de 20 ans que j’écris… On pourrait dire que cela a commencé quand j’étais adolescent, lorsque j’écrivais des scénarios de jeux de rôle, que je faisais jouer à mes amis le week-end en tant que Donjon Master… Mais même avant cette époque, déjà, j’étais fasciné par les mots, la lecture, l’écriture…

Actusf : Toutes vos biographies mentionnent que vous êtes psychiatre. Votre métier
influence-t-il sur votre écriture ? Et réciproquement ?

Armand Cabasson : Oui ! La psychologie des personnages me passionne. Nombre de mes thèmes sont également très « psy » : la lutte contre ses démons intérieurs, le combat pour surmonter les épreuves du passé…
La littérature enrichit également la Psychiatrie. Plusieurs articles spécialisés sur « le démon du jeu »/« le joueur pathologique » citent « Les Frères Karamazov » de Dostoïevski ; Freud a songé évidemment aux pièces consacrées à Œdipe en baptisant sa découverte « Le Complexe d’Œdipe » ; Lacan a considérablement progressé dans ses réflexions sur le désir en analysant, entre autres, « Hamlet » de Shakespeare et « Le Banquet » de Platon…
Ne vous est-il jamais arrivé, alors que vous butiez sur un problème personnel, de repenser tout-à-coup à un livre que vous avez lu ? N’avez-vous pas alors remarqué comme ce livre pouvait être en lien, justement, avec ce qui vous préoccupait ? Et son « irruption » dans vos pensées ne vous a-t-elle pas aidé ? Si vous avez déjà vécu cela, alors ce que je dis sera limpide… Sinon, cela restera un peu obscur…

Actusf : Beaucoup de vos nouvelles dans Le Poisson Bleu nuit tournent autour du désir et du prix à payer pour. Etes-vous d'accord et si oui pourquoi cela vous intéresse-t-il ?
Armand Cabasson : Oui ! Les problèmes que nous rencontrons avec notre désir et la façon dont les gérons sont au cœur de notre vie.

Actusf : Plusieurs de vos personnages sont d'ailleurs des enfants. Pour quelle raison ? Est-ce parce qu'ils ont une innocence qui rend leur cruauté encore plus
affreuse ?

Armand Cabasson : Certains personnages sont des enfants, d’autres des adultes, d’autres encore sont des « entités » (esprits…)… Les enfants sont plus forts que ne le croient les adultes (fort heureusement !). Dans mes textes, les enfants ne sont pas de frêles créatures sans défense : eux aussi essaient de faire face aux difficultés, mais à leur façon…

Actusf : Plusieurs de vos personnages sont également souvent décalés, en marge.
Est-ce parce qu'ils ont plus de « choses » à raconter ?

Armand Cabasson : Non, c’est parce que je dois être décalé moi-même. Et c’est tant mieux, d’ailleurs…

Actusf : Il y a une belle diversité dans Le Poisson Bleu nuit, mais aussi dans Loin à
l'intérieur, c'est la diversité de vos nouvelles. Comment naissent vos idées
? Dans quoi puisez-vous votre inspiration ?

Armand Cabasson : Je tiens énormément à cette diversité. Comment naissent mes idées ? Je ne le sais toujours pas… Je peux plus facilement répondre à la question de l’inspiration. Je la stimule en voyageant (partout en Europe, aux Etats-Unis, au Japon, en Russie, en Afrique du Nord… mais aussi en France !), en lisant, en visitant des musées ou des châteaux, en regardant des films, en discutant avec des amis auteurs... J’essaie de m’immerger régulièrement dans un bain d’images, de sons, d’odeurs… Il y a plusieurs sujets qui me passionnent, mais j’essaie aussi, régulièrement, de découvrir d’autres univers, de « goûter » à d’autres saveurs, de m’intéresser à tel ou tel sujet sur lequel j’ignore tout…

Actusf : Vous avez fait plusieurs romans autour de l'époque Napoléonienne, vous
faites d'ailleurs partis de l'association du Souvenir napoléonien. Qu'est-ce
qui vous intéresse dans cette période et dans le personnage Historique de
Napoléon ?

Armand Cabasson : Mais justement, je ne parle quasiment pas de Napoléon. C’est vraiment cette époque qui m’intéresse, bien plus que le seul personnage de Napoléon. Il s’est passé énormément de choses durant ces quelques années, et, aujourd’hui, nous sommes les héritiers de cette période (et de toutes les autres), pour le meilleur comme pour le pire. Dans cette série, j’aborde de multiples thèmes : la dérive des idéaux de la Révolution, l’incroyable épopée sanglante de la Grande Armée avec ses victoires « impossibles » et ses désastres, les manipulations diplomatiques, l’humanisation du système de santé, les premiers pas de la Psychiatrie « moderne » (c’est à cette époque que certains médecins ont commencé à défendre l’idée que l’on pouvait soigner certains « troubles de l’esprit » par des moyens « moraux » (au sens « psychologique », par opposition aux soins physiques)), le Paris de l’époque napoléonienne, le développement des musées publics, la naissance de l’amitié franco-polonaise… On y croise Talleyrand, le prince Eugène, le marquis de Sade, Pinel, Beethoven, Alexandre Ier…

Actusf : Plusieurs de vos nouvelles se passent aux Etats Unis. Est-ce que c'est parce que le pays vous attire ? Et si oui pourquoi ? Ou est-ce que c'est parce
qu'on trouve là bas des décors propices à l'intrigue et au suspens ?

Armand Cabasson : Effectivement, j’aime beaucoup les Etats-Unis (je m’y suis rendu à plusieurs reprises), mais j’adore aussi la France, la Grande-Bretagne et le Japon. Plusieurs de mes nouvelles s’y déroulent car c’est une façon pour moi de « rompre » avec le quotidien. J’associe l’écriture et la lecture avec la notion « d’évasion ». On change d’univers… « Ailleurs », mon imagination se libère plus facilement qu’« ici »… Et, en même temps, les thèmes que je veux aborder demeurent très proches de nous.
Mais, actuellement, je songe à un court roman qui devrait se dérouler en France…

Actusf : Vous avez-reçus de nombreux prix pour vos nouvelles comme pour vos romans. Ont-ils une importance pour vous ? Vous mettent-ils une pression
supplémentaires pour les récits qui suivent ?

Armand Cabasson : Un Prix est un encouragement. Je me souviens de chaque remise de Prix avec beaucoup d’émotion. C’est comme lire une chronique positive, discuter amicalement lors d’un salon littéraire avec un lecteur qui apprécie ce que l’on écrit… Cela n’exerce pas de pression sur moi (heureusement, car la Psychiatrie, elle, en exerce déjà bien assez…).

Actusf :  Vous faites des romans pour vos enquêtes Historiques, mais des nouvelles en fantastique. Pour quelles raisons ? Est-ce que le format court vous convient mieux en fantastique ?
Armand Cabasson : Je me contente de suivre mon désir. Je veux dire par là que j’écris ce que j’ai envie d’écrire, et du coup, je suis extrêmement motivé pour le faire. J’adore la notion de « format court » (nouvelle ou court roman), mais j’aime aussi les romans de grande ampleur, les séries, les sagas… Il n’est pas du tout exclu que j’écrive un jour un roman Fantastique ou de Fantasy.

Actusf : Quels sont vos projets ? Et vos envies ?
Armand Cabasson : Beaucoup de projets et plus encore d’envies ! Je continue à écrire des nouvelles, je réfléchis au 4e roman de ma série qui se déroule à l’époque napoléonienne et je songe à un court roman contemporain.

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