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Archives : Interview d'Alastair Reynolds en 2007
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Archives : Interview d'Alastair Reynolds en 2007

Si les traductions d'Alastair Reynolds sont moins nombreuses depuis quelques années en France, il n'en reste pas moins que son cycle des Inhibiteurs était passionnant. On avait échangé par mail en 2007 autour de celui-ci...
 
ActuSF : Comment avez-vous découvert la science-fiction ? Qu’est-ce qui vous a plu dans ce genre de littérature ?
Alastair Reynolds : La science-fiction a toujours fait partie de ma vie aussi loin que je me souvienne. Même dans ma petite enfance, les films et les émissions télé qui m’intéressaient étaient de la science-fiction – Star Trek, Docteur Who, Le Voyage fantastique, La Machine à explorer le temps.

ActuSF : Qu’est ce qui vous a poussé à en écrire ?
Alastair Reynolds : Depuis l’âge de 5 ans, j’ai découvert que j’aimais écrire des histoires – c’est juste quelque chose que j’ai toujours fait depuis.

ActuSF : Comment est née l’idée des Inhibiteurs ?
Alastair Reynolds : J’ai écrit quelque chose qui ressemblait aux Inhibiteurs à mes débuts, un roman non publié. J’ai réutilisé la plupart des idées dans les livres suivants et les histoires, en ajoutant des détails et en complexifiant jusqu’à ce que cela fasse vrai. La notion d’une ville dans un environnement dangereux doit beaucoup aux histoires de Known Space de Larry Niven.

 

ActuSF : Comment voyez-vous les « Amarantins » ?
Alastair Reynolds : Je ne pouvais pas les visualiser du tout jusqu’à ce qu’un jour j’aie un flash et que je les aie vus avec une clarté absolue, après quoi ils ont été comme une évidence. Ils sont comme des dinosaures mais humanoïdes.

ActuSF : Est-ce que l’archéologie extraterrestre est un sujet qui vous intéresse et pourquoi ?
Alastair Reynolds : C’est un thème qui ressort de temps en temps dans mon travail, cependant je ne dirais pas que c’est d’un intérêt prépondérant pour moi.

ActuSF : Est-ce que cela vous apprend quelque chose sur l’humanité ?
Alastair Reynolds : Pas vraiment – je pense que c’est juste une idée amusante à exploiter, spécialement dans un contexte de hard SF ou d’horreur.

ActuSF : Vous parlez des peuples non-humains. Qu’est-ce qui vous intéresse en eux ?
Alastair Reynolds : J’aime que mes extraterrestres soient aussi extraterrestres que possible, et j’aime que mes humains soient (en grande partie) étranges. Trop de livres de SF rassurent le lecteur avec de la familiarité – je ne veux pas de ça. Mes romans de SF préférés sont pleins d’étrangeté, j’espère.

ActuSF : L’Arche de la rédemption décrit en particulier les Conjoineurs, un genre d’êtres humains modifiés génétiquement. Comment voyez-vous le futur de l’humanité ?
Alastair Reynolds : Je n’aimerais pas deviner. Je suis ouvertement optimiste mais je pense que nous devons nous attendre à quelques temps difficiles. De toute évidence, l’ingénierie génétique, l’augmentation de l’intelligence entre autres vont jouer un rôle grandissant. Mais je pense qu’il y aura une large base de gens vivant dans 100 ou 200 ans qui seront à peu près comme nous, avec des longévités similaires. Même si l’immortalité devient possible, cela mettra des centaines d’années avant que la technologie n’atteigne tout le monde sur la planète, pour peu que tout le monde la souhaite. Nous ne pouvons toujours pas offrir la médecine de base à des millions de personnes !

ActuSF : Est-ce que cela doit changer ?
Alastair Reynolds : Non, mais cela changera probablement.

ActuSF : Quel genre de rapport entretenez-vous avec vos personnages ?
Alastair Reynolds : Ils sont juste des produits de mon imagination que je balade sur papier. Ils n’ont pas d’existence indépendante quand je n’écris pas sur eux. Je ne m’assois pas en pensant « Je me demande ce que prépare Clavain » ou quelque chose du genre. Et ils font ce que je leur dit de faire, et pas le contraire !


ActuSF : En France, on peut lire cinq tomes des Inhibiteurs mais vous en avez déjà écrit sept. Que pouvez-vous nous dire sur les deux tomes qui ne sont pas encore parus ?
Alastair Reynolds : Alors, il y a cinq romans dans l’univers de The Revelation Space (je ne l’appellerais pas l’univers de la cité du gouffre) et trois autres romans totalement indépendants. Les autres livres sont Century Rain, un genre d’histoire SF investigation/voyage dans le temps qui se passe dans une version imaginaire de Paris, et Pushing Ice, un roman sur le premier contact avec les extraterrestres.

Le troisième livre, House of Sun, devrait sortir au Royaume-Uni en 2008 et parle d’une famille de clones à l’échelle de la galaxie, six millions d’années dans le futur. Je ne sais pas encore ce que sera le prochain, cependant ce ne sera probablement pas sur le voyage dans l’espace.

ActuSF : Y aura-t-il une suite ?
Alastair Reynolds : Il y aura d’autres romans dans l’univers de Revelation Space, si je trouve des idées pour cela.

ActuSF : Un autre de vos livres est paru en France : Diamond Dogs, Turquoise Days contenant deux novellas. Comment sont nées les idées pour ces deux histoires ?
Alastair Reynolds : Chacune fut commandée, écrite et publiée séparément, pour des livres séparés. Je les ai appréhendées comme des histoires longues, en ne pensant pas que par la suite elles pourraient être rassemblées. Diamond Dogs a été écrit un an avant Turquoise Days, ce qui est la raison pour laquelle l’une des histoires est plus sombre que l’autre.

ActuSF : Qu’est-ce que ce livre représente pour vous ?
Alastair Reynolds : C’est un livre différent. Si cela devait avoir une fonction utile, je dirais que cela permet aux gens de lire un peu de l’univers de Revelation Space en version courte, sans avoir à lire un livre de 600 pages. Cependant, je ne sais pas si cela fonctionne comme ça !

ActuSF : On vous dit souvent auteur de hard science. Êtes-vous d’accord ?
Alastair Reynolds : Pas vraiment – je veux dire, j’ai occasionnellement utilisé le terme moi-même, mais seulement comme moyen pratique de distinguer ce que j’écris de, par exemple, la fantasy ou de Star Trek.

Mais cependant, la science est vitalement importante pour moi, je ne suis pas un auteur pragmatique dans le sens où je suis au supplice avec tous les calculs et les détails techniques. Je ne suis pas intéressé par la lecture de ce genre de SF, et sûrement pas par son écriture. Je me vois plus comme un auteur concerné par le « cœur de la science-fiction » – voyage dans le temps, le futur moyen terme, l’intelligence artificielle, la vie extraterrestre, ce genre de choses – bien plus que, disons, la satire, la politique, les relations entre les personnes ou hommes-femmes etc. Ce n’est pas que je pense que l’on puisse écrire quoique ce soit de bien en les évitant, bien sûr – c’est juste que ce ne sont pas mes préoccupations principales.

ActuSF : Qu’est-ce qui vous attire dans la science au point de lui faire une place si importante dans vos livres ?
Alastair Reynolds : La science est juste intrinsèquement fascinante – je ne peux pas dire mieux. C’est comme la musique – je ne pourrais pas vivre sans.

ActuSF : Vous voyez vous comme un auteur de New Space Opera ?
Alastair Reynolds : Un peu, mais seulement dans le fait que j’envisage le New Space Opera comme faisant partie d’une continuité graduelle qui retourne directement à l’Age d’or. Je ne crois pas à une continuité rigoureuse entre l’ancien et le nouveau, juste une augmentation graduelle en sophistication.

ActuSF : Est-ce que toutes ces classifications ont un sens pour vous ?
Alastair Reynolds : Quand je donne des interviews, oui ! Sinon, je me focalise plutôt sur le travail. Je ne m’assois pas en pensant « Je vais écrire une histoire de New Space Opera aujourd’hui ». Je pourrais plutôt m’assoir et penser « je vais écrire une histoire sur le contact avec les extraterrestres ».

ActuSF : Vous avez travaillé pour l’ESA (European Space Agency). Est-ce que votre travail a nourri votre imagination ou le contraire ?
Alastair Reynolds : Non, mon travail était plutôt indépendant de mon écriture. Je travaillais dans un domaine si spécialisé que je n’y ai jamais vu de grosses connections avec ce que j’écrivais.

ActuSF : Est-ce que vous parlez avec d’autres scientifiques pour alimenter vos romans ?
Alastair Reynolds : Non – à part la lecture des magazines et des livres, tout sort de ma propre tête. Je n’aime pas discuter de mes idées avant de les explorer dans la fiction. Les explorer dans la fiction est tout l’intérêt de l’exercice, pour moi, et je suis suffisamment arrogant pour prétendre que je n’ai besoin de l’expertise de personne pour valider mes propres idées tordues !

ActuSF : Pourquoi avez-vous quitté l’ESA ?
Alastair Reynolds : Je n’avais pas assez de 24 heures par jour pour être scientifique et écrivain. J’ai réussi à équilibrer les deux pour un temps, mais finalement cela a fini par m’user. En toute sagesse, c’était une décision facile à prendre.

ActuSF : Quels sont vos projets maintenant ?
Alastair Reynolds : Je viens juste de terminer mon huitième roman, House of Suns, et en même temps que la préparation de sa publication, j’écris deux courtes histoires. Cela sera le commencement pour un nouveau livre en mars, mais je ne sais pas encore de quoi cela va parler.

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